Planification de la gestion forestière dans les UGF
Le processus de planification dans les unités de gestion forestière (UGF) commence par :
- l’évaluation des ressources forestières – y compris un inventaire forestier et souvent aussi une évaluation des impacts environnementaux et sociaux ;
- une analyse des conditions économiques et du marché – c’est-à-dire une analyse des opportunités commerciales pour les biens et services forestiers et d’autres facteurs économiques qui pourraient avoir une incidence sur la gestion forestière ;
- une évaluation des aspects sociaux, environnementaux, juridiques et autres – c’est-à-dire définir les exigences sociales, environnementales, juridiques et autres aux fins de la GDF, qui établissent le cadre des conditions nécessaires pour la mise en œuvre de la GDF dans des situations nationales et locales spécifiques. Cette évaluation pourrait inclure aussi la clarification du régime foncier et l’octroi de permis par le gouvernement en matière d’environnement. Le gestionnaire ou le propriétaire forestiers pourraient être obligés d’obtenir l’approbation du gouvernement pour les accords de responsabilité sociale.
L’amélioration continue grâce à l’accumulation des connaissances fait partie intégrante de la GDF, et les plans de gestion forestière doivent être examinés régulièrement et révisés conformément à l’évolution des conditions. Les résultats et les impacts sont évalués et les données découlant de ces évaluations intégrées dans la révision des objectifs, le cas échéant, et la mise à jour du plan de gestion forestière.
La participation des parties prenantes forestières aux phases initiale et successives de la planification est cruciale pour le succès de la mise en œuvre de la GDF. Elle contribuera au règlement des conflits qui pourraient éclater au fil du temps et à assurer que le savoir, les intérêts et les valeurs locales sont incorporés au plan de gestion forestière (voir Approches et outils participatifs dans le secteur forestier).
Genre et planification de la gestion forestière
Genre et planification de la gestion forestière
Il est essentiel que les femmes interviennent à chaque étape de la planification de la gestion forestière. Le fait de laisser à l’écart la moitié de la population représente, en effet, un gaspillage de compétences et de connaissances importantes; pourtant, il arrive très souvent que les femmes soient sous-représentées au sein des groupes pertinents d’utilisateurs forestiers et qu’elles soient exclues des pouvoirs décisionnels, avec des résultats négatifs.
Écouter les opinions des femmes et des hommes est indispensable pour tenir compte des questions de genre en formulant les mesures de gestion des forêts: les femmes et les hommes ont souvent des interactions différentes avec les forêts et peuvent être touchés de manière différente par les modifications importantes de l’écosystème, des ressources et des politiques.
De plus, la participation des femmes dans les institutions de gestion forestière, comme les groupes d’utilisateurs des forêts (GUF), améliore les revenus et favorise la durabilité des ressources. Malgré cela, elles sont encore extrêmement sous-représentées dans ces groupes et ont souvent un pouvoir décisionnel limité.
Négliger les différences de sexe lors de la planification peut avoir de graves conséquences pour les femmes et pour le milieu forestier. En consultant uniquement les hommes, par exemple, le choix des espèces ou des techniques de gestion des forêts introduites pourrait ne pas convenir à tous les utilisateurs, notamment aux femmes (étant donné que les femmes et les hommes ont tendance à utiliser des ressources différentes).
Par ailleurs, si, suite à cela, les femmes doivent parcourir de plus grandes distances pour trouver du bois de feu ou d’autres produits indispensables, leur charge de travail augmente et elles risque d’être davantage exposées aux agressions et éventuellement aux violences sexuelles. Cela vaut également pour les filles, qui risquent de ne pas pouvoir aller à l’école ou de ne pas pouvoir étudier si elles sont obligées de parcourir des distances plus grandes pour aller chercher des produits forestiers. Elles auront, en conséquence, moins envie d’entreprendre des études si la charge de travail couvre l’essentiel de leur journée.
Il est donc indispensable pour la planification d’une gestion forestière responsable et durable d’assurer la participation des femmes et des autres groupes marginalisés. Malgré cela, les femmes rencontrent encore de nombreux obstacles comme les barrières culturelles, la discrimination en matière de régimes et de droits fonciers, ou l’absence de mesures incitatives dédiées.
