L'alimentation des populations a toujours été, depuis les indépendances, l'une des préoccupations majeures des Etats africains. Pendant trente ans, ceux-ci ont consacré des efforts importants à la détermination de politiques et de programmes nationaux d'autosuffisance alimentaire. Les plans élaborés intégraient à la fois des actions de mise en valeur agricole, de développement des importations et d'amélioration de la commercialisation.
Ces politiques ont été rendues nécessaires par l'accroissement démographique considérable enregistré dans l'ensemble des pays. La population de l'Afrique de l'Ouest par exemple, qui était de l'ordre 45 millions en 1930, a atteint 220 millions en 1995, et les statisticiens en prévoient, avec une quasi-certitude, le doublement dans les trente prochaines années: vers 2020, la sous-région sera en effet peuplée de 470 millions de personnes. Cet accroissement a fait dire que l'Afrique de l'Ouest était une terre de peuplement accéléré. Incontestablement, l'explosion démographique rendra délicate la résolution des problèmes qui en découleront. Elle impose par conséquent un renouvellement permanent de la réflexion sur l'approvisionnement alimentaire et l'adaptation des stratégies de commercialisation. Dans cette réflexion, le rôle des Administrations territoriales de proximité dans les SADA doit constituer un aspect majeur car c'est au niveau local que commence la sécurité alimentaire.
Le dynamisme démographique s'accompagne d'autres phénomènes qui rendent eux aussi la démarche urgente. L'urbanisation rapide entraînera une redistribution spatiale de la population. En l'an 2020, la population urbaine sera trois fois plus nombreuse qu'en 1990 et le taux d'urbanisation dépassera 60 pour cent contre 40 pour cent aujourd'hui. L'habitat sera donc à dominante urbaine et les gestionnaires de ce cadre de vie verront s'étendre le champ de leurs interventions. L'alimentation urbaine comptera alors parmi les secteurs prioritaires. On mesure les efforts d'investissement que les responsables des villes auront à réaliser pour l'établissement des populations et pour leur intégration économique. Comment relever les défis démographiques, spatiaux et économiques engendrés par le développement des villes d'une autre façon que par l'imagination de stratégies adaptées aux habitants des cités?
Si les décideurs doivent repenser la question alimentaire à partir de la ville, ils doivent également repenser la ville elle-même, confrontée à des mutations économiques profondes. La récession des années 80 a occasionné la baisse des ressources publiques et du pouvoir d'achat des ménages, et justifié des programmes d'ajustement qui ont contraint les Etats à la dévaluation, à la libéralisation et à la décentralisation. Dans cette mouvance, les Collectivités locales (CL) se sont vu transférer une partie des compétences exercées autrefois par l'Administration centrale. L'extension de leurs pouvoirs a conféré à ces instances une capacité plus importante dans le traitement des affaires et partant, un statut d'organe pivot dans la gestion urbaine. Il est désormais de la responsabilité des Autorités municipales de concevoir et de gérer la ville, en planifiant et en mettant en oeuvre des opérations de développement de la commune en vue d'assurer les meilleures conditions de vie à l'ensemble de la population.
Cette étude fait la synthèse des réflexions menées sur le rôle des Collectivités locales dans le domaine particulier des SADA. Les villes observées sont Abidjan, Accra et Dakar, respectivement capitales de la Côte d'Ivoire, du Ghana et du Sénégal. Sur les territoires nationaux, les capitales sont des espaces remarquables par leur poids démographique, leur étendue et leur importance économique. Etant donné leurs perspectives d'évolution, elles permettent de toucher du doigt les contraintes et les opportunités diverses, actuelles et futures, dont les Autorités locales doivent tenir compte dans la résolution des questions relatives à l'alimentation des citadins. Les aspects majeurs des analyses seront dégagés selon quatre axes:
