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Appendice: Modèle algébrique des effets sur les prix et les quantités des préférences commerciales et des réductions des droits NPF

Le modèle algébrique présenté ci-après est un modèle statique très simple à trois pays, allant directement dans le sens de la théorie de Viner (1950) concernant les unions douanières, bien qu'il reflète non pas une union douanière mais une préférence tarifaire unilatérale. Les trois pays (ou groupes de pays) considérés sont un pays importateur qui accorde une préférence commerciale (pays A), le groupe de pays en développement exportateurs qui la reçoivent (pays B) et les autres pays (développés) exportateurs (pays C) dont les exportations vers le pays A sont imposées sur la base du taux NPF. Seul un produit est considéré. Dans un souci de simplicité, l'on suppose que la courbe de la demande d'importations et celle de l'offre d'exportations sont linéaires et qu'aussi bien le droit NPF que le droit préférentiel sont spécifiques.

La demande d'importation dans le pays A, (MA) et l'offre dans les pays B et C (XB et XC) dépendent des prix intérieurs (PI).

1) MA = mA - nAPA

2) XB = mB + nBPB

3) XC = mC + nCPC

Il y a lieu de noter que ces équations sont présentées de telle sorte que tous les paramètres de pente ni sont positifs.

Les prix perçus pour les exportations dans les pays B et C sont le prix sur le marché intérieur du pays A moins, respectivement, le droit préférentiel TB et le droit NPF TNPF (il n'est pas tenu compte des frais de transport ou des marges commerciales):

4) PB = PA - TB

5) PC = PA - TNPF

Les équations 4) et 5) impliquent que le prix perçu par les exportateurs préférés du pays B dépasse le prix sur le marché mondial, c'est-à-dire le prix que les exportateurs qui paient le droit NPF perçoivent du pays A, de la marge préférentielle TNPF - TB :
PB = PC + TNPF - TB .
Dans une situation d'équilibre, l'offre globale d'exportation est égale à la demande d'importation:
6) XB + XC = MA
Ce système de six équations peut être résolu pour les six inconnues, c'est-à-dire trois quantités et trois prix.

Si l'on suppose que l'offre d'exportation du pays C qui ne bénéficie pas de préférences a une élasticité infinie, le prix dans le pays C, qui est l'équivalent du prix sur le marché mondial, est fixé de façon exogène (PC*). Le prix dans le pays importateur A est également fixé:

PA = PC* + TNPF .
Cela est vrai aussi longtemps qu'une partie des importations du pays A provient du pays C, c'est-à-dire aussi longtemps que la préférence commerciale n'a pas pour effet de donner au pays B l'intégralité du marché d'importation du pays A. Aussi longtemps que tel est le cas, le prix dans le pays A n'est pas affecté par la préférence commerciale.

Le prix perçu par les exportateurs préférés est déterminé par le prix fixé sur le marché mondial plus la marge préférentielle.

PB = PC* + TNPF - TB.
Dans ce cas simple, il est clair qu'il y a une corrélation inverse entre le prix perçu par les exportateurs jouissant de la préférence et le niveau du droit préférentiel. Par conséquent, l'introduction d'une préférence commerciale (c'est-à-dire d'une réduction TB = TNPF) accroît le prix perçu par les exportateurs bénéficiant de la préférence et par conséquent le volume de leurs exportations et leur bien-être. Simultanément, il ne fait aucun doute qu'une libéralisation complète, c'est-à-dire le fait de ramener aussi bien TNPF que TB à zéro, se traduit pour les exportateurs jouissant de la préférence d'un prix inférieur à celui qu'ils touchent lorsque le droit NPF est positif et que la préférence commerciale l'est aussi. Autrement dit, le scénario tarif plus préférence "attire" les exportations des exportateurs du pays B bénéficiant de la préférence dans une direction qui n'est pas soutenable dans une situation de libre-échange.

D'un autre côté, si le droit NPF est réduit sans être totalement éliminé, le prix perçu par les exportateurs préférés, le volume de leurs exportations et leur bien-être économique dépendent directement de ce qu'il advient de la marge préférentielle. Si le droit préférentiel est défini comme étant le droit NPF moins un nombre déterminé d'unités monétaires par quantité, (c'est-à-dire si la marge préférentielle est maintenue constante) et si le droit NPF après réduction demeure au moins aussi élevé que le droit préférentiel, la réduction du droit NPF n'a aucun effet sur le prix perçu par les exportateurs préférés ni par conséquent sur le volume de leurs exportations ou leur bien-être. Inversement, si la marge préférentielle diminue par suite de la réduction du droit NPF, les exportateurs préférés subissent manifestement un préjudice du point de vue du valeur et du volume de leurs exportations et de leur bien-être.

Dans le cas plus général, où l'offre d'exportations de l'exportateur NPF n'a pas une élasticité infinie, les prix dans les trois pays dépendent des droits fixés. Lorsque l'on résout les équations pour les prix, l'on peut montrer facilement que le prix dans le pays A est alors:

PA = [nCTNPF + nBTB + m] / n ,
tandis que le prix perçu par les exportateurs préférés est:
7) PB = [nCTNPF - (nA + nC)TB + m] / n ,
où m et n sont définis comme étant m º mA - mB - mC et n º nA + nB + nC .

Dans ce cas, il est clair que, sur la base d'un droit NPF donné, plus la préférence commerciale (TB) est généreuse, et plus le prix dans le pays A diminue. Inversement, le prix perçu par les exportateurs préférés augmente à mesure que le droit préférentiel diminue. Dans ce cas, l'on ne peut pas dire de façon catégorique si la préférence commerciale a pour effet d'"attirer" des exportations du pays B dans une direction qui n'est pas soutenable dans une situation de libre-échange. Cela dépend du signe du terme nCTNPF - (nA + nC)TB. Si ce terme est positif, une libéralisation complète du commerce se traduira par une diminution de PB et inversement. Le signe plus ou moins dépend à la fois des niveaux des droits et des paramètres de réaction. Plus la marge préférentielle est grande (c'est-à-dire plus TB est faible sur la base d'un TNPF), et plus la structure des exportations résultant de la préférence commerciale risque de ne pas être soutenable après une libéralisation complète du commerce. Toutefois, avec un droit préférentiel nul, il ne fait absolument aucun doute que le fait de ramener le droit NPF à zéro réduit le prix perçu par les exportateurs préférés et entraîne ainsi un ajustement à la baisse du volume des exportations.

Ce qu'il advient du prix perçu par les exportateurs préférés (et par conséquent du volume de leurs exportations et de leur bien-être) si le droit NPF est réduit dépend dans ce cas également de l'évolution de la marge préférentielle. C'est ce que l'on voit si l'équation 7) est remaniée pour faire apparaître la marge préférentielle (MP º TNPF - TB).

7a) PB = [(nA + nC)MP - nATNPF + m] / n .
Si la réduction du droit NPF n'affecte pas l'ampleur de la marge préférentielle, PB augmente, ce qui se traduit par un gain pour les exportateurs préférés. Si la marge préférentielle est rétrécie par déduction du même nombre d'unités monétaires que le droit NPF (c'est-à-dire si le droit préférentiel demeure constant lorsque le droit NPF est réduit), les exportateurs préférés subissent incontestablement un préjudice. Entre ces deux cas limites, cependant, se trouvent des situations dans lesquelles la marge préférentielle diminue un peu du fait de la réduction du droit NPF, mais le prix perçu par les exportateurs préférés n'en augmente pas moins, de même que le volume de leurs exportations et que leur bien-être.


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