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CYCLE BIOLOGIQUE

Figure 3. Cycle biologique du Criquet pèlerin.

Le Criquet pèlerin, comme tous les autres acridiens, passe par trois stades successifs: l’œuf, la larve (ou nymphe) et l’ailé (voir Fig. 3).

Les œufs sont pondus par les femelles. Lors de l’éclosion, naissent de jeunes criquets dépourvus d’ailes, appelés larves. Les larves se débarrassent de leur cuticule cinq à six fois pendant leur développement et leur taille s’accroît à chaque fois. Ce processus s’appelle la mue et la période qui sépare deux mues successives s’appelle un stade. La dernière mue, du stade larvaire 5 (ou 6) dépourvu d’ailes à l’imago, ou ailé, s’appelle la mue imaginale. Le nouvel ailé, appelé «jeune ailé», doit attendre le séchage et le durcissement de ses ailes avant de pouvoir voler. Les ailés ne muent pas et leur taille ne s’accroît donc pas mais leur poids augmente progressivement. Les ailés qui peuvent voler sont, au départ, sexuellement immatures. Quand ils deviennent sexuellement matures, ils peuvent s’accoupler et pondre des œufs.

Caractéristiques du cycle biologique du Criquet pèlerin

Stades

Œuf, larve, ailé

 

Durée

Œuf

10 à 65 jours

 

Larve

24 à 95 jours (36 jours en moyenne)

 

Ailé

2 mois et demi à 5 mois

 

Ponte à mue imaginale

40 à 50 jours

 

Maturation des ailés

3 semaines à 9 mois
(moyenne de 2 à 4 mois)

 

Total

2 à 6 mois

Mues

5 à 6 (solitaire), 5 (grégaire)

 

Phases

Solitaire, transiens, grégaire

 

Zone affectée

16 millions de km2 (rémission), 29 millions de km2 (invasion)

 

Note: la maturation des ailés peut prendre jusqu’à 270 jours lorsque les températures sont basses ou l’habitat aride.

Figure 4. La femelle fore le sol à l’aide de ses valves génitales situées à l’extrémité de l’abdomen, et pond une oothèque. Cette oothèque mesure 3 à 4 cm de long et est pondue à une profondeur de 5 à 10 cm environ.


Question fréquemment posée n° 2 (voir réponse page 42)

Les criquets pèlerins pondent-ils des œufs dans des zones de végétation dense?

Œufs

Ponte

Les œufs sont généralement pondus dans des zones de sol sablonneux dépourvu de végétation. En général, la femelle ne pond que si le sol est humide à une profondeur de 5 à 10 cm. Dans les sols sablonneux meubles, il a été signalé que des femelles ne pondaient que si l’humidité se rencontrait à une profondeur de plus de 12 cm. Avant de pondre, la femelle sonde souvent le sol en y insérant l’extrémité de son abdomen pour déterminer si l’humidité est suffisante. Il est important de réaliser qu’une ponte n’est pas toujours en cours lorsque les femelles sont en train de sonder. Le seul test sûr est de creuser le sol pour vérifier si des œufs ont été pondus.

La femelle pond les œufs sous forme d’une masse ovigère appelée oothèque. Les œufs ressemblent à des grains de riz et sont disposés comme dans un régime de bananes miniature. Lorsque la femelle a déterminé que l’humidité édaphique était suffisante, elle fore le sol avec les valves génitales situées à l’extrémité de son abdomen et dépose une masse ovigère (voir Fig. 4). Elle ferme ensuite l’orifice de ponte par un bouchon spumeux. L’oothèque a une longueur de 3 à 4 cm et son extrémité supérieure se trouve à une de profondeur de 5 à 10 cm. Une telle profondeur nécessite une grande extension de l’abdomen de la femelle. Les oothèques de Criquet pélerin contiennent moins de 80 œufs en phase grégaire et entre 90 et 160 œufs en phase solitaire.

Les essaims pondent souvent leurs oothèques en groupes denses, à des densités de quelques dizaines à quelques centaines d’oothèques par m. Les mâles ainsi que les femelles qui ne sont pas prêtes à pondre peuvent repartir. En conséquence, les grands essaims se divisent et les mâles peuvent se retrouver séparés des femelles. Des tests de laboratoire indiquent qu’une femelle en ponte laisse une phéromone qui incite les autres femelles à pondre à proximité. On pense toutefois que, sur le terrain, la vue est un sens plus important que l’odorat dans l’attraction des femelles vers celles qui sont déjà en ponte. Ce comportement signifie que la ponte a seulement lieu dans quelques-uns des sites apparemment appropriés. Ce type de comportement ainsi qu’une substance chimique ajoutée à la matière spumeuse de l’oothèque lorsque la densité des femelles adultes est élevée permettront d’induire la grégarisation de la génération suivante.

