0625-B4

POINT SAMPLING , ESTIMATION DE LA SURFACE TERRIER EN FORET NATURELLE

Sébastien NGOY SANGWA 1 et MAWALALA N. 2


RESUME 

Il existe encore peu d'expériences sur l'application des appareils optiques en forêt tropicale. La présente étude concerne l'évaluation de la matière ligneuse en termes de surface terrière dans une forêt naturelle de YANGAMBI à l'aide du prisme calibré et du Rélascope de Bitterlich.

L'étude a montré que l'état de massif joue un rôle important dans le choix de l'instrument.

Si le Relascope offre l'avantage de corriger automatiquement l'erreur due à la pente, et s'il peut donner des résultats en principe plus précis, le prisme reste apprécié car en plus d'être léger et simple à manipuler, il est utilisable dans des conditions de faible éclairage de ces forêts.


1. INTRODUCTION 

Le but de l'étude est de déterminer, dans les conditions de travail des forêts tropicales, l'instrument d'optique et les facteurs qui permettent d'avoir une bonne estimation quantitative de la matière ligneuse en terme de surface terrière et de nombre de tiges à l'hectare.

La base de comparaison est donné par les résultats d'un inventaire systématique réalisé à la même époque dans le même bloc d'étude.

2. MILIEU D'ETUDE 

L'étude a été réalisée dans un bloc de 400 ha de la réserve floristique de la LUWEO à YANGAMBI.

Les travaux de Gilson et Van Wambeke (1956) a indiquent la présence dans cette zone des sols colluvionnés ocre jaune en haut des plateaux et un horizon blanc ou gris influencé par la nappe phréatique dans le fond des vallées. La rivière LUWEO traverse en bonne partie le bloc de travail. Selon Gutzwiller (1956) b , on reconnaît quatre aspects à la végétation de cette zone, à savoir:

En général, le climat de YANGAMBI appartient au type Af de la classification de Köpper. Les amplitudes annuelles de température sont faibles; la moyenne étant de 24,5°C à 25 °C; la moyenne des pluies calculée sur une période de 33 ans ( 1941- 1974) est de 1842,9 mm/an; la pluviosité présente une nette dissymétrie entre les deux maxima équinoxiaux et les deux minima solsticiaux; les mois de janvier et février sont les plus secs de l'année avec un minimum de 84,1 mm en Janvier. Les brouillards matinaux sont les plus fréquents à l'époque de solstice; l'humidité relative est très élevée, de l'ordre de 80 à 90 %. YANGAMBI jouit annuellement de plus de 2.000 heures de soleil représentant 46 % de l'insolation possible; la radiation globale journalière y est faible( 415,1 cal/cm 2 . mois).

3. METHODE DE TRAVAIL 

L'inventaire de comparaison a été réalisé à un taux de 2 % avec des places du type complexe; dans la grande place de ¼ ha étaient comptés les moyens et les gros bois ( circ.≥ 6o cm) et dans la petite place de 1/16 ha étaient comptés les petits bois ( circ. comprise entre 20 et 60 cm). La répartition des 32 places échantillons nécessaires pour atteindre le taux fixé a été faite de façon systématique. Le travail a été réalisé par une équipe de 6 hommes ( un Chef d'équipe boussolier, un indicateur, un pointeur, un mesureur, et deux débrousailleurs).

Le bloc inventorié à une superficie totale de 400 hectares.

Les instruments optiques utilisent, quant à eux, les méthodes qui estiment la surface terrière sans application directe des instruments aux arbres à inventorier.

