NERC/04/INF/11


Vingt-Septième Conférence Régionale de la FAO pour le Proche-Orient

Doha, Qatar, 13 - 17 mars 2004

Initiative visant à faciliter l'Examen et l'Actualisation des Stratégies et des Politiques Nationales à l'Appui de la Sécurité Alimentaire et du Développement Agricole: Point de Vue de la Région du Proche-Orient

TABLE DES MATIÈRES



I. INTRODUCTION

1. La FAO a lancé l'"Initiative visant à faciliter l'examen et l'actualisation des stratégies et des politiques nationales à l'appui de la sécurité alimentaire et du développement rural" à la fin de 2002. Cette démarche a pour objectif d'influer sur l'assistance aux politiques que la FAO offre à l'échelle nationale, de manière à soutenir les États membres au niveau des procédures de contrôle, de révision et d'actualisation des politiques générales et des stratégies existantes. Cette mise à jour devrait dépendre du pays concerné et supposer la participation de toutes les parties prenantes, la FAO assumant un rôle d'appui. Dans le cadre de ce processus, on prendra en considération la contribution d'autres initiatives d'évaluation, de programmation ou de développement, comme le Plan cadre des Nations Unies pour l'aide au développement ou les documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté. Il serait ainsi possible d'offrir aux pays et à leurs partenaires de développement de nouvelles possibilités de concentrer leurs efforts sur la faim, la sécurité alimentaire et l'agriculture, ainsi que sur le développement agricole et rural.

2. Le présent document résume les principaux éléments qui découlent de la mise en œuvre et de l'exécution de plusieurs initiatives et se fonde sur des renseignements rassemblés ou regroupés à l'issue d'une vaste évaluation des politiques, menée grâce i) aux réponses à un questionnaire national et ii) à la réalisation des profils des politiques nationales. Ces deux initiatives sont le fruit d'une collaboration entre les Représentations de la FAO dans les pays, les sous-divisions et les unités d'assistance aux politiques du Bureau régional de la FAO.

II. SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET DÉVELOPPEMENT AGRICOLE DANS LA RÉGION DU PROCHE-ORIENT

3. Dans la région du Proche-Orient, le climat est semi-aride ou aride et les précipitations, faibles et variables. On y trouve des pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire et la population totale était d'environ 663 millions d'habitants en 2001, dont 238 millions dépendent directement de l'agriculture - y compris la pêche et l'élevage. Les ressources en terres cultivables et en eau, relativement peu abondantes, creusent un écart entre la production vivrière nationale et la demande effective des consommateurs, de sorte que la région éprouve des difficultés à garantir sa sécurité alimentaire. Elle doit importer des quantités de plus en plus importantes de denrées alimentaires pour répondre aux besoins d'une population en expansion rapide. Parallèlement, il existe d'importants écarts entre les pays de la région et aux seins de ceux-ci en ce qui concerne le revenu par habitant et les disponibilités alimentaires. Il subsiste en effet des poches de pauvreté et de malnutrition, alors que globalement, les disponibilités alimentaires de la région pourraient suffire.

4. En dehors de la Turquie, qui dispose d'importantes ressources agricoles, toutes les sous-régions du Proche-Orient devraient afficher un déficit vivrier relativement marqué d'ici à 2010, puisqu'il devrait avoir augmenté d'environ 54 pour cent par rapport à la situation de 1995, en conséquence d'une progression annuelle de 2,9 pour cent. La part de la demande de produits alimentaires couverte par la production varie considérablement d'une sous-région à l'autre, par rapport à la taille de leur population. L'Asie centrale, qui rassemble 45 pour cent de la population de la région, ne représente que 22 pour cent du déficit vivrier, tandis qu'à l'extrême opposé, la Péninsule arabe, où ne vit que 7,5 pour cent de la population de la région, est responsable de 24 pour cent de ce même déficit.

5. Il est également possible de regrouper les pays de la région en fonction des prévisions de leur taux d'autosuffisance alimentaire (production vivrière/demande totale). Un tiers des pays, environ, auraient ainsi un taux inférieur à 60 pour cent. Il s'agit notamment de trois pays exportateurs de pétrole et de deux pays à faible revenu, que leur capacité restreinte d'importation de denrées alimentaires placerait dans une situation difficile. Bien que considérés comme des pays à revenu intermédiaire, l'Iraq et la Jordanie se heurteraient à des problèmes semblables faute d'une augmentation proportionnelle des devises disponibles. Le deuxième groupe se compose des pays à revenu intermédiaire qui devraient générer suffisamment de devises pour financer l'importation de 20 à 30 pour cent des aliments nécessaires à l'échelle nationale. La Turquie et le Maroc, dans le troisième groupe, seraient en mesure de satisfaire leur demande alimentaire grâce à la production nationale. Les trois autres pays du groupe sont des pays à faible revenu qui disposent de ressources agricoles suffisantes. Leurs deux taux d'autosuffisance sont atteints avec des niveaux nutritionnels peu élevés. Malgré ces écarts entre les pays, il n'en demeure pas moins que l'ensemble de la région, à l'exception de la Turquie, restera déficitaire sur le plan vivrier.

