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Modélisation hydrologique


Jean-Marie Lamachère, Laboratoire d'hydrologie, ORSTOM, Montpellier

Christian Puech, LCT CEMAGREF/ENGREF, Montpellier, France

Resumé

En Afrique de l'Ouest, la description et la cartographie des états de surface permet d'utiliser les relations hydro-pluviométriques du catalogue de Casenave et Valentin (1989) dans la modélisation hydrologique. Ces relations ont été établies à l'échelle du mètre carré pour de fortes averses. Afin d'appliquer ces relations à des averses naturelles, aux intensités faibles et variables, il est proposé ici l'utilisation des concepts de pluie utile et de potentiel de ruissellement. Le passage des potentiels de ruissellement aux écoulements réels s'effectue à l'aide d'une fonction de calage qui intègre les phénomènes de transfert à l'échelle des bassins versants.

Dans le cadre d'un programme financé par la FAO et exécuté conjointement par le CIEH, l'Orstom et le Cemagref (FAO 1996), cette méthodologie a été appliquée à la prédétermination des crues de fréquence décennale de petits bassins versants des zones sahélienne et tropicale sèche. Les résultats de ces travaux montrent qu'aucun coefficient de calage n'est nécessaire pour les très petits bassins versants imperméables de superficie inférieure à 10 km2. Pour les autres bassins, plus le bassin versant est grand et plus il est perméable, plus faible est le coefficient de calage. Appliquée au cours d'une saison des pluies, la même méthodologie permet de modéliser le comportement hydrologique des sols d'un bassin versant en tenant compte de l'évolution temporelle des états de surface (végétation, travail du sol, encroûtement). L'exemple du calcul des apports potentiels, annuels et mensuels du petit bassin versant de Bindé (région de Manga, Burkina Faso) montre qu'il est nécessaire d'établir une fonction de calage dont les paramètres varient au cours de la saison des pluies, afin de rendre compte du fonctionnement hydrologique complexe du bassin versant.

Abstract

In West Africa, description and mapping of the surface features allow for the use of the relationships between rain and runoff at the elementary scale (1 m2) taken from the Casenave and Valentin catalogue (1989). The relationships were established for rainstorms. In order to apply these to showers having low and unsettled rain intensities, concepts of useful rainfall and runoff potentials are proposed here. To change from the runoff potentials to the stream flow it is necessary to use an adjustment function which integrates the transfer phenomena to the scale of the basins.

In the framework of the FAO programme carried out by CIEH, Orstom and Cemagref (FAO 1996), this methodology was applied to predetermine the decennial flood on small basins in the Sahelian and dry tropical areas of West Africa. The results show that no adjustment coefficient is necessary for very small impermeable basins having a drainage area smaller than 10 km2.

For other basins, the larger and more permeable they are, the smaller is the adjustment coefficient. Applied to the rainy season, the same methodology makes it possible to model the soils' hydrological behaviour on a basin including the temporal evolution of the surface types (vegetation, tillage or weeding, crusting). Calculations of the annual and monthly potential runoff on the small basin of Bindé (region of Manga, Burkina Faso) show that it is necessary to establish an adjustment function with variable parameters during the rainy season, in order to take into account the complicated hydrological behaviour of the basin.


Introduction

En zone sahélienne, l'amélioration de l'estimation des ruissellements à l'échelle des petits bassins versants viendra d'une meilleure connaissance des aptitudes des sols au ruissellement (Rodier et al. 1984). L'une des façons de répondre à cette exigence a consisté à mesurer l'aptitude au ruissellement des surfaces élémentaires par simulation de pluies, à l'échelle du mètre carré, dans toute l'Afrique de l'Ouest. Une typologie générale a été proposée par Casenave et Valentin sous la forme d'un catalogue : "Les états de surface de la zone sahélienne" (1989). Selon ces auteurs, "le terme état de surface désigne un système de surfaces élémentaires à un instant donné, système qui constitue un ensemble homogène au sein duquel les différentes composantes entretiennent des relations fonctionnelles quant au ruissellement et à l'infiltration".

Une autre réponse possible, complémentaire de la précédente, consiste à utiliser les nouveaux outils de connaissance et de représentation de la surface du sol mis au point grâce à la télédétection, les SIG (système d'information géographique) et les MNT (modèle numérique de terrain). De nombreux chercheurs ont développé l'utilisation des SIG dans la modélisation hydrologique (Kovar et Nachtnebel, 1996) mais peu d'auteurs intègrent la télédétection dans l'analyse des processus hydrologiques (Schultz et Barrett, 1989).

Dans une série de trois articles publiés dans les actes de l'atelier « Télédétection et gestion des ressources en eau » qui s'est tenu à Montpellier du 29.11 au 1.12.1995, nous exposons brièvement l'utilisation de ces nouveaux outils dans les zones sahélienne et tropicale sèche :

· la description au sol des états de surface,

· l'utilisation de la télédétection pour la cartographie des états de surface,

· la modélisation des lames ruisselées par agrégation des relations hydro-pluviométriques élémentaires à l'échelle des unités hydrologiques et des bassins versants.

