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VINGT-DEUXIÈME CONFÉRENCE RÉGIONALE POUR L'AFRIQUE

LE CAIRE (ÉGYPTE), 4-8 FÉVRIER 2002

PROGRAMME DE LUTTE CONTRE LA TRYPANOSOMOSE AFRICAINE (PLTA)

Table des matières



 

I. INTRODUCTION

1. La trypanosomose, qui est transmise par les glossines, est une maladie propre à l'Afrique qui atteint à la fois l'homme et les animaux. Cette maladie est présente sur environ 10 millions de kilomètres carrés dans 37 pays subsahariens, ce qui correspond à peu près à un tiers des superficies terrestres de l'Afrique, et on estime qu'elle menace 50 millions de personnes et 48 millions de bovins. La trypanosomose a des effets considérables sur l'agriculture africaine; on estime que les pertes annuelles de production bovine à elles seules sont de l'ordre de 1 à 1,2 milliard de dollars. À cela, il faut ajouter les effets négatifs indirects de la trypanosomose sur la production végétale totale. La maladie conditionne les décisions d'installation des personnes, les modalités de gestion de leur bétail et l'intensité des cultures. Il résulte de ces divers facteurs des modifications de l'utilisation des terres, de l'environnement ainsi que du bien-être des populations et une vulnérabilité accrue des activités agricoles.

2. La FAO a identifié le renforcement de l'agriculture comme le principal élément de la lutte contre la pauvreté et de l'amélioration de la sécurité alimentaire dans les pays en développement. La nécessité de favoriser l'agriculture, la santé et la sécurité alimentaire, condition préalable de la lutte contre la pauvreté, a été soulignée lors du Sommet mondial de l'alimentation, tenu à Rome en 1996. La nécessité de lutter contre la pauvreté est particulièrement ressentie dans les zones d'Afrique subsaharienne infestées par les glossines. Dans cette région, l'insécurité alimentaire concerne la moitié de la population. Environ 85 pour cent des pauvres se trouvent dans les zones rurales et plus de 80 pour cent de la population sont tributaires de la production agricole pour vivre.

3. L'un des éléments essentiels des programmes visant à lutter contre la pauvreté est une coordination efficace entre les organismes et institutions œuvrant pour atteindre le même objectif.

II. LE PROGRAMME DE LUTTE CONTRE LA TRYPANOSOMOSE AFRICAINE (PLTA)

4. Pour répondre à la nécessité de parvenir à des efforts concertées entre les diverses institutions luttant contre les glossines et la trypanosomose aussi bien sous sa forme humaine que sous sa forme animale, le programme de lutte contre la trypanosomose africaine (PLTA) a été approuvé en novembre 1997 par la Conférence de la FAO. Il vise à conjuguer les efforts de la FAO, de l'OMS, de l'AIEA et du BIRA/OUA afin:

-  de veiller à ce que l'approche de l'amélioration de la santé humaine et du développement socio-économique et agricole durable des zones infestées soit harmonieuse et durable;

-  d'encourager et de coordonner des alliances et des efforts internationaux en vue d'interventions concertées contre la trypanosomose et des glossine; et

-  de parvenir à une lutte intégrée contre la trypanosomose en Afrique.

5. Par ses activités, le PLAT vise à définir le cadre politique, les stratégies et les principes directeurs de lutte contre les vecteurs tenant compte:

-  des facteurs socio-économiques de la lutte contre la trypanosomose;

-  des effets de cette maladie sur l'agriculture africaine;

-  de la participation communautaire;

-  de la gestion des médicaments;

-  de l'intégration des techniques de lutte;

-  de considérations environnementales.

III. LA CAMPAGNE PANAFRICAINE D'ÉRADICATION DES GLOSSINES ET DE LA TRYPANOSOMOSE (PATTEC)

6. Outre la mise en place du PLAT mentionné plus haut, l'OUA a, plus récemment, pris l'initiative de lancer la campagne panafricaine d'éradication des glossines et de la trypanosomose (PATTEC). Cette initiative a d'abord été approuvée par la Conférence des chefs d'État et de gouvernement de l'OUA en juillet 2000 à Lomé (Togo). Ensuite, une première ébauche de la mise en place prévue de la PATTEC a été approuvée au Sommet tenu en juillet 2001 à Lusaka (Zambie).

