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3. Rubriques du recensement et définitions


3. Rubriques du recensement et définitions

Dans les sections suivantes, il ne sera question que des rubriques et des notions et définitions correspondantes susceptibles d'influer directement ou indirectement sur le dénombrement des femmes et de leurs activités dans l'agriculture.

3.1 Exploitation

Le Programme du recensement mondial de l'agriculture de 1990 donne de l'exploitation la définition suivante: "une unité économique de production agricole soumise à une direction unique et comprenant tous les animaux qui s'y trouvent et toute la terre utilisée entièrement ou en partie pour la production agricole, indépendamment du titre de possession, du mode juridique ou de la taille" (FAO, 1986c).3

3 Les définitions adaptées par le Programme du recensement mondial de l'agriculture de 1990 et d'autres définitions en matière de collecte de données sur l'agriculture sont présentées a l'annexe B.

Le Programme donne quelques éléments supplémentaires pour l'identification de l'exploitation. Certains intéressent plus particulièrement l'évaluation du travail des femmes (FAO, 1986c):

a) Privation des terres

Le premier point soulève le problème de la définition et du dénombrement des exploitations sans terres. Si la question des exploitations sans terre est évoquée ici c'est en raison de ses liens avec la pauvreté rurale, problème primordial pour l'étude duquel beaucoup de données sont nécessaires. Cette question a également été soulevée par la Consultation interinstitutions (FAO, 1991c), qui a fait remarquer que les femmes étaient souvent surreprésentées parmi les paysans sans terre et que des données décomposées d'après le sexe étaient requises d'urgence dans ce domaine.

De ce point de vue, il faut entendre par privation des terres l'impossibilité pour les ruraux pauvres d'accéder à la terre. En conséquence, mesurer la privation des terres ne consiste pas simplement à établir une distinction entre ceux qui y ont accès et les autres. La notion de privation des terres en tant qu'aspect de la pauvreté exclut ceux qui n'ont pas de terres en raison seulement du type de production (exploitations qui ne pratiquent que l'élevage). A l'inverse, cette notion inclut souvent les exploitations qui n'ont accès qu'à une superficie très limitée, ce qui est le cas des classifications qui existent dans maints pays (voir par exemple CIRDAP, 1987).

Quelques explications au sujet du concept et des classifications utilisées dans ce domaine s'imposent. En premier lieu, paysans sans terre et exploitations sans terre sont deux notions distinctes qui se mesurent au moyen d'instruments différents. En second lieu, la définition d'exploitation sans terre varie d'un pays à l'autre et dépend de plusieurs variables telles que la taille de l'exploitation, le revenu tiré de la terre ou le temps passé à la travailler (CIRDAP, 1987; FAO, 1985b; et Lipton, 1985).

La notion de privation des terres trouve son expression dans les classifications adoptées par les pays: quasi-absence de terres, absence technique de terres, exploitants cultivant des terres à rendement marginal et autres catégories d'exploitations ayant à un accès limité à la terre.

On est en droit de s'attendre à ce que le recensement permette d'enregistrer les exploitations quasiment sans terres ou marginales ou techniquement sans terres. La notion de privation totale des terres fait référence aux personnes et non aux exploitations (à l'exception de celles qui pratiquent des activités telles que l'élevage) et ne peut être mesurée qu'au moyen d'instruments statistiques orienté vers l'individu.

La signification du phénomène des exploitations sans terre varie d'une région à l'autre. En Afrique, le nombre d'exploitations de ce type n'est élevé que dans quelques pays alors qu'en Asie il est très élevé et croissant. En Amérique latine, le phénomène est lié à l'exode rural, qui a poussé vers les centres urbains des milliers d'agriculteurs (FAO, 1986e).

Au Bangladesh, où l'économie repose essentiellement sur l'agriculture (pêche, foresterie et élevage compris), qui représente plus de 50 pour cent du PIB, la terre est une ressource rare. Près de la moitié des ménages sont techniquement sans terre puisqu'ils dispose de moins de 0,5 hectare. On compte quelque 1,18 million de petites exploitations, généralement exploitées par des femmes. Les études effectuées dans certains villages ont révélé que le revenu tiré de la production des exploitations (généralement considérées comme des exploitations sans terre) représentaient entre 28 et 47 pour cent du revenu familial total (Brac, 1983, Schaeffer, 1986; et Islam et Ahmad, 1987; cités dans Banque mondiale, 1990).

Dans le monde en développement, une forte proportion d'exploitations sans terre est gérée par les femmes. L'élevage du bétail et l'aviculture, ainsi que les cultures maraîchères et les cultures de base parfois sont souvent pratiqués par la femmes sur les exploitations sans terre, voire au domicile même, généralement en zone urbaine.

Selon la définition donnée dans le Programme de 1990, les exploitations sans terre ne sont prises en compte que lorsque la terre n'est pas un facteur de production indispensable. La question de savoir si les exploitants quasiment sans terre, techniquement sans terre ou utilisant de terres à rendement marginal sont recensés lors du dénombrement ou pas est lice à celle de la prise en compte des petites exploitations. Les critères utilisés pour définir le champ d'application du recensement et les méthodes employées pour en établir la base (voir précédente section) peuvent permettre d'obtenir des informations sur ces exploitations (voir section 2.3).

b) Existence d'unités économiques diverses

Le deuxième élément concernant l'identification des exploitations joue un rôle déterminant dans le dénombrement des exploitantes. S'il est appliqué, une unité de production agricole exploitée par une femme et appartenant au ménage d'un autre exploitant, même si elle est placée sous la direction générale d'un homme, sera considérée comme une exploitation séparée; c'est l'exploitante qui sera interrogée et son exploitation sera dénombrée.

c) Existence de multiexploitations

Le troisième élément a déjà fait l'objet d'une analyse à la section 2.1. Lorsqu'un ménage donné a plus d'une exploitation, le principe de base consiste à retenir l'exploitation comme unité de dénombrement. Toutes les exploitations et les informations correspondantes doivent être enregistrées sans tenir compte du fait que les exploitants appartiennent au même ménage. Un exemple type de cette situation est celui des femmes qui travaillent à temps partiel ou de façon saisonnière sur l'exploitation de leur époux tout en utilisant leur propre exploitation. Il faut considérer ces femmes comme les exploitantes indépendantes pour ce qui est de leur activité principale et des travailleurs familiaux non rémunérés en ce qui concerne leur activité secondaire; leur exploitation ne doit pas être confondue avec celle de leur époux.

d) Coexploitants

En cas d'exploitation commune, il est parfois difficile d'enregistrer séparément des informations pour deux exploitants ou plus et d'éviter les doubles comptages lorsque deux ou plusieurs ménages sont concernés. Le Programme de 1990 (FAO, 1986c) distingue deux cas:

Dans le premier cas, c'est le ménage lui-même qui sera enregistré comme exploitant mais, dans le second, ce sont les membres de différents ménages qui seront enregistrés comme exploitants et des données seront réunies sur les différents ménages concernés. Lorsque les exploitants sont deux ou plusieurs individus des divers ménages, ce sont ces derniers qui seront enregistrés comme exploitants. Le Programme propose trois rubriques différentes:

Le Programme n'indique pas clairement dans quel cas il faut considérer l'un des coexploitants comme l'exploitant principal ni si des informations doivent être recueillies sur les deux exploitants.

