Ces facteurs peuvent être évalués séparément: inondations et eaux profondes en riziculture (A.13.1); risque dinondation en général (A.13.2); risque dorages et de vent (A.13.3) et risque de gelées (A.13.4).
A.13.1 Submersion et riziculture
Vingt-cinq à trente pour cent des surfaces rizicoles du globe sont exposées à des crues de hauteur considérable. On y cultive des variétés traditionnelles de riz flottant à longue tige. Un égal pourcentage de terres rizicoles est soumis à des crues peu profondes (IRRI, 1975b). La riziculture en eau profonde est principalement pratiquée dans les vallées fortement peuplées et dans les deltas de grands fleuves (Gange, Brahmapoutre, Godaveri, Irraouadi, Chao Phraya et Mékong) où lon cultive des variétés indica à faible rendement. Dans les zones ou la submersion est particulièrement profonde (1 à 6 mètres), on cultive des variétés de riz flottant, dont la tige sallonge à mesure que le niveau de leau sélève, tandis que les feuilles flottent à la surface. Dix pour cent environ des terres rizicoles de lAsie et de lAfrique sont plantées en variétés de riz flottant; cinquante pour cent environ en variétés non flottantes mais à longue tige, adaptées à une profondeur de submersion moyenne. Laptitude des terres dépend des variétés disponibles et de la fiabilité des crues. Selon la variété cultivée, la vitesse délévation ou dabaissement du niveau de leau est très importante. Si leau descend trop rapidement certaines variétés risquent la verse. Un courant rapide peut coucher ou déraciner la culture, ou la recouvrir de limon. Une submersion par leau de mer entraîne des dommages supplémentaires, dus au sel. De nombreuses variétés de riz tolèrent une certaine submersion ou peuvent pousser même sous leau. Les jeunes plants sont souvent plus sensibles aux crues et à la submersion que les plants plus âgés.
Le riz flottant se plante généralement au début des premières pluies de mousson, en jetant les semences à la volée sur un sol sec ou humide. Dans un premier stade, le riz se développe comme une culture pluviale et doit même parfois supporter une certaine sécheresse au stade de la plantule. Le photopériodisme (voir Rayonnement) déclenche linitiation florale dès que leau commence à descendre mais avant la fin des pluies. La récolte se fait parfois à laide de barques, mais elle peut également se faire quand leau sest complètement retirée et que le sol est sec. Laptitude des terres et de leau dépend de la fiabilité et de la hauteur des crues, de la durée et de la pronfondeur de submersion quexigent les diverses variétés, ainsi que de la vitesse de décrue. La vitesse découlement de leau est également importante.
Il arrive que le choix de la variété de riz soit imposé par les caractéristiques des terres; si les variétés considérées nont pas le même potentiel de rendement, elles influeront sur la productivité des terres; les exigences particulières de variétés peuvent donc être déterminantes pour la classification des terres. Les variétés de riz se répartissent en cinq grandes catégories: riz irrigué de bas-fond; riz pluvial dressé (riz de bas-fond poussant sous une faible lame deau); riz pluvial semi-flottant (bas-fond); riz deau profonde et riz pluvial strict. Les variétés de riz adaptées à ces diverses conditions ont un potentiel de rendement différent. Cest le riz irrigué de bas-fond qui donne les rendements les plus élevés et le riz cultivé au sec qui donne (généralement) les rendements les plus bas.
On en trouve un bon exemple sur la côte sud de Java, où lon a délimité des zones non sujettes à submersion, des zones sujettes à une submersion moyenne et des zones sujettes à une submersion prolongée. Les premières peuvent donner deux récoltes de riz de variétés modernes à haut rendement, un avantage apte à compenser le coût de la protection de superficies supplémentaires contre les inondations. Des variétés de riz à longue tige (améliorées dans certains cas) se sont révélées adaptées à des terres sujettes à des terres soudaines et temporaires. Il était important dévaluer deux points: le risque en fonction des dates de plantation et la possibilité éventuelle dobtenir deux récoltes annuelles au lieu dune en utilisant des riz améliorés à cycle plus court. Les avantages devraient ensuite être comparés avec les coûts de maîtrise des crues et dirrigation. Dans les zones soumises à une submersion saisonnière prolongée, il na été possible dobtenir quune seule récolte de saison sèche. On a ensuite exprimé en termes économiques la production de riz, les intrants et extrants, et les dépenses de mise en valeur des terres sur les différentes unités de terres, pour mettre ensuite au point des classes daptitude des terres. On aurait pu aussi créer des types dutilisation des terres, mais cela aurait obligé à évaluer un très grand nombre de combinaisons dunités de terres et de types dutilisation.