Le nombre d’oothèques pondues par une femelle dépend du temps que celle-ci met à développer chaque oothèque et de sa propre longévité. Sur le terrain, l’intervalle entre chaque ponte est d’environ 10 jours. Les ailés deviennent rares six ou sept semaines après la première ponte bien synchronisée, sauf peut-être quand les températures sont basses. Cela suggère que presque toutes les femelles pondent une oothèque, que 75% environ d’entre elles survivront et en pondront une deuxième, que 25% peut-être pondront une troisième oothèque mais que très peu d’entre elles parviendront à pondre quatre oothèques. Une moyenne de deux oothèques par femelle est la norme.

A cause de la mortalité naturelle, les œufs pondus par une femelle n’éclosent pas tous et les larves qui éclosent n’atteignent pas toutes le stade adulte. Dans des conditions de température et d’habitat optimales, les taux de multiplication peuvent atteindre 16 à 20. En d’autres termes, une seule femelle peut produire de 16 à 20 criquets viables en une seule génération.

Figure 5. La vitesse de développement de l’œuf dépend de la température du sol. La mortalité des œufs peut être causée par plusieurs facteurs qui varient d’un habitat à l’autre.

Développement et incubation

Le Criquet pèlerin pond presque toujours ses œufs dans un sol suffisamment humide pour que les œufs puissent absorber l’humidité nécessaire à leur développement. Il est rare que des œufs soient pondus dans un sol sec ou presque sec. Si les œufs étaient pondus dans un sol sec, ils se dessécheraient, sauf s’il pleuvait peu après la ponte. La vitesse de développement des œufs est donc exclusivement fonction de la température du sol à la profondeur de l’oothèque (voir Fig. 5). Il existe une relation relativement forte entre la température du sol et la température de l’air; on peut par conséquent prédire la vitesse de développement des œufs de façon satisfaisante à partir des températures de l’air et même à partir de valeurs moyennes car, dans la plupart des zones de reproduction, les températures ne varient pas fortement d’une année à l’autre pour un site et une période donnés. Il peut cependant y avoir des exceptions, notamment en hiver, lorsque le temps est exceptionnellement chaud et permet la poursuite du développement.

Mortalité

La proportion d’œufs qui survit jusqu’à l’éclosion varie considérablement avec les conditions de l’habitat et la présence de parasites et de prédateurs. Les œufs peuvent se dessécher, particulièrement s’ils sont exposés au vent; ils peuvent également être détruits par des inondations persistantes. De tels événements ne sont toutefois pas fréquents. Une mortalité élevée peut se produire si les températures du sol sont supérieures à 35ºC. Les estimations en pertes totales varient de 5 à 65% pour cause de non-viabilité (moins de 10%), d’échec à l’éclosion (3 à 4%), de prédation (moins de 40%), de moisissure, de bactéries et de dessiccation (moins de 10%). Les pertes moyennes sont de l’ordre de 13% dans les populations solitaires et de 33% environ dans les populations grégaires.

Données relatives aux œufs de Criquet pèlerin

Profondeur de ponte

5 à 15 cm

Durée de ponte

7 à 30 heures

Nombre de pontes par femelle

2 à 3

Intervalle entre les pontes

6 à 11 jours

Œufs/oothèque

150, 120, 60 (solitaire); 60 à 80, 50 à 70, 35 à 70 (grégaire)

Œufs/génération

400/femelle (solitaire); 140/femelle (grégaire)

Densités des oothèques

200 à 500/m2 en groupes

Densité moyenne

5/m2

Longueur de l’oothèque

3 à 4 cm

Durée d’incubation

10 à 65 jours

Mortalité

5 à 65% (fourchette); 13% (moyenne, solitaire); 33% (moyenne, grégaire)

Remarque: certains de ces chiffres proviennent d’estimations réalisées sur le terrain ou au laboratoire

Figure 6. Les larves éclosent et passent par cinq ou six stades larvaires. Lors de la mue imaginale, les ailes se développent et les larves deviennent de jeunes ailés. Le développement larvaire est plus rapide lorsque les températures sont élevées que lorsqu’elles sont basses.