7. Dans la note descriptive sur la PATTEC, il est souligné que l'objectif ultime est l'éradication des glossines et de la trypanosomose en Afrique. Pour atteindre cet objectif, la PATTEC organisera et coordonnera la campagne et mobilisera les ressources humaines, financières et matérielles nécessaires.

IV. ÉLABORATION DE LA STRATÉGIE

8. Le PLTA est essentiellement consacré à l'élaboration et à l'application de normes reposant sur des fondements scientifiques pour l'évaluation des coûts et avantages économiques, sociaux et environnementaux de la lutte contre les glossines et la trypanosomose. Il étudie et analyse l'équilibre entre les besoins humains au point de vue de la sécurité alimentaire et de la durabilité des moyens de subsistance et la conservation des ressources naturelles et la prévention de la dégradation de l'environnement. Par conséquent, les interventions contre les glossines et la trypanosomose sont placées dans le contexte général de la lutte contre la pauvreté et de la sécurité alimentaire, le processus de l'élaboration de stratégies étant orienté en fonction d'un développement amélioré de l'élevage et de l'agriculture. On a beaucoup débattu au PLTA de l'élaboration d'un ordre de priorité pour les interventions contre les glossines, dans le cadre général de la production agricole, dans certaines zones bien définies. Ce principe a en attendant été reconnu comme la condition sine qua non de la réussite. L'incorporation de l'intervention contre les glossines et la trypanosomose dans le processus général du développement et de la production agricole donne l'occasion de maximiser les avantages pour les ruraux pauvres tout en limitant le plus possible les effets négatifs sur l'environnement. Elle favorisera donc une protection intégrée durable dans les systèmes agricoles visés et améliorera les possibilités d'adoption par les éleveurs/producteurs.

9. Afin de tenir compte de toute l'ampleur et de toute la complexité du problème des glossines et de la trypanosomose dans le contexte dans plans d'action nationaux et régionaux de lutte contre la pauvreté, des efforts interdisciplinaires se substituent progressivement aux approches fondées sur les technologies.

V. ÉLARGIR LES PERSPECTIVES DE LA PROTECTION INTÉGRÉE: UNE APPROCHE INTÉGRÉE

10. La trypanosomose touche à la fois les humains (maladie du sommeil) et les animaux (nagana). Comme il a été dit plus haut, outre les effets négatifs sur la santé et la production animale, la trypanosomose conditionne le choix des lieux d'habitation, d'élevage et de culture et par conséquent l'utilisation des terres. Dans tout le sous-continent infesté par les tsé-tsé, il existe différents degrés de fertilité des sols et diverses zones agro-écologique, associés à des systèmes agricoles distincts et à des mélanges locaux de modèles de développement social, culturel et économique. Les pressions exercées sur l'un des éléments des systèmes agro-écologiques ont une incidence sur l'ensemble du système et l'approche de la protection intégrée doit tenir compte des divers facteurs.

11. Les progrès des techniques de lutte contre la trypanosomose et les glossines qui vont se poursuivre ne suffiront probablement pas à fournir les éléments nécessaires à la mise en place de programmes d'intervention viables contre les glossines et la trypanosomose. Lorsque l'on conçoit des stratégies durables de protection intégrée, il faut tenir compte de toutes les facettes du problème.

12. Tout en reconnaissant que l'identification de zones appropriées devant être débarrassées des glossines et de la trypanosome est complexe, le PLTA a fixé les critères suivants pour l'établissement des priorités:

-  la trypanosome animale est un obstacle de taille au développement de systèmes agricoles mixtes;

-  la lutte contre la tsé-tsé dans une zone tout entière entraîne une amélioration assez rapide de la situation;

-  il est possible, dans la zone en question, d'améliorer durablement la productivité agricole.

13. Ces critères ont été retenus parce que si le paysage agricole est en mutation, en particulier lorsqu'il s'agit du passage à une intégration culture-élevage, il n'est guère utile de faire porter la lutte contre les glossines sur l'ensemble de la zone. En effet, l'utilisation des terres se modifie. La croissance démographique renforce la pression sur les terres et dans les zones infestées par les glossines, cela modifie l'environnement biophysique/rural au point que le milieu naturel devient moins propice à la survie des glossines.