Nous développons également dans le présent article une application de ces nouveaux outils à la prédétermination des lames ruisselées pour les petits bassins versants des régions sahélienne et tropicale sèche. Cette application comprendra :

· la détermination de la classe d'infiltrabilité de la méthode Orstom (FAO, 1996),

· la détermination de la lame ruisselée décennale,

· la détermination des apports mensuels et annuels sur le petit bassin de Bindé par la prise en compte de l'évolution des états de surface au cours de la saison des pluies.

Télédétection et hydrologie

Pour les petits bassins versants, la détermination des caractéristiques hydrologiques est, jusqu'à présent, essentiellement globale. L'utilisation de données nouvelles, issues des traitements numériques d'images satellite, ouvre des possibilités multiples soit par l'utilisation des modèles globaux existants, par exemple le modèle SWRRB (Arnold et al., 1989) et la méthode du Service de conservation des sols (US Dept. of Agr., 1985), en améliorant la connaissance des paramètres d'entrée des modèles, soit par l'utilisation de nouveaux modèles conçus pour le traitement d'informations spatialisées, par exemple le modèle MODLAC (Girard, 1982) et le modèle r.water.fea (Vieux et Gauer, 1994).

En zone sahélienne

En zone sahélienne, la pluviométrie moyenne interannuelle varie entre 200 et 600 mm. Cette zone peut être considérée a priori comme favorable à l'utilisation de la télédétection. On y note en effet :

Un contexte géographique et climatique caractérisé par :

· une bonne visibilité sur de longues périodes, due à la rareté du couvert nuageux, même en saison des pluies,

· une végétation peu abondante et dispersée qui limite l'extension des feux de brousse et permet d'observer la nature des sols.

Un contexte hydrologique marqué par :

· des pluies violentes et de courte durée qui conduisent à la formation de sols nus encroûtés, générateurs de forts ruissellements,

· un fort ruissellement de surface. « Au Sahel, le ruissellement de surface est prépondérant » a écrit Jean Rodier (1992).

De la zone sahélienne humide (de 400 à 600 mm) à la zone sahélienne sèche (200 à 400 mm), le couvert végétal se raréfie et l'organisation pédologique superficielle des sols (croûtes) prend de plus en plus d'importance dans la détermination de l'aptitude des sols au ruissellement et à l'infiltration. Dans ce contexte, le lien entre télédétection et hydrologie va donc se faire sur le constat que les états de surface, et plus particulièrement les organisations superficielles des sols, sont primordiaux pour la connaissance du ruissellement et la prédétermination des apports à l'échelle des petits bassins versants.

En zone tropicale sèche

En Afrique de l'Ouest, la zone tropicale sèche est comprise entre les isohyètes interannuelles 600 et 1 000 mm. Moins favorable que la zone sahélienne à l'utilisation de la télédétection, elle présente néanmoins un certain nombre d'atouts :

Un contexte géographique et climatique caractérisé par :

· une longue période sèche (novembre à mars) avec une bonne visibilité sur cette période, mais une visibilité plus faible qu'en zone sahélienne au cours de la saison pluvieuse (avril à octobre),

· une végétation herbacée abondante en saison des pluies qui permet, en saison sèche, le développement des feux de brousse et leur propagation,

· des pourcentages de terres cultivées très variables d'une région à l'autre, qui peuvent être localement très importants (de 50 à 60 %).

Un contexte hydrologique marqué par :

· des pluies violentes et de courte durée qui conduisent à la formation de sols encroûtés générateurs de forts ruissellements, mais aussi des pluies plus fréquentes et de faible intensité qui favorisent la croissance du couvert herbacé,

· des crues plus fréquentes qu'en zone sahélienne et des écoulements où l'importance du débit de base, dû à la remontée des nappes aquifères, commence à influencer significativement le régime des cours d'eau, principalement en fin de saison des pluies.

Le pourcentage de couverture végétale et de mise en culture sont ici les principaux facteurs explicatifs du ruissellement et de l'infiltration. Le couvert herbacé est susceptible de fortes variations sous l'effet des feux de brousse et de la sénescence périodique. Pour une pluviométrie annuelle inférieure à 800 mm, la couverture végétale ligneuse étant généralement de faible densité, la surface du sol et sa couverture herbacée sont directement accessibles à l'observation satellitaire. Dans le contexte tropical sec, le lien entre télédétection et hydrologie va donc se faire sur le constat que les états de surface, plus particulièrement le couvert végétal herbacé et la mise en culture des sols, sont primordiaux pour la connaissance du ruissellement. En ce qui concerne la prédétermination des apports à l'échelle des petits bassins versants, des informations sur l'écoulement de base des marigots devront compléter celles qui concernent le ruissellement.

Caractéristiques communes aux zones sahélienne et tropicale sèche

En Afrique de l'Ouest, la faiblesse du relief est une caractéristique commune aux zones sahélienne et tropicale sèche. Elle entraîne une grande homogénéité climatique sur l'ensemble des deux zones et peu de déformations géométriques sur les images satellite.