Lorsque les exploitants sont un homme et une femme, il est très vraisemblable que c'est l'homme qui sera considéré comme l'exploitant principal, les stéréotypes le désignant généralement comme le personnage le plus influant du ménage. Il en résultera une sous-estimation du nombre des femmes assumant d'importantes responsabilités dans les exploitations et participant aux décisions dans le domaine agricole. Il est donc proposé de recenser les coexploitants, qu'ils soient ou non issus du même ménage. Au stade de la tabulation, les différents types d'exploitants coexploitants du même sexe, coexploitants de sexes différents, ménages travaillant conjointement, etc. - peuvent être présentés sous forme de tableaux lorsqu'ils sont proportionnellement nombreux.

3.2 Exploitant

Le Programme de 1990 définit l'exploitant comme "la personne physique ou morale responsable de la marche de l'exploitation agricole et des grandes décisions concernant l'utilisation des ressources. Il a également la responsabilité technique et financière de l'exploitation. Il peut assurer la marche de l'exploitation directement ou confier la responsabilité du travail courant de la gestion à un régisseur salarié" (FAO, 1986c).

Les rubriques proposées par le Programme de 1990 s'agissant du statut juridique de l'exploitant sont les suivantes:

a) Privé

b) Gouvernement

Les Suppléments régionaux au Programme de 1990 recommandent instamment de consigner l'âge et le sexe de l'exploitant (FAO, 1989b; FAO, 1990d; FAO, 1990e; et FAO, 1991d).

3.3 Ménage de l'exploitant et membres du ménage

La définition du ménage adoptée dans le Programme de 1990 suit des recommandations du Bureau de la statistique des Nations Unies.

Le lien ménage-exploitation a été examiné à la section 2. Toutefois, il importe de souligner une fois encore la différence entre ces deux notions. L'exploitation est une unité économique simple tandis que le ménage est une unité socio-économique complexe. Les deux notions se recoupent souvent et les membres du ménage peuvent participer aux activités de l'exploitation à temps complet ou parallèlement à d'autres activités agricoles ou non agricoles.

Une certaine confusion peut apparaître au moment de la collecte des données, étant donné le lien entre les deux notions. L'unité économique soumise à l'examen est l'exploitation. A cet égard, le Programme de 1990 recommande que:

Pour obtenir des informations fiables sur les ressources humaines de l'exploitation, il faut mettre l'accent sur celle-ci et non - comme c'est le cas dans certains des pays examinés - sur les seuls membres du ménage.

3.3.1 Utilisation et définition de la notion de chef de ménage

Bien qu'une évolution en ce sens ne soit pas toujours facile à mesurer, il est prouvé que le nombre de ménages ayant à leur tête une femme s'accroît. Cette situation s'explique souvent par l'émigration des hommes et une instabilité familiale croissante. Dans certaines régions du monde, il est aussi moins fréquent qu'auparavant de voir les ménages dirigés par une femme perdre leur autonomie et s'intégrer à d'autres ménages au décès de l'époux, comme c'était le cas avec la famille élargie.

Le terme chef de ménage a différentes acceptions: depuis l'interlocuteur des recensements jusqu'au principal décideur dans le ménage et il a fait l'objet de longs débats. D'une part, il y a ceux qui pensent qu'entre des partenaires égaux il n'y a aucune raison de désigner un chef; d'autre part il y a ceux qui pensent que le ménage a besoin d'un guide et qu'il faut un interlocuteur auprès duquel obtenir les données. En outre, dans la plupart des pays il y a un rapport direct entre le sexe du chef de famille et le statut économique du ménage. Dans les pays en développement, les ménages ayant à leur tête une femme sont souvent les plus pauvres parmi les pauvres.

Les définitions et critères utilisés pour identifier le chef du ménage tendent à dénier ce rôle aux femmes. Pour cette raison et pour d'autres - tenant notamment à la difficulté d'obtenir des informations fiables - il a souvent été suggéré de supprimer cette notion. Toutefois, aucune solution de remplacement n'a été adoptée à l'échelle internationale pour définir les familles dont les femmes sont les principaux soutiens et décideurs.

Une étude sur les recensements de la population entreprise en 1973 (Nations Unies, 1984) a fait apparaître que trois grands types de définitions étaient utilisés:

Il est pratiquement impossible de donner une définition qui soit parfaitement adaptable à tous les pays. La définition suggérée dans le Programme de 1990 est la suivante: celui qui "détient les principaux pouvoirs et responsabilités en ce qui concerne les affaires du ménage" (d'après Principes et recommandations concernant les recensements de la population et de l'habitation, Nations Unies, 1980).

Nous suggérons de conserver la notion de chef de ménage, notamment dans les pays les moins avancés, et de définir des critères précis pour l'identification du chef de ménage. Il faudra aussi veiller avec attention à la formation et à la sensibilisation des recenseurs sur ce point (voir section 5.4) pour limiter les interprétations arbitraires de leur part et les réponses subjectives de la part des déclarants.

Comme on l'a vu, le principal objectif est de recenser les ménages rencontrant des difficultés économiques dont les femmes assurent seules la subsistance (pour elles-mêmes et pour leurs enfants) tout en étant responsables de l'entretien général. La définition appliquée doit privilégier la notion de soutien financier.

L'autre moyen de recenser les différents types de ménage et de désigner les plus défavorisés d'entre eux est celui qui consiste à mettre l'accent sur la composition des ménages. Dans ce cas, l'analyse est faite a posteriori sur la base des informations recueillies en ce qui concerne l'âge, le sexe et la situation matrimoniale des membres du ménage. En examinant la composition de celui-ci, on peut en définir plusieurs types non pas en se référant à un seul membre (le chef du ménage) mais en fonction des caractéristiques socio-démographiques de tous les membres. On peut citer certains exemples de ménages classés d'après leur composition (Nations Unies, 1984):

Des classifications plus complexes peuvent être définies à l'aide d'informations supplémentaires.