Évaluation préliminaire:
Lors de l’évaluation préliminaire, il est très important de mener une analyse de la question des genres. Une évaluation sensible à l'équité entre les sexes peut inclure: des outils pour comprendre quand les différences en matière de régimes et de droits fonciers sont imposées par des normes rigides liées au genre; une collecte de données ventilées par sexe sur l’utilisation des arbres, la plantation et la récolte; une analyse des obstacles liés au genre pour l’accès aux marchés; une analyse intersectorielle intégrant le genre avec l’âge, la race, et le milieu.
Définition des objectifs de gestion :
En définissant les objectifs de gestion, les parties prenantes devraient tenir compte des spécificités des sexes pour pouvoir répondre de manière équitable aux besoins des femmes et des hommes.
Évaluations préliminaires
Évaluations préliminaires
Des évaluations préliminaires devraient être entreprises dès le début du processus de planification de la gestion forestière. Ces évaluations aident la prise de décisions et contribuent à assurer la viabilité économique, sociale et environnementale du plan de gestion. Elles pourraient inclure les points suivants :
- clarification du régime foncier ;
- analyse du statut juridique de la terre ;
- collecte de données sur les milieux biophysique (climat, topographie et hydrologie, par exemple) et socioéconomique (démographie, conditions de vie et gouvernement local, par exemple) ;
- analyse des opportunités commerciales pour les biens et services forestiers ;
- analyse d’autres facteurs économiques influençant la gestion forestière ;
- enquêtes sociales (en utilisant des méthodes d’évaluation rurale) ;
- analyse de scénarios de gestion fondés sur des données d’inventaire conformément aux lois, politiques, stratégies et plans nationaux et sous-nationaux ;
- analyses coûts-bénéfices des options.
Inventaire forestier
Inventaire forestier
Un inventaire forestier recueille des informations sur les ressources forestières ligneuses et non ligneuses, la classification du site, les aspects sociaux et la biodiversité. Des inventaires complets au niveau de l’UGF peuvent être préparés périodiquement, et les données devraient être intégrées dans les systèmes d’information géographique dans la mesure du possible. Entre autres, les données des inventaires de l’UGF sont utilisées normalement pour estimer la possibilité de récolte annuelle de bois et de produits non ligneux (voir ci-dessous et Inventaire forestier).
Établir les objectifs de gestion
Établir les objectifs de gestion
Des objectifs de gestion bien définis sont essentiels à la GDF. Des informations adéquates et la compréhension des conditions sociales, culturelles, environnementales et économiques sont nécessaires pour l’établissement de ces objectifs (figure 1).
Une déclaration de politique générale par le propriétaire ou le gestionnaire forestiers exposant la théorie, les objectifs et les réalisations escomptées des opérations forestières devrait être formulée. Les objectifs de gestion devraient être établis sur la base de cette déclaration.
Les objectifs de la gestion forestière sont établis avec des buts clairs et mesurables qui indiquent les résultats spécifiques à obtenir au cours de la période couverte par le plan de gestion forestière. La tâche du gestionnaire forestier est d’équilibrer les objectifs de gestion : une gestion dont l’objet principal est un produit ou service unique pourrait limiter la capacité de la forêt à réaliser d’autres objectifs et cela devrait être reconnu explicitement dans le processus de planification de la gestion forestière.
La gestion forestière à objectifs multiples peut accroître potentiellement la valeur monétaire que les communautés, gestionnaires et propriétaires – qui sont parfois les mêmes individus – obtiennent des ressources forestières. Ainsi, la production et la récolte des produits forestiers non ligneux (PFNL) servent de façon croissante à compenser les coûts de l’exploitation à impact limité (dans les concessions forestières de Malaisie et du Cameroun, par exemple).
Figure 1. Le processus d’établissement des objectifs de gestion pour une unité de gestion forestière
Zonage et stratification d’une UGF
Zonage et stratification d’une UGF
Une UGF pourrait avoir des objectifs de gestion secondaires qui ne sont pas entièrement compatibles avec les objectifs primaires. Dans la mesure du possible, les zones forestières qui doivent être gérées pour différents objectifs, ou ont clairement des fonctions ou valeurs différentes (conservation, production, foresterie communautaire, écotourisme et bois sacrés, par exemple), devraient être assignées à des aires ou parcelles distinctes.