III. ENTRAVES AU DéVELOPPEMENT AGRICOLE

6. Plusieurs obstacles et entraves s'opposent à un développement durable de l'agriculture au Proche-Orient. On peut les classer en trois grandes catégories: ressources naturelles, réformes des politiques et institutions. La première catégorie se rapporte aux ressources limitées en terre et en eau, ainsi qu'à la population. La deuxième concerne le parti pris en faveur des villes, les systèmes de planification fortement autocratiques, la réforme des politiques générales et la libéralisation, le recul des investissements en faveur de l'agriculture et du développement rural, les problèmes de stabilité politique et sociale et les situations d'urgence. La troisième catégorie, pour sa part, traite de la stabilisation et/ou de l'accroissement de la production vivrière et des revenus, de la protection de la sécurité alimentaire et de la lutte contre la pauvreté en milieu rural. Dans ce contexte, les institutions agricoles traditionnelles ont repris le rôle de l'État en tant que producteur agricole et fournisseur d'intrants et de services. Du reste, les économies de la plupart des pays de la région ont été marquées par des investissements dans les technologies de production agricole non irriguée insuffisants en regard du nombre de ménages qui en dépendent. Parmi les autres obstacles institutionnels que l'on rencontre au Proche-Orient figurent le piètre accès à des infrastructures en mauvais état, la prédominance des institutions publiques dans les services financiers et l'insuffisance du financement rural.

IV. PRINCIPALES QUESTIONS DE POLITIQUES AGRICOLES


A. Principales questions de politiques dans la région du Proche-Orient

i. Rationaliser l'utilisation de l'eau d'irrigation

7. La plupart des économies de la région, si pas toutes, dépendent de l'agriculture irriguée. L'approvisionnement de la région en eau est limité, contrairement à la demande. La quantité d'eau et sa qualité constituent de graves problèmes dans la région. Il est possible de réaliser des économies d'eau en améliorant l'efficacité de production et de distribution en matière d'utilisation de l'eau.

ii. Libéralisation des échanges et développement des marchés

8. Beaucoup de pays du Proche-Orient procèdent en ce moment à l'ouverture de leurs marchés agricoles à trois niveaux distincts et de plus en plus poussés: libéralisation unilatérale, plans d'intégration régionale et libéralisation multilatérale des échanges. Plusieurs de ces pays ont libéralisé leur secteur agricole en supprimant ou en réduisant les subventions de toutes sortes et en libéralisant les taux de change et le régime commercialtaux de change eete changes etprimant ou rverture de leurs marchés agricoles à trois niveaux distincts s plus t. Le Maroc, la Turquie, l'Égypte, la Jordanie et le Soudan en sont des exemples frappants. Les États membres de l'Organisation de coopération économique (OCE) ont entamé ce processus. Toutefois, le degré de libéralisation varie fortement d'un pays à l'autre. Il faut ajouter à cela que d'autres pays maintiennent toujours d'importantes subventions. Plusieurs accords commerciaux ont été signés à l'échelon régional/sous-régional en vue de libéraliser les échanges agricoles, notamment dans le cadre du Conseil de l'unité économique arabe (CUEA), de l'OCE, de l'Union du Maghreb arabe (UMA) et du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Sur le plan multilatéral, beaucoup de pays de la région sont désormais membres de l'OMC et ont pris des engagements visant à libéraliser leur secteur agricole dans le cadre de divers accords, et plus particulièrement de l'Accord sur l'agriculture. Actuellement, 16 pays sur 30 sont membres de l'OMC et neuf ont un statut d'observateur.

iii. Questions de pauvreté et de sécurité alimentaire en milieu rural

9. La pauvreté est bien plus répandue en milieu rural que dans les zones urbaines. Elle dépend avant tout d'un accès restreint à des ressources limitées en terre et en eau, d'une faible productivité, de précipitations imprévisibles, d'un nombre relativement peu élevé d'options en matière de culture et d'élevage et d'une dégradation constante des ressources naturelles. Il n'est malheureusement pas facile d'obtenir des statistiques de la pauvreté pour tous les pays de la région, encore moins lorsqu'il s'agit des zones rurales. La tendance à la baisse du financement du développement agricole et rural revêt une importance capitale en regard des problèmes de lutte contre la pauvreté et de sécurité alimentaire que connaissent bien des pays de la région ou qui apparaissent en ce moment.

