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Le Partenariat mondial sur la restauration des paysages forestiers: une vision globale

C. Saint-Laurent et J. Carle

Carole Saint-Laurent est coordonnatrice au Partenariat mondial sur la restauration des paysages forestiers, et conseiller principal en matière de politiques forestières, Union mondiale pour la nature (UICN), Toronto, Canada.
Jim Carle est forestier principal (plantations et protection) à la Division des ressources forestières, FAO, Département des forêts, Rome.

Restaurer les paysages forestiers implique de renforcer l’aptitude des forêts et des arbres à répondre aux besoins de subsistance des populations et de l’environnement, au sein de la mosaïque des diverses utilisations des terres présentes dans le paysage.

L’approvisionnement soutenu en bois et fibres, des emplois sûrs, une bonne productivité agricole, des habitats pour les espèces, la protection des bassins versants et d’autres fonctions connexes liées à la forêt ne peuvent être fournis simultanément à partir d’un même site. Cependant, ils peuvent l’être au sein d’une mosaïque d’utilisations des terres au niveau du paysage.

De même, on ne peut prétendre que des forêts exploitées intensément offrent un large éventail de biens et de services au niveau du site, mais, à l’échelle du paysage, leur rôle peut aller bien au-delà de la simple production de bois d’œuvre industriel. Les gouvernements, les organisations internationales, le secteur privé et les organisations non gouvernementales (ONG) reconnaissent de manière croissante que les avantages et inconvénients inhérents à la foresterie de production moderne
ne peuvent être pleinement appréhendés qu’au niveau d’un paysage, suffisamment vaste pour embrasser les demandes complexes et concurrentielles d’utilisation des terres, mais suffisamment limité pour répondre aux préoccupations locales quant à leur utilisation durable. C’est en fonction du paysage auquel elles contribuent que les forêts plantées – ou d’autres types de forêts – gérées de manière intensive peuvent renforcer ou, au contraire, compromettre les moyens d’existence viables et l’utilisation durable des terres.

La dégradation et la fragmentation intéressent plus de 60 pour cent des forêts du monde. Des méthodes artisanales de restauration, comme le simple reboisement de superficies dénudées sont des solutions limitées. Elles ne prennent pas en compte les causes complexes de la dégradation forestière. La restauration des forêts à l’échelle du paysage (voire du bassin versant) répond plus efficacement aux multiples besoins en ressources des populations et satisfait aux différentes utilisations des terres, comme l’agriculture, la foresterie et les aires protégées.

La restauration du paysage est une approche pratique. Son objectif n’est pas de tenter de rétablir les forêts originelles du passé, mais de restaurer les fonctions des forêts dans l’ensemble du paysage. Pour le réaliser, il faut réunir les parties prenantes afin d’identifier, négocier et mettre en œuvre des pratiques qui rétablissent un équilibre optimal entre les avantages écologiques, sociaux et économiques des forêts et des arbres, dans un modèle élargi d’utilisations des terres. Un paysage forestier restauré peut comprendre, dès lors, les éléments suivants:

  • des aires protégées pour la gestion des bassins versants et la conservation de la nature;
  • des plantations bien gérées;
  • des superficies reboisées après exploitation;
  • des zones tampons ou des bandes arborées le long des cours d’eau, freinant les crues et l’érosion;
  • des superficies de forêt naturelle servant au tourisme et à la santé de l’écosystème;
  • un développement communautaire planifié.

La restauration du paysage forestier peut donc éviter et réduire la dégradation des terres tout en aidant à assurer les avantages suivants:

  • un revenu et des possibilités d’emploi pour les collectivités rurales;
  • une source durable de bois pour les industries forestières et les collectivités locales;
  • un nombre et une qualité accrus des habitats pour les animaux et les végétaux;
  • une meilleure résistance et tolérance au changement climatique;
  • une disponibilités en eau de qualité élevée;
  • des produits non ligneux comme les plantes médicinales et des biens commercialisables;
  • des possibilités de récréation et de tourisme;
  • un piégeage du carbone assurant des bienfaits sociaux et environnementaux;
  • une valeur accrue des terrains proches des zones restaurées.

Un partenariat mondial pour des forêts saines

Le Partenariat mondial sur la restauration des paysages forestiers est un réseau mondial de plus de 24 gouvernements et organisations (voir l’encadré) œuvrant avec des praticiens, des collectivités et des industries pour développer et renforcer les efforts de restauration du paysage forestier dans le monde entier. Il a été lancé publiquement en mars 2003 par l’Union mondiale pour la nature (UICN), le Fonds mondial pour la nature (WWF) et la Commission des forêts de Grande-Bretagne, à la seizième session du Comité des forêts de la FAO. Il vise à catalyser, promouvoir et renforcer les conditions et approches permettant la restauration du paysage forestier, de façon à favoriser les collectivités locales et la nature tout en respectant les engagements internationaux vis-à-vis des forêts.