Le contexte cartographique général est peu précis. Il n'existe encore guère de cartes topographiques au 1/50 000, ce qui peut justifier l'achat d'images spatiales à haute résolution. La couverture aérienne est rarement renouvelée, ce qui légitime l'achat d'images satellite récentes.

Dans le contexte sahélien et, par extension, dans le domaine tropical sec, le lien entre télédétection et hydrologie va se faire selon le constat que les états de surface sont primordiaux pour la connaissance des ruissellements. Dans ces deux zones géographiques, toute méthodologie efficace de prédétermination des crues utilisant la télédétection passera donc par une cartographie des états de surface.

Principes fondamentaux

Choix méthodologiques

Pour transformer une description de la surface du sol en lame ruisselée, plusieurs démarches sont possibles. Elles sont basées sur le choix préalable de l'échelle de modélisation hydrologique, en relation avec les possibilités de transformation de l'information spatiale en information de ruissellement. Nos choix méthodologiques sont les suivants :

1. utilisation des relations hydro-pluviométriques du catalogue des états de surface (échelle 1 m2) comme fonctions de production,

2. cartographie des états de surface par télédétection et utilisation d'un SIG,

3. agrégation des lames ruisselées élémentaires par sommation à l'échelle des unités cartographiques (classes d'états de surface) et des bassins versants,

4. utilisation d'une fonction de calage pour reconstituer les lames ruisselées à l'exutoire.

Les méthodes proposées ci-après ne concernent que l'estimation des volumes ruisselés (crues). En Afrique intertropicale, ceux-ci constituent pour les petits bassins versants :

· plus de 90% de l'écoulement sous une pluviométrie annuelle inférieure à 600 mm;

· de 70 à 80% de l'écoulement sous une pluviométrie annuelle de 900 mm;

· de 50 à 60% de l'écoulement sous une pluviométrie annuelle de 1 200 mm.

Le calcul des apports repose donc, en zone sahélienne, presque exclusivement sur la simulation des crues générées par le ruissellement. Par contre, en zone plus humide, le calcul des apports repose aussi sur une connaissance, même sommaire, des fluctuations du débit de base.

La cartographie des états de surface d'un bassin versant est la première étape d'une modélisation spatialisée des ruissellements. La seconde étape consiste à tenir compte de la variabilité spatiale et temporelle des pluies. La troisième étape comprend l'intégration de l'évolution saisonnière des états de surface, tels que le développement de la végétation, les travaux culturaux ou l'engorgement des sols. En l'absence d'informations spatialisées sur l'évolution de ces phénomènes, la modélisation hydrologique ne peut être qu'imparfaite. La méconnaissance des pertes par transfert le long des versants et dans le réseau hydrographique constitue par ailleurs d'autres sources importantes d'incertitude.

Le comportement hydrologique des états de surface

Les fonctions de production à l'échelle élémentaire

Les types de surfaces élémentaires ayant été soigneusement répertoriés et décrits au cours des observations au sol, ils peuvent être identifiés dans le catalogue des états de surface de la zone sahélienne. Ce catalogue permet d'associer à chaque type de surface élémentaire i et à chaque pluviomètre n une relation hydrodynamique du type :

Lrn,i = (ai + bi IKn ) Pun,i + ci Ikn - di (1)

où : Lrn,i est la lame ruisselée sur la surface élémentaire i attachée au pluviomètre n,

Pun,i est la pluie utile de la surface élémentaire i attachée au pluviomètre n,

ai, bi, ci et di sont les paramètres hydrodynamiques caractéristiques de la surface élémentaire i, de son sol, de sa couverture végétale et de son organisation superficielle,

Ikn est l'indice des précipitations antérieures, correspondant à un indice d'humectation

avec IKn,j = (IKn,j-1 + Pn,j-1 ) e-symb1.gif (847 bytes)T (2)

où : T est l'intervalle de temps en jours séparant les pluies journalières des jours j (Pn,j) et j-1 (Pn,j-1) au même pluviomètre n, et  symb1.gif (847 bytes) est un coefficient égal à 0,5 en zone sahélienne.

La pluie utile (figure 1) est définie ici comme la hauteur pluviométrique de l'averse, de durée T, dont l'intensité IP est supérieure à l'intensité de pluie limite du ruissellement Il, autre valeur caractéristique de la surface élémentaire, qui varie avec le degré d'humectation du sol (IK) et son état de surface :

Pun,i = symb2.gif (845 bytes)T (IPn * symb3.gif (847 bytes)t) pour IPn > Ili (3)

FIGURE 1

Calcul de la pluie utile pour IL = 10 mm/h

La formulation mathématique du potentiel de ruissellement de l'unité cartographique u est la suivante :

PRu = symb2.gif (845 bytes)n,i (symb1.gif (847 bytes)n,i,u * Lrn,i,u ) avec Lrn,i,u = Lrn,i de la relation (1) (4)

où : PRu est le potentiel de ruissellement de l'unité hydrologique u,

Lrn,i,u est la lame ruisselée de la surface élémentaire i attachée au pluviomètre n sur l'unité cartographique u,

symb1.gif (847 bytes)n,i,u est le coefficient de pondération de la surface élémentaire i attachée au pluviomètre n sur l'unité cartographique u.

