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Méthodologie essais de provenance dans les tropiques

J. BURLEY

Le Comité FAO de la mise en valeur des forêts sous les tropiques, à sa deuxième session (Rome, 21-24 octobre 1969), a demandé que ce texte soit largement diffusé.

AU COURS DE LA DEUXIÈME CONSULTATION MONDIALE sur la sélection des arbres forestiers, organisée récemment par la FAO et l'IUFRO (Washington D.C., août 1969), la sélection des arbres tropicaux a fait l'objet d'une attention particulière. La plupart des pays tropicaux, a-t-on souligné, doivent absolument produire eux-mêmes les graines d'espèces et provenances appropriées. A cette fin, chacun d'eux doit tout d'abord procéder à des essais de toutes sortes d'espèces potentielles et de leurs provenance. Certains pays tropicaux ont déjà entrepris de vastes programmes d'essais et de boisement, mais beaucoup d'autres n'ont encore rien fait. La présente communication constitue un rappel des considérations fondamentales à retenir pour effectuer des essais de provenance rationnels, en supposant que l'on possède les informations nécessaires pour indiquer les espèces appropriées.

Par provenance on entend soit l'origine géographique de graines ou de matériel végétal, soit les végétaux eux-mêmes. En règle générale, les essences dont l'aire de répartition est étendue présentent, selon la provenance, d'importantes variations anatomiques, morphologiques et physiologiques.

Les études génécologiques des essences permettent de recueillir des informations sur la structure et l'ampleur des variations phénotypiques et génotypiques. La variabilité peut tenir à la distribution de facteurs de milieu continus ou discontinus (type de sol, altitude, exposition ou latitude), ainsi qu'aux facteurs associés (précipitations, température et photopériode). La culture, dans des conditions relativement uniformes - chambres à milieu contrôlé, serres, pépinières ou essais en champ, par exemple - de jeunes plants obtenus à partir de graines de diverses sources, permet d'évaluer la contribution relative des facteurs génétiques et de milieu aux variations (et des caractères taxonomiques classiques et de traits physiologiques étudiés plus récemment comme la réaction photopériodique ou thermopériodique).

Bien qu'elles soient indispensables à un programme rationnel de boisement au moyen d'une espèce non expérimentée, ces études gynécologiques nécessitent beaucoup de temps, de main-d'œuvre, de qualifications et d'équipement; il faudrait donc laisser aux organisations de recherche compétentes le soin de les effectuer. En revanche, les essais de provenance doivent être effectués par chacun des pays qui désire expérimenter une espèce déterminée. Ils ont pour principal objet pratique d'identifier les provenances dont les graines permettront d'obtenir des forêts bien adaptées et productives. Il faut en outre rassembler des informations sur l'ampleur des variations entre les arbres d'une même provenance.

L'idéal serait que chaque pays désireux de faire des essais d'une nouvelle espèce recueille lui-même les graines. Or, de nombreuses espèces sont originaires de zones difficilement accessibles, pour des raisons politiques ou géographiques; aussi serait-il bon de créer un organisme international centralisé de rassemblement des graines. Cela vaut particulièrement pour les espèces présentant une grande importance comme bois exotique: Gmelina arborea, Tectona grandis, Pinus caribaea, P. khasya, P. merkussi et un certain nombre d'espèces d'Eucalyptus. Divers organismes s'occupent déjà sur le plan international du rassemblement des graines et d'essais en champ d'espèces tropicales: Forest Research Institute, Canberra (Australie), Commonwealth Forestry Institute, Oxford (Angleterre), Centre technique forestier tropical, Nogent-sur-Marne (France), Centre de sélection du teck Danemark-Thaïlande, Lampang. La FAO coordonne ces efforts, et dans certains cas leur offre un appui financier par l'intermédiaire de son Groupe d'experts en ressources génétiques forestières.