3.3.2 Informations à réunir sur le ménage de l'exploitant

Jusqu'à présent, les programmes de recensement de l'agriculture ont davantage privilégié les facteurs de production non humains que les ressources humaines. Toutefois, dans le Programme de 1990, plusieurs rubriques du type: "caractéristiques démographiques et anthropométriques" et "emploi" ont été proposées (FAO, 1986c). Ces rubriques recouvrent les considérations suivantes: âge et sexe de l'exploitant, statut économique du membre du ménage (actif ou non actif), les travaux réalisés sur l'exploitation (à titre permanent ou intermittent). Dans les suppléments régionaux, la question du temps consacré à l'exploitation par l'exploitant et les membres du ménage durant l'année est également prise en considération.

Dans quelques pays, le questionnaire du recensement de l'agriculture contient aussi des questions plus détaillées sur les caractéristiques socio-économiques des membres du ménage. Dans le recensement de 1988 réalisé en Colombie, des informations ont été réunies sur chaque membre du ménage à propos de l'âge, du sexe, du niveau d'éducation, d'éventuels traitements médicaux, du statut économique (actif/non actif) et du nombre d'heures de travail sur l'exploitation et en dehors. En Guinée, le recensement de l'agriculture de 1988-89 a introduit des questions sur l'âge, le sexe, le niveau d'alphabétisation, le niveau d'éducation, l'éventuelle présence de chaque membre du ménage, le statut (actif ou non actif) ainsi que l'âge, le sexe et la situation de famille de l'exploitant. En Malaisie, le questionnaire de 1977 contenait des données sur l'âge, le sexe, le lien avec le chef du ménage, la situation matrimoniale, l'origine ethnique, le niveau d'éducation, la formation professionnelle, le statut économique, le revenu éventuel, la profession et le secteur économique, la situation en matière d'emploi, etc.

Comme on l'a vu à la section l, la source de données sur les ressources humaines que constitue le recensement de l'agriculture n'a pas été exploitée à fond. Les données réunies sur les membres du ménage de l'exploitant peuvent fournir les informations nécessaires sur les spécificités de chaque sexe dans certains domaines d'un intérêt particulier pour la FAO. En outre, les informations sur des caractéristiques socio-économiques des membres du ménage peuvent être en rapport avec la taille, la structure et la productivité (lorsque celle-ci est enregistrée) de l'exploitation quand les deux concepts se recoupent parfaitement.

Les questions portant sur les membres du ménage peuvent fournir des données utiles sur les facteurs de production et les services, sur le niveau d'éducation et de formation et sur les travaux réalisés pour réaliser les principaux objectifs en matière d'amélioration de la productivité agricole et d'élimination de la pauvreté en milieu rural. Plus spécialement, les données sur les membres du ménage peuvent permettre de mieux comprendre:

Au vu des éléments examinés à la section 1, liés à la stratégie de la FAO et à la nécessité d'obtenir des statistiques sur l'agriculture et le développement rural, il est proposé que le recensement de l'agriculture recueille sur chaque membre du ménage les données suivantes:

En outre, dans les pays où l'exode rural et l'émigration sont importants, il convient aussi de demander si le chef du ménage est présent au moment de l'interview ou pendant la période de référence spécifiée.

La question du travail des enfants doit également être prise en considération, notamment dans les pays où l'emploi de jeunes enfants est courant ou leur participation aux travaux réalisés sur l'exploitation par le ménage fréquent. Les données obtenues permettraient de mieux comprendre le statut "économique" attribué à l'enfant dans la famille, la mesure dans laquelle les enfants sont tenus éloignés du système éducatif quand leur participation aux travaux est requise et la situation respective des garçons et des filles dans ce domaine. Le pays fixe généralement un âge minimum en ce qui concerne le travail des enfants. Toutefois, dans les pays en développement, il convient de poser la question relative au statut économique à chacun de manière à obtenir des informations sur le travail de très jeunes enfants. Les tableaux devraient ensuite être établis en fonction de l'âge (un groupe des personnes de 15 ans et plus devra être inclus) comme le recommande le Programme de 1990 dans le but de faciliter des comparaisons au niveau international.

Dans certains pays, des données sur l'emploi - qu'il s'agisse des membres du ménage ou du personnel salarié - sont enregistrées séparément en ce qui concerne les enfants. On peut citer à ce titre la Malaisie - où cette idée d'information est enregistrée par sexe ainsi que pour les employés à temps complet et à temps partiel - et le Pakistan - où une distinction est établie entre les travailleurs de 15 et plus et les travailleurs de 10 à 14 ans.

3.3.2.1 Sexe et âge

Le sexe et l'âge de chaque membre du ménage doivent être enregistrés.

3.3.2.2 Situation de famille

La situation de famille des femmes est généralement lice à leur statut économique. Les mères célibataires constituent souvent le groupe le plus défavorisé et sont exposées à un risque très élevé de pauvreté. En outre, on sait que la situation de famille des femmes chefs de ménage est le reflet de la situation économique de celui-ci (Nations Unies, 1984).

Il convient également de prêter attention aux diverses formes de situation matrimoniale telles que les unions consensuelles et la polygamie. Les distinctions entre union monogame et union polygame revêt notamment une grande importance dans l'analyse du secteur agricole. Les seconda ont une incidence sur la façon dont l'organisation de l'exploitation est répartie entre les épouses et le chef de famille, sur les responsabilités des membres de ménage et sur la situation économique générale. Dans les secteurs où ces pratiques sont fréquentes, il importe que les catégories relatives à la situation de famille témoigne bien des réalités locales.

Dans le Programme de 1990, il n'est pas question de la situation de famille, pas plus que de la polygamie et de son lien avec le problème des ménages où il existe des multiexploitations. Des directives doivent être données à cet égard notamment dans les régions où les situations matrimoniales d'un type particulier sont fréquentes.

3.3.2.3 Enseignement et formation

Deux aspects essentiels doivent être considérés en ce qui concerne l'inégalité entre hommes et femmes en matière d'éducation:

Dans nombre de sociétés, les femmes risquent fort de ne pas atteindre le même niveau d'enseignement que les hommes et, dans beaucoup de pays, elles ont un taux d'alphabétisation inférieur. Leur niveau d'enseignement est lié à leur participation aux activités agricoles et aux possibilités qui leur sont offertes d'acquérir une formation technique.

Des études financées par la Banque mondiale ont montré le lien déterminant entre l'efficacité des agriculteurs et leur niveau d'enseignement agricole (Jamison et Lau, 1982, citées dans Saito et Weideman, 1990). Les agricultrices sont souvent écartées des systèmes de formation. Au Burkina Faso, un projet d'élevage à l'échelle d'un village a échoué dans la mesure où les informations et les ressources destinées à améliorer la production de petits animaux étaient axées sur les hommes alors que la responsabilité de l'élevage des petits animaux (ovins, caprins et volaille) était du ressort des femmes (Carloni, 1987, cité dans Saito et Weidemann, 1990). Une analyse de 11 grands projets agricoles réalisés au Népal a montré que les nouvelles méthodes n'étaient présentées qu'aux hommes. Au Pakistan, un programme de premiers secours géré par l'hôpital vétérinaire n'assure une formation en matière de soins aux animaux qu'aux hommes, alors que ce sont les femmes qui sont responsables de l'élevage (Banque mondiale, 1989b).