Données relatives aux larves solitaires

Nombre de stades larvaires

5 à 6

Couleur

Verte ou verdâtre

Nombre de stries oculaires

7

Durée du développement

30 à 39 jours (zones de reproduction estivale et mer Rouge)
28 à 48 jours (périodes plus fraîches, ex.: Afrique du Nord-Ouest)

Durée moyenne de L1 à L4

6 à 7 jours/stade

Durée moyenne de L5 à L6

7 à 10 jours

Mortalité

70% (L1), 20% (L2), 10% (L3 à L5), 5% (à chaque mue)

Larves

Éclosion

Au moment de l’éclosion, les larves traversent le bouchon spumeux pour gagner la surface. Elles muent immédiatement en stade 1 et passent ensuite par cinq stades larvaires (parfois six en phase solitaire), muant entre chaque stade. Lors de la dernière mue (ou mue imaginale), le jeune ailé émerge (voir Fig. 6). Les stades larvaires sont souvent appelés L1, L2, L3 et ainsi de suite.

Développement

La vitesse du développement larvaire, comme celle du développement embryonnaire, est une fonction de la température (voir Fig. 6). La corrélation avec la température de l’air est toutefois moins claire que pour les œufs car les larves peuvent, dans une certaine mesure, contrôler la température de leur corps en se chauffant au soleil ou en cherchant de l’ombre. Il n’y pas d’indication que des larves se développent plus lentement dans une végétation relativement sèche.

Survie

La pluie, associée à la ponte des œufs, génère normalement suffisamment de végétation pour permettre aux larves de se développer. Les populations larvaires peuvent périr faute de nourriture mais cela est rare. Cependant, seule une fraction des larves survit jusqu’à la mue imaginale. Jusqu’à 70-80% des larves de stade 1 peuvent périr à cause de réserves hydriques inadéquates, du cannibalisme et de la prédation par les fourmis. Au cours du développement des larves survivantes, une mortalité de 10 à 20% peut être due au cannibalisme, au parasitisme et à la prédation.

Stades

Au cours des périodes de rémission, il arrive fréquemment qu’on trouve simultanément des larves solitaires de tous les stades dans une même zone. Cela est dû, en partie, au fait qu’il y a des intervalles entre les pontes et, en partie, au fait que les œufs d’un même site de ponte et d’une même oothèque n’éclosent pas tous exactement au même moment. Les bandes larvaires contiennent souvent plusieurs stades larvaires, bien que généralement un ou deux stades prédominent.

Comportement des larves solitaires

Aube – avant le lever du soleil

Les larves se déplacent sur la végétation et sur le sol et grimpent jusqu’en haut des plantes

Après le lever du soleil

Les larves descendent des plantes sur le sol

En début de matinée

Les larves se réchauffent au sol, du côté des plantes exposé au soleil, à l’abri du vent

Fin de matinée

Les larves grimpent de nouveau dans la végétation, s’abritent à l’intérieur des plantes ou se reposent perchées en haut de celles-ci

Après-midi

Les larves redescendent au sol et se réchauffent du côté des plantes exposé au soleil

Crépuscule

Les larves grimpent à nouveau dans la végétation

Figure 7. Avec l’accroissement de leurs effectifs, le comportement des larves solitaires change. Elles se concentrent et peuvent former des groupes. Cela se produit fréquemment lorsque la végétation commence à se dessécher. Leur couleur change également et une maculature noire apparaît.

Groupes

Avec l’accroissement de leurs effectifs dans certains habitats, le comportement des larves change: des accumulations et des concentrations se produisent (voir Fig. 7). Cela peut se produire lorsque les larves s’abritent dans la végétation, se chauffent au soleil, s’alimentent, se perchent ou se déplacent sur le sol. Au cours de ces périodes, les larves commencent à se sentir attirées les unes par les autres et à former des groupes. L’apparition de taches noires sur les larves solitaires vertes constitue un autre indicateur mais le changement de comportement précède le changement de couleur. Le regroupement peut être considéré comme une étape intermédiaire dans le changement qui s’opère entre des larves en phase solitaire et des bandes de phase grégaire.

En raison de la diversité des habitats et de la variabilité du comportement acridien, les groupes ne se forment à partir d’un seuil densitaire précis. Le regroupement se produit souvent dans des habitats ouverts, moins homogènes, dans lesquels des taches de végétation relativement dense sont séparées par de vastes superficies de sol nu comme, par exemple, dans des sites à Panicum sp. et Heliotropium sp. D’autre part, lorsque des larves solitaires en faible densité sont présentes dans des habitats homogènes alternant plantes basses et sol nu ou dans des habitats à la végétation uniformément dense, la probabilité que des groupes se forment est plus faible.

Sur le terrain, la présence de groupes larvaires indique que les populations larvaires deviennent grégaires et que des bandes vont vraisemblablement se former. Ce processus peut être accéléré lorsque des effectifs élevés de sauteriaux et d’autres locustes sont présents sur le même site.

Question fréquemment posée n° 3 (voir réponse page 42)

Comment peut-on faire la différence entre groupes et bandes larvaires?