iv. Pollution et problèmes environnementaux

10. La dégradation de l'environnement constitue l'une des principales sources d'inquiétude au Proche-Orient. L'un des dangers les plus graves est celui de la salinisation et de l'engorgement, notamment dans le sud de l'Iraq, au Pakistan, en République islamique d'Iran, en Égypte et dans les États du Golfe. Cette situation est d'autant plus critique que l'intensification des cultures et les subventions gouvernementales entraînent un recours excessif aux pesticides et aux engrais chimiques. Dans de nombreux pays d'Asie centrale, comme l'Azerbaïdjan, se pose le problème d'une irrigation excessive et d'un drainage insuffisant, ce qui risque d'accroître considérablement la salinité. L'érosion des sols due à l'eau et au vent compte également parmi les problèmes environnementaux de la région. Du reste, les pêches sont, elles aussi, touchées par la pollution.

v. Questions de réformes institutionnelles

11. De nombreux pays de la région se tournent vers les réformes institutionnelles et le renforcement des capacités comme moteurs de développement et de croissance. Ils optent pour une refonte du processus de développement et la mise en place d'institutions pour générer la croissance. Cette démarche suppose une modification du rôle de l'État, l'amélioration des organisations communautaires rurales, la mise en place ou la création d'institutions de marché, l'attribution de droits de propriété et une orientation des services de financement rural davantage axée sur les plus démunis.

B. Développement agricole dans la région du Proche-Orient: vue d'ensemble

12. Bon nombre de pays du Proche-Orient ont commencé, dès le début des années 80, à mettre en œuvre des réformes des politiques, notamment des programmes d'ajustement structurel. Il s'agit entre autres de l'Égypte, de la Turquie, de la République islamique d'Iran, du Maroc, du Pakistan, de la Syrie et du Soudan. De telles réformes influent, de bien des manières, sur les disponibilités alimentaires et l'accès aux denrées alimentaires. Les changements radicaux qui vont de pair avec ces programmes d'ajustement, quoique essentiels à un accroissement de la production alimentaire, ont un coût qui menace le bien-être à court terme des plus démunis. Il ressort néanmoins d'une première évaluation des réformes agricoles menées en Égypte, au Maroc et en Tunisie au cours de la deuxième moitié des années 80 que celles-ci ont favorisé un développement de la production agricole globale, jusqu'à atteindre le niveau record du début des années 90.

13. Une bonne connaissance des nouvelles technologies agricoles et un accès à celles-ci permettront, à terme, de promouvoir un développement propice à l'accroissement des rendements, à la diminution des risques et à la préservation de l'environnement. Les pays de la région sont, aujourd'hui plus que jamais, en mesure d'absorber les nouvelles technologies, grâce à la constante progression des niveaux d'instruction. Cette affirmation est encore plus vraie en ce qui concerne la disponibilité d'un vaste réservoir de compétences dans le domaine de l'agriculture. Par ailleurs, les gouvernements de la région procèdent à des réformes institutionnelles et apportent des modifications à leur mode de gouvernance en renforçant la décentralisation et la privatisation et en diminuant le contrôle de l'État. D'autre part, la proximité des principaux marchés d'exportation offre de bonnes possibilités de développement à l'agriculture de la région, ce qui s'explique par la position stratégique que cette dernière occupe, tant historiquement qu'à l'heure actuelle. On s'attend à ce que, dans la foulée du Cycle de l'Uruguay et de l'Accord sur l'agriculture, l'évolution des politiques générales dans la région ait un impact marqué sur l'ampleur et sur l'orientation des échanges intrarégionaux. Globalement, il semblerait que les accords de l'OMC puissent, tout bien considéré, apporter une légère amélioration des échanges agricoles intrarégionaux, sans que cela soit décisif.

C. Cadres stratégiques ou politiques en place dans les pays du Proche-Orient

La section qui suit présente un résumé des cadres stratégiques ou des politiques mis en place dans les pays du Proche-Orient. Elle fournit des informations sur le cadre stratégique ou les politiques rurales, agricoles et sous-sectorielles de chaque pays, ainsi que sur l'appui passé et présent offert par la FAO et sur les besoins futurs.

i. Stratégies nationales et/ou cadres directeurs

14. Tous les pays du Proche-Orient disposent, à des degrés et sous des formes divers, de politiques générales et de stratégies et l'on commence à appliquer aux cadres stratégiques des programmes d'ajustement structurel et/ou des plans de développement modestes ou ambitieux, axés sur le marché. C'est le cas par exemple de l'Algérie, de l'Égypte, de la République islamique d'Iran, du Kazakhstan, du Koweït, du Kirghizstan, du Liban, de la Libye, de la Mauritanie, d'Oman, des Territoires palestiniens, du Qatar, de l'Arabie saoudite, du Soudan, de la Syrie, du Tadjikistan, du Turkménistan, de l'Ouzbékistan et du Yémen. Certains passent par des changements constitutionnels, comme le Bahreïn, qui vient de se convertir en monarchie constitutionnelle, ce qui pourrait influer sur le cadre stratégique national et les politiques d'ensemble. D'autres pays, en revanche, continuent de dépendre totalement de l'aide extérieure, à l'instar de Djibouti.

ii. Cadre stratégique rural, agricole et sous-sectoriel et politiques d'ensemble

15. La plupart des pays de la région appliquent actuellement l'une ou l'autre forme de plan de développement agricole. L'Algérie, par exemple, est en train d'adopter la première phase d'un plan national de développement agricole (2002-2005) et élabore une stratégie de développement rural. Le Bahreïn dispose d'une stratégie de développement pour 2010, en plus d'un plan de développement agricole à moyen terme. L'Égypte a réalisé une stratégie de développement agricole pour 2017, et élabore en ce moment un plan de développement rural. La République islamique d'Iran, la Jordanie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Liban, la Libye, la Mauritanie, Oman, les Territoires palestiniens, le Qatar, l'Arabie saoudite, le Soudan, la Syrie et le Tadjikistan sont autant de pays qui ont des politiques ou des stratégies agricoles d'appellations diverses, mais dont les objectifs sont semblables. En revanche, des pays comme Djibouti, le Koweït, le Turkménistan, l'Ouzbékistan et le Yémen possèdent ce qu'il convient d'appeler des documents de stratégie agricole, tandis qu'un pays comme les Émirats arabes unis ne dispose, à l'heure actuelle, d'aucune stratégie ou politique agricole à l'échelon fédéral ou au niveau de chacun des émirats. Néanmoins, la FAO a réalisé, en avril 2000, un document intitulé "Stratégie des Émirats arabes unis pour 2010".

iii. Rôle de la FAO à l'appui des pays de la région

16. La FAO a collaboré avec les États Membres pour élaborer et mettre en œuvre des cadres stratégiques de développement agricole durable et de sécurité alimentaire. Ainsi, l'Organisation a soutenu l'élaboration, la mise en œuvre et l'actualisation des programmes et des plans nationaux de développement agricole de la plupart des pays de la région, comme l'Algérie, le Bahreïn, l'Égypte, la République islamique d'Iran, la Jordanie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, le Liban, la Libye, la Mauritanie, Oman, les Territoires palestiniens, le Qatar, l'Arabie saoudite, le Soudan, la Syrie, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan et le Yémen. On prépare en ce moment l'appui à l'Ouzbékistan et à l'Émirat d'Abu-Dhabi, dans les Émirats arabes unis. Par ailleurs, Djibouti a sollicité une assistance technique pour l'élaboration d'une stratégie et d'un plan d'action pour le développement rural. Très récemment (novembre 2003), le programme "pétrole contre nourriture" a pris fin en Iraq et la FAO vient d'adopter le programme "Transition du secours, de la remise en état et de la reconstruction vers le développement". Le Koweït a introduit une demande de plan de développement agricole à moyen terme. Le Liban prépare son projet de stratégie nationale de développement agricole et l'on prévoit que la FAO apporte un appui supplémentaire aux politiques. Enfin, le Turkménistan a bénéficié du Programme spécial pour la sécurité alimentaire, de la FAO, tandis que le gouvernement doit toujours indiquer ses priorités définitives en matière d'assistance technique à l'échelon des projets.

iv. Besoins en matière d'appui aux politiques

17. L'appui aux politiques que la FAO offre à la plupart des États Membres porte notamment sur un renforcement des capacités d'analyse et de mise en œuvre des politiques agricoles, de même que sur la mise à jour des stratégies. Il est tout aussi important d'axer les efforts sur des questions relevant de la commercialisation, des échanges, de la gestion des ressources naturelles et de la lutte contre la pollution. À l'avenir, l'aide pourrait, par exemple, viser à construire un secteur agroindustriel tourné vers les exportations, à développer les industries artisanales, à promouvoir les petites entreprises et à réformer le secteur coopératif (comme en Égypte). L'aide de la FAO aux politiques est tout particulièrement nécessaire pour: