Le "ranching" marin est un moyen intéressant de retirer davantage de protéines animales du milieu aquatique. Cela implique que l'on gère l'incubation afin de préserver ou d'accroître les pêcheries, ou encore d'en créer de nouvelles. Malgré leur signification légèrement différente, les expressions "ranching marin", "amélioration à partir d'écloseries" et "pêche fondée sur l'élevage" sont ici considérées comme synonymes.

L'utilisation de poissons d'élevage pour reconstituer des populations naturelles a fait l'objet de trois critiques principales : rien ne prouve apparemment que la pêche ait tiré profit de cette amélioration, l'entretien des écloseries coûte très cher et il est à craindre que l'interaction des poissons d'élevage et des populations indigènes ait un effet préjudiciable sur la diversité génétique naturelle.

De plus, les résultats obtenus jusqu'ici n'ont pas été particulièrement brillants. La diminution constante des stocks de morue de l'Atlantique malgré la libération, à partir de l'Amérique du Nord et de la Norvège, de milliards de ces poissons dans l'Atlantique en fournit un bon exemple. Au nombre des raisons de cet insuccès, on peut évoquer le fait que l'on n'a pas su faire face de façon adéquate au recul de la pêche et qu'on a adopté une approche quelque peu simpliste de l'amélioration, en déversant des millions de larves dans des masses d'eau appropriées et en espérant que tout irait ensuite pour le mieux; en outre, la plupart des programmes n'ont fait l'objet d'aucun suivi et les poissons d'élevage n'ont pas été marqués, ce qui n'a pas permis de les distinguer aisément des poissons indigènes.

Toutefois, en dépit des risques de perte de diversité génétique et des autres effets néfastes qui peuvent résulter de l'interaction des poissons d'élevage et des poissons indigènes, bon nombre de programmes d'amélioration ont pour objectif de mélanger poissons sauvages et poissons d'élevage en vue de former une nouvelle et plus nombreuse population mixte. En conséquence, pour certains programmes d'amélioration et pour certaines espèces aquatiques, une des principales options consistera à essayer d'obtenir, dans les écloseries, des poissons qui soient compatibles avec les stocks ichtyologiques sauvages et l'environnement. A cet effet, il convient de définir clairement les buts et objectifs des programmes d'amélioration en écloseries. Ces programmes devraient en particulier s'attacher à préserver les ressources génétiques des stocks sauvages et d'élevage. Etant donné que l'essentiel de ces ressources se trouvent dans les populations sauvages et que la pêche constitue la plus importante source de protéines animales, aucun effort ne doit être épargné pour protéger les ressources sauvages.

L'article expose les méthodes et principes généraux auxquels devraient se référer les programmes d'amélioration en écloseries ou de "ranching" pour préserver et tirer parti des ressources génétiques (diversité biologique).

Au nombre des points abordés figurent les niveaux naturels et l'organisation de la diversité génétique, les objectifs des programmes d'amélioration, les raisons de la régression de la pêche dans son état originel; l'article contient également des considérations spéciales sur l'implantation des nouvelles espèces, une évaluation des techniques d'incubation et des méthodes d'élevage, une analyse des besoins écologiques des espèces élevées et un aperçu des techniques de surveillance des populations sauvages et d'élevage.

L'article s'achève par la constatation que le "ranching" aquatique est un domaine complexe où interviennent des considérations techniques, biologiques, écologiques, socio-économiques et politiques. A l'occasion d'une réunion récente, des experts du monde entier ont défini une "approche responsable" de l'amélioration à partir d'écloseries, fondée sur un processus d'évaluation, de surveillance et d'intervention de caractère pluridisciplinaire. Bien que la prise en compte des facteurs génétiques ne puisse à elle seule assurer la réussite d'un programme de "ranching", les efforts déployés en matière de production et de conservation ne pourront être durablement couronnés de succès que dans la mesure où les principes de la gestion des ressources génétiques auront été appliqués.