Bien que ce bilan des plus prudents soit très positif, il ne reflète cependant pas les résultats qu'aurait atteint une exploitation rationnelle car :
(i) sur le plan technique Elevage :
les porcs auraient dû être vendus dès qu'ils atteignaient les 90/100 kgs, mais il s'agit ici de truies que l'exploitant veut faire reproduire en vue de la vente de porcelets, ce qui est un autre genre de spéculation qu'il sera intéressant de suivre.
sur le plan élevage porcin, le résultat obtenu est remarquable, le taux de croissance ayant été supérieur à celui atteint dans un élevage industriel de porcs situé à proximité, et qui a par ailleurs fourni porcelets et provendes. Ce résultat est sans doute dû à un environnement plus favorable créé par l'eau, et au vu duquel l'exploitant a édifié au cours de 1977, par ses propres moyens, deux nouveaux étangs de 3 – 4 ares chacun, dotés de porcheries à 4 loges destinées à recevoir les truies reproductrices.
(ii) sur le plan technique piscicole :
la mise en charge de 400 alevins de Carpe à l'are, en monoculture, pendant une durée de 10 mois a indiqué que des étangs sous porcs peuvent supporter de très fortes densités de poissons sans inconvénient majeur (pratiquement aucune mortalité, malgré une mauvaise gestion de l'eau, ce qui paraît assez surprenant). Cependant, il est probable sinon certain que les résultats piscicoles auraient été bien meilleurs en associant Carpe et Tilapia nilotica (voire même en plus, T. macrochir et Cyprin doré) et si la mise en charge avait été limitée à 1.000 alevins au lieu du double.
10 mois d'élevage sont de toute évidence beaucoup trop longs, cette période pouvant être réduite de moitié ce qui permet 2 récoltes annuelles, limite les risques des effets de la loi du minimum, et assure une meilleure gestion de l'étang.
En 1978, la remise en charge sera faite autant que possible, sur les bases indiquées ci-dessus.
la gestion de l'eau n'a pas été des plus heureuse en raison de contraintes sur la disponibilité en eau exercées par les riziculteurs en amont et en aval de l'exploitation, ce qui n'a pas permis :
de faire une vidange de contrôle ou d'exploitation après 4 ou 5 mois de mise en charge.
de maintenir dans l'étang une hauteur d'eau suffisante ; de ce fait, la végétation verticale a pris une extension inquiétante, surtout avec le retour des chaleurs depuis Août-Septembre, occupant au moins 80% de l'étang en fin d'élevage.
malgré la monoculture et la surcharge, l'élevage Carpe réalisé dans un environnement amélioré et enrichi par les effets de la fumure des porcs, a produit un rendement de l'ordre de 2,5 Tonnes/Ha/An, sans nourriture complémentaire artificielle, ce qui paraît en soi un excellent résultat. On ne peut dire toutefois si un facteur limitant (loi du minimum) n'a pas joué depuis un certain temps (élevage en eau stagnante).
en cours d'élevage, on a remarqué un développement intense d'algues planctoniques donnant à l'eau une couleur permanente vert foncé caractéristique des eaux riches en phytoplancton. Cependant, en Septembre, 3 porcs ont été transférés dans une autre porcherie et au ocurs d Octobre-Novembre l'eau a commencé à se clarifier et à s'acidifier, ce qui confirme la nécessité d'un assec après 4 – 5 mois pour permettre la minéralisation des vases.
l'étang a également fourni du fourrage vert aux pores, sous forme d'Eichornia crassipes (jacinthe d'eau) cultivée dans un coins de la pièce d'eau et occupant au début 20 m2 environ. Cependant, au ocurs des 3 derniers mois de l'élevage, Eichornia avait triplé de surface. Il semble qu'en fin d'élevage (depuis Août) l'exploitant fut très occupé ailleurs et a dû laisser la gestion (ou plutôt la surveillance) de l'élevage à un gardien qui n'avait de toute évidence pas les qualités requises pour en assurer le parfait contrôle.
sur le plan de la croissance, les Tilapia en petit nombre ont le meilleur indice et notamment T. nilotica et macrochir ( 3 specimens) avec des tailles totales de 32/34 cm et un poids de 750/800 grammes chacun ; de même T. zillïi a atteint des tailles allant de 12,5 à 17 cm de longueur totale, avec un mode apparent de 14cm ce qui semble une belle performance pour cette espèce. Par contre les Carpes, en surcharge , accusent une courbe de croissance beaucoup plus étalée variant de 12,5 à 20 cm L.T. avec un mode apparent de 15 cm et un poids moyen de 60/65 grammes. Cette courbe de croissance obtenue dans les conditions décrites ci-avant (milieu enrichi) est similaire à celle obtenue dans les eaux naturelles des Hauts-Plateaux où les Carpes atteignent à 1 an un poids moyen de 50 à 80 grammes, ce qui semble bien confirmer ici l'effet de surcharge mentionné.
sur le plan purement spéculatif et commercial, but final de l'opération, il eut été plus intéressant d'avoir 1.000 poissons d'un poids moyen de 125/150 grammes dont la valeur marchande est plus élevée, plutôt que 2.000 petits poissons de moindre valeur. De même, il eut été plus profitable d'associer Carpe et Tilapia pour une meilleure exploitation de la nourriture disponible, une productivité plus élevée, mieux valorisée, donc des recettes plus importantes.