14. S'agissant de la préparation concrète des programmes de lutte contre les glossines, il faut reconnaître que les effets de l'expansion des zones de culture, de la chasse, de la collecte de bois de feu et autres altérations du milieu naturel dues à l'homme sont variables d'un endroit à l'autre et selon l'espèce de glossine dont il s'agit. La connaissance du processus de fragmentation par isolement de l'habitat des tsé-tsé constitue donc un élément essentiel de la formulation de programmes agricoles viables. Le processus de modification des habitats des glossines par des activités de l'homme est plus prononcé lorsque les pressions qui s'exercent sur les terres sont relativement fortes. Cependant, l'empiétement des tsé-tsé sur ces zones compromet souvent l'intégration culture-élevage car les agriculteurs locaux ne peuvent utiliser comme il convient les animaux de trait.

15. Par conséquent, dans les zones où la pression qui s'exerce sur les terres est modérée, la lutte contre la tsé-tsé, puis l'éradication de celle-ci peuvent réussir et ont des probabilités de permettre d'obtenir des avantages maximaux au point de vue du développement agricole durable. La réduction et/ou l'élimination du risque dû aux glossines et à la trypanosome qui en découle est auto-alimentée et se renforce de façon autonome. Pour parvenir à cela, la lutte contre les glossines doit être précédée et complétée par des plans d'amélioration de la santé animale et des ensembles de mesures visant à assurer une agriculture mixte durable. De cette façon, la glossine peut disparaître progressivement des terres agricoles tandis que l'intensification consécutive des activités agricoles mixtes renforce la nouvelle situation de faible risque dû à la maladie. Compte tenu des considérations qui précèdent, l'identification d'emplacements pour le développement actif de l'agriculture mixte constitue le point de départ de toute intervention visant les glossines et la trypanosome.

16. Les considérations qui précèdent montrent bien que pour réussir, la lutte contre la tsé-tsé exige une connaissance du processus d'isolement et de fragmentation des habitats de la tsé-tsé de façon que l'on puisse tirer parti des effets de la pression sur les terres. En outre, il faudrait tenir compte des différences d'écologie des mouches dans l'interface tsé-tsé/agriculture pour les diverses zones géographiques, et en particulier tenir compte des contrastes entre l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique de l'Est. L'analyse du processus de fragmentation de l'habitat des glossines devra également être mené une fois que les opérations sont en place, afin que l'on s'assure que les interventions contre la tsé-tsé continuent à être harmonisées avec le recul autonome ou spontané du vecteur.

17. Les avantages de la lutte contre la tsé-tsé/de l'éradication auront, en cascade, des conséquences positives sur les zones voisines de celles qui ont été retenues pour la lutte/l'éradication. Dans la zone tampon ou intermédiaire, la lutte contre le vecteur pourrait être envisagée à un stade ultérieur, dès que les conditions agro-vecteurs sont propices. Il est donc important que la mise en place progressive de la lutte active contre les tsé-tsé à l'échelle de la zone, qui vise à obtenir l'expansion progressive des zones à faible risque de maladies, soit orientée en fonction d'informations appropriées sur le modèle spatial dynamique de la lutte "naturelle", "autonome", ou "agricole" contre la tsé-tsé.

18. Un autre argument en faveur d'un examen plus attentif du processus naturel de modification de l'habitat de la tsé-tsé est la pertinence qu'il a pour la lutte contre la maladie. Les agriculteurs qui ne bénéficient pas d'une lutte à grande échelle contre la tsé-tsé devront se contenter des moyens et outils disponibles localement pour protéger leur bétail vulnérable. L'application d'insecticides sur les animaux ou les traitements à l'aide de médicaments trypanocides sont les principales mesures de protection utilisées par les éleveurs mais ils ont un coût considérable, et souvent, les systèmes agricoles traditionnels n'ont pas de moyens suffisants pour permettre leur utilisation en permanence. Il existe d'autres moyens, moins coûteux, de protéger les animaux, notamment en évitant le contact avec les vecteurs par une modification des pratiques de gestion des pâturages. On peut également, en particulier en Afrique de l'Ouest, élever des ruminants domestiques trypanotolérants, en particulier dans les zones à risque élevé de trypanosomose, lorsque la lutte contre les glossines est difficilement envisageable du fait de conditions agroclimatiques défavorables.