Le Programme de 1990 ne comporte pas de rubrique sur l'enseignement et la formation, alors que de nombreux pays de toutes les régions prévoient cette rubrique. En France, lors du recensement de l'agriculture de 1979-1980, il était demandé à l'exploitant ou aux membres du ménage s'ils avaient reçu une formation agricole. Dans le recensement réalisé en Malaisie en 1977, des questions étaient posées sur le niveau d'éducation et de formation professionnelle. Dans le recensement réalisé aux Philippines en 1981, il a été demandé quel était le diplôme le plus élevé obtenu. Des questions similaires étaient prévues dans les recensements réalisés au Togo (1982-83), en Colombie (1988), en Guinée (1988-89), en Ouganda (1989-1990) et ailleurs.

Il convient d'inclure une question sur le niveau d'éducation - en adaptant les rubriques à la réalité locale et notamment le degré d'alphabétisation ou d'illettrisme - et sur la formation.

Il demander à chaque membre du ménage:

La formation technique et agricole de type classique est incluse dans la rubrique éducation. Les programmes non officiels ne comprennent pas les services de vulgarisation dispensés par des fonctionnaires. Le questionnaire doit comporter une question spécifique couvrant ce type d'activités de formation non institutionnelle (voir section 3.6.5). On trouvera à la section 4 des critères de classification de ces rubriques.

3.3.2.4 Eventuelle participation aux travaux réalisés sur l'exploitation

Les deux rubriques "A-t-on effectué des travaux sur l'exploitation au cours de l'année?" et ''A-t-on engagé de la main-d'oeuvre agricole permanente ou intermittente" figurent dans le Programme de 1990 (FAO, 1986c).

Le problème déterminant qui se pose ici est de savoir comment formuler la question de telle sorte que, les femmes qui sous-évaluent souvent leur travail, soient recensées parmi les travailleurs. De même, il convient de donner des indications précises aux recenseurs, qui, ayant leur propre perception du travail des femmes, ont tendance à sous-évaluer leur contribution effective.

Dans nombre de sociétés, les femmes sont souvent considérées - et se considèrent elles-mêmes - comme des ménagères, même si elles exercent une activité économique. Quant aux hommes, pour des raisons de statut social, ils hésitent à avouer que leurs femmes et filles travaillent. Les recenseurs peuvent être conditionnés par des préjugés et hésitent parfois pour des raisons culturelles et religieuses à communiquer directement avec des femmes.

Cette question est aussi examinée à propos de l'activité principale et secondaire, des problèmes de définition (paragraphe 3.4.2), ainsi que de la formulation des questions et de la formation de recenseurs (section 5).

3.3.2.5 Temps consacré à l'exploitation

Les données sur le temps consacré à diverses activités sont extrêmement utiles pour décrire et analyser la division du travail en fonction du sexe et de nombreuses autres variables socio-économiques. Elles servent aussi à tester les modèles économiques relatifs aux processus de décision concernant la répartition du travail entre les activités commerciales et non commerciales au sein du ménage (voir Becker, 1965; Gronau, 1973 et 1980; cités dans Dixon-Mueller, 1985) et à évaluer la demande de travail de différents systèmes d'exploitation en fonction des conditions climatiques, des modes de culture et des techniques (Cleave, 1974; cité dans Dixon-Mueller, 1985). A l'échelon national, les planificateurs peuvent exploiter les études sur l'utilisation du temps pour obtenir des informations élémentaires en vue de formuler des stratégies concernant l'augmentation de la productivité agricole ou le développement rural. Les études sur l'utilisation du temps étaient fréquentes dans l'ex-Union soviétique, puisque les premières ont été réalisées dans les années 20, ainsi que dans d'autres pays d'Europe orientale et en Finlande (Niemi, Eglite, Mitrikas, Patrushev et Paakkonen, 1991, Harcsa, Niemi et Babarczy, 1988). Dans ce dernier pays, des études détaillées des relations la situation familiale, le cycle d'évolution individuelle et les principales caractéristiques de l'utilisation du temps, ont été réalisées.

La Consultation interinstitutions a recommandé d'affiner les méthodes utilisées dans les pays en développement concernant les études sur l'utilisation du temps et de tester les différentes méthodes de collecte de données (observations, carnets de bord, etc.) (FAO, 1991c).

Il ne sera pas question dans le présent rapport des méthodes concernant les études sur l'utilisation du temps car il s'agit d'un domaine qui touche davantage aux enquêtes par sondage qu'aux recensements. Toutefois, il y a lieu de reconnaître la valeur de telles méthodes pour mesurer la contribution des femmes. Le recours à des études sur l'utilisation du temps constitue un moyen efficace d'évaluer la valeur économique du travail des femmes mais aussi de recenser leurs principaux problèmes d'emploi du temps ainsi que les éventuels domaines d'intervention4.

4 La relation entre la charge de travail des femmes et leur taux de fertilité ou entre les problèmes d 'emploi du temps des agricultrices et la dégradation de l'environnement sur les petites exploitations agricoles (le cycle femme/population/environnement) acquiert une dimension politique grandissante (voir par exemple FAO, 1992a et 1992b)

Dans le cadre des recensements agricoles la question peut être limitée au temps total consacré par chaque membre à travailler sur l'exploitation et en dehors.

L'accroissement de la productivité de la main-d'oeuvre est un des principaux objectifs des politiques de la planification dans les secteurs de l'agriculture et du développement rural. Accroître la productivité et le revenu est l'un des buts de la CMRADR (voir section 1). Mesurer les différences entre hommes et femmes en ce qui concerne la productivité de la main-d'oeuvre est une tâche difficile. Toutefois, le temps que les femmes et les hommes consacrent à l'exploitation, de même que d'autres indications sur leur niveau d'éducation et de formation et leur activité principale et secondaire peuvent aider les planificateurs à concevoir des mesures spécifiques pour améliorer la productivité. Le nombre d'heures ou de jours consacrés aux travaux agricoles peuvent permettre de mesurer l'apport de chaque sexe sous forme de travail. De plus, la question du nombre d'heures ou de jours de travail passés sur l'exploitation et en dehors permet de définir les différentes catégories de travailleurs: temporaires, saisonniers, à temps partiel, intermittents, les femmes étant souvent surreprésentées dans ces catégories. Il est particulièrement important de décomposer ce type d'information d'après le sexe.