A.13.2 Risque de crues
Dans les zones où le riz est cultivé sous une faible lame deau et dans les zones produisant dautres cultures, les crues soudaines et violentes ne sont pas seulement préjudiciables aux cultures; elles endommagent aussi le sol et linfrastructure (diguettes des rizières, chemins, bâtiments temporaires ou permanents, routes et ponts, etc.). Les zones les plus exposées aux conséquences des crues sont les plaines dinondation, les plaines alluviales et côtières, les régions soumises à de fortes variations saisonnières des précipitations et où des pluies intensives peuvent tomber durant des heures, voire des jours. Lincidence des crues est en rapport avec les formes de relief.
Pour fixer les limites critiques du risque de crues, on peut utiliser deux critères: la durée de submersion, qui est le nombre moyen de jours (pendant la période végétative ou pendant lannée) où la terre est recouverte deau. Elle peut être établie daprès les relevés pluviométriques, où être estimée. La fréquence dinondation correspond à la probabilité annuelle de crues destructrices. Une crue destructrice est une crue qui détruit ou endommage gravement les cultures, les terres, ou les infrastructures. Selon le cas, une crue destructrice peut être quantifiée daprès la durée de la submersion et/ou daprès la vitesse de lécoulement ou du débit de leau en mouvement. Le tableau ci-après peut être utilisé pour en faire une évaluation quantitative, lorsquon dispose de données; mais il sert plutôt de base à une évaluation subjective.
Fréquence des crues destructrices:
Très rares ou inexistantes |
Moins dune crue tous les 20 ans, ou aucune |
Rares |
Moins dune crue tous les 5 ans |
Peu fréquentes |
Entre une crue tous les 5 ans et une crue par an |
Très fréquentes |
Plus de 5 crues par an |
Tableau 45 EXEMPLE DE LIMITES CRITIQUES POUR LEVALUATION DU RISQUE DE CRUES
Coefficient de classement |
Fréquence des crues avec de forts courants pendant
la période végétative |
Durée des crues avec courant faible |
s1 |
1 tous les 10 ans |
Aucune-2 jours |
s2 |
1 tous les 6-10 ans |
2 jours-3 semaines |
s3 |
1 tous les 3-5 ans |
3-20 semaines |
n |
1 tous les 1-2 ans |
Plus de 20 semaines |
Il est souvent nécessaire, dans une évaluation des terres, de déterminer dans quelle mesure celles-ci sont exposées aux orages et au vent ainsi que le degré de vulnérabilité ou de tolérance de différentes cultures à ces facteurs. Il faut également apprécier leurs incidences économiques probables pour les différentes cultures et unités de terres. Deux aspects sont à considérer: la prévalence générale du risque (le vent, par exemple) et les épisodes exceptionnels, comme les pluies diluviennes, les cyclones et les ouragans. Ces derniers sont pris en compte pour la sélection des types dutilisation des terres, mais létendue des dégâts et la capacité de la culture à survivre et continuer de produire après lépisode peuvent être particulièrement critiques dans certains endroits, qui devront être différenciés par un coefficient de classement spécial. Parmi les cultures, on distingue nettement les cultures à cycle court des cultures pérennes. La survie de cultures à un orage isolé est un problème moins grave quand il sagit de cultures à cycle court que quand il sagit de plantations arboricoles et de vergers, qui sont parfois complètement détruits. Le bananier peut reprendre à partir de rejets souterrains si la partie aérienne est détruite, ce qui est impossible pour la plupart des arbres.
Dans de nombreuses parties du monde, la grêle peut infliger de graves dégâts aux cultures, voire les détruire, ce qui peut avoir une incidence sur le choix des cultures. Généralement, les dégâts causés par la grêle sont très localisés. La possibilité de contracter une assurance contre la grêle peut également influer sur le choix des cultures.
A.13.4 Risque de gelées
Le gel peut être un élément de classification important. Les mouvements catabatiques de lair créent des poches de gel dans le fond des vallées. Le gel peut détruire les fleurs des cultures fruitières tempérées et, partant, influer sur les rendements. Les gelées rares sont particulièrement graves pour les vergers (agrumes, par exemple) car elles peuvent tuer les arbres, quel que soit leur âge. Les gelées destructrices peuvent être identifiées du point de vue des températures, de la durée et des périodes de lannée pendant lesquelles elles peuvent causer des dommages, en analysant les relevés météorologiques. Lexpérience locale est souvent utile pour comprendre les effets des formes de relief (incidence plus forte des gelées dans les fonds des vallées et accroissement de leur fréquence avec laltitude).