19. Les programmes de développement plus généraux, ne visant pas expressément la lutte contre la tsé-tsé et la trypanosomose, peuvent néanmoins contribuer à une modification de la situation agro-écologique locale et améliorer les perspectives de réussite des programmes de lutte contre la tsé-tsé. L'évolution en cours des paysages agricoles dans de vastes zones d'Afrique subsaharienne rend le risque de la maladie très variable d'un endroit à l'autre et, même d'un village à l'autre, dans des proportions considérables. Ce phénomène offre donc des perspectives pour un programme d'expansion progressive des interventions contre la tsé-tsé et la trypanosomose, mais il faudrait suivre l'évolution du milieu naturel et, en même temps, de l'habitat de la tsé-tsé, du contact glossine-animaux et du niveau de transmission de la maladie.

20. Les niches périurbaines de la tsé-tsé et de la trypanosomose existent également et, en raison des caractéristiques environnementales spécifiques des sites, elles nécessitent d'une attention particulière. L'accroissement de la consommation de protéines dans les principales agglomérations d'Afrique subsaharienne, ainsi que l'urbanisation progressive mais bien réelle, ont entraîné une forte augmentation de la demande de produits d'origine animale, notamment de lait. Pour satisfaire la demande de lait à un coût acceptable grâce à une production locale accrue autour des centres urbains, il a fallu intensifier la production animale des petits éleveurs. Les bovins améliorés issus de croisements sont plus vulnérables et, au point de vue de la santé et de la productivité, ils souffrent d'avantage des effets négatifs de la trypanosomose que les bovins locaux. En conséquence, cette situation particulière autour des principales agglomérations d'Afrique subsaharienne doit être prise en compte dans les plans de santé humaine et vétérinaire, d'urbanisation et de commercialisation, et dans la gestion des ressources naturelles urbaines - périurbaines - rurales.

VI. QUELQUES RÉALISATIONS RÉCENTES

21. Depuis sa mise en place, le PLTA a comporté des activités normatives et de renforcement des institutions. Une série de réunions techniques et d'ateliers auxquels ont participé la communauté du PLTA et des représentants de la PATTEC se sont tenues en 2000-01, et ont abouti à un accord sur les critères et mesures normatives à respecter pour la conception de plans stratégiques et la sélection des zones prioritaires pour les interventions de lutte contre les glossines et la trypanosomose à l'échelle des zones, notamment dans la région de savane humide d'Afrique de l'Ouest et dans les systèmes des vallées éthiopiennes. Des cartes géographiques indiquant les densités et la répartition des populations humaine et animale, les cultures, la situation des glossines et de la trypanosomose en Afrique de l'Ouest, la stratégie possible d'intervention et les avantages estimatifs ont été dressés. (Voir exemple à l'Annexe).

VII. ENTENTE CONCERNANT LA COLLABORATION INTERINSTITUTIONS

22. Le problème de la trypanosomose en Afrique subsaharienne est considéré comme une priorité dans les programmes de lutte contre la pauvreté. D'ailleurs, le PLTA et la Campagne panafricaine d'éradication des glossines et de la trypanosomose (PATTEC) ont été soulignés lors d'une réunion du Conseil économique et social de l'ONU tenue en juillet 2001 à Genève. Il est urgent d'harmoniser et d'unifier les diverses initiatives afin d'obtenir une action concertée en matière de planification de la lutte contre les glossines et la trypanosomose. Outre l'acceptation des considérations susmentionnées, cela suppose des normes et orientations en matière de lutte contre les vecteurs, et un alignement institutionnel et structurel majeur dans tous les domaines intersectoriels de la lutte contre la pauvreté.

