3. Cadre sociopolitique et économique pour la sécurité alimentaire


Documents d'information technique 1-5
Volume 1
© FAO, 1996


Table des matières

Remerciements

Résumé analytique

 1. INTRODUCTION ET VUE D’ENSEMBLE

 2. ÉVOLUTION DU CADRE POLITIQUE DANS UNE PERSPECTIVE HISTORIQUE

 3. RELATIONS MONDIALES ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE DANS LES ANNÉES 90

 4. CHANGEMENTS DÉMOGRAPHIQUES ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

 5. LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE DANS UN MONDE EN ÉVOLUTION: L’ENVIRONNEMENT ÉCONOMIQUE

 6. MODIFICATION DU PARADIGME ÉCONOMIQUE

 7. FAIRE FACE À LA CRISE: AJUSTEMENT DES POLITIQUES ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

 8. LA CRISE ET L’AJUSTEMENT DANS LES PAYS DÉVELOPPÉS ET LEURS CONSÉQUENCES POUR LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT

 9. ÉVOLUTION DES RELATIONS ÉCONOMIQUES MONDIALES: FINANCES INTERNATIONALES ET COMMERCE

10. UN GRAND PAS EN AVANT DANS LA LIBÉRALISATION DES ÉCHANGES INTERNATIONAUX

11. PERSPECTIVES POUR L’INTÉGRATION ÉCONOMIQUE RÉGIONALE

12. RESSOURCES NATURELLES ET ENVIRONNEMENT

13. PROBLÈMES D’EMPLOI ET MARCHÉS DU TRAVAIL

14. UN ENVIRONNEMENT ÉCONOMIQUE MONDIAL EN ÉVOLUTION: IMPLICATIONS AU NIVEAU DES POLITIQUES

15. REGARDS VERS LE PASSÉ ET L’AVENIR

BIBLIOGRAPHIE


Remerciements

La préparation des documents de travail techniques du Sommet mondial de l’alimentation a mobilisé, outre le personnel de la FAO, un grand nombre d’experts de la communauté scientifique internationale, venant d’institutions internationales et d’organisations gouvernementales et non gouvernementales. L’ensemble des travaux a été contrôlé à la FAO par un comité de lecture interne composé de fonctionnaires choisis pour leurs compétences personnelles, et chargé de veiller à ce que l’ensemble respecte les critères de qualité et de cohérence requis.

Le présent document a été préparé par M. G.E. Rossmiller de la FAO. Après avoir été examiné une première fois par tous les départements techniques de la FAO, par des collègues invités, par le Comité de lecture et par des personnes sélectionnées en dehors de la FAO, une première version a été publiée et diffusée, pour observation, aux gouvernements, aux organisations intergouvernementales (OIG) et aux organisations non gouvernementales (ONG), ainsi qu’à d’autres experts sélectionnés. Des remarques et des avis très compétents ont été envoyés par MM. Sartaj Aziz (Pakistan); Carl Eicher du Michigan State University (Etats-Unis); Gerard Viatte de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE); Alex McCalla de la Banque mondiale; et Robert Paarlberg du Harvard University (Etats-Unis).

Le Secrétariat de la FAO remercie tous ceux qui ont apporté leur contribution à ce document, mais il assume la responsabilité de son contenu.


Résumé analytique

Un grand nombre d’éléments qui affectent la sécurité alimentaire ont changé au cours des deux décennies qui ont suivi la Conférence mondiale sur l’alimentation de 1974. Le plus important est sans doute l’avènement de l’économie mondiale. Mais d’autres faits nouveaux ont contribué tout autant à redessiner l’histoire, à savoir: l’effondrement de la planification centralisée en Europe centrale et orientale et dans l’ex-Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) et la transition vers une économie libérale qui en a découlé; l’effort de désarmement et de non-prolifération des armes; la croissance économique rapide en Chine et dans d’autres pays d’Asie de l’Est; et la conclusion des guerres civiles dans des pays comme l’Angola, le Mozambique, le Cambodge, El Salvador et le Nicaragua.

Ces dernières années, on a également assisté à une recrudescence des conflits ethniques, parfois associés à un nationalisme longtemps dissimulé, par exemple en Tchétchénie, dans l’ex-Yougoslavie, au Rwanda et en Somalie. De fait, si la plupart des conflits actuels opposent les habitants d’un même pays et non des pays différents, ils n’en compromettent pas moins la sécurité alimentaire. La consommation de drogues et les activités criminelles et la corruption qui accompagnent son trafic deviennent un des problèmes majeurs de la société contemporaine qui entrave la sécurité alimentaire aux niveaux individuel et collectif.

Quelques idées proposées à la Conférence de 1974 restent valables, et des questions comme la croissance démographique, la santé, l’urbanisation et la pauvreté doivent encore être traitées comme il convient. En outre, on accorde aujourd’hui une plus grande place aux problèmes environnementaux, tels que le déboisement, la qualité de l’eau et de l’air, les changements climatiques et la surpêche, ainsi qu’à leur relation avec la sécurité alimentaire.

