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L'enseignement forestier en Afrique tropicale

ANDRÉ LAFOND

ANDRÉ LAFOND est vice-doyen de la faculté de foresterie et de géodésie de l'université Laval, Québec, Canada. Cet article est une version abrégée d'un rapport FAO devant paraître prochainement.

Le continent africain peut être divisé en deux grandes régions selon les langues utilisées: le français et l'anglais. La région anglophone est divisée en deux zones principales: la zone orientale à foresterie extensive; la zone occidentale, qui possède également de grandes étendues de forêt dense. Quant aux pays de langue française, ils peuvent être divisés en quatre zones principales: les pays situés autour de la Méditerranée, les pays de la savane et du Sahara, le bassin équatorial de l'ouest et les pays bordés par l'océan Indien.

On a pu calculer qu'environ 1700 forestiers professionnels seraient requis par l'ensemble des pays d'Afrique en 1985 et que 10000 techniciens devraient être formés si un programme d'ensemble de développement forestier doit être établi pour atteindre les objectifs provisoires du PIM en matière de développement des forêts et des industries forestières.

Les pays de langue française, où la plus grande partie de la forêt dense est concentrée, sont ceux où les besoins, tant pour l'enseignement forestier professionnel que celui des techniciens, sont les plus urgents.

Dans les pays de langue anglaise, en plus des trois facultés forestières qui existent déjà au Nigeria et au Libéria, une autre devrait être établie en Ouganda et une quatrième dans un pays de la partie australe de la région. Dans la zone de langue française, il existe un besoin urgent d'au moins deux facultés forestières: une première au Cameroun ou en Côte-d'Ivoire et une seconde au Congo (Kinshasa). Une autre faculté pourrait être établie dans les pays du Maghreb.

Pour ce qui est des écoles techniques, le développement des écoles existantes et un meilleur équipement sont indispensables si l'on veut atteindre les objectifs de 1985. Dans les pays de langue anglaise, on doit envisager l'établissement à très brève échéance d'une école technique en Ethiopie, tandis que dans les pays de langue française, une école devrait être créée aussitôt que possible en République démocratique du Congo et une autre au Congo (Brazzaville). L'école traitant des problèmes de la savane, située à Bouaké, en Côte-d'Ivoire devrait être agrandie pour satisfaire aux besoins des pays de savane. Les autres écoles techniques devraient être améliorées pour faire face aux besoins de l'avenir.

On peut estimer qu'environ 45 millions de dollars devraient être investis dans les 15 prochaines années pour la construction d'écoles et pour la formation du nombre requis d'étudiants.

Cette somme pourrait provenir principalement de l'aide du Programme de développement des Nations Unies ou encore des agences d'assistance bilatérale. Entre-temps, le développement d'une politique forestière doit être poursuivi au moyen de l'aide externe tant pour l'administration, les inventaires forestiers et la préparation des plans d'aménagement et les développements des techniques de plantations, que pour l'établissement de grandes pépinières dans les milieux tropicaux.

On doit aussi continuer à investir dans le développement des infrastructures et l'ouverture de voies d'accès aux grandes formations forestières qui ne sont pas actuellement économiquement accessibles.

II est souhaitable que, dans un avenir rapproché, soit établie en Afrique une industrie de la cellulose et de pâte et papier qui pourrait répondre aux besoins toujours croissants.

Introduction

Ce travail est un essai de synthèse des données accumulées sur le problème de l'enseignement forestier en Afrique. II a pour but d'évaluer les besoins de développement de l'enseignement forestier tant au niveau universitaire qu'au niveau technique en considérant les exigences actuelles et futures de la foresterie et des industries forestières sur ce continent.

RÉFÉRENCES

De nombreuses études ont été faites récemment par la FAO sur les problèmes de l'enseignement forestier en Afrique. M. J.Q. Williamson, Directeur de l'éducation à la Forestry Commission (Grande-Bretagne), a visité 14 pays de langue anglaise en Afrique (Ethiopie, Ghana, Kenya, Libéria, Libye, Malawi, Nigeria, Ouganda, République arabe unie, Rhodésie du Nord, Rhodésie du Sud, Sierra Leone, Soudan et Tanzanie), et M. J.J.E. Dosne a visité six pays de langue française (Cameroun, Congo [Brazzaville], République démocratique du Congo, Côte-d'Ivoire, Gabon et Guinée), et a préparé des rapports sur les problèmes de la formation forestière dans ces pays. Durant les années 196566, M. H.A. Hilmi, de la FAO, a visité différents pays d'Afrique (Ethiopie, Ghana, Kenya, Libéria, Libye, Malawi, Nigeria, Sierra Leone, Somalie et Zambie). Durant les mois d'octobre et de novembre 1968, M. André Lafond a visité cinq pays de langue française d'Afrique occidentale (Cameroun, République centrafricaine, Rép. dém. du Congo, Côte-d'Ivoire et Gabon). En 1965 et 1966, M. E. Saari a établi des rapports sur les besoins en matière d'enseignement et de formation forestiers en Algérie, au Maroc et en Tunisie. D'autre part, plusieurs études sur les problèmes forestiers de l'Afrique ont aussi été publiées par la FAO, et la plus importante d'entre elles est Consommation, production et commerce du bois en Afrique: évolutions et perspectives (Rome, 1967).

RESTRICTIONS

Pour les besoins de cette étude, tous les pays d'Afrique ont été étudiés à l'exception de l'Afrique du Sud, de l'Angola, du Mozambique et de la Rhodésie. D'autre part, il y a des limitations sérieuses quant à la documentation accessible sur les ressources forestières, les besoins en personnel et les développements futurs de l'enseignement forestier.

Cependant, on a essayé d'estimer, par suite d'enquêter auprès des différentes administrations, les besoins des futurs plans de développement de l'enseignement forestier pour l'Afrique, dans la mesure où ces renseignements étaient disponibles à la fin de 1968. Ail se peut que ces informations soient incomplètes sur quelques projets spéciaux, tels par exemple l'expansion possible d'une école forestière en Afrique du Nord ou la construction d'une école technique au Cameroun.