Il suffit de se placer à un point central d'une placette et de compter tous les arbres éligibles en un tour d'horizon; la surface terrière à l'hectare du peuplement s'obtient en multipliant le nombre d'arbres comptés par un facteur approprié de l'appareil. Ceci grâce à la relation directe qui existe entre le diamètre des arbres et l'angle de vide de l'instrument. PARDE (1961) f donne une démonstration géométrique du principe. Nous avons utilisé deux instruments: le relascope de surface Bitterlich et le prisme calibré. Dans le relascope, une bande large correspond à une unité relascope de surface terrière en mètre carré à l'hectare; le facteur de surface terrière en mètre carré à l'hectare s'obtient par le carré du nombre d'unités relascope utilisées. Dans le prisme, l'angle constant est matérialisé par l'angle de réfraction du coin de verre; ainsi , l'image d'une tige est déplacée, par exemple d'un angle correspondant à la force d'optique du prisme à travers lequel l'arbre est vu (AVERY, 1967) g .

Nous avons utilisé dans ce travail les facteurs 1 et 4 du Relascope et le prisme calibré de facteur 10. Les points de station et d'observation sont des points centraux des parcelles; un deuxième point de contrôle étant choisi à 15 m du premier dans la direction Est Ouest; ceci afin de tenir compte de l'inégale répartition des tiges en nombre et en grosseur à l'intérieur des placettes ( Avery, 1967) h .

Dans ces conditions, le taux d'échantillonnage pour chaque facteur peut être calculé de la manière suivante:

t % = n x 100
      st . F

où t %: taux d'échantillonnage en %
st: surface totale inventoriée
F: facteur utilisé
n: nombre de points

Si la correction de l'erreur due à la pente est automatique dans le cas du Relascope, nous sommes référés dans le cas du prisme au tableau de RENDALL et SANY WITTENSTEIN(1964) i , qui donne une liste de facteurs de correction appropriés en fonction de la pente. Cette dernière méthode d'opération optique a exigé la mise sur pied d'une équipe de deux personnes( un débroussailleur et un opérateur).

4. RESULTATS 

4.1 Dénombrement des tiges par facteur.

Il se dégage des données du tableau 1 que le nombre de tiges comptées est beaucoup plus élevé pour l'unité relascope 1 que pour les autres facteurs. En d'autres termes, plus le facteur utilisé est petit, plus le nombre de tiges à compter est élevé.

Tableau 1: Nombre moyen de tiges enregistrées par les instruments à chaque point d'observation sur un bloc de 400 ha de la réserve floristique de LUWEO (Inventaire par point, 1976).

Numéros Placettes

Relascope

Prisme

 

Facteur 1

Facteur 4

Facteur 10

1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
29
30
31
32

29,00
22,00
25,25
22,00
24,50
23,00
28,50
30,00
28,00
19,00
25,75
31,00
29,50
22,00
19,S00
24,25
19,50
28,00
28,00
29,00
32,50
27,00
26,50
30,00
30,50
18,50
20,75
15,00
25,00
18,00
32,00
25,25

9,75
5,25
8,00
6,75
6,00
5,50
8,50
9,00
9,25
5,00
8,25
9,00
6,50
6,75
6,50
7,50
6,50
9,25
8,50
9,25
10,00
7,25
8,50
10,50
10,25
6,75
7,25
5,00
6,00
6,25
11,00
8,50

4,00
2,00
3,00
2,75
2,25
2,00
3,00
3,50
3,25
1,75
3,25
3,25
2,50
2,25
2,25
2,75
2,50
3,50
3,25
3,50
3,75
3,50
3,25
4,00
3,75
2,25
2,75
1,75
2,00
2,25
4,00
3,00

4.2 Répartition des tiges.

La répartition des tiges par hectare est obtenue en utilisant un facteur (f) de correction par classe de diamètre pour une constante donnée. Pour chaque angle de balayage et selon la catégorie de grosseur considérée:

f =    1 ha    
        (Rec) 2 .∏

où f: facteur de correction
Rec: Rayon du cercle cactéristique de l'arbre moyen de la classe considérée.

Tableau 2 a ainsi permis de mettre en évidence par facteur utilisé, la forme en inversé (figures 1, 2, 3), caractéristique de la répartition des grosseurs en forêts tropicales.

Tableau 2: Répartition de tiges à l'hectare en fonction des classes de diamètre du bloc d'inventaire de LUWEO (« POINT SAMPLING », 1976).