Pour une durée variable au cours de la saison des pluies (une semaine à quelques mois) on peut associer à chaque unité cartographique (classe d'états de surface), une liste de surfaces élémentaires avec leurs coefficients de pondération correspondant à la composition de chaque classe en surfaces types élémentaires types. La composition d'une même classe d'états de surface est en effet susceptible d'évoluer au cours de la saison des pluies; cela revient à modifier la liste des surfaces élémentaires types et leurs coefficients de pondération en fonction du développement de la végétation et du calendrier cultural (Lamachère, 1996).

La formulation proposée ci-dessus (relations 1 à 4) est très générale. Elle permet, par le calcul de la pluie utile, de ne faire intervenir que des intensités pluviométriques susceptibles de ruisseler. Elle permet également, si on dispose de plusieurs pluviomètres sur le bassin versant, de rattacher les états de surface aux différents pluviomètres en fonction de leur localisation.

Ainsi calculée, la lame ruisselée doit être considérée comme un potentiel de ruissellement, moyenne pondérée des ruissellements à l'échelle élémentaire. On opère ici un changement d'échelle du comportement hydrologique puisqu'on passe d'une référence implicite de 1 m2 (taille de la mesure en simulation de pluies) au comportement hydrologique d'une surface beaucoup plus grande, celle d'un versant ou d'une partie de versant. La lame ruisselée à la nouvelle échelle n'est pas la somme des lames ruisselées élémentaires. La plupart du temps elle lui sera inférieure.

Agrégation à l'échelle des bassins versants

A l'échelle des bassins versants, l'agrégation des ruissellements peut être réalisée soit par simple sommation pondérée des potentiels de ruissellement des unités cartographiques composant le bassin versant, soit par utilisation d'une fonction de transfert permettant de décaler dans le temps l'arrivée des ruissellements à l'exutoire du bassin. Nous ne traiterons ici que de la simple sommation et de l'utilisation d'une fonction de calage.

La cartographie des états de surface d'un bassin versant permet de connaître, au terme de la procédure de traitement des images, les superficies occupées, sur ce bassin, par les différentes unités cartographiques. A chaque unité cartographique on peut associer un coefficient de pondération (symb4.gif (851 bytes)u) correspondant à la surface qu'il occupe sur le bassin versant. La somme pondérée des potentiels de ruissellement (PRu) de toutes les unités fournit une estimation du potentiel de ruissellement global à l'échelle du bassin versant (PRg), soit :

PRg = symb2.gif (845 bytes)u (symb4.gif (851 bytes)u * PRu) (5)

La lame ruisselée réelle (LR) est ensuite obtenue par l'utilisation d'une fonction de calage de laquelle on extrait le coefficient de calage (CC) et l'ordonnée à l'origine (B), qui varient au cours de la saison des pluies puisqu'ils représentent les pertes par transfert le long des versants et dans le réseau hydrographique.

LR = CC * PRg + B (6)

Les valeurs du coefficient de calage et de l'ordonnée à l'origine sont obtenues par analyse des relations entre les valeurs du potentiel de ruissellement et les lames ruisselées observées à l'exutoire du bassin versant, ces relations étant supposées linéaires.

Application à la détermination des crues

Prédétermination des crues de fréquence décennale

La principale difficulté et la principale source d'erreurs dans l'utilisation des méthodes Orstom et CIEH, pour la prédétermination des crues de fréquence décennale (FAO, 1996), consiste à déterminer le coefficient de ruissellement de même fréquence. Il paraît donc judicieux de se servir à cet effet des nouvelles technologies. Dans ce but, Jean Rodier a proposé (1992) de définir les classes d'infiltrabilité des petits bassins versants d'Afrique tropicale par le calcul des lames ruisselées pour une pluie utile égale à 50 mm (Pu = 50 mm) et un indice d'humectation égal à 5 mm (IK = 5 mm). Mais on peut aussi calculer directement les lames ruisselées correspondant aux pluies de fréquence décennale.

TABLEAU 1

Définition des classes d'infiltrabilité de la méthode Orstom (Rodier 1992)

Lame ruisselée en mm
pour Pu = 50 mm et IK = 5 mm

Classe d'infiltrabilité
> 40 Très imperméable (TI)
30-37 Particulièrement imperméable (PI)
24-26 Imperméable (I)
12-18 Relativement imperméable (RI)
6-9 Perméable (P)
1-5 Très perméable (TP)

Détermination de la classe d'infiltrabilité

A partir d'un échantillon de petits bassins versants expérimentaux, une correspondance (tableau 1) a été établie entre d'une part les lames ruisselées provenant d'une agrégation des lames ruisselées élémentaires à l'échelle des bassins versants et, d'autre part, les classes globales d'infiltrabilité définies à partir des lames ruisselées observées aux exutoires des bassins.

Les classes d'infiltrabilité définies par Jean Rodier correspondent à des bassins versants types caractérisés par des conditions régionales moyennes de ruissellement sur les versants et des conditions normales de transfert dans le réseau hydrographique.