Figure 8. Comportement des bandes larvaires.

Données relatives aux larves grégaires de Criquet pèlerin

Nombre de stades larvaires

5

Couleur

noire(L1), jaune et noire (L2 à L5)

Nombre de stries oculaires

1 (L1), 2 (L2), 3 (L3), 4 (L4), 5 (L5)

Durée du développement

25 à 57 jours

Durée moyenne de L1 à L4

6 à 7 jours/stade

Durée moyenne de L5

10 jours

Dimension (en mm)

7 (L1), 15 (L2), 20 (L3), 33 (L4), 50 (L5)

Poids (en mg)

30 à 40 (L1), 50 à 80 (L2), 120 à 200 (L3), 500 à 700 (L4), 1000 à 1200 (L5)

Mortalité

70% (L1), 20% (L2), 10% (L3 à L5), 5% (à chaque mue)

Bandes

Éclosion. L’éclosion se produit généralement à l’aube ou peu après et les larves nouveau-nées, qui noircissent dans les heures suivant l’éclosion, se dirigent vers la touffe de végétation la plus proche. Le premier jour, les larves ne s’alimentent pas et se déplacent peu. Regroupées, elles n’occupent pas plus de quelques dizaines de cm2 mais cette masse correspond à plusieurs milliers d’individus par m2 et se présente généralement sous forme de petites taches noires et denses (voir Fig. 8).

Par temps chaud et ensoleillé, les bandes larvaires alternent repos sur perchoir et marche. Par temps couvert, les bandes se déplacent peu.

Les densités au sein des bandes larvaires varient selon le comportement des bandes et le stade larvaire ainsi qu’en fonction de l’habitat et des conditions météorologiques. Par exemple, les bandes au sol sont plus denses que les perchées, elles-mêmes plus denses celles en déplacement. Les densités maximales des bandes au sol sont de plus de 30 000 larves par m2 pour les premiers stades et d’à peine plus de 1 000 larves par m2 pour le stade 5. Les densités moyennes sont beaucoup plus faibles; pour les bandes de dernier stade, elle est de l’ordre de 50 à 100 larves par m2. Les densités relatives des différents stades ne signifient pas grand chose car les larves grandissent.

Fusion. La surface occupée par les bandes larvaires augmente avec le développement des larves et des bandes voisines fusionnent, résultant en la formation de bandes beaucoup plus grandes; ce processus se poursuit jusqu’au stade 4. Des larves des stades 1, 2 et 3 se retrouvent parfois mélangées à des bandes larvaires de stade plus âgé. L’augmentation en taille des bandes avec l’âge peut même être supérieure à la diminution en densité. Au dernier stade, les bandes ont cependant tendance à se disperser et à devenir moins cohérentes.

Déplacement. La vitesse de déplacement d’une bande varie avec la température, le couvert végétal et même avec la taille et la cohésion de la bande. Par exemple, les mesures effectuées pour des bandes de stade 4 dominant indiquent que les déplacements varient de 200 à 1 700 m par jour.

Généralement, les bandes se déplacent seulement de jour, à partir de deux à trois heures après l’aube jusqu’à une heure environ avant le coucher du soleil. Il existe cependant des signalisations de déplacements nocturnes lors de températures exceptionnellement élevées ou par pleine lune. Si la végétation est très sèche, les bandes peuvent continuer à se déplacer de nuit à la recherche de végétation verte. La bande maintient généralement une direction constante pendant le jour et un obstacle, même majeur, n’est pas toujours suffisant pour changer sa trajectoire. Le déplacement se fait souvent, mais pas toujours, dans le sens du vent. A la mi-journée, les bandes se perchent généralement dans la végétation.

Période de la journée

Comportement des bandes larvaires

De 20 min avant à 2 h 1/2 après le lever

Descente de la végétation; marche lente et dense du soleil

De 45 min à 2 h après le lever du soleil

Regroupement au sol

De 1 h 1/2 après le lever du soleil

Marche à la mi-journée

Après-midi

Perchage dans la végétation

La fin d’après-midi à 1h avant

Marche le coucher du soleil

De 80 min avant à 5 min après

Regroupement au sol le coucher du soleil

Pendant la nuit

Marche éventuelle de quelques heures; perchage perchage dans la végétation

Figure 9. Effet (a) du sol nu et (b) d’un couvert végétal bas et uniforme sur le comportement des larves.

Effet de la végétation sur le comportement journalier des larves

Durant la journée, le comportement des larves est influencé par l’habitat. Le comportement des larves dans quatre principaux types d’habitat est décrit ci-après.

