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II. Méthodes

2.1. Concepts et classification des formations forestières naturelles

Les termes utilisés pour désigner les formations végétales naturelles tropicales africaines sont très nombreux et souvent controversés (Aubreville, 1957 ; Trochain, 1957 ; Descoings, 1971).

Cependant, parmi les concepts utilisés, ceux utilisé par "l’Accord interafricain sur la définition des types de végétation de l’Afrique tropicale " (Trochain, 1957) sont couramment utilisés. En effet pour plusieurs auteurs, cette classification est plus adaptée à la compréhension des paysages sahéliens et soudaniens de l’Afrique de l’Ouest. Ce sont ces concepts qui ont été repris en partie par Saâdou (1990, 1996) dans ses subdivisions phytogéographiques de la République du Niger. Aussi, pour Peyre de Fabrègue (1995) et Roussel (1987), le terme Pseudo steppe à épineux semble plus adaptatif pour qualifier le type physionomique général des formations végétales qui se développent dans la partie Nord de l’Ader Doutchi. Or il s’agit de termes consacrés par l’accord de Yangambi.

Les principales formations forestières seront distinguées par rapport aux types physionomiques suivants :

2.1.1. Formations ligneuses

 

a. Forêt dense sèche 

Peuplement fermé, pluristrate, de stature moins élevée (10 à 15 m). La plus part des arbres sont décidus et le sous bois arbustif est soit sempervirent soit décidu et le tapis herbacé sciaphile est discontinu.

 

b. Formations arborescentes ouvertes

Forêt ouverte, strate arborescente moyenne (10 à 12 m) décidue, à cimes plus ou moins jointives, l’ensemble demeurant clair, à tapis graminéen continu.

Le feuillage des formations forestières sèches, en général nanophylles à microphylles, permet une pénétration de la lumière suffisante pour qu’une végétation herbacée héliophile, à base de vivaces, puisse se développer en abondance.

 

c. Fourrés

Type de végétation arbustive (< 7 m), fermé sempervirent ou décidu, riche en espèces buissonnantes et en épineux, généralement peu pénétrable, souvent morcelé, à tapis graminéen absent ou discontinu. Ces formations correspondent aux brousses tigrées qui représentent l’essentiel des formations forestières dans la partie Ouest de la République du Niger (Boudouresque, 1995 ; Ambouta, 1984, 1997).

 

d. Forêts ripicoles (galeries forestières)

Gaine forestière bordant un cours d’eau. La composition de cette formation est très variable selon la latitude et la capacité de rétention en eau du sol.

Dans le sud, certaines rivières sont bordées par une végétation arborescente élevée (25 à 30 m) comportant des espèces soudaniennes méridionales (Boudouresque, 1995). Vers le Nord, la végétation se contracte progressivement jusqu’au stade fourré, qui lui-même s’éclaircit.

2.1.2. Les formations herbeuses

Deux principaux types sont distingués :

 

a. Les steppes

Le concept de steppe est de plus en plus couramment utilisé. Boudouresque (1995) la définit comme "une formation herbeuse discontinue à ouverte, à base de graminées annuelles, éventuellement mêlées à des herbacées vivaces (de moins de 80 cm), alors largement espacées, et à des ligneux ; difficilement parcouru par le feu. Les strates arbustives et arborescentes sont peu développées, surtout composées d’épineux (Balanites, Acacia, etc.) ". Au cours de la saison sèche, les thérophytes desséchés disparaissent rapidement, laissant le sol nu de mars à juin, sans protection contre la déflation éolienne (Roussel, 1987).

 

b. Les savanes

Formation herbeuse comportant une strate herbacée supérieure continue d’au moins 80 cm de hauteur, qui influence une strate inférieure ; graminéennes à feuilles planes, basilaires et caulinaires ; ordinairement brûlées annuellement ; plantes ligneuses ordinairement présentes.

c. Formations aquatiques

Ce type physionomique regroupe les peuplements d’hydrophytes et d’hélophytes formant les prairies marécageuses (Garba, 1984, Boudouresque, 1995).