DÉFINITION DES RÉGIONS

Les différents pays d'Afrique peuvent être groupés selon les points de vue et les buts que l'on poursuit. Tout récemment, M. Gutzwiller a suggéré une division de l'Afrique sur la base de grandes formations écologiques en considérant la productivité potentielle de ces pays du point de vue forestier ou du reboisement 1.

1Commission des forêts pour l'Afrique, deuxième session, Lomé, Togo, 20-25 janvier 1969.

Ces zones sont les suivantes:

1. La zone maghrébine: Algérie, Maroc, Tunisie.

2. La zone de savane et de steppe: Cameroun, République centrafricaine, Côte-d'Ivoire, Dahomey, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée portugaise, Haute-Volta Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Tchad, Togo.

3. Côte de l'Afrique occidentale: Côte-d'Ivoire, Ghana, Guinée, Libéria, Nigeria, Sierra Leone.

4. Bassin équatorial africain: Angola, Cameroun, République centrafricaine, Congo (Brazzaville), Rép. dém. du Congo, Gabon, Guinée équatoriale.

5. Plateau de l'est africain: Burundi, Ethiopie, Kenya, Ouganda, Rwanda, Tanzanie, Territoire des Afars et des Issas.

6. Plateau de l'Afrique méridionale: Angola, Botswana, Rép. dém. du Congo, Lesotho, Malawi, Mozambique, Rhodésie, Swaziland, Zambie.

7. Région de Madagascar: Madagascar, Maurice, Réunion, îles Seychelles.

La distribution de la forêt dense ou de la savane arborée varie considérablement selon ces différentes régions et près de 80 pour cent de toute la forêt dense est incluse dans le groupe 4, c'est-à-dire le bassin de l'Afrique équatoriale (148 millions d'hectares de forêt dense sur 193 millions pour l'ensemble de l'Afrique). On doit se souvenir que cette grande superficie de forêt est la moins populeuse surtout si l'on fait la comparaison avec la zone des savanes où le gros de la population africaine s'est établi.

Du point de vue du développement de l'enseignement forestier, une autre division de l'Afrique peut être considérée puisqu'il y a des paramètres autres que les paramètres écologiques: principalement la différence entre les langues les plus en usage, à savoir le français et l'anglais et la distribution de ces langues selon les différentes régions d'Afrique. De ce point de vue, l'Afrique pourrait être divisée en six grandes régions: d'une part, les pays où l'anglais est la langue prédominante, au moins comme langue véhiculaire, et, d'autre part, ceux où le français est la langue prédominante. Les pays de langue anglaise pourraient se diviser en deux groupes: est africain (Botswana, Ethiopie, Kenya, Libye, Malawi, Ouganda, République arabe unie, Soudan, Tanzanie et Zambie); ouest africain (Gambie, Ghana, Libéria, Nigeria, Sierra Leone).

Les pays de langue française pourraient être groupés en quatre régions principales: pays de forêt dense de l'ouest africain (Cameroun, Côte-d'Ivoire, Congo [Brazzaville], République démocratique du Congo, Gabon, Guinée); pays sahariens et de savane (Burundi, République centrafricaine, Dahomey, Haute-Volta, Mali Mauritanie, Niger, Rwanda, Sénégal, Tchad et Togo), pays du Maghreb ou de l'Afrique du Nord (Algérie, Maroc et Tunisie); pays en bordure de l'océan Indien (île de la Réunion, Madagascar, Somalie et Seychelles).

Ressources forestières

D'après l'étude de la FAO Consommation, production et commerce du bois en Afrique: évolutions et perspectives, on estime que les forêts couvrent en Afrique quelque 683 millions d'hectares, soit 23 pour cent du total des terres. Les plus grandes superficies de forêt se trouvent en Afrique occidentale (407 millions d'hectares) avec cependant des zones importantes en Afrique orientale (251 millions d'hectares). Une comparaison du pourcentage de la forêt dense et de la forêt méditerranéenne par rapport à la superficie totale en forêt et à la superficie totale des pays, peut donner une bonne indication des besoins en éducation forestière (tableau 1).

D'après les données du tableau 1, il ressort clairement que le développement de l'enseignement forestier dans différents pays suit de près la distribution des forêts dans la région. A titre d'exemple, tous les pays de l'Afrique occidentale, qu'ils soient de langue française ou anglaise, sont ceux où la plus importante partie des terres est couverte par la forêt avec 30 pour cent dans les pays de langue anglaise et 52 pour cent dans les pays de langue française. Ainsi, dans les pays de langue française, où se trouve la plus importante surface de forêt dense, il n'y a pas une seule faculté forestière, mais on y trouve par contre deux écoles forestières de langue anglaise.

Etudiants du collège africain pour l'aménagement de la faune sauvage de Mweka (Tanzanie) pendant un exercice pratique dans le parc national de Tsavo, Kenya.

TABLEAU 1. - SUPERFICIE TOTALE EN FORÊT ET SUPERFICIE TOTALE DE LA FORÊT DENSE PAR RAPPORT A LA SUPERFICIE TOTALE DES RÉGIONS

 

Superficie de l'ensemble des régions

Superficie en forêt

Superficie totale

Forêts dense

Superficie totale

Million d'hectares

Pourcentage

Million d'hectares

Pourcentage

Pays anglophones






Région orientale

969,2

136,6

14,1

7,8

0,8

Région occidentale

135,7

53,1

39,1

17,6

13,0

Pays francophones






Afrique occidentale

399,8

206,0

52,0

150,2

38,0

Pays de savane

600,8

73,7

12,3

2,4

1,9

Maghreb

299,8

8,6

2,9

1,6

0,6

Pays en bordure de l'océan

123,4

19,2

15,5

9,8

7,9

VOLUME DES BOIS

Le volume global des forêts d'Afrique n'est pas connu, bien que des inventaires aient été faits dans les régions où se trouvent les forêts les plus importantes. L'ensemble de l'inventaire des forêts d'Afrique reste à faire, particulièrement en Afrique occidentale. On peut s'attendre que, même si l'on emploie les techniques modernes de l'inventaire forestier, plusieurs années s'écouleront avant que l'on ait des résultats complets par suite du coût élevé de pareils inventaires et de la carence en personnel formé pour exécuter ces travaux. On sait que des inventaires intensifs révèlent, d'une façon générale, un volume de bois beaucoup plus considérable qu'une estimation approximative.