Pour tenir compte des conditions particulières propres au bassin versant étudié, il conviendra d'utiliser la liste de contrôle associée à la méthode Orstom. Ces conditions particulières concernent l'existence de zones à forte perméabilité à l'aval des versants, de zones endoréiques locales, d'un pourcentage élevé de mise en culture ou d'une dégradation plus ou moins prononcée du réseau hydrographique.

Détermination de la lame ruisselée

Si l'on souhaite calculer directement les lames ruisselées de fréquence décennale à partir des cartes d'états de surface, Jean Rodier (1992) propose d'utiliser des coefficients de calage qui varient en fonction de la classe de perméabilité, de la superficie du bassin versant et du taux de remplissage des réservoirs superficiels. Ces coefficients ont été calculés pour des conditions favorables au ruissellement, à partir des fonctions de calage (équation 6), en considérant l'ordonnée à l'origine B égale à 0, c'est-à-dire un remplissage maximum des réservoirs superficiels. Les potentiels de ruissellement (PR) ont été calculés en utilisant les cartes d'états de surface de petits bassins versants aux superficies égales ou inférieures à 20 km2 et les relations hydro-pluviométriques à l'échelle élémentaire figurant dans le catalogue de Casenave et Valentin (1989). Ces coefficients ont été fournis à titre indicatif et provisoire par Jean Rodier.

Sur la seconde ligne de chaque classe de perméabilité du tableau 2, nous avons placé les valeurs des coefficients de calage calculés à partir des abaques Orstom (FAO, 1996) présentant la décroissance des coefficients de ruissellement décennaux avec la croissance de la superficie des bassins. A l'exception de la classe RI (relativement imperméable), nous avons pris la même valeur de référence pour les bassins versants de superficie égale à 1 km2. Pour la classe RI, la valeur initiale de 0,85 nous a paru plus cohérente que la valeur de 0,60 proposée par Jean Rodier.

La décroissance des coefficients moyens de calage avec la taille du bassin versant présente une analogie évidente avec la décroissance des coefficients de ruissellement décennaux des abaques Orstom. Cette analogie n'a rien de fortuit. Elle est en effet produite par les mêmes causes, c'est-à-dire les pertes par écoulement le long des versants et dans le réseau hydrographique. A priori, ces coefficients de calage devraient conserver une certaine signification pour des averses plus modestes que l'averse décennale et subir des variations sensibles au cours de la saison des pluies. En particulier, l'ordonnée à l'origine de la fonction de calage devrait prendre des valeurs négatives en début de saison des pluies.

TABLEAU 2

Coefficients moyens de calage entre lames ruisselées simulées et observées.

Classes de perméabilité Modes de calcul Coefficients de calage par classe de superficie en Km2
1 5 10 20 50 100 200
Particulièrement
imperméables PI
Rodier 1992
Orstom 1995
1,15

1,15

1,05

1,08

-

0,99

0,90

0,87

-

0,74

-

0,54

-

0,44

Imperméable
I
Rodier 1992
Orstom 1995
1,10

1,10

1,02

0,97

-

0,89

0,85

0,85

-

0,62

-

0,53

-

0,44

Relativement
imperméable RI
Rodier 1992
Orstom 1995
0,60

0,85

0,55

0,75

-

0,70

0,45

0,63

-

0,55

-

0,48

-

0,44

Perméable
P
Rodier 1992
Orstom 1995
0,60

0,60

0,50

0,53

-

0,48

0,40

0,36

-

0,28

-

0,24

-

0,20

Très perméable
TP
Rodier 1992
Orstom 1995
0,60-0

0,60-0

0,45-0

0,45-0

-

0,38-0

0,30-0

0,30-0

-

0,23-0

-

0,19-0

-

0,15-0

Validation

L'application de cette méthodologie a donné les résultats consignés dans le tableau 3. Deux régions climatiques sont représentées sur ce tableau:

· la zone tropicale sèche (de 850 à 1 200 mm) avec les bassins du Kuo et du Dougo (peu cultivés) et le bassin versant de Bindé (très cultivé);

· la zone sahélienne sensu lato (de 150 à 800 mm) avec les bassins versants de Taïma, Polaka, Tchalol (zone sèche peu cultivée) et le bassin versant de Thyssé Kaymor (zone plus humide très cultivée).

A partir de ces exemples, il est clair qu'au-dessus d'une superficie de 10 km2 les lames ruisselées calculées par simple agrégation (colonne 7, valeurs brutes) sont nettement surestimées. L'utilisation des coefficients de calage (colonne 8) permet de mieux approcher les valeurs observées. Au-dessous d'une superficie de 10 km2, on peut remarquer que la méthode Orstom, utilisant les classes d'infiltrabilité, ne fournit pas de meilleurs résultats que l'agrégation brute.