 

2.2. Plantations forestières

2.2.1. Concepts et classification des plantations forestières

Les termes utilisés correspondent en partie à ceux utilisés par Lanly (1986) dans le cadre de l’évaluation des ressources forestières tropicales. Ainsi le terme " plantation " est utilisé pour désigner :

-les peuplements forestiers établis artificiellement par boisement sur une terre qui ne portait pas auparavant de couvert forestier.

-les peuplements forestiers établis artificiellement par boisement sur des terres qui ont porté un couvert forestier dans les cinquante dernières années ou de mémoire d’homme, l’opération comportant le remplacement du peuplement antérieur par un peuplement nouveau et différent,

-les introductions d’enrichissement.

Ces plantations peuvent être linéaires, en bandes, en bloc et divers objectifs leur sont assignés. Il s’agit entre autres la production de bois de feu, la production de fruits et de gomme arabique, la défense et restauration des sols, la fixation biologique de ces sols.

Cependant il faut noter que les plantations d’arbres en dehors de la compétence des services de l’environnement ne sont pas prises en compte. Il s’agit des plantations d’ombrage et de celles des fruitiers effectuées dans les vergers.

 

2.3. Méthode d’évaluation

Depuis 1936 Aubreville soulignait que la colonie du Niger avait prévu des plantations de Acacia senegal. Tout récemment en plus des diverses opérations menées par les projets de développement, dans le cadre de l’engagement de Maradi (CND, 1984), il était prévu l’intensification des opérations de reboisement et de stabilisation des dunes de sables par la plantation des essences ligneuses pérennes, la généralisation des ceintures vertes autour des villes et villages, la création dans chaque chef lieu de département et d’arrondissement d’un arboretum.

Dans le cadre de cet engagement les superficies à planter annuellement sont les suivantes :

Subdivisions administratives

Département

Arrondissement

Poste Administrative

Surfaces à planter (ha)

15

10

5

C'est ainsi que depuis cette date, chaque année d’importantes superficies sont plantées. Aussi, des opérations de plantation sont opérées au cours de la réhabilitation des milieux dégradés dans le cadre de plusieurs projets forestiers. On peut citer entre autres : le Projet Planification et Utilisation des sol et des Forêts (PUSF), le Projet de Développement Rural de Tahoua, le Projet Intégré Keita, le Projet Forestier IDA – FAC – CCCE, le Projet DFS, le Projet Petites Irrigations dans la Basse Vallée de Tarka, le Projet Agrosylvo-pastoral Nord Tillabéry, le Projet Aménagement et Gestion de la Roneraie du Dallol Maouri, etc.

Les superficies plantées annuellement au niveau national et des départements seront présentées pour la période 1992 – 1996.

Une différence sera faite entre les plantations linaires et les périmètres de restauration des terres qualifiées de plantations en bloc. Les travaux feront ressortir la densité des plantations, les essences plantées, les modes d’affectation de ces plantations (utilisation), l’état actuel de ces plantations.

 

2.4. Concepts et classification des peuplements ligneux des champs ou parcs agroforestiers

Le terme parc agroforestier (ou les peuplements ligneux des champs) est défini de diverses façons selon les auteurs. Il s'agit de l'association des arbres aux cultures dans des interactions écologiques et économiques. Pour l'ICRAF (1994) il est question d'un "système d'utilisation des terres dans lequel les végétaux ligneux pérennes sont délibérément conservés en association avec les cultures et / ou l'élevage dans un arrangement spatial dispersé et où existent à la fois des interactions écologiques et économiques entre les ligneux et les autres composantes du système".

Plusieurs types physionomiques sont distingués au Niger (Ada, 1993 ; Mahamane, 1997). Il s’agit entre autres des parcs à Acacia albida (ou Faidherbia albida), Butyrospermum paradoxum, à Parkia biglobosa, à Parinari macrophylla, à Borassus aethiopum, à Hyphaene thebaica, à Balanites aegyptiaca, etc.

Traditionnellement, le parc arboré joue plusieurs rôles au sein des agrosystèmes de la zone. Le parc à Acacia albida caractérise ainsi la physionomie du peuplement ligneux des champs de plusieurs terroirs villageois. C’est le cas de dans la région de Zinder où le Sultana interdisait la coupe abusive des pieds de Acaccia albida.