Si ces organismes réussissent à rassembler des quantités suffisantes de graines représentatives d'une série de provenances représentatives, il est souhaitable qu'ils entreprennent en coopération des essais comparatifs internationaux en utilisant dans plusieurs pays les mêmes provenances. L'analyse conjuguée des résultats permettra d'obtenir plus d'informations que chaque pays participant n'aurait pu en réunir pour son compte, mais il est préférable que l'organisme se charge lui-même de l'analyse et de l'interprétation. On peut citer à titre d'exemple les essais organisés en 1967-1968 par le Commonwealth Forestry Institute d'Oxford (11 provenances de P. merkusii ont été distribuées à 20 pays, et 14 provenances de Cedrela spp. à 14 pays) et par le Comité FAO de coordination de la recherche forestière méditerranéenne (Eucalyptus camaldulensis et E. dalrympleana). Il est indispensable de diffuser le plus rapidement possible, en les faisant paraître dans des revues ou bulletins spécialisés, les résultats des essais isolés ou communs.

Pour coordonner et normaliser la recherche sur les provenances et pour faciliter la diffusion des résultats, l'IUFRO a créé en 1962 un groupe de travail de recherches et de contrôle de provenances. Ce groupe a présenté au congrès de l'IUFRO en 1967, à Munich, son deuxième projet de rapport sur la normalisation des méthodes de recherches et des essais sur les provenances ¹ où se trouvent des recommandations générales concernant les questions suivantes: échantillonnage et obtention des graines; dispositif, organisation et analyse; techniques et évaluations à appliquer dans les pépinières et plantations; publication des résultats. Ce rapport a une portée générale mais les problèmes particuliers des tropiques doivent être examinés plus longuement.

(1 IUFRO. 1967. Standardization of methods for provenance research and testing: Actes du 14e Congrès IUFRO, Munich, Sect. 22: 672-718.)

Le rapport de l'IUFRO a été largement diffusé; étant admis comme hypothèse que la FAO, l'IUFRO et plusieurs autres institutions, comme celles dont il a été fait état, organiseront la collecte et la distribution de graines certifiées et le rassemblement international des résultats, on s'attachera ici à traiter surtout des justifications et des méthodes des essais de provenance qui pourraient être effectués par tel ou tel pays tropical.

Il n'est ni possible ni souhaitable d'exposer spécifiquement les méthodes. Les compétences, les ressources, les emplacements, les espèces intéressantes et les objectifs varient en effet énormément d'un pays tropical à l'autre. On se limitera donc à esquisser ici quelques notions fondamentales dont devrait tenir compte tout pays tropical qui entreprend des recherches sur les provenances.

Objectifs

Ainsi qu'il a déjà été souligné, le principal objectif pratique des essais de provenance est de déterminer de façon aussi rapide et économique que possible les provenances qui permettent d'obtenir des forêts bien adaptées et productives. La productivité elle-même n'implique pas toujours une croissance rapide; la survie, la résistance à des facteurs de milieu défavorables ou à des parasites, la qualité du bois, la production de graines pourraient être des critères importants. Le deuxième grand objectif de ces essais est de créer des peuplements locaux pour la production de graines. L'excédent de graines peut être semé dans des parcelles séparées selon la provenance, ou semé en vrac, mais dans les deux cas les meilleurs individus doivent être retenus en vue d'une sélection à venir.

Pour organiser un essai de provenance, on doit connaître exactement les objectifs et, pour tous les caractères intéressants, le degré d'écart acceptable entre les provenances; il est indispensable, pour organiser les expériences et en interpréter en termes pratiques l'importance statistique et analytique, de connaître ce degré d'écart et la précision des mesures. Si l'écart critique entre deux valeurs moyennes de provenance est d'un mètre, il n'est guère utile de mesurer au millimètre près la hauteur de chaque arbre (ou d'organiser des répétitions assez nombreuses pour calculer la hauteur moyenne estimative par provenance). En règle générale, les écarts significatifs vont de cinq à dix pour cent de la moyenne.

Pour définir les objectifs d'un essai, il faut indiquer clairement le nombre de variables et la fréquence des mensurations. Nous allons parler de quelques traits utiles dans l'immédiat, mais il faut bien souligner ici que ceux qui effectuent des essais de provenance ont souvent tendance à faire des mesures trop nombreuses portant sur un trop grand nombre de variables.

