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4. EVALUATION DE L'ETAT DES STOCKS

4.1 Introduction

Les données de capture et d'effort furent examinées pour savoir à quel point les variations de PUE présentées, pouvaient refléter la variation d'abondance des stocks (Tableaux 4,5, 7 et 8). Les efforts de pêche se sont rélévés extrêmement divers, plusieurs types de bateaux utilisant plusieurs types d'engins ont pêché les stocks pélagiques de la zone. D'autre part, l'efficacité des différentes flottilles s'est révélée extrêment variable non seulement au cours d'une même année quand elle pêchait sur les mêmes espèces cibles, mais encore plus quand les espéces cibles changeaient d'une année à l'autre. Seuls les experts roumains ont présenté une série historique suffisamment longue au cours de laquelle ils ont standardisé les efforts des chalutiers et des senneurs. La standardisation n'a cependant pas été effectuée le long de la série historique pour tenir compte des changements d'engins de pêche et des changements dans leur efficacité. Cependant, la flottille de pêche roumaine opére dans la zone Sénégal–Mauritanie sans porter son effort sur une cible spécifique particuliére. La PUE de la flottille roumaine a donc été considérée la base la plus acceptable pour refléter les variations d'abondance des stocks et a servi de PUE standard à partir de laquelle les efforts théoriques pour l'ensemble de la flottille opérant dans la région ont été calculés.

4.2 Modèles de production : pertinence, résultats

4.2.1 Trachurus spp.

Les données disponibles sur l'effort, les captures totales du Trachurus spp. ainsi que les captures par unité d'effort par pays pêcheur sont résumées aux Tableaux 1 et 5. Comme les deux principales espéces, T. trachurus et T. trecae forment des stocks unitaires dans les zones 34.1.3 et 34.3.1 combinées, l'analyse a porté sur l'ensemble de ces deux divisions statistiques. Les deux espéces ne sont que rarement distinguées dans les statistiques de captures et ont cependant des modes de vie similaires et des paramétres biologiques trés comparables. c'est pourquoi l'analyse qui suit a été tentée sur les deux espèces confondues. Pour les captures sovieétiques de Trachurus spp. anteérieures à 1972, qui n'ont pas été déclarées par division statistique, on a présumé qu'elles proviennent des zones 34.1.3 et 34.3.1 et que 10% de ces captures étaient constitués de Caranx spp. (COPACE/PACE 78/10, p. 155).

La série de données roumaines sur l'effort et les captures a donc servi de base aux calculs (Tableau 7). Les sommes des captures et les efforts théoriques en jours de pêche ainsi obtenues ont été ensuite utilisées dans un modéle de production de Schaefer. Ce modéle a été choisi car les points PUE/effort sont relativement bien alignés. Il faut d'autre part mentionner qu'il n'existe pas au CNROP d'informatique permettant d'effectuer rapidement des analyses. Aussi a–t–on travaillé trés rapidement en faisant des calculs à la main et faute de temps il n'a pas été possible d'effectuer des analyses plus approfondies. Le Groupe de travail ne disposait d'autre part pas de données permettant de standardiser l'effort sur les données historiques roumaines. Les résultats obtenus doivent donc être considérés comme une première approximation très grossière ne donnant simplement qu'un ordre de grandeur. Ces analyses devront bien sûr être affinées notamment en pondérant les efforts par année pour s'approcher de l'état d'équilibre des stocks. On a donc consideéré une première version de ce modèle, dans laquelle ont été utilisés les CPUE et les efforts théoriques des mêmes années.

Dans un premier temps, l'ensemble de la série historique a été utilisé et dans un second temps uniquement les valeurs des années 1978 à 1981 au cours de laquelle la qualité de l'effort n'a que peu varié.

Les résultats préliminaires obtenus sont les suivants (Fig. 3).

  1. Sur l'ensemble de la série historique:

    Ymax = 462 000 t pour 26 320 jours de pêche roumains.

  2. Sur la série 1978-1981 :

    Ymax = 379 300 t pour 16 400 jours de pêche roumains.