ACCROISSEMENT ET DÉVELOPPEMENT POTENTIEL

Bien que de nombreuses parcelles échantillons permanentes aient été établies dans certains pays d'Afrique, des données précises sur l'accroissement de la forêt tropicale ne sont pas disponibles actuellement et il est bien difficile de déterminer quelle pourrait être la production potentielle de ces étendues forestières.

PRODUCTION DE BOIS ET UTILISATIONS

On peut dire qu'avec l'accroissement de la population en Afrique, la superficie forestière aura une tendance à décroître de façon marquée. Par exemple, on a calculé qu'en Afrique occidentale les superficies aujourd'hui couvertes par la forêt ne représentent que 60 pour cent de la forêt originale. Ceci est également vrai dans la forêt méditerranéenne qui se développe en Afrique du Nord. Au tableau 2 on trouvera un résumé des quantités de bois enlevées dans les principales régions d'Afrique, compilé d'après la publication Consommation, production et commerce du bois en Afrique: évolutions et perspectives.

On doit noter que ces données, concernant l'extraction des bois en Afrique, valent pour la période 1959-61 et que depuis cette époque l'exploitation des bois a augmenté considérablement dans la plupart des pays forestiers d'Afrique, particulièrement ceux de la partie occidentale comme la Côte-d'Ivoire, le Cameroun et le Gabon, de sorte que ces valeurs doivent être considérées comme un minimum. D'autre part, pour se faire une idée de l'influence que peut avoir la population sur la destruction des superficies forestières, on a calculé qu'en Côte-d'Ivoire chaque fermier défriche quelque quatre hectares de forêt au cours de sa vie. Ainsi, il détruit un volume de bois beaucoup plus considérable que celui qu'il aurait employé durant la même période de temps.

TABLEAU 2.- QUANTITÉS DE BOIS ENLEVÉES EN AFRIQUE

Régions

Billes

Rondins

Bois de chauffage

Milliers de mètres cubes

Afrique orientale

1600

4800

90000

Afrique occidentale

8000

5000

80000

Afrique du Nord

100

350

4350

LES PEUPLEMENTS ARTIFICIELS

Pour compenser jusqu'à un certain point l'utilisation du bois en Afrique, les peuplements artificiels semblent la solution qui peut s'avérer déterminante en pays de savane où les quelques peuplements forestiers que l'on rencontre ne rendent qu'une faible quantité de bois par unité de surface. II semble que les plus grandes superficies de plantations se rencontrent dans les pays d'Afrique orientale en incluant Madagascar. Ces pays ont des plantations considérables avec 165000 hectares au total en 1961. On trouve au Kenya 93000 hectares et au Rwanda-Burundi 67500 hectares de plantations de diverses espèces forestières. En Afrique occidentale, les plantations ne sont pas aussi importantes, principalement parce que la plus grande partie de ces terres est couverte par de la forêt dense. La superficie totale des plantations en Afrique occidentale est de quelque 182000 hectares avec les plus grandes surfaces en République démocratique du Congo. Les plantations se développent de façon considérable en Côte-d'Ivoire, au Gabon, au Ghana et au Nigeria. L'effet de ces peuplements artificiels ne s'est pas encore fait ressentir en Afrique occidentale, par contre en Afrique orientale, principalement au Kenya et à Madagascar, les plantations commencent à rendre une p[-quantité de plus en plus importante de bois ayant une valeur industrielle. On devra se souvenir qu'en Afrique orientale, les plantations de conifères couvrent de grandes superficies. En Afrique occidentale, par contre, il n'y a que bien peu de plantations de conifères et la plupart ne sont faites qu'à titre expérimental. La plupart des superficies plantées l'ont été avec l'okoumé, le liba, les cassia et les eucalyptus.

USAGES FUTURS

On peut s'attendre que dans les années à venir, l'exploitation forestière s'accroîtra considérablement et il existe déjà de nombreux plans dans plusieurs pays africains qui prévoient le développement et l'établissement d'industries de pâtes et papiers. L'exploitation de la forêt du bassin équatorial, principalement au Cameroun et dans les deuxième et troisième sections du Gabon, aussi bien qu'en République centrafricaine, est en cours de développement. On étudie actuellement des plans de développement qui ouvriraient la cuvette équatoriale de la République démocratique du Congo couverte d'une forêt très dense et très riche.

Dans les pays de forêt tropicale dense, on doit considérer qu'une des tâches les plus importantes de l'avenir sera d'utiliser une plus grande partie de cette forêt et de trouver des usages et des applications pour un plus grand nombre d'espèces. On peut s'attendre aussi à ce que les bois africains rencontrent une compétition de plus en plus serrée sur les marchés internationaux des bois provenant d'Asie et d'Amérique du Sud.

Le marché nord-américain pourrait s'ouvrir à une plus grande consommation des bois africains de haute qualité si ceux-ci étaient mieux connus. D'autre part, on pourrait employer davantage les bois indigènes dans les constructions locales où parfois les matériaux sont importés de pays lointains, alors que des bois d'excellente qualité restent inutilisés. Les possibilités d'établissement d'une industrie de panneaux agglomérés se servant des espèces tropicales, aussi bien que d'industries de pâte et papier, ne paraissent pas cependant devoir se développer rapidement dans un proche avenir. Cependant, le matériau est là; mais il semble que l'industrie mondiale des pâtes et papiers souffre actuellement d'une capacité de production que ne peut absorber le marché. De plus, de nombreux problèmes technologiques doivent être résolus avant que l'on puisse envisager l'établissement d'usines de pâtes et papiers modernes qui utiliseront efficacement les espèces de l'Afrique tropicale. Ce serait cependant la solution d'avenir pour un emploi plus complet des ressources forestières de la forêt tropicale.

La restauration des terres épuisées et des bassins versants appauvris est certainement une des tâches majeures en Afrique tropicale, car la destruction répétée de la végétation par le feu conduit à une réduction considérable de la fertilité du sol.

Dans les pays de savane, de grandes plantations d'espèces adaptées à ce milieu devront être faites à pour répondre à la demande de bois de chauffage, puisque c'est là que la population est la plus dense. L'aménagement des bassins versants revêt aussi une très grande importance dans les régions semi-arides où le reboisement et le contrôle des eaux sont un facteur essentiel pour la population et l'agriculture.

LA RÉFORME AGRAIRE ET LA RECOLONISATION

Un des problèmes les plus importants de la foresterie en Afrique découle de la tenure et du mode de propriété de la terre: étant donné que la tenure coutumière y est le contrôle de la terre au niveau de la tribu, une politique d'aménagement forestier, qui est fondamentalement basée sur la stabilité de la tenure aussi bien que sur le contrôle d'opérations forestières s'étendant sur une longue période de temps, peut être très difficile à établir. L'établissement de réserves forestières est très important tant pour le maintien et l'aménagement de la faune sauvage que pour le contrôle de l'agriculture nomade qui a provoqué la destruction de vastes superficies forestières.

On rencontre un problème similaire dans les pays de savane où le brûlage incontrôlé de la savane, après chaque saison de pluies, conduit à la destruction de la régénération forestière aussi bien que dans la dégradation des sols. Dans plusieurs pays d'Afrique, l'aménagement des pâturages est lié à la conservation des sols et à celle de la forêt. Toute politique à long terme, qui prévoit un usage rationnel de la terre, supposera la formation de spécialistes locaux aussi bien que de techniciens qui acquerront une compréhension approfondie des problèmes de leur pays et qui pourront éventuellement trouver des moyens pour hâter l'application des solutions. De plus, il y a une tendance dans les pays d'Afrique, comme ailleurs, pour la population agricole, à se concentrer autour des grandes villes dans une proportion qui va sans cesse en s'accroissant, et l'on trouve des superficies de plus en plus considérables désertées par la population rurale qui espère trouver autour des villes des conditions de vie meilleures. Peut-être un des exemples les plus frappants de cette situation est-il le développement prodigieux de la population à Kinshasa durant les dix dernières années, où la population est passée d'environ 300000 à près de 2000000 d'habitants en 1968.

Parcs, aménagement de la faune, loisirs

L'importance de l'aménagement de parcs, de réserves de gibier et du tourisme en Afrique, va s'accroître considérablement au fur et à mesure que les divers pays acquerront une plus grande stabilité politique et qu'ils attireront ainsi des investissements intéressés au développement du tourisme en Afrique. Déjà, des résultats extrêmement intéressants ont été obtenus dans divers pays, particulièrement en Afrique orientale et ceci n'est que le début d'une tendance très importante pour ces pays. Cependant, l'attrait que peut avoir l'Afrique pour les touristes réside surtout dans la conservation de ses ressources naturelles, l'organisation de réserves forestières et l'aménagement de sa faune. De plus, un aménagement rationnel du gibier peut, en certains cas, pourvoir jusqu'à un certain point à un régime plus riche en protéines.

Un système de formation forestière pour l'Afrique

En conclusion, la formation convenable du personnel forestier à tous les niveaux est une des conditions essentielles pour le développement de toutes les ressources naturelles des pays d'Afrique.

Tous les niveaux de la formation forestière doivent être intégrés dans un système d'ensemble qui tiendra compte des besoins essentiels pour le meilleur développement et la meilleure utilisation possibles des milieux forestiers. L'éducation du public, dans son ensemble, devra aussi être intégrée au système. En plusieurs endroits, où les peuples de ces pays vivent traditionnellement en forêt et ont à l'égard du milieu forestier des relations qui peuvent être profondément ancrées dans la tradition religieuse, il peut être inopportun d'essayer de développer une politique forestière qui serait en contradiction avec ces traditions. La meilleure des politiques forestières n'aurait pas beaucoup de signification, même si l'on dispose d'un excellent groupe de techniciens, si les gens ne comprennent pas son importance et n'acceptent pas jusqu'à un certain point de coopérer pour sa mise en pratique. Le développement d'un système de formation forestière doit être considéré tant au niveau professionnel qu'à celui des techniciens, des gardes forestiers, des contremaîtres et de la main-d'oeuvre spécialisée.

L'ENSEIGNEMENT FORESTIER AU NIVEAU DES CADRES

La formation au niveau des cadres doit être une formation universitaire dans tous les aspects des sciences forestières, c'est-à-dire non seulement la sylviculture, mais aussi les problèmes de gestion, d'exploitation et de transformation des matériaux forestiers. L'étudiant ayant reçu cette formation recevra un diplôme de l'université.

Les facultés forestières doivent, autant que possible, s'intégrer aux universités pour tirer avantage de tous les autres enseignements. La foresterie moderne n'inclut pas seulement les sciences physiques et biologiques, mais aussi les sciences humaines, les sciences sociales et économiques aussi bien que celles de l'ingénieur. On doit se souvenir que le développement de grandes superficies forestières présuppose l'emploi de techniques de l'ingénieur et aussi une appréciation précise de l'efficacité et des meilleures méthodes de gestion. Ces méthodes doivent tenir compte des problèmes sociaux des populations vivant autour ou dans la forêt et susceptibles d'être affectées par l'application de grands plans d'aménagement ou de l'exploitation intensive des peuplements forestiers.

L'enseignement des deuxième et troisième cycles doit être organisé avec la coopération de tous les autres enseignements, mais rester autant que possible indépendant de l'agriculture. La foresterie moderne est suffisamment développée et a assez de problèmes, particulièrement dans les pays tropicaux, pour demander tout le temps disponible d'un étudiant pendant une période de quatre ans aux fins de lui donner une formation adéquate.

Une faculté forestière pourrait se développer selon trois orientations principales. La première considérerait les aspects du milieu forestier tels la classification des terres, la fertilisation des sols, tous les problèmes biologiques et écologiques de la forêt. La seconde, d'autre part, serait dirigée vers les techniques de la sylviculture, de l'aménagement, de la dendrométrie, des statistiques, de la législation forestière aussi bien que de l'exploitation, tandis que la troisième section serait davantage intéressée aux problèmes de la transformation des bois, de l'organisation du travail, du développement, de la planification industrielle, des sciages, des panneaux ou des industries de pâte et papier. Cette section serait également intéressée à la chimie du bois ou à la physique.