A partir des quelques exemples traités, on peut donc présumer que l'utilisation des nouvelles technologies pour la prédétermination des lames ruisselées de fréquence décennale (ou des coefficients de ruissellement) conduit à des résultats comparables à ceux obtenus par d'autres méthodes. Ils sont même souvent meilleurs. De plus, contrairement aux autres méthodes, le traitement numérique des images satellite fournit des informations spatialisées qui peuvent être utilisées hors du bassin où elles ont été recueillies.

TABLEAU 3

Lames ruisselées décennales déterminées à l'aide des nouvelles technologies

        Lames ruisselées de fréquence décennale en mm
Bassins versants Superf. en km2 Pluie annuelle
en mm
Classe d'infil.
(*)
Estim. à partir
des obs.
Abaques Télédétection et agrég.
Orstom
FAO 1995
Valeurs
brutes
Corrigées
par coeff.
Kuo (BF) 58,9 1 100 RI 15,8 23 31 16,6
Dougo (BF) 158,0 1 100 RI 6,4 21 29 13,3
Bindé (BF) 9,7 950 RI à I 32,0 30 34 24 à 31
Taïma (BF) 104,0 450 I 19,0 14 29 17,0
Polaka (BF) 9,6 450 I 22,0 35 32 30,0
Tchalol (BF) 10,5 450 I 42,0 36 32 30,0
Thyssé (Sen) 16,0 800 RI 20,0 22 28 18,6

(*) Infiltrabilités déterminées par agrégation des lames ruisselées élémentaires pour Pu = 50 et IK = 5 mm; BF = Burkina Faso, Sen = Sénégal.

Application à la détermination des apports

Variabilité temporelle des états de surface

Deux échelles de temps doivent être considérées pour étudier la variabilité temporelle des états de surface : l'échelle saisonnière et l'échelle pluriannuelle. Nous nous intéresserons ici à l'échelle saisonnière.

Un état de surface est défini par un ensemble de caractères : type de sol, micro-relief et organisation superficielle, taux d'humectation et couverture végétale. Sur un même site, ces caractères varient en fonction du temps. Le type de sol et sa granulométrie restent les caractères les plus stables, le taux d'humectation et la couverture végétale étant les caractères les plus instables.

La variabilité saisonnière du couvert herbacé

Au mois d'avril (ou mai) en zone soudanienne et au mois de mai (où juin) en zone sahélienne, l'apparition des premières pluies, assez fortes et non isolées, déclenche le développement de la végétation herbacée. Sous réserve que les pluies soient suffisantes, en quantité et en fréquence, pour satisfaire les besoins en eau des jeunes plantes, le couvert végétal herbacé croît plus ou moins rapidement selon la zone climatique, le type de sol et sa position sur le versant.

En zone soudanienne, la croissance du couvert herbacé dépend principalement de la précocité des premières pluies et de leur régularité. Les observations effectuées au ranch de Nazinga par Fournier (1991) montrent que le pourcentage de recouvrement herbacé, compris entre 5 et 20 % après le passage des feux de brousse, croît régulièrement d'environ 20 % par mois, dès les premières grosses pluies du mois d'avril. Il faut en moyenne trois mois à la strate herbacée pour retrouver un taux de recouvrement supérieur à 80 % sur la plupart des sols et des unités de paysage.

En zone sahélienne, dans la région d'Oursi au Burkina Faso (Claude, Grouzis, Milleville 1991), la croissance du couvert herbacé est plus rapide et plus forte sur les sols sableux éoliens que sur les glacis argileux. La phytomasse herbacée atteint son maximum en 40 jours sur les sols sableux dunaires et en 50 jours sur les glacis argileux. Le couvert végétal reste faible sur les glacis, où le maximum de recouvrement est toujours inférieur à 40 % et souvent inférieur à 20 %. Il est nettement plus important sur les sols sableux éoliens où le taux de recouvrement maximal est compris entre 40 et 60 %. Il est très important dans les bas-fonds où son taux de recouvrement dépasse 80 %.

Le tableau 4 (Lamachère, 1996) illustre l'influence du couvert végétal sur l'aptitude au ruissellement des sols en région sahélienne et soudanienne.

Les fluctuations du couvert herbacé et l'incidence exacte du taux de recouvrement herbacé sur le comportement hydrodynamique des sols sont encore mal connues. La limite inférieure du taux de recouvrement, au-dessous duquel le couvert végétal herbacé ne semble plus avoir aucun effet sur le ruissellement, se situe autour de 30 %.

La limite supérieure, au-dessus de laquelle une augmentation du taux de recouvrement ne joue plus qu'un rôle mineur, se situe autour de 80 %. Entre ces deux valeurs nous en sommes réduits pour l'instant à des interpolations plus ou moins hasardeuses.