Avec les crises du pétrole de 1973 et de 1979 et les crises de la dette des années 80, les responsables politiques ont été confrontés à la réalité de l’interdépendance planétaire. Le problème de la dette, qui n’est pas encore résolu malgré les nombreux allégements et réductions, a des effets délétères sur la sécurité alimentaire. Les paiements au titre du service de la dette réduisent la capacité d’importer des aliments, ainsi que des articles qui pourraient accroître la production et la consommation alimentaires intérieures, et limitent les ressources consacrées au développement et au bien-être social. Les remèdes le plus souvent préconisés étaient la stabilisation macroéconomique, la mise en oeuvre de réformes structurelles (libéralisation et privatisation) et une priorité accrue aux échanges internationaux. Un ensemble de mesures ont été employées, notamment: réforme des taux de change, privatisation des entreprises publiques, réduction du budget de la fonction publique et de l’ensemble des dépenses publiques, réduction de l’inflation et diminution des subventions.

Dans le processus d’ajustement, les stratégies d’industrialisation introvertie des années 60 et 70 ont été remplacées par des approches plus ouvertes sur l’extérieur. Une approche orientée sur le marché a remplacé les stratégies de développement tournées vers une participation gouvernementale directe aux affaires commerciales et économiques, et les subventions sélectives ont remplacé les subventions généralisées. Sous l’effet de ces changements structurels, les prix des produits agricoles tendent à augmenter, ce qui avantage les producteurs commerciaux et les paysans qui ont un accès bien défini à la terre, mais nuit aux salariés ruraux et urbains qui sont généralement des acheteurs nets de produits agricoles. La libéralisation des marchés et l’ajustement macroéconomique peuvent créer dans leur phase initiale un chômage et une pauvreté sectoriels, si des dispositifs de sauvegarde efficaces ne sont pas mis en place simultanément.

Dans le même temps, une nouvelle structure institutionnelle a été érigée pour le commerce. Les négociations du Cycle d’Uruguay de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), qui visaient à réduire le protectionnisme suivant un programme préétabli, ont été conclues, et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a été créée. On commençait aussi à constituer des organisations régionales du commerce. Les marchés financiers sont devenus pratiquement complètement intégrés et mondialisés. Tout cela a limité l’aptitude des pays à fixer eux-mêmes leurs politiques monétaires et budgétaires. Il est encore trop tôt pour évaluer pleinement l’importance de ce nouveau contexte économique plus libéral et intégré, pour la sécurité alimentaire mais, avec le temps, elle risque d’être notable.

L’assistance extérieure a diminué ces dernières années, et l’agriculture a été frappée de façon disproportionnée par cette réduction. En conséquence, en 1994, les engagements totaux dans le secteur agricole ont été inférieurs de 23 pour cent à ceux de 1990. Entre 1990 et 1993, les flux de capitaux extérieurs privés vers les pays en développement ont augmenté de façon spectaculaire, pour se stabiliser après la crise mexicaine; toutefois, comme ces capitaux sont concentrés sur un nombre limité de pays, on ne peut s’attendre à ce qu’ils compensent la réduction de l’aide publique aux pays à faible revenu. Par ailleurs, l’expérience montre le risque potentiel d’une dépendance excessive vis-à-vis de l’étranger, en cas d’instabilité des marchés financiers.

L’accentuation des déséquilibres démographiques et économiques entre les pays, et les événements politiques intervenus notamment au début des années 90, sont venus bouleverser les schémas internationaux de migration et de mobilité de la main-d’oeuvre. Outre les réfugiés, plus de 80 millions de personnes vivent actuellement hors de leur pays, et les migrations transfrontières ont atteint des niveaux sans précédent, pour des raisons politiques et économiques, tandis que l’exode rural au sein des frontières reste un problème grave dans beaucoup de pays. Les flux migratoires ont une incidence directe sur la sécurité alimentaire tant dans les pays d’origine que dans les zones d’accueil, ainsi que pour les migrants eux-mêmes. Les dépenses massives consacrées à la maîtrise et à la prise en charge des migrations pourraient être réduites si les efforts étaient dirigés davantage vers l’amélioration des conditions de vie et d’emploi de la population, dans le pays d’origine.

Pour qu’un cadre sociopolitique et économique puisse favoriser l’élimination de l’insécurité alimentaire et de la sous-alimentation ou, en d’autres termes, garantir des vivres pour tous:

En dernière analyse, la sécurité alimentaire de tout pays doit relever de la responsabilité et de l’autorité du gouvernement national collaborant avec les autorités locales et les groupements et les individus concernés. Une coordination et une liaison internationales sont nécessaires. La communauté et les organisations internationales peuvent être utiles, mais elles ne peuvent remplacer les actions concrètes et la volonté politique du pays lui-même de parvenir à la sécurité alimentaire.