Un programme de quatre ans serait requis avant qu'un diplôme, équivalent au baccalauréat en foresterie ou au premier diplôme universitaire, soit décerné. II se peut que dans bien des cas une année préparatoire soit requise pour donner une formation scientifique générale avant que ne puisse véritablement commencer l'enseignement spécialisé en foresterie. Cependant, l'étudiant du premier cycle doit recevoir une formation générale plutôt que des options trop spécialisées. L'expérience nous montre que dans de nombreux pays ayant une grande superficie de forêt vierge, on s'attend à ce que l'ingénieur forestier ait des possibilités très variées et qu'il puisse répondre à tous les besoins lorsqu'il se trouve dans des endroits isolés sans grand espoir de recevoir de l'aide ou des conseils de l'extérieur.

ENSEIGNEMENT DES DEUXIÈME ET TROISIÈME CYCLES

L'enseignement des deuxième et troisième cycles est relié au développement de la recherche et il est bien difficile de concevoir une faculté forestière moderne sans qu'il ne s'y poursuive de recherche par les professeurs. Cependant, ceci pourrait être considéré comme une seconde étape dans le développement de l'éducation forestière.

Il peut être profitable pour les étudiants qu'un grand nombre d'entre eux poursuivent, en totalité ou en partie, leurs études supérieures à l'extérieur de leur pays d'origine, dans des écoles spécialisées d'Europe et d'Amérique. On devra toutefois prendre des précautions nécessaires pour maintenir de bonnes relations entre les professeurs des écoles forestières africaines et les écoles des pays à l'extérieur de ce continent dans la mesure où les étudiants des deuxième et troisième cycles sont concernés pour s'assurer que ceux-ci consacreront leur temps à des problèmes qui pourront éventuellement être utiles à leur pays, et qu'à leur retour ils pourront utiliser au mieux leurs nouvelles connaissances ou leurs spécialités comme une contribution au développement de la foresterie de leur pays. Trop souvent, les étudiants poursuivant des études supérieures, lorsque laissés à eux-mêmes, choisissent des sujets dans des spécialités trop étroites qui peuvent nécessiter par exemple un équipement qu'ils ne pourront obtenir à leur retour dans leur pays, d'où la difficulté pour eux de s'adapter.

Une des entreprises les plus difficiles de toute la formation forestière est certainement l'éducation du public puisqu'une des conséquences de l'application des pratiques forestières sera de s'écarter des façons traditionnelles. Des spécialistes connaissant à fond les traditions des différents peuples devraient être formés pour permettre une meilleure compréhension des politiques forestières, que ce soit la préservation de la savane contre le feu, la tenue des plantations ou une politique générale d'aménagement.

La foresterie est une partie des sciences naturelles qui vient, au point de vue des connaissances, bien après l'agriculture, et ceci est vrai non seulement dans les pays en voie de développement, mais même dans les pays les plus développés où une foresterie intensive a été pratiquée pendant de nombreuses années. Quand il s'agit des forêts tropicales, ce problème est d'autant plus aigu que l'on connaît très peu de choses sur la nature des forêts de l'Afrique. Bien que des recherches très valables aient été effectuées dans le passé et soient poursuivies actuellement, elles sont loin de couvrir un grand nombre de problèmes forestiers pratiques. Ainsi, de nouvelles méthodes devraient être développées pour des inventaires forestiers qui seraient adaptés aux conditions spéciales des forêts d'Afrique, considérant le grand nombre d'espèces que l'on rencontre aussi bien que les complexités de structure de ces peuplements forestiers. La dendrométrie des espèces africaines devrait être étudiée de beaucoup plus près et on devrait procéder à une évaluation du taux d'accroissement de la forêt tropicale, de son dynamisme en relation avec le sol. Quand il s'agit de plantations, il semble bien que la relation entre la fertilité du sol et les arbres soit des plus importantes. II est parfois possible d'observer des carences minérales marquées dans quelques-unes des plantations d'Afrique, et il y a des problèmes très sérieux en certains endroits résultant de la compétition des lianes et autres espèces avec les arbres, de sorte que l'emploi de sylvicides pourrait être étudié de façon méthodique. On doit s'attendre cependant qu'au moment de la mise en route des programmes de recherche, l'aide extérieure serait requise pour organiser cette recherche et même pour trouver quelques-unes des solutions les plus élémentaires jusqu'à ce qu'un nombre suffisant de forestiers qualifiés, ayant atteint le niveau du doctorat, soient prêts à prendre la relève. II n'y a aucun doute que l'organisation actuelle de l'enseignement forestier en Afrique ne laisse pas prévoir de grandes possibilités de développement de la recherche dans un avenir immédiat.

L'ÉDUCATION FORESTIÈRE AIT NIVEAU DU TECHNICIEN

On ne peut pas rêver d'appliquer de façon intensive les techniques de la foresterie sans un nombre suffisant de techniciens bien préparés. On a estimé qu'il faut de quatre à dix techniciens pour un forestier selon les endroits ou les problèmes. Dans la plupart des pays, il semble que les écoles techniques forestières soient en nombre suffisant en Afrique, mais la plupart d'entre elles devraient être développées de telle façon qu'elles puissent attirer un plus grand nombre de jeunes gens vers ces carrières. Dans l'avenir, on devra attacher une importance considérable à la préparation de techniciens pour les exploitations forestières et pour la transformation du bois, qu'il s'agisse du sciage, de l'organisation des ventes, de classification ou de mesurage. Lors du développement de futures industries de pâte et papier, des techniciens spécialisés seraient nécessaires pour leur bon fonctionnement.

Au niveau des gardes, des contremaîtres ou des travailleurs spécialisés, plus d'efforts doivent être faits dans l'avenir immédiat, bien qu'il existe actuellement des projets d'apprentissage des métiers forestiers exécutés un peu partout en Afrique et dont les résultats sont extrêmement intéressants. On devra se rappeler que dans bien des circonstances, les cours à ce niveau pourraient être donnés dans les langues locales et que ceci pourrait aider considérablement à attirer un nombre plus grand de jeunes travailleurs voulant acquérir un métier. C'est là une condition essentielle pour le développement économique de la plupart des pays d'Afrique.