On est tenté, surtout s'il s'agit d'une espèce qui n'a jamais fait l'objet d'essais ou dont la représentation par provenances serait difficile à répéter, de mesurer le plus grand nombre possible de caractères avec autant d'intensité et de fréquence qu'on peut. Or, les difficultés de traitement, d'analyse et d'interprétation des données s'accroissent rapidement lorsque le nombre de variables augmente, et la rentabilité est extrêmement faible. Il arrive fréquemment que des données soient rassemblées mais non analysées. L'utilisation de plus en plus répandue d'ordinateurs très rapides facilite l'application de techniques d'analyse à variables multiples; celles-ci peuvent faire apparaître, entre les provenances, des rapports qui ne ressortent pas clairement des analyses à variable unique, mais on entreprend souvent des analyses sans plan bien défini, «pour voir».

Même si des institutions spécialisées sont disposées à offrir les services de leur personnel et leur équipement pour effectuer des analyses complexes, le pays tropical qui procède à l'essai peut se trouver obligé, faute de ressources, de limiter les données rassemblées. Il doit alors fixer l'ordre de priorité entre les caractères qui présentent une valeur pratique immédiate et ceux qui ne sont utiles que comme moyen de discrimination descriptible ou biosystématique. Les caractères taxonomiques pourraient fort bien être évalués, une fois au moins, sur la base d'échantillons appropriés, par des services de recherche spécialisés, en particulier par ceux qui entreprennent des essais internationaux sur les provenances.

Types d'essais sur les provenances

Il peut être nécessaire, pour déterminer la ou les meilleures provenances d'une espèce pour un emplacement, un pays ou une région donnés, d'effectuer des essais de plusieurs types ou échelonnés. Le choix est fonction des informations disponibles, de l'ampleur des variations naturelles à l'intérieur de l'espèce et de la variation entre les emplacements potentiels de plantation. Il faut tenir compte aussi des objectifs des séries d'essais, des ressources disponibles et de l'importance que présente l'espèce dans le cadre du programme national. Il est parfois possible de regrouper certains stades en un seul, de combiner les essais de provenance de plusieurs espèces analogues ou de mener de front plusieurs stades. En outre, deux ou plusieurs provenances de certaines espèces peuvent être comparées au cours d'essais antérieurs par espèces.

S'il s'agit d'une espèce répandue sur une aire considérable, il est peu probable qu'une seule expérience indique la meilleure provenance, même pour un type d'emplacement unique. On peut donc, pour chaque type d'emplacement important, procéder dans l'ordre suivant:

1. Echantillonnage couvrant l'ensemble de l'aire;
2. Echantillonnage restreint;
3. Essais pratiques de contrôle.

ECHANTILLONNAGE COUVRANT L'ENSEMBLE DE L'AIRE

Il s'agit de déterminer les grandes régions dans les limites desquelles on peut constater que les provenances ont une adaptation et une productivité raisonnables. Ainsi qu'il est souligné dans le rapport de l'IUFRO, les essais peuvent faire découvrir des zones générales d'où il faut éviter d'importer des quantités considérables de graines ou d'où il faut au contraire autoriser ces importations en attendant les résultats de la deuxième série d'essais. Le principal objectif est cependant de déterminer les procédures 3. appliquer pendant cette deuxième étape. Il serait utile de mettre au point, pour chaque espèce, - une méthode systématique (de préférence chifrée) de classification homoclimale. On manque souvent d'une définition précise des emplacements.

Les études d'échantillons portant sur l'ensemble de l'aire doivent rester brèves et simples. Si l'on dispose d'assez de graines et de ressources, on peut planter ailleurs de grands blocs de chaque provenance aux fins d'estimation du rendement à pleine maturité et de sélection d'arbres individuels, d'hybridation de provenances, de production de graines et d'entretien de la réserve génétique. Mais il s'agit principalement à ce stade d'éliminer le plus tôt possible les provenances évidemment dépourvues d'intérêt, de façon à réduire suffisamment le nombre de provenances pour procéder à des essais plus critiques. Selon l'étendue de l'aire de l'espèce ou les disponibilités en graines, le nombre de provenances expérimentées peut être plus ou moins important. Des essais sont actuellement en cours dans six stations du Malawi sur 25 et 36 provenances de Pinus elliottii et P. taeda. De même, environ 150 provenances sont représentées sur certaines plantations du dernier essai de Pseudotsuga menziesii organisé par l'IUFRO, et plus de mille collections de graines de Picea abies ont été rassemblées.

Cette étape des essais devrait représenter le quart ou la moitié de la révolution commerciale; comme la concurrence entre arbres est relativement faible jusqu'à ce stade, on peut utiliser de petites parcelles. On utilise généralement des parcelles carrées de 16 à 25 arbres, mais l'emploi de parcelles de 1 à 9 arbres a été recommandé particulièrement dans le cas d'expériences portant sur un grand nombre de provenances (plus de 50) et lorsque l'on dispose des moyens nécessaires pour analyser les résultats assez complexes. Ces parcelles extrêmement petites sont moins intéressantes dans les régions tropicales, où les arbres grandissent si vite qu'ils se font rapidement concurrence. Elles ont en outre l'inconvénient d'imposer de nombreuses répétitions, ce qui entraîne des difficultés pour le dispositif, l'arrangement et l'enregistrement.

Il n'est pas toujours nécessaire que les parcelles aient la forme d'un carré et contiennent un nombre carré d'arbres. Si elles en contiennent un petit nombre, elles peuvent être linéaires; cependant, comme les essais de provenance ont pour objet d'évaluer le comportement d'une provenance sans concurrence d'autres provenances, il vaut mieux utiliser des parcelles carrées ou rectangulaires. La forme des parcelles peut être influencée par les pratiques d'aménagement prévues, mais elle est en grande partie fonction de la variabilité de la station. Si les gradients linéaires des facteurs d'emplacement sont assez importants, on disposera des parcelles rectangulaires dont le côté le plus long sera parallèle aux courbes de niveau de la variation de la station.

On utilise rarement des parcelles ne portant qu'un seul arbre, car la mortalité normale en fait disparaître un nombre excessif et aggrave la concurrence à l'intérieur d'une même provenance. Des provenances qui seraient admissibles en plantation pure peuvent se trouver éliminées par suite de la lenteur de leur croissance initiale. Tout de suite après la survie, c'est la hauteur qui est généralement la principale variable de production que l'on évalue dans les études portant sur l'ensemble de l'aire, car elle est moins sensible que le diamètre à la concurrence entre arbres.

ECHANTILLONNAGE RESTREINT

Cette phase des essais de provenance a pour objet d'identifier des régions moins vastes et, en fin de compte, chacune des provenances qui a la plus forte productivité. Le nombre de provenances étudiées peut varier de cinq à dix; il peut être utile de représenter chacune d'elles, selon les ressources de l'organisme qui récolte les graines, par des graines d'arbres supérieurs et d'arbres choisis au hasard. Indépendamment des considérations relatives aux moyens financiers, à l'espace et aux ressources végétales, deux facteurs contraires influent sur la superficie des parcelles à ce stade: en premier lieu, la variation sera moins forte entre les parcelles de provenances sélectionnées, l'interaction entre parcelles sera plus faible et la superficie des parcelles peut donc être diminuée (les parcelles n'ont besoin d'être vastes que si l'on prévoit de fortes interactions entre parcelles). En revanche, ces parcelles doivent être conservées pendant une révolution complète et peuvent donner des renseignements sur le rendement (hauteur et diamètre) avant les essais pratiques de contrôle. Il est donc souhaitable d'établir des parcelles assez grandes: on emploie généralement des parcelles de 49 à 169 arbres. Peut-être sera-t-il bon de prévoir un ou deux rangs d'entourage, surtout pour éviter que les données concernant le rendement ne soient faussées par les effets de lisière.

ESSAIS PRATIQUES DE CONTRÔLE

Il s'agit maintenant de procéder, dans des conditions normales de plantation, à des essais d'un petit nombre de provenances intéressantes. Alors que, pendant les deux premières phases, il faut veiller avec un soin particulier au dispositif expérimental, le problème a moins d'importance au cours de la phase d'essais pratiques de contrôle. Il est indispensable de répéter des parcelles témoins à l'intérieur des parcelles d'essai et entre ces parcelles. Les parcelles d'essai doivent être assez grandes pour permettre les mesures normales (0,5 à 1 hectare) ou faciliter les études de coût et de sylviculture (2 à 5 hectares). Comme pour les étapes antérieures, ces essais doivent être répétés dans les principaux types d'emplacement de chaque pays. Si l'on peut lier le rendement à des traits plus simples comme la hauteur, on peut réduire la superficie des parcelles et la durée des essais pratiques de contrôle. Il convient de signaler ici qu'il faudrait mettre au point au plus tôt des méthodes d'essais pour toutes les phases des essais d'espèces, de provenance et de descendance. Peut-être les institutions spécialisées réussiront-elles à effectuer des recherches sur des plants en chambre à milieu contrôlé de façon à faciliter les prévisions de comportement dans les conditions de plantation tropicales.

Dispositif expérimental et organisation

Pour organiser les essais de provenance, les chercheurs doivent, si possible, demander l'avis d'un statisticien qualifié et expérimenté, en particulier si les conditions locales imposent certaines variations par rapport aux dispositifs habituels. Le dispositif expérimental a pour objet d'atténuer le plus possible l'hétérogénéité du milieu et d'augmenter la précision des comparaisons de traitements ou de provenances. On peut réduire les erreurs expérimentales en choisissant un emplacement uniforme, bien que l'on doive, en sélectionnant les emplacements des essais de provenance, éviter l'uniformité typique. Il est impossible d'éliminer toutes les causes d'erreurs expérimentales; et un bon dispositif expérimental facilite la distinction entre les erreurs expérimentales et les autres sources de variations.

Un dispositif aléatoire de parcelles pourrait être utile dans l'étape d'échantillonnage couvrant l'ensemble de l'aire, mais, pour toutes les étapes, le meilleur dispositif est le dispositif aléatoire en bloc complet, dans lequel chaque répétition contient une parcelle de chaque provenance. Sa simplicité est telle qu'il peut être planté et évalué par du personnel relativement peu qualifié; l'analyse préliminaire de la variance de la moyenne par parcelle peut s'effectuer facilement au moyen de calculatrices de bureau; sa souplesse fait qu'il peut être adapté aux conditions locales; enfin, sa solidité du point de vue statistique fait que la perte de certaines parcelles ou même de blocs entiers n'empêche pas d'utiliser les données restantes. Le nombre de répétitions dépend de la variabilité des emplacements, de la variabilité des provenances, de la précision des mesures et de la superficie des parcelles, ainsi d'ailleurs que des ressources disponibles. Si les fluctuations climatiques annuelles sont considérables, il peut être nécessaire de procéder aux répétitions pendant des années séparées. Chaque fois qu'on le pourra, on utilisera le dispositif aléatoire en bloc complet, à condition que le nombre de provenances ou la superficie des parcelles ne nécessite pas une superficie trop vaste pour les répétitions.

Lorsque les essais portent sur un grand nombre de provenances ou qu'on utilise de grandes parcelles, l'accroissement de l'hétérogénéité du milieu risque de réduire la précision; il serait bon alors d'avoir recours à un dispositif de bloc incomplet. Les traitements sont organisés par petits blocs, et les blocs sont disposés de façon que leurs milieux internes soient homogènes. Les types équilibrés sont préférables, car chaque traitement est pratiqué une fois par répétition avec tous les autres traitements, de sorte que l'ensemble de l'expérience peut au besoin être analysé comme un dispositif aléatoire en bloc complet. Cette méthode permet au personnel local de procéder rapidement à une analyse; elle peut même devenir la seule applicable si plusieurs parcelles ne donnent pas de résultats ou sont endommagées, ou encore si, pour des raisons d'économie, l'étude est limitée aux meilleures provenances; elle per met en outre d'estimer le supplément de précision obtenu par application du dispositif en bloc incomplet.

Le Commonwealth Forestry Institute (Oxford) procède actuellement à des essais sur les espèces ou les provenances tropicales en utilisant des dispositifs équilibrés en bloc incomplet qui comprennent des grilles rectangulaires pour 12, 20 et 30 traitements et des grilles triples pour 9, 16, 25 et 36 traitements. Ces dispositifs, plus efficaces que les dispositifs en bloc complet aléatoire, sont aussi plus difficiles à contrôler, planter, évaluer et enregistrer, et ne doivent être utilisés que s'ils sont absolument indispensables.