Points centraux des classe de diamètre (cm )

Facteurs de correction par classe de circ. Pour un angle de balayage donné

Nombre de tiges observées à l'hectare en fonction de diamètres

Nombre de tiges calculées à l'hectare


3,18
9,55
15,92
22,29
28,66
35,03
41,40
47,77
54,14
60,50
66,87
73,24
79,61
85,98
92,35
98,72
105,09
111,46
117,83

URIST

URIVST

PFX

URIT

URIVST

PFX

URIST

URIVST

PFX

1184
139
50
26
16
10
7
5
4
3
3
2
2
2
1
1
1
1
0

4736
558
201
103
62
41
29
22
17
13
11
9
8
7
6
5
4
4
3

11844
1397
502
256
155
103
73
56
43
34
28
23
20
17
14
13
11
10
9

0,5
2,5
2,1
1,8
2,0
2,1
1,9
2,0
1,6
1,9
1,3
1,5
1,0
0,5
0,7
0,5
0,2
0,2
0,0

-
0,3
0,4
0,5
0,5
0,6
0,6
0,7
0,6
0,6
0,5
0,4
0,4
0,3
0,3
0,2
0,2
0,1
0,1

-
0,1
0,1
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,2
0,1
0,1
0,1
0,1
0,1

-
347
105
47
30
21
13
10
7
6
4
3
3
1
1
1
0
0
0

-
194
80
51
31
24
17
15
10
7
5
4
3
3
2
2
1
1
0

-
143
77
59
41
30
21
16
11
9
7
6
5
5
3
2
2
1
1

TOTAL

1456

5839

14608

24,3

7,4

2,9

599

450

439

  • URIST : Unité Relascope I de surface terrière
  • URIVST: Unité Relascope IV de surface terrière
  • PFX : Prisme de facteur 10
  • 4.3 Surface terrière:

    Selon le principe de BITTERLICH ( Kendall,1964) J ;

    S T = N.F

    où S T: Surface terrière
    N: Nombre de tiges comptées par place échantillon
    F : Facteur de surface terrière

    La surface terrière est donc obtenue en multipliant le nombre de tiges comptées par le facteur de l'instrument utilisé.

    Les moyennes à l'hectare obtenues avec les trois facteurs sous étude sont de 25.25 m 2 pour UR IST; de 28.95 m 2 pour PFX et de 31.06 m 2 pour UR IV ST. Dans le type de forêts étudiées, les sondages de GERMAIN EVRARD (1954) k ont donné des moyennes de 31.2 m 2 et de 35.8 m 2 .

    L'inventaire statistique à 2 % réalisé dans ce bloc de 200 hectares à la même époque et avec les mêmes places échantillon a montré une moyenne de 28.65 m de surface terrière.

    La comparaison statistique des résultats par la méthode de l'analyse de la variance

    (Tableau 3) complétée par le DUNKAN TEST ( Dagnelie, 1969) l , indique que seule la moyenne de l'URIST s'écarte significativement du résultat de l'inventaire systématique. La précision des estimations décroît dans le sens suivant:

    Inventaire systématique PF 10 URIVST URIST

    Tableau 3: Analyse de la variance.

    Source de variation

    DL

    Somme des carrés

    Variance

    FC

    Total
    Inter parcelles
    Inter facteurs
    Inter facteurs
    Erreur expérimentale

    27
    31
    3
    24
    43

    5594,8
    458,05
    553,8
    5040,9
    453,9

    44,05
    147,9
    184,6
    40,6
    4,7

    9,37 ***
    31,46 ***
    39,28 ***
    8,61 ***
    -

    F0,001(3,124) = 5,85

    DUNCAN TEST

    Pour une probabilité de transgression de 95 %, les valeurs critiques ( ) sont:

    Pour n = 2 ∆ = 2,81 x 0, 830 = 2, 332
    Pour n = 3 ∆ = 2,96 x 0, 830 = 2, 456
    Pour n = 4 ∆ = 3,05 x 0, 830 = 2, 531

    En utilisant les résultats de l'inventaire systématique comme témoin, on obtient:

    Tableau 4: Duncan test sur les quatre moyennes de la surface terrière (systématique, Unité Relascope de facteur 1, Unité Relascope de facteur 4, prisme de facteur 10)


    Relascope facteur 4

    Prisme facteur 10

    Inventaire systématique

    Relascope facteur 1

    X

    X - 25,25

    X - 28,65

    X - 28,95

    31,06

    28,95

    28,65

    25,25

    5,81*
    (2,531)
    3,70*
    (2,456)
    3,40*
    (2,332)

    2,41
    (2,456)
    0,30
    (2,332)

    2,11
    (2,332)

    On rejoint ainsi l'idée de divers auteurs, dont Kendall et Sany Wittgensyeins (1964) m , qui affirment que le coefficient optimum de surface terrière est celui qui limitera la fréquence d'arbres tangents tout en permettant un comptage relativement élevé d'arbres, minimisant ainsi la mission d'arbres cadrés.

    De façon pratique aussi, un plus grand facteur est associé à un plus petit cercle caractéristique pour un arbre de dimension donnée , réduisant ainsi le nombre d'arbres à inclure dans le comptage avec , comme effet, une exécution rapide sur terrain.

    5.CONCLUSION 

    L'emploi d'un instrument dépend du choix de l'utilisateur et de l'état du massif à inventorier. Le principe des instruments utilisés en échantillonnage par point (POINT SAMPLING) est l'utilisation de l'angle constant. Dans les conditions de travail de nos forêts, le facteur le plus limitant est l'éclairage. Pour les instruments expérimentés, le prisme de facteur 10 s'est avéré d'une précision suffisante et d'une manipulation simple dans l'évaluation de la quantité de matière ligneuse de ces forêts. Avec la recommandation de faire identifier et mesurer les arbres comptés, le POINT SAMPLING est une méthode d'exécution rapide qu'il faut tendre à vulgariser dans nos territoires où les valeurs caractéristiques des forêts sont encore loin d'être réunies. L'étude montre également que le prisme requiert un taux de sondage 2,5 fois inférieur pour atteindre une même précision que l'inventaire systématique.

    BIBLIOGRAPHIE

    *AVERY, T.E, 1967. Forest measurement , Mc Graw hill Book Company, New york,290

    *DAGNELIE, P. 1969. Théorie et Méthodes statistiques. Applications agronomiques. Volume II. Les méthodes de l'inférence statistique. Ed.J; DUCULOT, S.A. Gembloux, 451 pp.

    *GERMAIN ,R. et EVRAD, C., 1956. Etude écologique et phyto sociologique de la forêt à Brachystegia lurentii. Série scientifique n° 67, Bruxelles, 11à 16pp.

    *GILSON,P., VAN WAMBEKE, A. et GUTZ WILLER, 1956. Carte des sols et de la végétation du Congo Belge et du Ruanda Urundi . 6 YANGAMBI Placette 2 YANGAMBI

    A et B. Avec notice explicative, Publ. INEACC, Bruxelles 9 à 26pp.

    *KENDALL, R.H. et SAYN WITTGENSTEIN, 1964. Une évaluation du relascope. Direction de Recherches Forestières. Publ. Du Ministère des Forêts n° 1092F., OTTAWA, 30pp.

    *LEBRUN, J. et GILBERT, G. 1954. Une classification écologique des forêts du Congo. Publ. INEAC, série scientifique n° 63 ,Bruxelles, 89pp.

    *PARDE, J., 1961. Dendrométrie. Ed. de l'Ecole Nationale des Eaux et Forêts, NANCY, Paris, 350pp.


    1 Sébastien NGOY S., Economiste de Développement, réalisateur d'étude en tandem avec Augustin MAWALALA N.;

    2 Augustin MAWALALA N.; Ingénieur Forestier, chef de Division au Département de l'Environnement, Conservation de la Nature et Tourisme.