Sol nu (voir Fig. 9a). Les larves passent la majeure partie de la journée à se déplacer sur le sol nu, alternant repos et réchauffement au soleil (en se plaçant de face ou de profil par rapport au soleil).

Période de la journée

Comportement des larves

Aube, avant le lever du soleil

Marche au sol, repos et réchauffement face au soleil

Lever du soleil et début de la matinée

Repos au sol et réchauffement au soleil

Du milieu de la matinée à la mi-journée

Marche au sol

Mi-journée

Positionnement face au soleil

Après-midi

Marche au sol

Fin d’après-midi et crépuscule

Réchauffement au soleil

Crépuscule

Perchage et, si possible, prise de nourriture

Couvert végétal bas et homogène (voir Fig. 9b). Dans un habitat où la végétation est répartie de façon régulière et consiste en petites plantes basses séparées par de petites plages de sol nu, le comportement des larves est similaire à celui qu’elles ont sur le sol nu et s’y ajoutent des déplacements d’entrée et de sortie dans la végétation. Le déplacement des larves est réduit quand le ciel est nuageux ainsi que le matin de bonne heure, quand le ciel est dégagé et la température basse.

Période de la journée

Comportement des larves

Aube, avant le lever du soleil

Marche sur la végétation ou au sol suivie de perchage au sommet des plantes

Après le lever du soleil et en début

Descente des plantes vers le sol et réchauf-fement du de matinée côté des plantes exposé au soleil et à l’abri du vent; légère prise de nourriture

Fin de matinée

Nouvelle entrée dans la végétation pour s’y abriter ou se reposer en haut des plantes

Mi-journée

Positionnement face au soleil

Après-midi

Redescente vers le sol et réchauffement du côté des plantes exposé au soleil

Vers le crépuscule

Réchauffement au soleil

Crépuscule

Arrêt du réchauffement au soleil et nouvelle entrée dans la végétation

Distances parcourues par jour (en m)

 

Sol nu

Végétation basse

 

Temps ensoleillé

Temps nuageux

Temps ensoleillé

Temps nuageux

Stade 1

100

50

50

25

Stade 5

800

400

400

200

Figure 10. Effet d’une végétation hétérogène sur le comportement des larves.

Couvert végétal hétérogène (voir Fig. 10a). Dans les habitats où se rencontrent de grosses plantes denses et basses (ex.: Heliotropium sp.) séparées par de grandes plages de sol nu, les larves, au cours de la journée, passent la majeure partie de leur temps à grimper et descendre dans la végétation et très peu de temps au sol. Lorsque le ciel est couvert, les larves passent presque tout leur temps dans la végétation.

Période de la journée

Comportement des larves

Aube

Présence à l’intérieur de la végétation

Début de matinée

Réchauffement au soleil en haut des plantes;
parfois quelques mouvements de descente au sol et réchauffement au soleil

Milieu de journée

Retour dans la végétation pour s’y abriter et s’y alimenter

Après-midi

Perchage en haut des plantes

Fin d’après-midi

Réchauffement au soleil en haut des plantes

Crépuscule

Retour à l’intérieur de la végétation et prise de nourriture

Couvert végétal hétérogène avec de grandes plantes (voir Fig. 10b). Dans les habitats ouverts composés de plantes relativement hautes (ex: Panicum sp., Dipterygium sp. et Pennisetum spp.), les larves montent et descendent dans la végétation du côté du soleil levant et du soleil couchant.

Période de la journée

Comportement des larves

Aube

Les larves se déplacent vers le haut des plantes, du côté du soleil levant

Lever du soleil

Les larves descendent des plantes vers le sol du côté du levant

Matinée

Les larves se chauffent au soleil et s’alimentent

Milieu de journée

Les larves s’abritent dans la végétation

Après-midi

Les larves quittent la base des plantes du côté du sud-ouest et se
déplacent au sol

Fin d’après-midi

Les larves se regroupent à la base des plantes du côté du couchant
et se chauffent au soleil

Crépuscule

Les larves vont s’abriter dans les plantes et s’y alimentent

Distances parcourues par jour (en m)

 

Végétation mixte

Végétation de haute taille

 

Temps ensoleillé

Temps nuageux

Temps ensoleillé

Temps nuageux

Stade 1

2

1

10

5

Stade 5

20

10

100

50

Figure 11. Lors de la mue imaginale, les ailes de l’adulte durcissent et l’ailé reste immature jusqu’à ce que sa maturation soit stimulée par les précipitations. S’il fait chaud et si la végétation est abondante, il faut environ trois semaines aux ailés pour atteindre leur maturité et pondre des œufs. Si le temps est sec et frais, les ailés peuvent rester immatures pendant six mois.