Quel que soit le dispositif choisi au stade de la plantation, il est souhaitable de le reprendre à la pépinière. Les plants destinés à la répétition en champ d'une phase donnée doivent provenir de la même répétition en pépinière. Ainsi, les effets de répétition en pépinière et en champ se confondent et la variance à l'intérieur d'une parcelle est réduite au minimum.

Lorsqu'une série d'essais de provenance intéresse plusieurs emplacements, il faut utiliser soit une pépinière centrale soit plusieurs pépinières séparées. La décision doit être prise sur la base de considérations locales de frais de main-d'œuvre et de transports, des dégâts qui risquent d'être causés aux plants par le transport, des risques de perte complète des arbres expérimentés s'ils proviennent d'une seule pépinière et des pratiques qui seront probablement utilisées plus tard. Comme pour tout ce qui a trait à l'aménagement des pépinières et des terrains, les techniques appliquées doivent être caractéristiques de celles qui sont couramment pratiquées ou doivent l'être à l'avenir sur chaque emplacement. Le rapport de l'IUFRO fait état de nombreuses questions controversées d'aménagement au stade de la pépinière et au stade de la forêt.

La série d'essais a généralement pour objet de déterminer la meilleure provenance pour chaque emplacement eu égard au milieu naturel et aux façons culturales envisagées. Dans une analyse combinée intéressant tous les emplacements, l'estimation des interactions entre les provenances et les emplacements exprimera les différences de comportement des provenances et indiquera la stabilité génétique du matériel faisant l'objet des essais. S'agissant d'essais internationaux, une réaction des provenances aux conditions locales des emplacements est plus probable encore; ils permettent en effet de cultiver du matériel analogue à différentes époques de l'année dans des conditions climatiques, édaphiques et d'aménagement extrêmement variables. Il serait de toute évidence impossible de cultiver les plants dans une seule pépinière même si les règlements de quarantaine permettaient de les expédier.

Aménagement et évaluation

Il n'est pas possible d'énoncer des règles générales pour l'aménagement et l'évaluation des essais de provenance, mais un plan détaillé doit être préparé pour chacun d'entre eux. Il est difficile de déterminer à l'avance si des opérations de sylviculture comme l'éclaircie et l'élagage s'effectueront à la même date pour l'ensemble de l'essai ou à des dates différentes selon les provenances. L'éclaircie peut être systématique, aléatoire ou sélective, selon les buts de l'essai. En règle générale, l'aménagement devrait être le même que celui qui est couramment appliqué au matériel d'essai ou considéré comme le meilleur pour lui.

Les types et la fréquence de l'évaluation varient selon les étapes des essais de provenance, mais ils doivent être bien précisés dans le plan. A la fin des opérations en pépinière, le comportement relatif des provenances peut faire l'objet d'une étude séparée qui peut fournir des renseignements biosystématiques ou permettre de formuler des prévisions pour le stade des opérations en plantation. Les caractères constatés en pépinière, en particulier les dimensions des végétaux, peuvent être utilisés comme co-variables dans les analyses de plantation. Il est utile aussi d'enregistrer en pépinière le taux de germination des graines, la survie des végétaux, l'uniformité, les caractéristiques des cotylédons et des feuilles.

Ainsi qu'il a déjà été souligné, les pays tropicaux ne disposant que de ressources limitées doivent donner la priorité aux caractéristiques productives, descriptives et taxonomiques. Les caractères productifs et descriptifs qui peuvent être étudiés utilement au cours des échantillonnages portant sur l'ensemble de l'aire et au cours des échantillonnages restreints sont les suivants: hauteur, diamètre, épaisseur de l'écorce, profondeur et largeur du houppier, nombre, inclinaison et longueur des branches, survie, uniformité; la verticalité de la tige doit être évaluée soit au moyen de mesures quantitatives permanentes, soit par classification catégorique. Ces caractères doivent être évalués à des intervalles de trois à cinq ans pendant toute la période d'essai; les évaluations sur les échantillons sont plus fréquentes (1 ou 2 fois par an) au cours des deux ou trois premières années.