L'éducation populaire dépend des écoles forestières, et des forestiers spécialisés dans ces domaines devraient être préparés en grand nombre. C'est certainement une condition essentielle pour l'acceptation par les populations de ces pays de programmes forestiers importants. Les principaux problèmes que cette éducation populaire forestière devrait traiter sont la protection de la savane, le reboisement et une meilleure compréhension des pratiques élémentaires de la foresterie, aussi bien que de leur influence sur la prospérité de la nation. Les moyens audio-visuels, la télévision, la radio ou les films devraient être largement employés, et ceci supposerait la réalisation de films et la préparation d'une documentation de base qui illustreraient l'application de la pratique forestière et ses buts dans les conditions africaines.

LES BESOINS DE LA FORESTERIE ET DES INDUSTRIES FORESTIÈRES

II n'existe pas de très grandes industries du bois en Afrique. Dans la plupart des pays forestiers, la plus grande partie des bois abattus n'est pas transformée dans le pays et est exportée à l'état brut, principalement en Europe. Ainsi la production totale d'un pays forestier comme le Gabon est moins considérable que la quantité de bois récolté par une seule grande industrie dans l'est du Canada. II n'existe pas encore une seule industrie importante de pâte, de cellulose ou de papier dans toute l'Afrique. La plus grande partie du personnel est recrutée à l'extérieur des différents pays concernés. Ceci est également vrai pour ce qui est du personnel des services administratifs, du développement de l'aménagement ou des politiques de reboisement aussi bien que de l'inventaire des ressources.

Cette situation est beaucoup plus sérieuse dans les pays de langue française que dans les pays de langue anglaise. Le nombre de forestiers et de techniciens requis dans ces deux groupes de pays est considérable si l'on veut voir l'application d'une pratique forestière rationnelle en Afrique au cours des quinze ou vingt prochaines années. Le tableau 3 a été tiré d'une note du secrétariat de la FAO présentée à la deuxième session de la Commission des forêts pour l'Afrique qui s'est tenue à Lomé, Togo, du 20 au 25 janvier 1969. II montre le nombre de techniciens actuellement présents dans les groupes de pays d'Afrique anglophone et francophone, et le nombre qui serait requis en 1985.

II y apparaît que dans les 15 pays de langue française considérés, il n'y a actuellement que 40 professionnels forestiers comparés aux 260 dans neuf pays de langue anglaise, et seulement 360 techniciens dans les pays de langue française comparés aux 1 500 dans les pays de langue anglaise. Les besoins en personnel pour ces deux groupes de pays peuvent être estimés au total à 1 830 professionnels pour 1985, soit 870 ingénieurs forestiers dans les pays de langue française et 4 620 techniciens tandis que les pays de langue anglaise auraient besoin de 960 ingénieurs forestiers et de 4 950 techniciens. Ainsi, les pays de langue française devraient accroître leur nombre d'ingénieurs forestiers de 22 fois et celui des techniciens près de 13 fois. Dans bien des cas, un nombre important de postes professionnels sont actuellement occupés par des étrangers dans les pays de langue française et la plupart des services forestiers dans ces mêmes pays ont un effectif inférieur à celui qu'ils devraient avoir.

INSTITUTIONS EXISTANTES ET BESOINS FUTURS

Niveau professionnel

Dans les pays de langue anglaise, il existe déjà un département de foresterie à l'université d'Ibadan, au Nigeria, lequel dispense un enseignement professionnel complet en langue anglaise. Cette école forestière joue un rôle très important pour la préparation d'ingénieurs forestiers dans les pays anglophones de l'Afrique de l'Ouest aussi bien que dans la partie anglaise du Cameroun. On trouve aussi des possibilités de formation au College of Agriculture and Forestry de l'université de Monrovia, au Libéria. Dans la partie de l'Afrique orientale anglophone, en Ouganda, il y a actuellement une école de niveau professionnel qui en est à ses débuts. D'autre part, il n'existe pas d'école forestière de niveau universitaire dans les pays de langue française. Cependant, l'école de Cap Esterias prend de l'extension pour dispenser une formation du niveau ingénieur des travaux, ce qui veut dire un cours de trois ans après l'obtention du baccalauréat ou de l'équivalent du baccalauréat français.

TABLEAU 3. - ESTIMATION DU PERSONNEL FORESTIER

 

Actuellement 1

Requis en 1985

Professionnels

Techniciens

Professionnels

Techniciens

Langue anglaise (9 pays)

260

1500

960

4950

Langue française (15 pays)

40

360

870

4620

Niveau technique

Au niveau technique, il y a actuellement 12 écoles techniques forestières dans l'ensemble de l'Afrique. Dans les pays de langue anglaise, on trouve huit écoles techniques: deux d'entre elles situées en Afrique occidentale (Ghana et Nigeria); les autres se trouvent en Afrique orientale (Kenya, Malawi, Tanzanie, Ouganda, Soudan et Zambie). Dans les pays de langue française, il y a au total quatre écoles techniques (Gabon, Cameroun et Côte-d'Ivoire). On trouve aussi une école à Madagascar qui est rattachée à une école d'agriculture. Il existe une école d'aménagement de la faune en Tanzanie et une école similaire a été créée à Garoua, dans le nord du Cameroun, pour les pays de langue française. Le nombre total des diplômés dans ces écoles est de 210 techniciens par an, dont 170 pour les écoles de langue anglaise et 40 pour celles de langue française. On peut estimer que les possibilités de promotion des techniciens forestiers, pour l'ensemble de ces écoles, seraient d'environ 300 diplômés par an.

Besoins futurs

Dans l'avenir immédiat il y a un urgent besoin pour l'établissement de deux écoles forestières de niveau universitaire dans les pays de langue française, dont une au Cameroun ou en Côte-d'Ivoire et l'autre en République démocratique du Congo. Dans les contrées de langue anglaise, on travaille actuellement au développement des écoles déjà existantes, au Nigeria et en Ouganda.

Quant au niveau technique, on peut souhaiter que, dans les pays de langue anglaise, pour atteindre le total de 4950 techniciens en 1985, le nombre de diplômés annuellement devrait passer à 385, ce qui suppose une augmentation de 215 diplômés par an. Dans les pays de langue française des efforts beaucoup plus considérables seraient requis pour fournir la main-d'œuvre technique nécessaire si les objectifs du plan de développement de 1985 doivent être atteints. Le nombre de diplômés devrait être augmenté de 40 à 410, c'est-à-dire de 370 par an. Dans les pays de langue anglaise, une nouvelle école technique qui pourrait former quelque 40 techniciens par an devrait être établie pas plus tard que 1971 en Ethiopie. Quant aux autres écoles techniques, des additions d'ordre mineur à leur structure actuelle suffiraient pour qu'elles atteignent les objectifs fixés.

D'autre part, dans les pays de langue française, la formation de techniciens doit être accrue de façon marquée et on peut suggérer qu'au Cameroun le nombre des techniciens diplômés soit porté à 35 par an (on doit noter cependant qu'il y a actuellement un programme de construction d'une école forestière technique grâce à une aide bilatérale). Le nombre de diplômés devrait atteindre quelque 83 techniciens par an au Gabon, 95 en Côte-d'Ivoire et 33 à Madagascar. Une école technique serait nécessaire au Congo (Brazzaville) avec 21 techniciens par an et au moins deux écoles devraient être établies en République démocratique du Congo avec une promotion de 40 techniciens. Quant à la République centrafricaine, les besoins seraient d'environ 18 techniciens par an. Le Tchad, le Dahomey et le Togo requerraient ensemble quelque 19 techniciens par an. Les pays de savane comme la Haute-Volta, le Mali, la Mauritanie le Niger et le Sénégal auraient besoin de 27 techniciens par an. On propose que l'école de Bouaké, qui se spécialise dans les problèmes de la savane en Côte-d'Ivoire, devrait être agrandie pour répondre aux besoins de ces pays.

PRÉPARATION DES ENSEIGNANTS

La FAO a organisé en Suède, en coopération avec l'agence suédoise pour le développement international, en mai-juin 1967, un cours sur les méthodes et les techniques d'enseignement destiné aux professeurs des écoles techniques forestières. Ces cours traitaient principalement des principes fondamentaux de l'enseignement, tels que la psychologie pédagogique et physiologique, l'évaluation des élèves et les méthodes et techniques d'enseignement. Ensuite, une série de cours ont été donnés sur les moyens audio-visuels et autres moyens pouvant aider à l'enseignement. Ces cours théoriques ont été suivis par des démonstrations aussi bien que par des exercices d'enseignement. Un cours similaire a été organisé en juillet-août 1967 pour les enseignants de langue française à Nogent-sur-Vernisson, en France. L'organisation de ces cours pourrait se poursuivre de sorte que le niveau des enseignants soit amélioré au point de vue de l'enseignement technique forestier et qu'ils se familiarisent ainsi avec les méthodes plus modernes de la pédagogie.

Quant au niveau universitaire, la plupart des professeurs devraient pour le moment être recrutés à l'extérieur et le niveau exigé devrait être celui d'un professeur d'université.

SALAIRES DES INSTITUTEURS

La question des salaires est un problème fondamental dans les écoles forestières et devrait faire l'objet d'une étude spéciale pour chacun des pays. Il est probable que l'aide extérieure devra être fournie pendant au moins les premières années du développement et de l'expansion de diverses écoles forestières, que ce soit au niveau technique ou au niveau universitaire, pour assurer une qualité suffisante de l'enseignement.

EDIFICES ET ÉQUIPEMENTS

II semble que la plupart des écoles techniques nécessiteront de nouveaux équipements et, dans bien des cas, de nouvelles constructions devront être prévues pour permettre l'expansion des programmes d'enseignement. Souvent même l'équipement moderne le plus élémentaire manque dans les écoles techniques, ce qui ne contribue d'aucune façon à améliorer la qualité de l'enseignement.

CONDITIONS D'ADMISSION

L'admissibilité aux écoles techniques pourrait se faire après 11 ou 12 ans de scolarité, selon le système d'éducation prévalent dans chacun des différents pays. C'est là une condition essentielle si l'on veut obtenir des techniciens formés aux normes modernes de la foresterie. Au niveau de l'université, les étudiants seraient acceptés après 12, 13 ou 14 ans de scolarité ou l'équivalent du baccalauréat dans les pays de langue française. En bien des circonstances, cependant, il semble qu'il serait nécessaire que ces étudiants poursuivent leurs études en sciences fondamentales pendant au moins un an avant qu'ils soient prêts à aborder les sciences forestières. Bien qu'il s'agisse là d'une opinion personnelle, l'auteur n'approuve pas l'admission des étudiants exclusivement sur la base de concours, parce qu'il pense que l'élimination doit se faire davantage sur l'évaluation de leurs aptitudes à suivre un cours basé sur l'enseignement de matières forestières que sur d'autres matières dont l'importance peut être tout à fait secondaire du point de vue pratique.

BESOINS ACTUELS ET FUTURS CONSIDÉRÉS PAR PAYS ET SOUS-RÉGIONS

Dans les pays anglophones de la zone occidentale de l'Afrique, on envisage l'agrandissement des bâtiments actuels au Nigeria aussi bien qu'une amélioration de l'enseignement à l'école forestière de Monrovia. Ces mesures suffiraient à faire face aux besoins de forestiers professionnels pour l'avenir immédiat. Cependant, on pourrait s'attendre à ce que, graduellement, l'enseignement supérieur se développe dans ces centres.

Ceci est valable également pour les écoles forestières techniques du Ghana et du Nigeria aussi bien que pour celles du Sierra Leone et du Libéria, qui doivent être agrandies pour permettre d'atteindre les objectifs de 1985. Dans la région orientale des pays de langue anglaise, le département des forêts qu'il est prévu d'établir à Makarere, en Ouganda, pourrait répondre à la plupart des besoins. Cependant, une autre faculté forestière pourrait être créée plus tard dans une région plus méridionale, qui porterait une attention particulière aux problèmes de reboisement qui seront si importants dans ces régions, ainsi qu'à l'aménagement des forêts tropicales. En ce qui concerne les écoles techniques, il s'agit principalement d'un programme d'expansion et de consolidation plutôt que de la création de nouvelles écoles, sauf en Ethiopie, où une de ces écoles devrait être établie à brève échéance.