TABLEAU 4

Influence du couvert végétal sur l'aptitude au ruissellement

Types de surfaces Coefficients hydrodynamiques Intensités limites de ruissellement Principales caractéristiques des surfaces
élémentaires a b c d Il0 Ils  
Zone soudanienne, région de N'Dorola : surfaces élémentaires à faible activité faunique, sans charge grossière
DES 2 0,71 0,0020 0,012 6,5 20 10 Sols sab.-lim. et couvert herbacé inf. à 40 %
DES 3 0,30 0,0030 0,010 8,0 30 18 Sols sab.-lim. et couvert herbacé sup. à 80 %
Zone sahélienne, région d'Oursi : surfaces élémentaires à faible activité faunique, sans charge grossière
DES 2 0,30 0,0030 0,010 8,0 30 20 Sols sableux et couvert herbacé sup. à 80 %
DES 3 0,47 0 0,150 9,8 20 10 Sols sableux, et couv. herbacé inf. à 50 %
ERO 4 0,82 0,0005 0,077 10,5 10 5 Sol sableux nu encroûté des micro-buttes

Les paramètres a, b, c et d correspondent à la relation Lr = (a + b IK) Pu + c IK - d avec IK = IKj = (IKj-1 + Pj-1) e-symb1.gif (847 bytes).T , IK étant l'indice d'humectation du sol, et  symb1.gif (847 bytes)= 0,5.Il0 correspond à un sol sec (IK = 0) et Ils à un sol très humide (IK = 20).

Le taux d'humectation

Le taux d'humectation des sols est un facteur qui conditionne plus ou moins fortement leur aptitude au ruissellement et à l'infiltration en fonction du type de sol et de son état de surface.

Sur les sols très argileux, avec fentes de retrait en saison sèche, tant que le sol n'est pas correctement humecté, jusqu'à la fermeture des fentes de retrait, le ruissellement est nul et l'infiltration totale. Dès que les fentes de retrait se sont refermées, ce qui correspond approximativement à un apport d'eau équivalent à 200 millimètres de hauteur pluviométrique, le ruissellement devient maximal, avec des coefficients supérieurs à 80 %.

En zone soudanienne, dès la fin du mois d'août, la remontée du niveau des nappes aquifères dans les bas-fonds et sur leurs marges peut créer également des conditions locales très favorables au ruissellement par la saturation superficielle et permanente des sols.

A contrario, sur les sols sahéliens fortement encroûtés, le taux d'humectation du sol joue un rôle marginal sur son aptitude au ruissellement. Au Sahel, il joue un rôle d'autant plus important sur l'infiltration que la porosité superficielle du sol est ouverte, ce qui correspond généralement à un fort taux de recouvrement herbacé.

Le tableau 4 fournit quelques exemples de variation des coefficients hydrodynamiques avec l'indice d'humectation des sols (IK). Cet indice varie entre les valeurs 0 et 20 mm en zone sahélienne, 0 et 40 mm en zone soudanienne. On peut ainsi constater l'influence non négligeable de l'indice d'humectation du sol sur le ruissellement, et plus particulièrement sur l'intensité de pluie limite du ruissellement.

Le micro-relief et l'organisation superficielle des sols cultivés

Valentin (1989) définit trois types de surfaces élémentaires sur les sols cultivés : un type C 1 où la porosité vésiculaire est inférieure à 5 %, un type C 2 où la porosité vésiculaire est comprise entre 5 et 30 %, un type C 3 où la porosité vésiculaire est supérieure à 30 %. Chaque type comprend une ou deux variantes selon le couvert végétal, l'amplitude du micro-relief ou la texture du sol. Ces trois types ne sont en réalité que des situations passagères de l'état de surface d'un sol cultivé. La surface d'un sol cultivé suit en effet une évolution qui dépend surtout de l'itinéraire cultural, avec son mode de travail du sol, et secondairement des chutes de pluies et de la position du sol sur le versant.

Au Nord-Ouest du Burkina Faso, dans la province du Yatenga et la région de Bidi (14 ° de latitude Nord), les observations effectuées sur sols sableux fins (Lamachère, 1991) ont montré que le micro-relief et l'organisation superficielle du sol évoluent sous l'action des gouttes de pluie et du ruissellement, de telle sorte qu'à la suite d'un sarclage butté (type C 1), le type C 2 est observé après un total pluviométrique de 100 mm tombé en fin de sarclage. Le type C 3 est observé après un total pluviométrique égal à 200 mm. Nous avons représenté, sur les figures 2 à 4, l'évolution des paramètres a, Pi et Il, correspondant à l'expression (1), en fonction de la somme des pluies tombées depuis le sarclage {S(Pa)}.

L'état des connaissances actuelles sur l'évolution du micro-relief, de l'organisation superficielle et du comportement hydrodynamique superficiel des sols cultivés (en fonction de l'itinéraire cultural, du type de sol et des chutes de pluie) est encore très fragmentaire dans les zones sahélienne et soudanienne.

FIGURE 2

Variations du coefficient a

FIGURE 3

Variations du paramètre Pi

FIGURE 4

Variations de l'intensité de pluie limite du ruissellement (II)

L'étude la plus récente sur ce thème est consacrée aux sols cultivés du sud Saloum au Sénégal (Perez, 1994). Le rôle joué par cette évolution dans la genèse des ruissellements sur les cultures mériterait un développement plus important des recherches dans cette direction.

