Conclusion générale

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L'accroissement général de la population urbaine qui représentait en Afrique subsaharienne 16 % de la population totale en I960 et 39 % en 1990 rend de plus en plus difficile l'approvisionnement des villes en produits alimentaires, d'autant plus que pour l'ensemble du continent la production alimentaire per capita a baissé sur cette période.

Cette constatation est particulièrement vraie pour les produits laitiers dont la demande est satisfaite par des importations croissantes: aujourd'hui elles représentent souvent plus de 90 % des approvisionnements des villes africaines en lait et produits laitiers alors que la production locale n'arrive pas à progresser de façon satisfaisante bloquée dans ses rigidités socio-économiques, intégrant difficilement les progrès techniques de sélection et de gestion des troupeaux et confrontée à une demande solvable limitée. Parmi les facteurs mis en cause dans cette situation, la formation des prix du lait et des produits laitiers occupe une place centrale. D'un côté, le marché mondial propose de la poudre de lait dont les exportations sont fortement subventionnées. On retrouve alors ces produits sur les marchés africains à des prix d'autant plus bas que la surévaluation constante du Franc CFA jusqu'à maintenant modérait le coût des importations. De l'autre côté, la faible productivité des troupeaux laitiers et la pénurie chronique de lait qui en résulte tirent les prix vers le haut. La production locale, concurrencée par les importations, ne peut dégager des revenus suffisamment rémunérateurs propres à encourager une augmentation des quantités mises sur le marché, d'où un recours sans cesse croissant aux approvisionnements extérieurs.

La nécessité de briser ce cercle vicieux du recours aux importations devient un impératif pour l'ensemble des pays africains: le coût considérable des achats extérieurs devient d'autant plus intolérable que, sur place, un potentiel parfois important ne trouve pas les débouchés lui assurant un développement sur et régulier. Seule une augmentation forte de la production locale peut permettre à l'ensemble de la population un accès satisfaisant aux laits et produits laitiers et une bonne amélioration du revenu des paysans, enclenchant ainsi un véritable processus de développement. Or, cet accès minimum aux laits et produits laitiers en Afrique est encore loin d'être atteint. Les considérations ethniques, religieuses, sociologiques, sur la consommation de lait et produits laitiers en Afrique ne résistent pas à cette seule évidence: l'obstacle majeur à la consommation régulière de lait et produits laitiers, c'est la faiblesse du pouvoir d'achat, ou autrement dit, un prix trop élevé du lait et des produits laitiers. La relative faiblesse des prix des produits importés avait sensiblement amélioré l'accès à ces produits, mais la dévaluation du FCFA devrait relancer le débat et la première solution envisageable est celle du développement de la production locale. Plusieurs pays de l'Est africain sont en passe de réussir ce plan de développement: Tanzanie, Kenya, et la présente étude semble indiquer que l'Ethiopie a mis en place une filière Lait dynamique à l'abri de toute importation.

L'Afrique de l'Ouest ne présente pas toujours des conditions géo-climatiques aussi favorables qu'à l'Est, mais des potentiels importants de production ont été identifiés sur de nombreuses zones (Mali, Burkina-Faso, Nord de la Côte d'lvoire).

Les tentatives para-étatiques n'ont pas toujours apporté les résultats escomptés, mais les initiatives privées montrent clairement la possibilité de structurer autour d'unités laitières bien gérées des filières Lait dynamiques et viables. Par contre, là où les conditions naturelles sont moins favorables, entraînant un niveau de ressources fourragères insuffisant, il sera impossible d'intensifier la production laitière et les efforts de sélection. de mise en place d'infrastructures de collecte et de transformation, etc.. demeureront illusoires, sinon à des coûts de revient rédhibitoires. Alors, le recours aux importations devient le passage obligé pour répondre aux besoins de la population. De toute évidence, l'intensification de la production laitière locale demeure une voie essentielle du développement rural dans maintes régions d'Afrique, mais la production à tout prix (= c'est à dire au détriment d'une prise en compte de la filière dans son ensemble) doit être écartée, car tôt ou tard la réalité économique s'imposera, multipliant les échecs rencontrés dans ce domaine.


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