L'enseignement supérieur en matière forestière dans les pays de langue française d'Afrique occidentale, où se trouvent la plupart des grandes forêts tropicales, est un problème beaucoup plus sérieux. D'après les études qui ont pu être faites en 1968 dans ces régions, on est arrivé à la conclusion qu'il serait urgent d'établir une école professionnelle forestière dans une université, de préférence au Cameroun ou encore en Côte-d'Ivoire, et qu'une autre faculté devrait être établie en République démocratique du Congo.

Toutes les écoles techniques, dans les pays de langue française, devraient être agrandies. De nouvelles écoles techniques devraient être établies très prochainement au Congo (Brazzaville) et en République démocratique du Congo. Dans les pays de savane, les forestiers professionnels pourraient être recrutés parmi les diplômés des écoles du Cameroun ou de la Côte-d'Ivoire, où ces facultés ont été établies. En ce qui concerne les techniciens, on pourrait en former un bon nombre à l'école de Bouaké, située au nord de la Côte-d'Ivoire, qui s'intéresse surtout aux problèmes de la savane. Cette institution pourrait être développée, modernisée et agrandie pour répondre à ces nouveaux besoins. Quant à l'école de Cap Estérias, celle-ci pourrait être aussi agrandie pour qu'un plus grand nombre de techniciens ou d'ingénieurs puissent répondre aux besoins immédiats de la République centrafricaine, et peut-être en partie à ceux du Congo (Brazzaville).

Dans les pays du Maghreb, une faculté forestière devrait être établie dans un des trois pays de langue française d'Afrique du Nord. On pourrait envisager une école qui pourrait répondre également aux besoins les plus urgents des autres pays arabes situés autour de la Méditerranée, qui utilisent actuellement les possibilités de formation disponibles en Irak, en République arabe unie et ailleurs. Quant aux pays de langue française en bordure de l'océan Indien, l'école technique de Madagascar devra être agrandie et son programme révisé, mais des forestiers professionnels pourraient recevoir leur formation en Afrique occidentale, au moins dans l'immédiat.

La formation au niveau universitaire de tous ces pays pourrait se faire, au moins pour les cinq ou dix prochaines années, en dehors des contrées d'origine jusqu'à ce que les facultés forestières soient suffisamment bien établies pour envisager le développement d'un programme d'études supérieures valables.

Le recyclage des techniciens et des professionnels dans toutes ces régions devrait sans doute être envisagé à une date ultérieure dans le but de ne pas trop disperser les efforts, étant donné les besoins considérables en nouveaux forestiers et techniciens. On doit bien souligner que, dans tous ces pays, il y a un besoin urgent de techniciens formés aux méthodes d'organisation de l'exploitation et ayant un sens développé de la gestion, qu'il s'agisse des administrations publiques ou privées. On devrait beaucoup insister sur cet aspect de la formation des futurs étudiants, soit au niveau professionnel, soit au niveau technique. Quand il s'agit des gardes, des contremaîtres ou de la main-d'œuvre spécialisée, il existe déjà différents projets FAO qui fonctionnent dans plusieurs de ces pays. Ces projets, qui donnent des résultats très satisfaisants, devraient être maintenus et développés au fur et à mesure que les besoins s'en feraient sentir.

COÛT DE CES PROGRAMMES

On peut calculer que la construction et le développement d'une faculté forestière moderne pourraient s'élever à environ 1000000 de dollars. Ceci comprendrait le coût des édifices et de l'équipement pour une faculté ayant au moins trois bons départements avec un personnel enseignant de 15 à 20 professeurs et la possibilité de diplômer chaque année entre 30 et 35 étudiants après une période de 6 ou 7 ans. On peut calculer que le coût d'un étudiant ingénieur forestier à l'université peut s'élever à environ 3 000 dollars par an et que le coût moyen, pour la formation d'un technicien serait de l'ordre de 3500 dollars pour un cours de deux ans.

D'autre part, si l'on considère la situation financière de la plupart des pays d'Afrique, il ne semble pas qu'ils soient en mesure de faire face aux exigences financières qu'impliquerait un tel programme de formation forestière. Si on fait le total des coûts pour la formation d'environ 1700 forestiers et de 10000 techniciens pour 1985, on parvient à la conclusion que c'est une somme de quarante-cinq millions de dollars qu'il faudra investir dans les différents pays d'Afrique pour l'enseignement forestier durant la période s'étendant de 1970 à 1985. Il est certain qu'une pareille somme ne pourrait pas être investie par les seuls pays africains. Ce programme requerrait une aide massive et systématique de la part du Programme de développement des Nations Unies et des agences d'aide bilatérale. Ce serait le seul moyen d'atteindre les objectifs du Plan indicatif mondial pour 1985 en ce qui concerne l'Afrique. La mise en œuvre d'un tel programme se traduirait par l'expansion d'une économie forestière qui permettrait à un grand nombre de ces pays de tirer un meilleur profit de l'ensemble de leurs ressources naturelles, et ceci contribuerait certainement à leur évolution normale de même qu'à la stabilisation de leur économie. Le refus ou l'impossibilité de s'engager dans un pareil plan de développement de la formation forestière en Afrique provoquera certainement une tension accrue en même temps qu'une économie moins bien équilibrée dans l'avenir.

Jusqu'au moment où les institutions formeront un nombre suffisant de diplômés, l'aide extérieure doit être poursuivie principalement en ce qui concerne l'administration, l'inventaire forestier et la politique forestière. Un effort particulier doit être fait dans les pays de langue française, où le développement des industries d'extraction n'a pas été jusqu'à présent balancé par un développement similaire de l'administration forestière ou de l'aménagement. Les programmes de recherche existants devraient être renforcés et d'autres projets devraient être mis en train pour assurer un usage plus rationnel des ressources forestières d'Afrique.


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