Nombre de jours

Proportion de la population

après la mue imaginale

prête à migrer

10

10%

11

20%

12

40%

13

20%

14

10%

Note: Ces chiffres sont des estimations à une température journalière moyenne de 25°C

Ailés

Jeunes ailés et ailés immatures

Après la mue imaginale, il faut environ dix jours pour que les ailes durcissent suffisamment et permettent un vol soutenu (voir Fig. 11). Les ailés restent ensuite immatures jusqu’à ce qu’ils rencontrent des conditions stimulant la maturation. La période pendant laquelle les ailés restent mmatures est très variable selon les conditions de l’habitat et peut impliquer une migration vers d’autres zones dans lesquelles existent des conditions plus propices (voir Migration, p. 32-33).

Maturation

Les conditions favorables à la maturation sont généralement associées à la pluie. Par exemple, des précipitations dans une zone déjà infestée ou l’émigration des criquets dans une zone de pluie récente peuvent déclencher la maturation. A leur arrivée dans une zone de pluie récente, les ailés immatures commencent généralement leur maturation. Un criquet mature déclenche la maturation de ses congénères, ce qui peut expliquer la maturation bien synchronisée des essaims.

Si la végétation est abondante, les températures journalières maximales égales ou supérieures à 35°C et que les précipitations permettent la croissance de la végétation, les ailés pourront probablement pondre leurs œufs trois semaines après la mue imaginale. A l’inverse, dans des conditions sèches, les ailés peuvent survivre à l’état immature pendant six mois ou plus. Par contre, les ailés ne peuvent pas survivre longtemps dans des conditions chaudes et sèches avec peu de nourriture. Bien que les ailés puissent survivre pendant l’hiver en Afrique de l’Ouest, au sud du Sahara, où il fait relativement chaud, ils ne s’y reproduisent pas.

Les mâles deviennent généralement sexuellement matures avant les femelles. Le seul indicateur satisfaisant de la maturation des femelles est le développement des œufs, qui ne peut être observé que par dissection (voir p.38-39 du fascicule des directives intitulé «Prospection»). Dans la plupart des cas, il faut environ dix jours pour que les œufs puissent être pondus. Quand les températures sont élevées et la végétation abondante, cette durée peut être réduite. Il est peu probable que le développement des œufs s’effectue à des températures inférieures à 15°C et, même lorsque les températures journalières atteignent 20°C, les ailés restent généralement immatures.

Conseil: le Criquet pèlerin est un grand acridien bien charpenté et au vol puissant lui permettant de parcourir 30 m environ avant de se poser. Il se pose souvent sur une plage de sol nu, de côté par rapport à l’observateur. Cela le distingue du Criquet arboricole, plus lourd, qui se déplace souvent d’un arbre à l’autre, ou du Criquet migrateur dont le vol rapide se termine par un brusque plongeon vers le sol.

Question fréquemment posée n° 4 (voir réponse page 42)

Les criquets pèlerins hivernent-ils?

Figure 12. Les ailés solitaires de Criquet pèlerin migrent pendant la nuit. Quand la température est supérieure à 20-22°C et que la vitesse du vent est inférieure à 7 m/s, ils prennent généralement leur envol 20 minutes environ après le coucher du soleil et peuvent voler pendant dix heures au maximum. Cependant, ils ne volent généralement que pendant quelques heures de suite.

Quelques caractéristiques des ailés solitaires

Couleur

Brunâtre

Durée de maturation

2 semaines à 6 mois

Période de l’envol

20 minutes après le coucher du soleil

Température lors de l’envol

> 20 à 22°C (100% des envols à >27°C)

Vitesse du vent lors de l’envol

< 4 à 7 m/s

Période du vol

Pendant la nuit

Direction du vol

Dans le sens du vent

Orientation des ailés

Dans le sens du vent

Vitesse au sol

7 à 18 m/s (25 à 65 km/h) ou vitesse du vent à l’altitude du vol + 4 m/s

Vitesse de vol moyenne

3,8 à 4,3 m/s (13 à 15 km/h)

Altitude de vol

< 1800 m (généralement < 400 m)

Durée du vol

10 h maximum (2 h en moyenne)

Distance parcourue pendant le vol

1 à 400 km/nuit

Ailés solitaires

Les ailés solitaires migrent pendant la nuit (voir Fig. 12). Des individus ont été détectés par radar à des altitudes pouvant atteindre 1 800 m. On ne sait pas si tous les criquets pèlerins pouvant voler migrent, combien de temps ils restent en vol pendant la nuit et s’ils volent ou non pendant des nuits consécutives. Il est possible qu’il y ait des vols brefs à basse altitude induisant des déplacements à courte distance et des vols soutenus à plus haute altitude qui correspondent à une migration. Certains criquets pèlerins solitaires peuvent ne pas migrer du tout mais simplement se déplacer localement.