Dans les suppléments régionaux pour le Proche-Orient, l'Asie et le Pacifique ainsi que l'Europe, il est proposé d'enregistrer le temps consacré au travail (en pourcentage) du temps total par l'exploitant, les membres du ménage de celui-ci et les travailleurs salariés permanents. En ce qui concerne les travailleurs intermittents, il est suggéré d'enregistrer le nombre total de semaines5 travaillées au cours de l'année. Une distinction en fonction du sexe n'est pas envisagée (FAO, 1989; FAO, 1990d; et FAO, 1990e).

5 Le vocabulaire utilisé dans le Programme mondial, qui révèle un parti pris à I 'encontre des femmes, doit être abandonné en faveur de la terminologie actuellement employée à l'OlT, l'expression semaine-homme par exemple étant remplacée par l'expression semaine de travail.

Au cours de certains des recensements de l'agriculture réalisés dans le présent cycle (19851995) et dans le cycle antérieur (1975-1985), le nombre d'heures ou de jours travaillés au cours de la période de référence est enregistré pour chaque membre du ménage et pour les travailleurs salariés. Lors du recensement réalisé en Colombie (1988), les catégories envisagées étaient les suivantes: moins de 10 heures, de 10 à 20 heures, de 21 à 30 heures, de 31 à 40 heures et plus de 40 heures. Les données étaient enregistrées séparément pour les membres du ménage et les travailleurs salariés, d'après le sexe. En Espagne (1987), le nombre de journées travaillées était enregistré pour chaque travailleur, d'après le sexe, la distinction étant faite entre journées complètes (six heures et plus) et journées incomplètes (moins de six heures). Des questions semblables ou plus détaillées étaient prévues dans les recensements réalisés en Italie, en Nouvelle-Zélande, aux îles Cook et dans d'autres pays.

Les suggestions en ce qui concerne la collecte des informations relatives à chaque membre du ménage travaillant sur l'exploitation sont les suivantes:

Le nombre d'heures de travail par semaine et le nombre de jours de travail au cours de la campagne agricole peuvent être répartis en classes prédéfinies, comme c'est le cas dans les pays susmentionnés. La collecte et l'analyse des données s'en trouvent bien évidemment facilitées.

Formes de rétribution et salaires

Evaluer le revenu des femmes présente un certain nombre de problèmes. Ces problèmes sont dus pour l'essentiel à la confusion qui s'installe lorsqu'il s'agit d'identifier les sources de revenu en nature - et d'attribuer une valeur à la production destinée à l'autoconsommation. Cette remarque vaut particulièrement pour les pays en développement, où la plupart des femmes ne perçoivent pas de salaire parce qu'elles sont généralement des travailleurs familiaux non rétribués ou qu'elles sont payées en nature.

De plus, il est prouvé que les femmes et les hommes perçoivent des salaires sensiblement différents. Une étude réalisée à ce sujet dans six Etats de l'Inde a fait apparaître des différences considérables entre hommes et femmes, ces dernières ne recevant en moyenne que 80 pour cent des salaires des hommes au bas de l'échelle (plantation, sarclage, moisson) et 73 pour cent à des postes plus élevés (Dixon-Mueller, 1985).

Les informations relatives aux formes de rétribution - salaire ou paiements en nature - et, dans toute la mesure possible, montants des salaires mensuels ou journalier permettent de mettre en lumière ces importants aspects de la vie des femmes et du développement rural en général.

3.3.2.6 Activité principale et activité secondaire

La Consultation interinstitutions a souligné la nécessité de décomposer d'après le sexe les données sur les activités secondaires, qui traduisent la diversité des activités réalisées par les femmes dans l'agriculture au cours de certaines périodes de référence (FAO, 1991c).

L'une des principales raisons pour lesquelles la participation économique des femmes est sous-évaluée est qu'on tend à considérer une grande partie de leurs activités comme des tâches ménagères. Dans le secteur agricole, ce problème de sous-évaluation est encore plus sensible, puisque les femmes exercent plus souvent que les hommes des activités à temps partiel, saisonnières, et intermittentes. Leur travail est plus difficile à mesurer, d'autant plus que la limite entre ce qui doit être considéré comme une activité économique et ce qui ne doit pas l'être est souvent un peu floue.

Les femmes elles-mêmes tendent à considérer leurs activités comme non économiques. Au Chili, on a constaté qu'un grand nombre de femmes classait plutôt les semailles et la moisson parmi les travaux ménagers que parmi les travaux agricoles (Garret, 1976, cité dans Dixon-Mueller, 1985). Dans de nombreux cas, les recenseurs ont tendance à négliger l'activité des femmes. Dans quelques recensements et enquêtes sur la main-d'oeuvre, les femmes vivant sur des exploitations sont classées comme économiquement inactives en fonction de leur sexe et de leurs liens avec les autres membres du ménage, sans qu'on tienne compte de leur activité effective.

Lorsqu'on n'interroge les gens que sur leur activité "principale", on s'expose à ne jamais comptabiliser le travail - en dehors des tâches ménagères - de beaucoup de femmes. Poser des questions secondaires est mettre en lumière ce que les femmes font effectivement. En outre, étant donné qu'elles exercent souvent des activités multiples - travaux sur leur propre exploitation, travaux sur l'exploitation de leur époux, travaux saisonniers sur d'autres exploitations, etc. - la question relative à l'activité secondaire peut contribuer à améliorer leur rôle. Dans une enquête pilote réalisée en Inde, on a constaté que les taux d'activité des femmes étaient passés, en appliquant la nouvelle définition normalisée de population active, de 16 à 41 pour cent d'après les réponses à la question sur les activités secondaires (Anker, Khana et Gupta, 1998; citées dans Dixon-Mueller et Anker, 1998).

Dans la question sur l'activité économique, on peut aussi prévoir une activité tertiaire pour s'assurer que, dans les pays où les femmes exercent des activités multiples en dehors de leurs tâches ménagères, leur contribution économique est prise en compte6.

6 Une question portant sur les activités tertiaires a été testée lors d'une enquête par sondage effectuée dans une région d'Italie en 1979. Cette enquête s'inscrivait dans le cadre d'un projet FAO visant à tester de nouvelles méthodologies et évaluer le travail réalisé par les femmes dans l'agriculture. L'expérience a donné des résultats encourageants.

La question concernant l'activité principale et l'activité secondaire est déjà incluse dans certains questionnaires nationaux. Ainsi, dans le recensement de l'agriculture organisé en 1991 en Ouganda, il était prévu une question sur l'activité principale et l'activité secondaire des membres du ménage.

Seuls les suppléments régionaux du Programme de 1990 comportent une question dans laquelle il est demandé si le membre du ménage exerce plus d'une occupation.