On obtiendra les mesures de rendement les plus utiles lors des essais de comportement en évaluant la hauteur, le diamètre, la forme, la décroissance et l'épaisseur de l'écorce. Les comparaisons portant sur la qualité du bois doivent être effectuées de préférence à la fin de cette phase, mais des renseignements préliminaires peuvent être obtenus au cours de phases antérieures des tests. Il faut également étudier pendant toutes les phases la phénologie de la croissance et de la floraison et la productivité des graines; cette étude peut exiger plusieurs années d'observation intensive. La réaction aux facteurs biotiques et écologiques défavorables doit être étudiée pendant toutes les étapes; lorsque des dégâts biotiques sont observés, il faut identifier l'organisme qui en est la cause.

Il y a quatre raisons d'insister sur l'utilité de procéder rapidement à des mensurations:

1. Il est urgent d'évaluer les corrélations entre la période juvénile et la maturité, en particulier pour les pays qui créent de vastes plantations en utilisant des espèces incomplètement expérimentées.

2. Il peut être nécessaire de choisir les provenances avant de disposer d'informations sur le comportement des arbres matures ou les corrélations entre la période juvénile et la maturité. Dans ce cas, on peut s'assurer une certaine sécurité en procédant à des analyses avec variables multiples de plusieurs indicateurs de comportement juvénile (hauteur et diamètre à la plantation et au bout de 6, 12, 18, 24 mois, par exemple).

3. L'analyse de co-variance permet parfois d'expliquer en partie la variation des caractéristiques matures en termes de caractères juvéniles. Les dimensions en pépinière et après la plantation peuvent être intéressantes, mais il faut tenir compte du tassement qui peut se produire tout de suite après la plantation et provoquer une diminution apparente de la hauteur de l'arbre. Il vaut peut-être mieux procéder à l'évaluation six mois après la plantation, bien qu'une étude initiale soit indispensable tout de suite après la plantation. Les travaux de culture, en particulier le labour mécanique ou à la charrue à disques, peuvent provoquer une augmentation apparente de la hauteur des arbres, mais leur incidence relative diminue à mesure que les arbres grandissent.

4. Il sera bon de comparer la croissance totale des provenances pendant toute la durée des essais. Lorsqu'il s'agit d'une courbe de croissance sigmoïde, des changements importants d'inclinaison et de précision se produisent au début de la révolution; il est nécessaire d'augmenter l'intensité des sondages pour obtenir des comparaisons d'une précision uniforme entre les provenances sur toute la courbe de croissance.

EGON GLESINGER PREND SA RETRAITE

M. Egon Glesinger, qui était entré à la Division des forêts et des industries forestières dès sa création en 1946, a pris sa retraite de la FAO comme Sous-directeur général

Agé aujourd'hui de 62 ans, M. Glesinger est né dans la ville silésienne de Teschen, au cœur d'une région qui, autrichienne jusqu'en 1919, fut ensuite partagée entre la Tchécoslovaquie et la Pologne.

M. Glesinger avait fait ses études de droit et d'économie à Genève, à Prague et à la «London School of Economics», et de droit international à Vienne. A la suite de la publication de sa thèse de doctorat sur le bois, il fut invité par lé Secrétaire général de la Société des Nations à organiser une conférence sur le bois, d'où devait sortir le Comité international non gouvernemental du bois dont il devint le secrétaire général. Cet organisme fut ultérieurement absorbé par la FAO.

Auteur apprécié du livre Demain, l'âge du bois, M. Glesinger fut rapporteur du Comité technique des forêts et des produits forestiers primaires, créé en 1943 par la Commission provisoire des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture. Le rapport de ce comité aboutit à l'inclusion des forêts et des produits forestiers primaires dans le champ d'activité et l'Acte constitutif de la FAO, quand celle-ci prit naissance à Québec en 1945.

En sa qualité de Directeur de la Division du bois FAO/CEE à Genève, Egon Glesinger inaugura la série de publications régionales de la FAO Consommation, production et commerce du bois en Europe: évolution et perspectives, dont la première étude européenne sortit des presses en 1953. Son nom restera également associé au Projet de développement méditerranéen de la FAO, qui date de la même époque

M. Glesinger fut nommé directeur de la Division des forêts de la FAO en 1959, quand Marcel Leloup prit sa retraite Quatre ans plus tard, il était promu Sous-directeur général du Département des relations publiques et des questions juridiques de la FAO.


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