La température limitante pour le vol de nuit est à peu près la même que pour le vol de jour, de l‘ordre de 20 à 22°C. Cela est surprenant car, à cette température ambiante limitante, la température du corps des criquets doit être considérablement plus basse lorsqu’ils volent de nuit plutôt que de jour, en plein soleil.

Les criquets pèlerins volant de nuit peuvent localiser les zones de végétation sur lesquelles se poser même si ce ne sont que quelques taches isolées. On ignore comment ils font.

Conseil: la nuit, les ailés sont attirés par les lumières. Lorsqu’on voit des ailés se diriger vers des lumières (par exemple, des réverbères dans les zones urbaines ou des feux de camp sur le terrain), cela peut indiquer qu’ils sont en train de se déplacer d’un site à un autre.

Question fréquemment posée n° 5 (voir réponse page 42)

Les ailés solitaires volent-ils pendant la journée?

Figure 13. Quand la végétation commence à se dessécher, les ailés solitaires peuvent se concentrer et former des groupes. Ce phénomène peut se produire pendant qu’ils se chauffent au soleil, s’alimentent, se perchent ou volent. Au cours de ce processus, le comportement et la couleur des ailés changent.

Groupes

Comme chez les larves, le comportement des ailés solitaires change en fonction de l’environnement et des effectifs (voir Fig. 13). Par exemple, au cours d’une rémission, à la fin d’une période de reproduction, les effectifs d’ailés augmentent souvent suite à la reproduction précédente. Dans le même temps, la taille des habitats favorables diminue avec le dessèchement des conditions ambiantes. Cela entraîne une concentration des ailés dans les zones relativement restreintes restant appropriées à leur survie. Si les ailés sont matures, cette concentration est souvent associée à une ponte dans les quelques zones au sol encore humide. Suite à la concentration, les ailés commencent à réagir à la présence de leurs congénères et à former des groupes. Ce phénomène peut également être indiqué par un changement de couleur des ailés bien que ce dernier se produise après le changement de comportement. Les ailés immatures peuvent être de couleur brune avec des traces rosâtres sur l’abdomen et les ailes, alors que les ailés matures présenteront des traces jaunâtres.

Des groupes peuvent se former quand les ailés se chauffent au soleil, sont perchés ou sont en vol. Ce dernier cas peut se produire dans les zones de vents convergents, entraînant la concentration des criquets. Sur le terrain, l’observation de groupes indique que les ailés deviennent grégaires et peuvent former des essaims. Ce processus peut être accéléré par l’arrivée d’autres ailés ou par la présence d’effectifs élevés de sauteriaux ou d’autres locustes.

Question fréquemment posée n° 6 (voir réponse page 42)

Comment peut-on faire la différence entre groupes d’ailés et essaims?

Figure 14. Les essaims passent la nuit perchés sur la végétation. A l’aube, ils descendent au sol et se chauffent au soleil. En milieu de matinée, les essaims prennent leur envol et continuent souvent à voler jusqu’à peu avant le coucher du soleil; ils se posent alors et s’alimentent. Si le temps est exceptionnellement chaud, les essaims peuvent se poser à midi et s’envoler de nouveau dans l’après-midi.

Essaims

Formation. Les premiers essaims se forment généralement à quelques dizaines ou même à quelques centaines de kilomètres sous le vent de la zone de ponte principale. Les jeunes ailés s’éloignent de la zone de reproduction; des agrégations se forment alors, rassemblant d’autres criquets autour d’elles.

Structure. Les essaims peuvent prendre la forme de nappes volant à basse altitude (essaims stratiformes) ou les criquets peuvent s’accumuler à haute altitude, semblables à des rideaux qui pendraient (essaims cumuliformes), le sommet pouvant se trouver à une altitude de 1 500 m (voir Fig. 14). Les essaims stratiformes sont plats et mesurent généralement plusieurs dizaines de mètres de large; ils se forment souvent lorsque le temps est frais et couvert ou en fin d’après-midi. Les essaims cumuliformes sont associés à des courants de convexion thermique lors d’après-midi chauds, particulièrement fréquents au cours des mois les plus chauds et les plus secs de l’année. Au sein des essaims cumuliformes, les criquets des 400 m inférieurs volent sous forme de courants qui peuvent prendre n’importe quelle direction. Les courants qui s’écartent de l’essaim le réintègrent ultérieurement. Les criquets situés plus haut dans l’essaim peuvent également constituer des courants à la direction aléatoire ou former des nappes tourbillonnantes.

Densité. La densité des essaims varie considérablement. Le chiffre communément accepté pour un essaim de taille et de densité moyennes posé au sol est de 50 millions d’individus/km2 (50 criquets/m2); les valeurs minimale et maximale sont respectivement de 20 et 150 millions de criquets/km2. Les essaims se déploient généralement lorsqu’ils sont en vol et couvrent alors entre deux et trois fois la superficie occupée lors du perchage. La densité volumique des essaims en vol peut atteindre un maximum de 10 criquets pèlerins par m3.

Caractéristiques des essaims de Criquet pèlerin

Couleur

Rose (immatures), jaune (matures)

Durée de maturation

2 semaines à 6 mois

Densité moyenne au sol

50/m2 (500 000/ ha)

Densité au sol, min/max

20 à + 120/m2 (200 000 à 1 + 200 000/ha)

Densité en vol

1/1000 m3 à 10/m3

Question fréquemment posée n° 7 (voir réponse page 42)

Les essaims volent-ils la nuit?

Figure 15. Paramètres de l’envol, du vol et de l’atterrissage des essaims.

Envol. Généralement, la première activité matinale des essaims consiste à descendre de la végétation sur laquelle ils étaient perchés pour la nuit (voir Fig. 14). Les criquets pèlerins posés sur le sol nu exposent leur corps perpendiculairement au soleil pour se réchauffer le plus vite possible. Avec l’augmentation de la température, des groupes de criquets s’envolent puis atterrissent plusieurs fois (voir Fig. 15). Comme les avions, les acridiens se posent et s’envolent face au vent. Les vols intermittents sont de type déroulant. Au niveau du front de l’essaim, les ailés descendent groupés, virant face au vent pour atterrir; à l’arrière de l’essaim, ils s’envolent face au vent. Au fur et à mesure que l’essaim passe au-dessus d’eux, les ailés virent pour le rattraper.

Vol. Vers le milieu de la matinée, ou plus tôt si la température est suffisamment élevée pour permettre un vol soutenu, tout l’essaim prend son envol. Les vols soutenus sont rares si la température est inférieure à 20°C. Cette température limitante est plus élevée si le ciel est couvert (environ 23°C).

Distance parcourue. Les essaims peuvent voler jusqu’à neuf ou dix heures par jour, se déplaçant sous le vent bien que des essaims matures puissent parfois se déplacer sur une courte distance face au vent si celui-ci est faible. Un essaim se déplace généralement à une vitesse légèrement inférieure à la vitesse du vent et peut facilement couvrir 100 km ou plus en une journée. Le niveau de vent qui détermine le déplacement des essaims cumuliformes n’est pas clair. Les essaims peuvent être poussés par des vents d’altitude ou bien être freinés par des vents de surface, souvent plus lents et soufflant fréquemment d’une direction différente. Bien que, dans un essaim, les criquets puissent voler dans des directions différentes, le résultat global est un déplacement dans le sens du vent. Comme dans beaucoup d’essaims une proportion considérable de criquets passe du temps au sol, l’essaim se déplace presque toujours à une vitesse inférieure à celle du vent. S’il n’y a pas de vent, les criquets volent à une vitesse de 3 à 4 m/s environ.

Atterrissage. Il arrive parfois que les jeunes essaims immatures continuent à voler après le coucher du soleil lors de soirées chaudes mais, normalement, les essaims commencent à se poser une heure environ avant le coucher du soleil, lorsque les courants de convexion disparaissent. Les densités aériennes peuvent être très élevées à ce moment de la journée.

Migration des essaims

Période de l’envol

Temps chaud: 2 à 3 heures après le lever du soleil Temps frais:
4 à 6 heures après le lever du soleil

Température lors de l’envol

Temps ensoleillé: > 15 à 17°C

Vitesse du vent lors de l’envol

< 6 m/s

Vol

Pendant la journée

Direction du vol

Dans le sens du vent

Vitesse au sol

Formule de Draper1 (zones de végétation), similaire à la vitesse du vent
(peu ou pas de végétation), ou 0,4 à 4,4 m/s (1,5 à 16 km/h)

Vitesse de vol moyenne

3,8 à 4,3 m/s (13 à 15 km/h)

Altitude de vol

15 à 1700 m

Température de vol (jour)

9 - 17°C < Température < + 40°C

Durée du vol

9 à 10 h (min), 13 à 20 h (max)

Distance parcourue

5 à + 200 km/jour

Période de l’atterrissage

2 heures avant le coucher du soleil à une demi-heure après
le coucher du soleil

1 0,9071W – 0,0199W + 0,0049H + 3,7373
où W = vitesse du vent (km/h) et H = altitude de vol (m)

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