En plus de certaines espèces, notamment les légumineuses fixatrices d'azote, les essences forestières préservées dans les champs jouent un rôle dans la restauration de la fertilité des sols. Aussi, les produits du parc constituent un refuge alimentaire pour de nombreuses sociétés, ils contribuent à améliorer la ration alimentaire (condiments), ils sont aussi sources de vitamines et autres oligo-éléments. A ce titre ils jouent un rôle clé dans la sécurisation alimentaire des populations par la compensation des périodes de déficit alimentaire.

 

2.5. Importance et répartition actuelle des formations forestières

2.5.1. Evolution des superficies des formations forestières

Déjà en 1937, Patterson et al. soulignaient l’importance de la couverture forestière au Niger. Ils avaient mentionné que toutes les régions traversées étaient boisées voir fortement boisées. Il s'agit d’immenses forêts à Commiphora africana qui s’étendent de Tahoua à N’Guigmi.

Une étude diachronique basée sur la documentation existante est conduite pour tracer l’évolution des formations forestières à l’échelle des régions pour lesquelles des données sont disponibles. Cette documentation porte sur la dynamique du couvert végétal et le taux d’occupation des sols. A cet effet les études de l’Université de Bordeaux II, dans le Département de Maradi sont mises à contribution (Raynaut et al. 1988, Stigliano, 1983 ; Rain 1998). Il en est de même pour l’évolution des brousses tigrées constituant l’essentiel des formations de la partie Ouest de la République du Niger (Ambouta, 1984 ; Lebrun, 1970, D’Herbès et al. 1998). Enfin, les diverses études conduites dans le cadre du Projet Energie II et du Projet Planification et Utilisation des Sols et Forêts seront mises à contribution dans cette étude diachronique (Projet Energie II, Projet PUSF et DFS, 1993). Les faciès actuels de la végétation seront comparés, par localité, à ceux décrits par Aubréville (1936) sur les forêts de la Colonie du Niger.

2.5.2. Cas des forêts classées et des aires protégées

Les forêts classées constituent des écosystèmes particuliers à l’échelle du terroir national. Elles correspondent à des enclaves d’écosystèmes dans les agrosystèmes. Elles devraient être les témoins d’écosystèmes aujourd’hui disparus ou en voie de l’être. Plusieurs fonctions sont liées à ces formations naturelles. On peut retenir, entre autres les rôles d’habitat pour la faune sauvage, de protection des sols, le rôle culturel, le rôle de réservoir phytogénétique, etc. A ce titre un accent particulier est mis sur l’évaluation des superficies occupées par ces formations forestières. Pour évaluer l’état actuel des forêts classées, nous avons fait beaucoup recours aux rapports annuels de la Direction de l’Environnement et de la Direction de la Faune, Pêche et Pisciculture ainsi que les mémoires de fin d’étude d’étudiants issus de plusieurs Universités et Ecoles et les différents documents de travail de Projets et d’Organismes œuvrant dans le milieu rural. Par la suite nous procéderons à une estimation de l’état actuel des forêts pour les quelles des études récentes ont été réalisées dans le cadre d’activités de projets d’aménagement de massifs forestiers.

 

2.5.3. Composition et structure des formations forestières

Suivant les situations phytogéographiques, la structure et la composition des différentes formations végétales seront décrites. On se référera aux descriptions de Boudouresque (1995), Saâdou (1990), Garba (1984), Schnell (1976) et Trochain (1957).

 

 

2.6. Potentiel de production des formations forestières

Les formations forestières au Niger ont fait l’objet de plusieurs travaux de recherche ayant pour objectif la détermination de leur productivité. On peut citer, entre autres, les travaux du Département de la Recherche Forestières de l’IRAN (Aboubacar, 1989). Aussi, en 1986, Alegria a proposé une méthode de sondage pour déterminer la quantité en bois de chauffe des Combretaceae dans la forêt classée de Guesselbodi (Kolo). Les tarifs de cubage ainsi élaborés ont connu une large utilisation pour estimer la productivité de plusieurs formations forestières. C’est le cas du Projet DFS qui a utilisé les formules élaborées par Alegria (1986) pour estimer la productivité des formations naturelles de Hamadidé. Aussi, le Projet Energie II a élaboré les schémas directeurs d'approvisionnement en bois pour 3 grandes villes du pays. Il s'agit de Maradi, Niamey et Zinder (Attari, 1997). Ada (1986) a estimé le potentiel en bois de feu des formations forestières situées dans un rayon de 100 km autour de la ville de Dosso.