23. Le PLTA est un programme de partenariat et il vise à ouvrir la voie à la PATTEC. Dans le cadre du PLTA, l'alliance internationale regroupant la FAO, l'OMS, l'AIEA et le BIRA/OUA œuvreront ensemble et conjugueront leurs efforts pour parvenir à une action concrète pour les dix années à venir. Les plans d'intervention devront nécessairement faire de la lutte contre la maladie du sommeil une question hautement prioritaire. Cela met en évidence le rôle de premier plan de l'OMS dans le renforcement de l'épidémio-surveillance sur le terrain de la forme humaine et de la maladie et l'amélioration des traitements médicamenteux. Par ailleurs, la FAO s'efforcera d'orienter les interventions dans le domaine de l'utilisation des terres, de l'agriculture et de la protection contre les vecteurs. Dans cette formule de lutte intégrée contre les vecteurs, l'AIEA favorise l'utilisation ciblée de la technique de l'insecte stérile en harmonie avec les facteurs éco-géographiques et épidémiologiques. L'OUA, par l'intermédiaire du BIRA, prendrait la responsabilité générale de la coordination et rassemblerait les différentes composantes sous un même toit politique.

24. Les quatre institutions, conjuguant leurs efforts, favoriseraient donc la mise en œuvre pratique d'actions sélectionnées et ciblées dans les pays touchés. Aux plans national et local, l'intervention elle-même serait effectuée directement par les parties prenantes sur le terrain. L'alignement PLTA-PATTEC ne constitue qu'un point de départ et fournit les directives, normes et autres éléments d'appui à la décision aux autorités nationales et aux partenaires du développement. La difficulté est de coordonner des forces et des priorités différentes des diverses institutions pour parvenir à l'objectif essentiel d'une lutte efficace contre les glossines et la trypanosomose et d'une lutte contre la pauvreté dans toute l'Afrique subsaharienne.

25. En résumé, il est nécessaire d'harmoniser en permanence le PLTA et la PATTEC pour aller de l'avant et veiller à ce que: i) le but ultime de la lutte contre la pauvreté grâce à une utilisation durable des terres soit expressément mentionné, ii) le programme de lutte contre la glossine et la trypanosomose soit conduit par les parties prenantes africaines, iii) les principes de la protection intégrée soient strictement respectés, iv) le programme vise la lutte à la fois contre la forme humaine et la forme animale de la trypanosomose et v) les approches techniques adoptées soient conformes aux normes et principes scientifiques internationaux.

VIII. ACTIVITÉS PRÉVUES

26. La FAO organisera d'autres ateliers chargés d'élaborer des directives à l'appui de la planification stratégique de la lutte contre les glossines et la trypanosomose qui soient adaptées aux besoins des différentes sous-régions de l'Afrique subsaharienne et mises en œuvre dans les différentes zones écoclimatiques, économiques et agricoles. Les directives faciliteront la préparation des programmes sous-régionaux.

27. Dans le contexte de l'harmonisation PLTA-PATTEC, la coordination et la collaboration souhaitées entre la FAO, l'OMS, l'AIEA et le BIRA/OUA seront renforcées par une meilleure définition des fonctions et des liens structurels.

IX. CONCLUSIONS

28. Compte tenu des effets des glossines et de la trypanosomose sur le développement agricole et rural et la santé humaine, l'orientation actuelle vers une action concertée mérite toute l'attention de la communauté internationale. Les efforts visant à lutter contre le problème de la trypanosomose en Afrique subsaharienne doivent être considérés comme absolument prioritaires pour la lutte contre la pauvreté. Étant donné que le PLTA et la PATTEC ont été soulignés au plus haut niveau au sein du système des Nations Unies, il est maintenant indispensable de décrire en détail et de façon plus concrète les diverses stratégies de protection contre les vecteurs et de développement agricole et humain dans les zones infestées. Grâce aux efforts concertés déployés par les forces multidisciplinaires de l'alliance internationale, le problème des glossines et de la trypanosomose sera abordé de façon plus complète, en commençant par certaines zones prioritaires bien délimitées. Une attention particulière sera consacrée aux avantages économiques, sociaux et environnementaux et aux éventuels coûts de la lutte contre les glossines et la trypanosomose. Seule une stratégie intégrée de cette nature assurera un équilibre entre les besoins humains immédiats d'aliments et de moyens de subsistance durables et la nécessité d'utiliser durablement les ressources naturelles et les systèmes agro-écologiques.