La procédure de zonage comprend l’identification, la cartographie et la gestion de zones de divers types exclues de l’exploitation (ou « mises en réserve ») ; elles peuvent comprendre des zones à vocation culturelle, des cours d’eau, des masses d’eau et des côtes, des zones d’éboulement, des aires de conservation et de protection, des forêts communautaires, des zones destinées à la conservation de la diversité biologique et de la faune sauvage, des zones affectées à la recherche scientifique et des zones tampons. Les systèmes d’information géographique et d’autres techniques peuvent contribuer à la cartographie et au zonage forestier, à modéliser des options de gestion de substitution et à servir d’aides à la décision.
Plans de gestion forestière
Plans de gestion forestière
Un plan de gestion forestière définit les activités forestières envisagées (inventaire, calcul des rendements, récolte, sylviculture, protection et surveillance, par exemple), spécifiant les objectifs, actions et mesures de contrôle dans une zone forestière. Un plan de gestion forestière est aussi un outil important pour assurer, d’une part, la communication des objectifs et stratégies forestière aux communautés vivant au sein ou à proximité de la forêt et à d’autres parties prenantes et, d’autre part, leur participation à la mise en œuvre de la GDF.
Un plan de gestion forestière s’applique normalement à une UGF qui est une zone de la forêt soumise à un système unique ou commun de gestion, ainsi que le décrit le plan de gestion. Une UGF peut être une grande concession forestière contiguë, un groupe de petites opérations forestières, avec parfois plus d’un propriétaire, ou l’un des divers autres arrangements possibles.
Un plan de gestion détaillé pour une UGF devrait comprendre trois plans de durée et d’importance stratégique différentes 
- le plan de gestion stratégique ou à long terme, couvrant 20-40 ans (ou davantage) et révisable tous les 5—10 ans ;
- le plan de gestion tactique, une version à moyen terme du plan de gestion stratégique (couvrant des périodes successives de 5-10 ans, par exemple) établissant les zones où auront lieu les opérations de récolte durant la période ;
- le plan opérationnel par le biais duquel le plan de gestion tactique est programmé, mis en œuvre et surveillé annuellement. Le plan opérationnel indique les mesures pratiques à prendre l’année suivante, comme les types de traitements sylvicoles et de récolte et leur calendrier par parcelle ou peuplement, l’ouverture de cloisonnements d’exploitation, la construction de pare-feux et d’autres activités. Le plan opérationnel est utilisé aussi à des fins de surveillance.
La planification de la gestion de chacun de ces trois niveaux est essentielle.
Plans simples de gestion forestière
On distingue plusieurs types de plans de gestion forestière en fonction des objectifs globaux de la gestion forestière et du type de gestionnaire forestier (entreprises forestières commerciales ou petits utilisateurs ou propriétaires forestiers privés locaux). Bien que ces plans ne s’excluent pas mutuellement, leur complexité peut varier suivant les situations locales et le type de gestion forestière à réaliser.
On peut simplifier considérablement tous les types de plans de gestion forestière, y compris ceux requis par la loi. Les grandes lignes directrices pour la préparation de plans de gestion forestière plus simples peuvent s’appliquer à une gamme de situations forestières et socioéconomiques.
Contenu du plan
Un plan de gestion forestière devrait comprendre des informations de base qui sont directement liées à la gestion forestière. Il devrait décrire les objectifs à long terme de la gestion, présenter des prescriptions et mesures spécifiques relatives à la protection, l’inventaire, la détermination du rendement, la récolte, la sylviculture, la surveillance et d’autres opérations forestières pour la réalisation de ces objectifs.
Le plan de gestion forestière devrait spécifier :
- la superficie maximale exploitable pour la récolte des produits forestiers, ou la quantité maximale de produits forestiers pouvant être récoltés, ou les deux, pour une période donnée ;
- l’infrastructure nécessaire suivant le plan de récolte, les conditions locales et d’autres facteurs pertinents ;
- les mesures de protection forestière à appliquer ;
- les opérations de mise en valeur de la forêt, y compris la sylviculture, à réaliser ;
- d’autres opérations nécessaires pour réaliser les objectifs de gestion, comme un inventaire forestier, la cartographie de la zone, des enquêtes techniques et sociales, la surveillance, des projections et la consultation avec le public.