Pour mieux cerner l'état d'équilibre, une deuxième version du modèle a été calculée, cette fois en prenant pour effort théorique la moyenne non pondérée des efforts des années i + 1, pris en relation avec les captures des années i + 1. On a alors obtenu (Fig. 4) :

  1. Sur l'ensemble de la série historique :

    Ymax = 515 700 t pour 25 000 jours de pêche roumains.

  2. Sur la série 1978-1981 :

    Ymax = 384 400 t pour 12 650 jours de pêche roumains.

Le Groupe de travail s'est penché sur l'origine des différences dans les estimations selon que l'on considére l'ensemble de la série historique ou seulement les années 1978-1981. Les conclusions ont été que les Roumains, dont les données ont servi au calcul des efforts théoriques, n'ont pas calculé de standardisation des efforts de pêche sur la série historique pour tenir compte du changement des engins de pêche et de leur efficacité. Ces efforts théoriques des années anciennes sont donc surestimés par rapport à ceux de la série récente. L'estimation obtenue à partir des seules années 1978-1981, pour criticable qu'elle soit, étant donné le peu de points ayant servi à bâtir la courbe et le type de calcul utilisé à cependant paru le plus pertinent ou du moins le plus réaliste aux yeux des experts. Un Ymax de 515 000 tonnes n'a jamais été atteint et la tendance des rendements est très nettement à la baisse depuis 1979, ce qui ne rend pas l'estimation de 515 000 tonnes plausible.

Par contre, un Ymax voisin de 400 000 tonnes semble en accord avec les résultats des prospections acoustiques effectuées dans la zone : en janvier 1982, l'URSS a prospecté la zone de 23°30–21°15N oú se trouvait une biomasse de 791 196 tonnes de Trachurus spp. La campagne conjointe entre la RDA et la Mauritanie, se limitant aux eaux mauritaniennes en mars–avril 1982, a trouvé une biomasse de Trachurus spp. y compris Decapterus rhonchus de 429 000 tonnes. La somme de ces deux estimations est d'environ 1 220 000 tonnes. En appliquant la formule de Gulland (1971) :

Ymax = 0,5 M × B, prenant M = 0,5–0,7, Ymax serait d'environ 300 000–400 000 tonnes.

L'expert soviétique a ajouté que les captures maximales pourraient être de l'ordre de 500 000 tonnes en incluant la zone du Sahara. Les arguments avancés ont été le fait que l'estimation acoustique de la biomasse au Sahara n'a pas été corrigée pour la zone du plateau continental non couverte par la prospection. Puis, les deux derniéres années ont été anormales. A cause d'un plus faible vent du NE, les poissons ont eu tendance à migrer vers le nord, ce qui fait qu'ils étaient plus rares en Mauritanie.

4.2.2 Scomber japonicus

Le modèle global exponentiel de Fox a été appliqué aux données des captures présentées au Groupe de travail, les captures par unité d'effort roumaines ayant servi de base pour calculer l'effort théorique correspondant. Là encore, le manque de programmes informatiques a limité la qualité des analyses, et les résultats présentés ici doivent bien sûr être considérés comme tout à fait préliminaires. Des calculs plus précis devront être entrepris. Il faut noter que la standardisation de l'effort n'a pas été effectuée le long de la série historique, ce qui limite d'autant la précision des résultats obtenus. Les données de base sont résumées aus Tableaux 2 et 8.

Les prises totales de maquereaux ont varié de 73 000 à 147 000 tonnes, sauf en l'année 1978 où 24 000 tonnes seulement ont été déclarées. La Figure 5 montre dans quelle mesure cette année est anormale. En admettant que les statistiques disponibles pour 1978 ne sont peut être pas correctes, le modéle de Fox a été appliqué avec puis sans tenir compte des données pour 1978. Les résultats obtenus sont alors (Figure 5):

avec 1978 : Ymax = 103 000 tonnes

fmax = 83 000 jours de pêche roumains

sans 1978 : Ymax = 101 000 tonnes

fmax=51 500 jours de peôche roumains

Etant donné que le niveau de captures et d'effort a été de:

Y1981 = 90 000 tonnes ; f1981 = 67 000 jours de pêche roumains, on se rend compte que, si l'on accepte ou non l'année 1978, on se trouve actuellement avant ou au–delà du niveau optimum de l'effort.