Modélisation de la variabilité spatio-temporelle des états de surface

Pour modéliser le comportement hydrodynamique des unités hydrologiques, la principale difficulté consiste à faire varier leur composition en fonction d'une part du développement du couvert végétal herbacé sur les surfaces naturelles et, de l'autre, des travaux agricoles et des chutes de pluie sur les surfaces cultivées.

Les variations temporelles des états de surface du bassin versant de Bindé (Lamachère, 1996), dans la région de Manga, au sud du Burkina Faso, ont été caractérisées par quatre états successifs pour la végétation herbacée (V0 à V3) et quatre répartitions différentes (CH 0 à CH 3) pour les surfaces cultivées.

Nous avons établi le calendrier suivant pour modéliser le comportement hydrodynamique des unités hydrologiques de ce bassin au cours de l'année 1982 :

· du 18/02/1982 au 11/05/1982 : états V0 et CH0, fortes pluies vers la mi-avril,

· du 12/05/1982 au 05/06/1982 : états V0 et CH1, labours vers la mi-mai,

· du 06/06/1982 au 20/06/1982 : états V1 et CH1, couvert végétal herbacé à 40%,

· du 21/06/1982 au 28/06/1982 : états V1 et CH2, 100 mm de pluies après les labours,

· du 29/06/1982 au 13/07/1982 : états V2 et CH2, couvert végétal herbacé à 60 %,

· du 14/07/1982 au 05/08/1982 : états V2 et CH1, premier sarclage début juillet,

· du 06/08/1982 au 29/08/1982 : V3 et CH2, couvert végétal herbacé à 80%,

· du 30/08/1982 au 31/08/1982 : états V3 et CH3, 200 mm de pluies après le sarclage,

· du 01/09/1982 au 23/09/1982 : états V3 et CH1, second sarclage fin août,

· du 24/09/1982 au 30/10/1982 : états V3 et CH2, 100 mm de pluies après le sarclage.

Les calculs sont effectués à l'aide d'un tableur, en combinant quatre types de tableaux. Les résultats de cette modélisation sur le bassin versant de Bindé pour l'année 1982 sont reportés sur le tableau 5.

TABLEAU 5

Ecoulements mensuels et annuels sur le bassin versant de Bindé en 1982

Mois Mars Avril Mai Juin Juillet Août Sept. Oct. Année
Lame écoulée

0,0

11,4

9,2

6,4

4,0

8,1

19,4

8,0

66,5

Lame ruisselée

0,0

10,9

9,8

6,4

3,2

5,6

10,1

0,9

46,9

Scénario 1

0,0

20,6

11,1

18,5

19,3

23,8

20,4

8,9

122,6

Scénario 2

0,0

20,6

11,1

15,9

14,6

14,2

12,9

5,5

94,8

Scénario 3

0,0

20,6

11,1

12,3

13,1

12,6

10,1

3,7

83,5

Le scénario 1 correspond à une répartition des surfaces élémentaires de début de saison. Le scénario 2 correspond à une répartition des surfaces élémentaires avec évolution du couvert végétal herbacé. Le scénario 3 correspond à une évolution des surfaces cultivées et du couvert végétal herbacé.

La comparaison des valeurs figurant au tableau 3 montre que la prise en compte des variations du couvert végétal herbacé, puis la prise en compte des modifications de la surface des sols cultivés, modifient de manière significative l'estimation des lames ruisselées sur le bassin versant de Bindé, dans le sens d'une amélioration des résultats, sans toutefois nous autoriser à nous affranchir de l'utilisation d'une fonction de calage dont les paramètres varient au cours de la saison des pluies.

Conclusion

L'utilisation de la cartographie des états de surface en zones sahélienne et tropicale sèche permet enfin de sortir du domaine subjectif en ce qui concerne l'appréciation globale de la perméabilité à l'échelle des bassins versants (Rodier, 1992). Au vu des résultats déjà obtenus, on peut soutenir avec raison qu'une meilleure compréhension et une meilleure modélisation des processus hydrologiques à l'échelle des bassins versants viendront d'observations hydrologiques à l'échelle des versants et de l'analyse des conditions de rétention et d'écoulement dans les réseaux de drainage. En attendant les résultats de ces observations, l'utilisation des relations hydro-pluviométriques à l'échelle élémentaire du m2 permet l'introduction, dans les modèles hydrologiques, de l'évolution de l'état de surface des sols au cours d'une même saison des pluies. Il permet également d'envisager, à l'échelle des bassins versants, la modélisation des effets sur le ruissellement d'une transformation de la couverture végétale ou de la mise en culture.

L'utilisation de fonctions de calage pour le calcul des lames ruisselées n'est qu'un pis-aller mais permet déjà une amélioration significative de l'estimation des crues de fréquence décennale sur les petits bassins versants non jaugés. La généralisation du traitement des images satellite et l'emploi de modèles d'agrégation spatiale utilisant des systèmes d'information géographique devraient faciliter l'association des données cartographiques et hydrologiques. L'exemple du petit bassin de Bindé montre cependant qu'avec la méthode proposée une amélioration significative de l'estimation des ruissellements passe par la détermination de fonctions de calage en tenant compte de la variabilité saisonnière du fonctionnement hydrologique des bassins.

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