Révision du plan
Le plan de gestion forestière devrait être examiné et, si besoin est, révisé périodiquement à la lumière de l’expérience acquise, des nouvelles informations et de l’évolution des situations. Chaque révision est une occasion pour les gestionnaires forestiers de remettre en question les objectifs et méthodes du plan de gestion. Dans les concessions forestières, par exemple, un examen devrait être conduit chaque 5-10 ans au cours de la période d’application du plan.
Réglementation et contrôle du rendement
Réglementation et contrôle du rendement
La réglementation du rendement est un concept central pour la GDF, en particulier dans les forêts tropicales naturelles (qui sont gérées normalement suivant des systèmes d’exploitation polycycliques). La réglementation du rendement consiste à calculer et contrôler les quantités de produits forestiers (volume commercial de bois sur pied et stocks de PFNL, par exemple) extraits d’une forêt chaque année pour s’assurer que le taux d’extraction n’excède pas l’accroissement.
Un rendement durable implique que les produits enlevés de la forêt sont remplacés par la croissance avec ou sans interventions de gestion. Dans les forêts à vocation de production où l’objectif principal est la production de bois, le calcul et la réalisation de rendements durables en bois exigent des informations sur les niveaux de densité et l’accroissement (c’est-à-dire des données d’inventaire et sur la croissance et le rendement). Des données d’inventaire et calculs similaires sont nécessaires pour évaluer les rendements durables en PFNL. De telles informations sont utilisées pour établir des tableaux de rendement et des modèles de croissance, qui peuvent ensuite être incorporés au plan de gestion forestière.
Estimation des niveaux durables de récolte de produit. Une mesure utilisée communément est le volume de bois qui peut être coupé en un an dans une zone donnée, autrement dit la possibilité de coupe annuelle (PCA). La PCA se calcule sur la base des objectifs de gestion, du matériel sur pied et des taux de croissance des espèces forestières désirables (c’est-à-dire valables commercialement), et de la superficie forestière qui fait l’objet de la gestion. La PCA est une mesure pratique du rendement durable dans une période donnée et peut servir à surveiller la production de la forêt et établir des limites pour son utilisation. Pour certains objectifs la PCA s’applique globalement à toutes les espèces commerciales, mais dans la planification de la gestion forestière elle est normalement ventilée par espèce ou groupe d’espèces et par parcelle ou peuplement à exploiter.
Si les informations sur les taux de croissance des espèces arborescentes désirables (lorsque la gestion forestière est introduite pour la première fois, par exemple), sont absentes ou limitées, la PCA devrait se baser sur les procédures empiriques classiques, qui sont les plus pertinentes pour l’UGF en question (voir, par exemple, les pages 158-159 dans FAO, 1998) jusqu’à ce que l’on dispose de suffisamment d’informations propres au lieu.
Prévisions du rendement
Les prévisions de la croissance et du rendement exigent des données de qualité élevée sur la croissance des arbres, qui s’obtiennent le mieux par le traçage soigné et la mesure périodique de placettes d’échantillonnages permanentes. Les prévisions de la croissance et du rendement et d’autres informations écologiques devraient être réunies. La recherche concertée peut être un moyen rentable d’obtenir des informations. FAO (1998) décrit les étapes de base de la création de modèles de prévision du rendement.
Contrôle du rendement
La division de l’UGF en massifs ou parcelles et la définition des zones de coupe et des volumes annuels sont fondamentales pour le contrôle pratique de la récolte. Une fois que la PCA a été atteinte, le massif ou la parcelle devraient être clos et mis hors exploitation jusqu’au nouveau cycle de coupe (ainsi que spécifié dans le plan de gestion forestière). Il faudrait éviter la réouverture prématurée des massifs exploités.
Les enregistrements des niveaux de production des produits ligneux et non ligneux devraient être conservés pour chaque parcelle ou massif exploités, et comparés avec les rendements prévus pour assurer que la PCA n’a pas été excédée. Ces informations sont aussi indispensables pour prédire la croissance et le rendement futurs et pour une révision précise des niveaux de rendement, et elles permettent d’assurer la continuité de la gestion au fil du temps.