On peut noter que la valeur de Ymax calculée trés grossiérement par le Groupe de travail est voisine de celle trouvée par Krivospitchenko (1981) qui estime Ymax à 118 000 tonnes.

4.3 Modéles analytiques

Une évaluation a ensuite été faite en utilisant la méthode d'analyse de cohortes par itération pour les stocks de Trachurus spp. dans les divisions statistiques 34.1.3 et 34.3.1. Pour la structure en âges de ces stocks on a de nouveau utilisé les données roumaines, les conversions de longueurs en poids et âge étant basées sur les équations retenues en paragraphe 2.2.

La valeur de départ pour le coefficient de mortalité naturelle a été M = 0,5, qui est la valeur moyenne des différentes estimations présentées au Groupe de travail. La valeur de F final de 0,51 était suggérée par l'expert soviétique. Là encore, manque de programmes informatiques, cette valeur de F a été utilisée tout au long de l'analyse. Cette valeur, qui est une valeur de F moyenne est probablement trop forte pour la derniére classe d'âge et aurait dû en tout cas être modulée pour tenir compte des différences des efforts au cours des années. Une meilleure solution aurait été d'extrapoler le F final à partir des tendances des vecteurs F sur les vieilles classes d'âge. Tenons ainsi davantage compte des différences d'accessibilité sur les plus grands individus. De même, les valeurs de F sur les cohortes pêchées en 1981 auraient dû être les moyennes des valeurs de F calculées sur les mêmes classes d'âge au cours des années précédentes plutôt que de prendre systématiquement la valeur 0,51. Là encore, une analyse plus fine devrait eôtre entreprise et les reésultats preésenteés ici doivent bien suôr eôtre considérés comme préliminaires.

Les Tableaux 9a-c résument pour la période 1972–1981 les résultats obtenus par cette méthode, donnant respectivement les nombres de poissons capturés par classe d'âge, les valeurs de F en fonction de l'âge, l'abondance en millions d'individus et, finalement, les biomasses calculées.

On note que la biomasse totale calculée par l'analyse des cohortes a été stable et de l'ordre de 1,2-1,5 million de tonnes dans la période 1972-1975 pour atteindre un niveau plus élevé en 1977–1979. Entre 1979 et 1981, on assiste à une chute de la biomasse calculée de 2,5 à 1,7 millions de tonnes, chute qui, d'après les résultats préliminaires obtenus en Mauritanie par les Roumains continue en 1982; aucun fort recrutement apparent ne s'est présenté depuis 1976. Les biomasses calculées des classes d'âge 1,2 et 3 montrent une trés nette tendance à la baisse depuis 1979, ce qui laisse présumer qu'une amélioration des rendement ne se fera pas dans un proche avenir.

Les valeurs calculées pour la biomasse en 1980-1981 sont assez voisines de celles obtenues par écho-sondage dans cette période. Elles semblent confirmer que le niveau du rendement maximum soutenu par le modèle de production de Schaefer est voisin de 400 000 tonnes.

On peut noter que le recrutement a été particuliérement fort en 1976 et que cette cohorte a soutenu la biomasse du stock jusqu'en 1980.

4.4 Prospections acoustiques

De nombreuses campagnes de prospection hydro–acoustique ont eu lieu dans les zones COPACE 34.1.3 et 34.3.1 depuis plus de 10 ans. Ces campagnes ont fait l'objet d'un Groupe de travail CNROP/CRODT qui s'est tenu en novembre 1982 à Dakar, dont le rapport vient de paraitre.

La comparaison des résultats de toutes ces campagnes est rendue difficile par la diversité des méthodes de prospection et d'évaluation de la biomasse utilisées. D'autre part, peu de campagnes ont couvert l'ensemble de la région qui nous intéresse, ce qui rend la comparaison des résultats d'autant plus délicate. Enfin, peu de résultats sont fournis espèce par espèce. Nous disposons donc généralement des estimations globales pour l'ensemble de la biomasse.

Les premiers résultats utilisables correspondent à une prospection effectuée par le N/O “Capricorne” en février 1974 entre les iles Bissagos et 28°N. Pour la région comprise entre 12°20N et 24°N, la biomasse de Trachurus spp. a été estimée à 1 600 000 tonnes. Pour la seule région sénégalo-mauritanienne, la biomasse de Trachurus serait de l'ordre d'environ 900 000 tonnes.

On ne dispose pas d'autres estimations de la biomasse de Trachurus spp. pour toute la période antérieure à 1980. En 1981, pour la rétion sénégalo-mauritanienne, deux estimations ont été faites par le N/O “Dr. Fridtjof Nansen” et une par le N/O “Capricorne”. Des résultats préliminaires sont également disponibles pour la campagne du “Dr. Fridtjof Nansen” en février/mars 1982. Les résultats obtenus ont été respectivement:

 Début mai 1981 Dr. F. Nansen (t)Mai 1981 Capricorne (t)Sept. 1981 Dr. F. Nansen (t)Février/mars 1982 Dr. F. Nansen (t)
Carangidés943.300378.000281.600438.000
Biom.Totale1.383.7002.420.3001.041.8001.375.000

Une campagne de prospection acoustique a été effectuée par le N/O “N'Diago” au mois d'octobre 1982. Au cours de cette campagne, l'ensemble du plateau continental mauritanien a pu être prospecté depuis les fonds de 10–20 m jusqu'aux fonds de 200 métres. Les résultats définitifs de cette campagne ne sont pas encore disponibles, mais les résultats préliminaires indiquent que la biomasse présente à cette époque était trés faible. Les principales détections rencontrées sur les fonds de 20–30 métres au large du banc d'Arguin étaient constituées uniquement de sardine (Sardina pilchardus) et d'anchois (Engraulis encrasicolus) de petites tailles. Sur les fonds de 50 à 200 métres, quelques concentrations de chinchards (Trachurus spp.) ont été détectées. Ces concentrations étaient dans l'ensemble plus denses et la biomasse totale de chinchards était trés faible à cette époque. Cependant, audelà de l'isobathe de 200 métres, des concentrations denses ont été détectées sur la pente du talus. Ces concentrations n'ont pu être malheureusement ni intégrées, ni identifiées. Du ler au 17 avril 1982, la RDA a effectué une campagne acoustique dans les eaux mauritaniennes à laquelle participaient leurs bateaux N/O “Ernst Haeckel” et ROS 414 “Walter Barth”. Les objectifs de cette campagne étaient d'estimer la biomasse des poissons pélagiques au-dessus des fonds de 50 à 200 métres et d'obtenir une idée de la distribution des poissons sur le talus continental. Le parcours suivi lors de cette campagne est illustré en Figure 6. 18 radiales ont été suivies, chacune traversant le talus et comportant 1-3 stations hydrologiques où les températures ont été relevées à des profondeurs de 0, 20, 50, 100, 150 et 200 métres. Les radiales “courtes” s'éloignaient d'au maximum 100 milles nautiques de la côte, jusque 17°52, 5'W, les “longues” jusque 18°52, 5'W (160 milles de la côte).

Les concentrations de poissons détectées, dont les enregistrements étaient intégrés par l'équipement Simrad à bord du “Ernst Haeckel” ont été pêchées par le “Walter Barth” pour connaitre la composition spécifique et pour obtenir des échantillons pour les analyses biologiques.

Dans la zone couverte de 26.580 m2, la biomasse totale des poissons pélagiques était de 844 500 tonnes, répartie de la facon suivante:

Trachurus trachurus302 530 t
Trachurus trecae58 210 t
Decapterus rhonchus69 190 t
Trichiurus lepturus63 680 t
Scomber japonicus96 330 t
Sardinella aurita31 890 t
Calmar131 930 t
Engraulis encrasicolus700 t

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