29. De vastes zones de la région subsaharienne infestées par la tsé-tsé (environ 10 millions de km2) offrent des possibilités considérables de production animale et végétale durable, mais pour réaliser ce potentiel, il faut que les mesures internationales de politique et d'ordre financier soient axées sur l'amélioration du bien-être humain dans les zones rurales. Comme il a été indiqué plus haut, dans les pays infestés par la tsé-tsé, 85 pour cent des pauvres vivent dans des zones rurales et plus de 80 pour cent de la population totale sont tributaires de la production agricole pour vivre.

30. Par conséquent, à partir des observations qui précèdent, et en favorisant des programmes intégrés d'interventions stratégiques contre les glossines et la trypanosomose, le PLTA fera office de catalyseur pour le développement agricole durable en faveur des pauvres.

X. RECOMMANDATIONS

31. À l'intention des gouvernements des États Membres

  1. les pays d'Afrique subsaharienne infestés par la tsé-tsé devraient réexaminer le rôle et les effets de glossines et de la trypanosomose sur la santé humaine et la production agricole, en particulier en ce qui concerne leur politique respective de lutte contre la pauvreté;
  2. le cas échéant, les interventions contre les tsé-tsé et la trypanosomose devraient être incorporées parmi les priorités des plans de développement agricole en tant que contribution importante à la sécurité alimentaire et à la lutte contre la pauvreté;
  3. les gouvernements devraient préparer la mise au point définitive du ou des programmes nationaux d'intervention contre la tsé-tsé et la trypanosomose, avec l'appui du PLTA et de la PATTEC au plan international.

32. À l'intention des organisations internationales

    1. les quatre organisations internationales que sont la FAO, l'OMS, l'AIEA et le BIRA/OUA devraient procéder à une harmonisation efficace et efficiente PLTA-PATTEC;
    2. les organisations devraient mieux définir leurs rôles respectifs et leur responsabilité en ce qui concerne les programmes d'intervention contre la tsé-tsé et la trypanosomose, en vue de parvenir à un maximum de synergie et de complémentarité et à un minimum de chevauchements;
    3. la FAO est dans une position privilégiée pour faire progresser la formulation de principes normatifs et de directives pour la planification stratégique des interventions contre la tsé-tsé et la trypanosomose à l'échelle des zones. L'approche méthodologique fondée sur des bases scientifiques qui a déjà été conçue pour l'Afrique de l'Ouest et dont la réussite a fait l'objet d'une large reconnaissance, offre des possibilités considérables d'application dans d'autres zones intéressées.

33. À l'intention des autres parties prenantes

    1. il faudrait renforcer la sensibilisation au problème de la tsé-tsé et de la trypanosomose par divers moyens d'information;
    2. il faudrait s'efforcer davantage d'associer les groupes communautaires, les ONG, le secteur privé et les services publics locaux à la planification, à l'exécution et au maintien de programmes d'intervention intégrés.

 

Dans un cadre écogéographique donné, la présence et la mise en place de systèmes agricoles sont régies par trois principaux facteurs: les populations humaine et animale (densité et répartition), et la production végétale. Ces éléments des systèmes agricoles et d'une façon plus générale, de la production agricole, exercent une influence et sont des facteurs importants à prendre en compte dans le processus de sélection des aires prioritaires dans lesquelles une intervention stratégique intégrée de lutte contre la tsé-tsé-la trypanosomose a le plus de chance de réussir et de produire des avantages économiques et humanitaires.

Dans un souci de simplicité et de clarté, la description des systèmes agricoles (population, cultures et élevage), la répartition des tsé-tsé et de la trypanosomose, et l'appui à la décision de lutte contre les vecteurs (vulnérabilité aux tsé-tsé et risque de réinvasion) sont illustrés par une série de cartes établies à l'aide de la technologie de systèmes d'information géographique. Un texte explicatif accompagne chaque carte.

Carte 1

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Agriculture mixte: relations entre les cultures et l'élevage

bovins
S M E
Cultures    faible
                moyen
                élevé

L'homme - les cultures et l'élevage

A. On trouve des systèmes à faible intensité de céréales et de bovins dans de deux zones distinctes:

a. les régions sèches du nord (gris clair);
b. la zone côtière humide du sud (gris foncé).

Tandis que dans le nord, le climat constitue un obstacle de taille à la production végétale, dans le sud humide, les cultures pérennes et les zones forestières (par exemple Liberia et Côte d'Ivoire) dominent.

B. En dehors de la zone forestière, la bande côtière du sud est en outre caractérisée par des systèmes dominés par les cultures céréalières dont l'intensité est moyenne à élevée (bleu clair et bleu foncé). Dans ces zones, on trouve relativement peu de bovins. Ces systèmes couvrent la plupart des zones méridionales du Ghana, du Togo, du Bénin et du Nigeria.

C. Les systèmes d'agriculture mixte (en jeune) où coexistent les cultures et l'élevage sont essentiellement situés autour des zones d'agriculture intensive (en rouge) dans la zone de culture à intensité moyenne à élevée: le plateau de Jos et les zones voisines du Nigeria, du sud du Niger, du centre du Burkina Faso (Ouagadougou) et la région de Dakar au Sénégal. Autour de ces zones, on trouve aussi des taches distinctes de systèmes mixtes à dominance de cultures ou d'élevage: les premières dans le sud du Niger (vert foncé: systèmes agricoles mixtes extensifs et à faible rendement) et les dernières plus éparses au Nigeria et au Burkina Faso (gris clair).

D. Les systèmes dominés par l'élevage et avec un faible taux de culture (marron) se trouvent en bordure des systèmes mixtes de la zone médiane. Dans les zones plus sèches, ils correspondent aux zones pastorales traditionnelles tandis que vers le sud dans les zones plus humides, les taux de charge ont fortement augmenté après les périodes de sécheresse des années 70 et 80. La plupart de ces zones ont maintenant été également débarrassées de l'onchocercose, ce qui a favorisé l'arrivée de nouveaux agriculteurs. Les zones typiques de défrichage sont a) le sud du Mali, le sud du Burkina Faso et le nord de la Côte d'Ivoire, b) le nord-ouest du Ghana et c) le nord-est du Bénin.

E. On trouve un système distinct à forte densité d'élevage dans les plateaux d'Adamaw et de Mambilla du Cameroun et du Nigeria.

Carte 2

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L'homme, les cultures et l'élevage

Densité de population

Faible         Aride
Faible         Humide
Moyenne    Cultures
Élevée        Cultures
Moyenne    Élevage
Mixte         Cultures
Élevé          Bovins
Mixte         Bovins
Mixte         Élevé

Trois systèmes:

1. aride en zone marginale
2. mixte
3. culture en zone humide

Carte 3

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Principaux systèmes cartographiques

A. Cultures sur des terres arides marginales (15%)

B. Agriculture mixte (57%): céréales - bétail

C. Cultures en zones humides (28%): pérenne

La comparaison avec les densités moyennes de population (carte 2) confirme la distinction de trois zones de systèmes dominants (carte 3).

A. Un système à faible intensité dans les zones arides où le climat est un facteur limitant.

B. Des systèmes mixtes complexes en cours d'évolution où une nouvelle augmentation de la population entraînera une plus forte intensité agricole.

C. Un système dominé par les cultures dans le sud humide où les pressions des populations étaient déjà fortes, sauf dans les zones forestières et aucune augmentation importante des effectifs bovin n'est à attendre après la disparition des tsé-tsé.

Carte 4

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Lute contre les vecteurs: par exemple tsé-tsé/trypanosomose

tsé-tsé et trypanosomose:

zone de répartition des glossines du nord

zones assainies

foyers habituels de maladie du sommeil chez l'homme

La carte 4 montre comment les systèmes identifiés sont liés à différents aspects de l'ensemble tsé-tsé-trypanosomose. Dans la zone du nord où la tsé-tsé est présente, tous les bovins sont des zébus. Ces animaux migrent de façon saisonnière dans la zone du nord de l'aire de répartition de la tsé-tsé (bande jaune). Cette zone présente une série de possibilités particulièrement intéressantes pour l'éradication de la tsé-tsé.

Carte 5

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Appui aux décisions: choix des zones pour l'éradication de la tsé-tsé

Effet du climat et de la végétation

Effet de la population humaine et des activités humaines

Habitat

Carte de la vulnérabilité à la tsé-tsé

Avantage potentiel de l'élimination de la tsé-tsé

Unité de lutte

Risque de réinvasion

Zones prioritaires pour l'éradication de la tsé-tsé

Le modèle d'appui à la décision est présenté schématiquement sur cette carte.

Carte 6 et Carte 7

Carte 6

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Écologie de la tsé-tsé

Poches de tsé-tsé:

Conditions climatiques généralement favorables. Présence de mouches dans des poches de végétation favorables sur le bord des rivières.

Répartition linéaire:

Pendant la saison sèche, présence de mouches dans des zones de végétation favorables sur le cours principal et les principaux affluents. Expansion linéaire des populations de mouches pendant les pluies.

Répartition ubiquiste:

En raison de conditions climatiques humides favorables, les mouches sont également présentes sur des affluents secondaires pendant la saison sèche.

Nord

Sud

Carte 7

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Vulnérabilité à la tsé-tsé: climat et agriculture

Région du nord

Région du sud

Effet probable de la population OU de l'agriculture mixte

Effet probable de la population ET de l'agriculture mixte

Pas d'effet important probable sur la tsé-tsé

Aires protégées

Lacs principaux

Les zones climatiques en forme de bandes ont une forte influence sur l'écologie de la tsé-tsé. Du nord au sud, le climat devient de plus en plus humide. De ce fait, les populations de tsé-tsé ont des probabilités d'être plus fragmentées, plus vulnérables et plus aisées à éliminer de façon permanente dans le nord. En outre, la réinvasion est moins probable car des espaces où règnent des conditions défavorables empêchent la dispersion des tsé-tsé. En revanche, dans le sud, où les tsé-tsé sont répandues, une forte pression favorisant la réinvasion a des probabilités de compromettre les tentatives de suppression permanente des tsé-tse et/ou d'éradication. Dans ces conditions, les techniques de maîtrise intégrée de la maladie associant des stratégies de pâturage adaptées, l'emploi de races trypanotolérantes, un suivi vétérinaire et une lutte contre les vecteurs dans les points chauds/zones à fort risque de contact peuvent être nécessaire pour parvenir à une lutte durable contre les vecteurs.

Carte 8

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Risque de réinvasion

Réinvasion improbable, en raison des conditions écoclimatiques uniquement

Réinvasion improbable en raison de l'agriculture mixte et des conditions climatiques

Réinvasion de plus en plus probable

L'application des modèles tenant compte des régimes climatiques et des systèmes d'agriculture mixte présents dans cette zone permet d'élaborer une prévision des risques de réinvasion en Afrique de l'Ouest.

Conclusion

Nous avons donné un exemple (simplifié) de l'approche méthodologique de planification stratégique de la lutte intégrée contre la tsé-tsé/trypanosomose à l'échelle d'une zone. Cette approche stratégique incorpore les différents éléments et les forces intrinsèques qui façonnent et conduisent l'évolution des systèmes agricoles (population humaine, élevage, cultures) dans une entité unique. Pour ce faire, les principaux facteurs climatiques ayant une influence sur les systèmes et sur la densité et la répartition du vecteur sont également pris en compte. L'approche décrite de lutte contre le vecteur permet de sélectionner les zones prioritaires où des actions équilibrées et ciblées auront le plus de chance de réussir et de produire le maximum d'avantages pour le bien-être de la population tout en protégeant l'environnement.

___________________________

* Fondée sur le document "L'homme, les cultures et le bétail an Afrique de l'Ouest: .............................................. ............................................ (G. Hendrickx, J. Slingenbergh, R.C. Matiolli, W. Wint) présenté à la Conférence sur la production culture-élevage durable pour améliorer les moyens de subsistance et la gestion des ressources naturelles en Afrique de l'Ouest, tenue du 19 au 22 novembre 2001 à Ibadan (Nigeria).