3.4 Problèmes de définition

La participation des femmes à l'activité économique a été sous-évaluée dans les statistiques officielles pour quantité de raisons, dont certaines sont liées aux notions et méthodes utilisées pour la collecte et l'analyse des données.

Les définitions et notions utilisées par le passé ne permettaient pas de rendre compte des activités des hommes et des femmes, notamment dans les pays en développement. Depuis qu'on se préoccupe à l'échelle internationale d'améliorer les statistiques décomposées d'après le sexe, les débats sur les notions et définitions utilisées ont été intenses tant dans les pays qu'au sein du système des Nations Unies. Des modifications importantes ont été apportées aux normes internationales concernant la population économiquement active, l'emploi et le chômage. Des activités ont également été entreprises pour en généraliser l'utilisation et former les statisticiens chargés de produire des statistiques décomposées d'après le sexe. Plusieurs pays ont d'ores et déjà adopté les nouvelles définitions et se préoccupent davantage des problèmes posés par l'évaluation du travail des femmes.

Toutefois, un grand nombre de pays n'ont pas encore adopté les nouvelles définitions. Par ailleurs, la révision en cours du système de la comptabilité nationale des Nations Unies tient compte de la délimitation des activités de production. Les modifications envisagées changeraient l'évaluation de la population active. Il faudra tenir compte des nouvelles normes dans les futurs programmes de collecte de données, y compris dans le Programme du recensement de l'agriculture.

3.4.1 Population active

On a reproché aux définitions classiques de la main-d'oeuvre de sous-évaluer le travail des femmes. Elles ont en effet tendance à mettre davantage l'accent sur le travail rétribué et à introduire des déformations fondées sur le sexe s'agissant de la distinction entre la production destinée à la consommation du ménage et la production destinée à la vente ou au troc.

La dernière norme en date recommandée par la treizième Conférence internationale des spécialistes des statistiques du travail, tenue en 1982 et approuvée par le Conseil d'administration de l'OIT en 1983, a consisté à modifier et élargir la précédente définition. Selon la nouvelle définition, la population active comprend toutes les personnes des deux sexes qui fournissent le travail nécessaire à la production de biens et de services économiques selon la définition du Système de comptabilité nationale et de balance de l'économie nationale (SNA des Nations Unies) pendant une période de référence déterminée (OIT, 1988). Selon le SNA, l'introduction de biens et services économiques inclut la production et la transformation de tous les produits primaires, qu'ils soient destinés au troc ou à l'autoconsommation (OIT, 1988). En cas de transformation des produits primaires à des fins d'autoconsommation, ne seront considérés comme des denrées économiques que les produits primaires transformés par les producteurs eux-mêmes. La transformation des produits primaires achetés tels que poissons, céréales ou bois à des fins d'autoconsommation est exclue (Dixon-Mueller et Anker, 1988).

Selon cette nouvelle définition, la plupart des activités féminines destinées à assurer la subsistance, devraient être considérées comme des activités économiques. Or, rares sont les pays qui ont adopté la nouvelle définition. La notion de ce qui est économique varie d'un pays à l'autre. Une étude des systèmes de comptabilité nationale réalisée dans 70 pays en 1978 indiquait que 71 pour cent de ces systèmes comprenaient la valeur imputée des activités sylvicoles (y compris la cueillette de fruits, la collecte de fibres ou le ramassage de bois de feu); 50 pour cent la production d'objets d'artisanat; 39 pour cent la transformation de produits alimentaires et 7 pour cent le transport d'eau (Blades, 1971; cité dans Dixon-Mueller et Anker, 1988).

L'utilisation de l'une des définitions de la population active au profit de l'autre modifie du tout au tout le mode d'évaluation de la main-d'oeuvre féminine. Une enquête rurale réalisée en Inde en 1983 fait apparaître des écarts importants dans les pourcentages de population active selon la définition utilisée. La définition de main-d'œuvre rétribuée de l'OIT (employés percevant un salaire en espèces ou en nature) donne un taux de 41,2 pour cent; si l'on utilise la définition d'avant la révision de 1982, le taux passe à 48,6 pour cent; et si l'on utilise la dernière définition, après révision, il atteint 69,6 pour cent (Anker, 1983).

La définition recommandée dans le Programme de 1990 est antérieure à la définition de 1982 (FAO, 1986c). Elle devrait être remplacée par la dernière des normes en date, qui permet de mieux appréhender les activités agricoles réalisées par des femmes.

La population active comprend toutes les personnes ayant atteint un âge spécifié qui sont employées ou inemployées pendant la période de référence. Les personnes employées sont celles qui exercent un emploi rétribué ou un emploi indépendant, y compris les membres de la famille non rétribués. A des fins pratiques, l'obligation minimum pour être considéré comme un employé est d'avoir travaillé une heure au moins pendant la période de référence (OIT, 1988).

La période de référence et le temps consacré au travail sont deux notions déterminantes lorsqu'il s'agit de mesurer le travail des femmes. Avec une période de référence limitée, on s'expose à exclure nombre de femmes et d'hommes exerçant un emploi saisonnier. La nouvelle définition autorise deux sortes de mesures différentes en introduisant les notions d' "habituellement actif", l'activité étant alors mesurée sur une longue période de référence (campagne agricole ou année) est d'actuellement actif (les activités sont mesurées par rapport à une période de référence courte telle que semaine ou journée). Dans le cas des activités agricoles, le recours à une période de référence longue est indispensable pour évaluer le travail des hommes et des femmes.

3.4.2 Travailleurs familiaux non rémunérés

Autre élément qui fausse les données sur les ressources humaines en fonction du sexe: la définition des membres de la famille exerçant un travail non rétribué. La plupart des femmes exercent des activités économiques qui, n'étant pas rémunérées, tendent à être considérées comme des tâches ménagères, et ne sont donc ni comptabilisées ni sous-évaluées. En outre, les femmes exerçant quantité d'activités ménagères et économiques, les secondes sont souvent des activités à temps partiel. Aussi, la fixation d'un nombre minimal d'heures de travail pour définir ce qu'est un travailleur familial non rémunéré crée des distorsions supplémentaires lorsqu'il s'agit d'évaluer le travail des femmes.

La définition de travailleur familial non rémunéré utilisée dans le Programme de 1990 correspond à la norme utilisée par l'OIT avant la révision de 1982. Un travailleur familial non rémunéré est défini comme une "personne qui accomplit sans rémunération un minimum donné de travail (un tiers au moins du nombre normal d'heures de travail) dans une entreprise exploitée par un parent vivant dans le même ménage" (FAO, 1986c).

La révision de 1982 a supprimé le seuil fixé antérieurement, qui excluait de la population active les personnes n'ayant pas travaillé au moins un tiers du temps de travail normal. Les travailleurs familiaux non rémunérés peuvent être considérés comme des travailleurs indépendants quel que soit leur nombre d'heures de travail au cours de la période de référence (OIT, 1988). Pour tous les autres travailleurs, il est exigé une heure de travail au minimum au cours de la période de référence.

La révision a également introduit une nouvelle disposition difficile à quantifier, qui peut conduire à sous-estimer le travail des femmes. Les personnes produisant seulement pour l'autoconsommation peuvent être considérées comme des travailleurs indépendants si leur production représente une part importante de la consommation totale du ménage (OIT, 1988). La notion de part importante est vague et susceptible d'interprétations subjectives. Le travail des femmes est souvent fragmenté en de multiples activités qui ne représentent chacune qu'un laps de temps limité et une faible part de la consommation totale du ménage. Le recours au concept de part importante se prête à diverses interprétations. La stricte application du principe d'une heure minimum résoudrait le problème.

3.4.3 Chômeurs

La treizième Conférence des statisticiens du travail de 1982 a modifié et élargi la définition de chômage. Selon la nouvelle norme, sont chômeurs toutes les personnes dont l'âge est supérieur à l'âge spécifié, qui, au cours de la période de référence, étaient sans emploi, prêtes à accepter un emploi ou à la recherche d'un emploi (OIT, 1988). En incluant les personnes prêtes à accepter un emploi, on dispose d'un critère approprié pour évaluer la population féminine active. Dans maints pays, les femmes n'ont pas aisément accès aux services officiels de l'emploi - bureau de la main-d'oeuvre, agence pour l'emploi, etc. - et sont souvent confrontées à des barrières sociales et culturelles lorsqu'elles entreprennent des démarches concrètes pour trouver un emploi.

Tous les pays en développement devraient envisager de considérer comme chômeurs toutes les personnes disposées à travailler lorsque les considérations susmentionnées ont un rôle important. Le Programme de 1990 le recommandait déjà sans insister suffisamment mais seulement pour les pays où les possibilités d'emploi sont très limitées (FAO, 1986c).

3.5 Travailleurs salariés

Il convient de réunir sur les travailleurs salariés les informations suivantes:

- travailleurs permanents

- travailleurs temporaires

- travailleurs intermittents

Selon la définition donnée par le Programme de 1990 (FAO, 1986c), un travailleur permanent est "une personne dont les services sont utilisés de façon régulière et continue, sur l'exploitation, durant la campagne agricole". Un travailleur intermittent est "une personne à laquelle on a recours à divers moments de la campagne agricole mais qui n'est pas supposé travailler de façon régulière et continue".

Si cela correspond aux besoins du pays, les travailleurs recrutés de façon régulière peuvent être classés en travailleurs permanents recrutés pour une longue période - et temporaires recrutés pour une courte période. Comme cela a été fait précédemment dans le cas des travailleurs appartenant au même ménage, il est recommandé de définir des classes de durée.

Ne pas mentionner le sexe des travailleurs temporaires ou intermittents compromettrait gravement la qualité des données sur le travail féminin, les femmes étant souvent surreprésentées dans ces catégories de travailleurs.

3.6 Accès aux ressources productives

Les principales priorités du développement agricole rural est d'améliorer l'accès des femmes aux ressources productives. Selon le Plan d'action pour l'intégration des femmes dans le développement de la FAO (1988c), les besoins les plus urgents sont les suivants: amélioration de la législation sur les droits en matière de terre et d'eau, création de systèmes de crédits pour les femmes, amélioration et transfert de technologies appropriées et participation aux programmes de formation. Pour instaurer davantage de justice et maximiser le rôle des femmes dans l'agriculture, et partant, accroître leur production, il est indispensable de permettre aux femmes d'accéder plus aisément aux ressources productives.

Les ressources productives fondamentales qu'il convient d'analyser sont les suivantes:

3.6.1 Terres et eaux

La privation des terres, reste un obstacle majeur pour les agricultrices. D'une manière générale, les femmes ont moins facilement accès à la terre que les hommes et lorsqu'elles disposent de terre, il s'agit d'un mode d'occupation généralement aléatoire. L'absence de droit de propriété sur la terre limite les chances des femmes d'être atteintes par les services de vulgarisation et de formation, les gêne pour avoir du crédit puisqu'elles n'offrent pas les garanties nécessaires. De ce fait, l'accès des femmes aux intrants et aux techniques est limité. Les études de la FAO démontrent que, dans de nombreux pays, la législation a souvent interdit l'accès des femmes à la terre et à d'autres ressources ou l'a conditionné à l'autorisation de l'homme. Ainsi, en Amérique latine, les femmes continuent d'être exclues des programmes de réforme agraire. La terre est attribuée au chef de famille, qui par tradition, est un homme. En Afrique, les règles coutumières tendent à favoriser les hommes en matière de droit de propriété des terres. Les cultures vivrières confiées aux femmes sont souvent reléguées sur les terres à faible rendement, ce qui ne fait qu'accentuer leur réputation de producteurs dangereux pour l'environnement. De plus, les pratiques en matière d'héritage, en vigueur dans de nombreux pays, tendent à renforcer l'autorité de l'homme sur la terre, allant jusqu'à priver de droits les veuves ayant de jeunes enfants.

Les droits des femmes à la propriété de la terre peuvent améliorer l'efficacité avec laquelle elles utilisent les ressources naturelles (arbres, terres, eaux, crédits, techniques, etc.), ou avoir un effet préjudiciable (FAO, 1992). En effet, si le régime d'occupation des terres est aléatoire, les femmes auront moins tendance à investir du temps et de l'énergie, à planter des arbres, construire des levées en suivant les courbes de niveaux et améliorer par d'autres mesures les rendements à long terme.

Dans le Programme de 1990 (FAO, 1986c), une rubrique du recensement est intitulée "Terres et eaux". Les rubriques proposées dans cette catégorie sont regroupées en deux subdivisions: rubriques concernant l'ensemble de l'exploitation et rubriques concernant chaque parcelle.

S'agissant des parcelles, le Programme propose déjà plusieurs rubriques. Dans de nombreux pays en développement, des informations détaillées sont réunies à propos de chaque parcelle lors du recensement. En incluant dans les questions le nom de l'utilisateur notamment on obtiendrait des informations utiles sur l'utilisation de la terre et sur l'accès des hommes et des femmes aux ressources.

Dans le Programme de 1990, il n'est fait mention de l'irrigation et du drainage qu'à propos de l'ensemble de l'exploitation. Le fait que l'exploitation (et l'exploitant) disposent de certains équipements ne signifie pas nécessairement qu'une femme appartenant au ménage et exploitant une parcelle y ait elle-même accès. Pour pouvoir savoir si les hommes et les femmes ont effectivement accès aux moyens d'irrigation et de drainage, il faudrait poser la question à propos de chaque parcelle:

En résumé les questions qui pourraient être posées pour chaque parcelle sont les suivantes:

Il est question du mode de faire-valoir dans le Programme de 1990 (FAO, 1986c) dans le cadre des rubriques concernant l'exploitation. Les catégories de modes de faire-valoir déjà recommandées par le Programme étaient les suivantes:

3.6.2 Utilisation d'engrais et de pesticides

Le Programme recommandait déjà des questions à propos des engrais et pesticides utilisés sur la terre, mais seulement dans le cadre de l'ensemble de l'exploitation.

Pour pouvoir confronter les données sur le sexe de l'utilisateur de la parcelle avec celles concernant l'utilisation de ces intrants, il faudrait envisager la même question pour chaque parcelle. Les rubriques suivantes doivent être ajoutées:

Pour chaque parcelle

Par engrais on entend toute substance qui est incorporée au sol pour accroître la quantité d'éléments nutritifs disponibles pour les végétaux. Les pesticides comprennent les insecticides, les fongicides, fumigants, herbicides, rodanticides et autres produits, qui sont pour la plupart des produits synthétiques.

3.6.3 Utilisation de machines et transport

Des rubriques concernant les machines et l'équipement figurent déjà dans le Programme de 1990 (FAO, 1986c) pour l'ensemble de l'exploitation. Afin de pouvoir obtenir ce type d'information s'agissant des différents utilisateurs, il convient de les inclure pour chaque parcelle. Toutefois, plutôt que de demander tous les détails indiqués dans le Programme pour l'ensemble de l'exploitation, il pourrait suffire de demander si l'utilisateur de la parcelle dispose de machines et de moyens de transport.

3.6.4 Accès au crédit

Manquant souvent de garanties (terres par exemple), les femmes n'ont généralement pas accès aux crédits. Elles doivent donc fréquemment compter sur leur époux ou sur d'autres parents ou encore avoir recours aux prêteurs d'argent qui pratiquent en général des taux d'intérêt élevés, ou sur des organisations non institutionnelles d'assistance mutuelle (tontines dans certains pays d'Afrique par exemple).

Les agricultrices ont besoin de crédits mais les institutions ont tendance à exclure les femmes, dont elles sous-évaluent la capacité de remboursement. La difficulté d'obtenir des crédits peut limiter l'utilisation d'intrants, et partant, être préjudiciable à la productivité.

Des informations sur l'accès au crédit peuvent être aisément obtenues grâce aux recensements de l'agriculture mais, bien que plusieurs pays prévoient déjà des questions sur ce point dans leurs questionnaires, parfois détaillés au point de spécifier les sources du crédit et l'usage qui en est fait, cette rubrique n'est pas prévue dans le Programme de 1990. Il convient de se demander si la question doit porter sur l'exploitation ou sur chaque membre du ménage. Dans le premier cas, la comparaison entre représentants des deux sexes se fera entre exploitantes et exploitants. Dans le second cas, on comparera les réponses des membres masculins et féminins du ménage.

Le choix qui sera fait dépendra sans doute du contexte local. Ainsi, en République dominicaine, les femmes ont accès aux crédits utilisés ensuite pour l'exploitation familiale par l'intermédiaire d'associations de femmes. Dans ce cas, il doit être utile de faire référence aux membres du ménage plutôt qu'aux exploitants.

Les rubriques proposées à ce sujet sont les suivantes:

3.6.5 Accès aux services de vulgarisation

Pour atteindre ses buts et objectifs, le Programme d'action de la CMRADR a désigné six domaines dont l'un est l'éducation, la formation et la vulgarisation. En particulier, les services de vulgarisation constituent un important instrument de développement agricole et d'atténuation de la pauvreté.

Les agricultrices ont besoin d'une attention particulière dans la mesure où elles ont plus difficilement accès que les hommes à l'information, aux techniques, à la terre, aux intrants et au crédit. De plus, étant responsables des tâches ménagères, elles manquent de temps et sont peu mobiles. La vulgarisation peut contribuer de façon déterminante à améliorer la situation de ces femmes et leur productivité sur le plan agricole mais les services de vulgarisation doivent s'adapter à leurs conditions particulières.

Etant donné le rôle des femmes dans la production agricole, on pourrait penser qu'elles sont nombreuses à participer aux programmes de vulgarisation. Or, les études montrent qu'elles tendent à être exclues de ces programmes (Saito et Weidemann, 1990). L'une des raisons de cette situation est que les femmes sont souvent laissées de côté par les agents de vulgarisation, qui ont tendance à les imaginer sans pouvoir de décision en matière agricole et moins capables que les hommes de comprendre la plupart des messages en raison de leur niveau d'éducation. En outre, dans certaines sociétés, des facteurs socio-culturels et religieux empêchent les agents de sexe masculin de communiquer avec les agricultrices. Le manque de temps dont elles disposent et le poids des tâches ménagères tendent aussi à écarter les femmes des services de vulgarisation. Enfin, dans certains pays, il est indispensable d'être propriétaire de la terre pour être sélectionné comme agriculteur de contact dans le cadre du système T & V7, qui exclut la plupart des femmes non propriétaires de terres.

7 Le système T & V, très répandu dans de nombreux pays, a été conçu par la Banque mondiale et se compose d'une démarche en deux temps: des contacts sont établis avec des agriculteurs sélectionnés, qui sont ensuite supposés jouer le rôle de diffuseurs.

Certains programmes de vulgarisation ne tiennent pas suffisamment compte des besoins spécifiques des agricultrices. Les services de vulgarisation s'intéressent souvent aux cultures dans lesquelles les agriculteurs de sexe masculin jouent un rôle prédominant, négligeant les cultures de subsistance et l'élevage des petits animaux, activités généralement du ressort des femmes.

Il est indispensable de savoir si les femmes sont atteintes par les services de vulgarisation pour réorienter les programmes dans leur direction et tenir compte de leurs préoccupations. Des informations obtenues à ce sujet peuvent être confrontées avec des informations sur l'accès à l'enseignement, à la terre, aux crédits et aux autres ressources productives.

Au niveau de l'exploitation, les questions porteront sur le sexe et l'âge des personnes contactées, leur lien avec l'exploitant et le nombre de fois où un contact a eu lieu au cours de la période de référence.

3.7 Elevage

Les catégories 7 et 8 du Programme de 1990 concernent les données en matière d'élevage au niveau de l'exploitation. Parmi les rubriques proposées devrait figurer le sexe du principal responsable ou de l'utilisateur. On pourrait donc ajouter les rubriques suivantes: sexe de l'utilisateur lien de l'utilisateur avec l'exploitant

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