Enfin Ichaou (1995) a évalué la productivité des formations contractées des plateaux de la partie Ouest de la République du Niger.

 

2.6.1. Principe de la méthode développée par le Projet Planification et Utilisation des Sols et forêts (PUSF) : Méthode de calcul pour la forêt classée de Guesselbodi, Alegria (1986)

Le principe repose sur l’élaboration d’équations pour estimer le poids du bois pour les trois essences principales de la forêt : Combretum micranthum, Combretum nigricans et Guiera senegalensis.

Combretum micranthum

Y=1,1059e(-1,529+1,6298DE)

Combretum nigricans

Y=1,0654e(-3,038+2,3393DE)

Guiera senegalensis

Y=1,0806e(-2,241+1,8577DE)

 

2.6.2. Méthode de calcul adoptée sur les formations de brousses contactées (Ichaou, 1995)

Le cubage est réalisé sur la base d’un sondage de l’ordre de 1/20 des placettes inventoriées et porte sur le matériel ligneux récolté par parcelle.

Le coefficient d’empilage est le volume de bois ou volume plein exprimé en m3 contenu dans un stère. Pour un stère le calcul est fait de la façon suivante :

Volume plein = P /8(S Ød02 + S dn2)

d0 = diamètre des bûches = 1 m

avec d0 diamètre du gros bout

dn diamètre des bûches sur le petit bout.

Le Coefficient d’empilage est donné par la formule suivante :

Coefficient d’empilage = Somme des volumes / Somme des volumes

A partir de ces équations, les volumes de bois ont été estimés par faciès.

 

2.6.3. Méthode adoptée par le Projet Energie II dans le cadre des différents schémas directeurs des villes de Maradi, Niamey et Zinder

La méthode repose sur l'interprétation des images satellites, corrigées et complétées par des observations de terrain et sur des inventaires forestiers.

Outre les formations forestières, les jachères ont été prises en compte du fait de leur importance dans l’approvisionnement en bois des populations.

2.6.4. Estimation des quantités de bois dans le département de Dosso (Ada, 1986)

L’étude a été conduite par Ada (1986) dans un rayon de 100km autour de la ville de Dosso. Il est habituellement admis que la productivité des formations forestières sahéliennes varient entre 0,5 et 1 stère par ha et par an. La productivité des formations forestières a été déterminée en utilisant ce coefficient.

2.7. Politique forestière

2.7.1. Propriété forestière

La situation foncière des forêts et les conditions de leur utilisation sont encore mal définies. En effet, il n’est pas toujours aisé de déterminer ce que les droits d’usage traditionnels englobent et qui peut les exercer du fait de la superposition du droit administratif. Les droits coutumiers concernent généralement l’exercice de la chasse, la cueillette de produits végétaux et animaux, l’utilisation du bois de chauffage et de construction, la pratique de l’agriculture et le pâturage.

2.7.2. Statut légal des forêts

Au Niger les forêts domaniales sont classées en deux catégories : les " forêts classées " qui constituent le domaine forestier classé et les " forêts protégées " qui constituent le domaine forestier protégé. Selon les prescriptions du Code Forestier (Ministère de l’Economie et du Climat, 1975) il s’agit de forêts délimitées après qu’une procédure administrative ait reconnu qu’elles n’étaient pas nécessaires à des utilisations autres que forestières. En effet ces forêts classées sont rigoureusement interdites à l’agriculture et ne devaient donc faire l’objet d’aucun défrichement sans qu’une procédure préalable de déclassement ait été effectuée. Néanmoins il y eut des pratiques de contrat de cultures entres les populations locales et les services de l’Environnement en vue de permettre l’exécution de certain Projet d'Aménagement forestier permettant ainsi l’exécution des volets agroforestiers. Actuellement ces forêts subissent une pression importante et connaissent une réduction importante de leur surface.

Les autres forêts sont appelées " forêts protégées ", le terme " protégées " indique que les défrichements incontrôlés et les exploitations commerciales non autorisées y sont interdits.

 

 

 

 

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