Les partenaires contribuent à:

  • fournir des compétences, des avis ou des financements;
  • participer à un réseau pédagogique de sites;
  • créer des outils servant au soutien à la décision, au renforcement des capacités, au suivi et à la gestion du savoir;
  • établir des groupes de travail nationaux sur la restauration des paysages forestiers;
  • accueillir des ateliers ou y contribuer;
  • introduire des réformes des politiques nationales;
  • entreprendre des projets de terrain.

Le partenariat vise à faire coïncider les besoins de chaque partenaire avec les ressources des autres et ce, au profit des forêts du monde.

Entre 2003 et 2005, les activités du Partenariat mondial ont cherché à rehausser l’image de la restauration du paysage forestier aux échelons national, régional et international; d’accroître la communication et les connaissances parmi les praticiens du monde entier; et d’identifier des moyens de faire contribuer la restauration du paysage forestier aux objectifs économiques et environnementaux des collectivités. Le partenariat a catalysé l’établissement de groupes de travail nationaux dans un certain nombre de pays et aidé à fournir un soutien financier, technique et politique, destiné à un grand nombre de nouvelles activités de restauration du paysage forestier dans le monde entier.

Le point culminant de la première étape a été l’atelier international sur la mise en œuvre de la restauration du paysage forestier tenu à Petrópolis, Brésil, en avril 2005, où plus de 100 participants provenant de 42 pays se sont réunis pour parler de l’avenir des forêts dégradées du monde et de la façon dont la restauration du paysage forestier pourrait aider à résoudre nombre de problèmes environnementaux et sociaux. Parmi les principaux résultats de l’atelier figure la ratification du Défi de Petrópolis, un appel mondial en faveur de la restauration des paysages forestiers, au profit des populations et de la nature, et pour contribuer à renverser la tendance à la perte et à la dégradation des forêts.

Les recommandations de l’atelier de Petrópolis ont été présentées à la cinquième session du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF-5) tenue à New York, Etats-Unis, en mai 2005, lors d’une table ronde sur la «Restauration des forêts du monde», où de nombreux ministres ont promis d’appuyer l’approche de la restauration du paysage forestier.

Au stade actuel des activités (de 2005 à 2009), le partenariat vise à répondre au Défi de Petrópolis comme suit:

  • instaurer le partenariat et l’appui nécessaire à tous les niveaux;
  • constituer un réseau pédagogique de sites pour améliorer la compréhension et la pratique de la restauration du paysage forestier;
  • fournir aux principaux acteurs l’information et les outils dont ils ont besoin pour prendre et mettre en œuvre des décisions portant sur la restauration du paysage forestier, et surveiller leurs impacts;
  • renforcer les cadres juridiques, stratégiques et institutionnels pour favoriser la restauration du paysage forestier, notamment des lois, des institutions et des incitations de soutien;
  • envisager un nouvel atelier international en 2009.

Des partenariats pour restaurer les paysages et offrir des occasions de revenu: quelques exemples

La vallée d’Ucayali, une vaste plaine d’inondation boisée en Amazonie péruvienne, a été dégradée par l’agriculture, l’exploitation forestière et l’augmentation de la population. Le Centre pour la recherche forestière internationale (CIFOR), le Centre mondial d’agroforesterie (CIRAF) et l’Institut espagnol pour les études agraires (INIA) se sont unis en partenariat pour restaurer la zone en replantant les essences indigènes, réhabilitant les sols dégradés et introduisant des associations de cultures et forêts, plutôt que d’abattre d’autres forêts pour y établir des plantations. De nombreux résidents sont des migrants en quête de nouveaux moyens d’existence, si bien que l’approche de la restauration du paysage forestier revêt une importance particulière.

Au Royaume-Uni, la Commission des forêts de l’Ecosse, la compagnie écossaise des eaux, les collectivités locales, British Petroleum et d’autres partenaires œuvrent de concert à la restauration d’une superficie de 8 500 ha de précieuses forêts indigènes autour du Loch Katrine en Ecosse centrale. Les avantages comprendront une amélioration de la disponibilité et de la qualité de l’eau urbaine, une meilleure conservation de la nature et des possibilités économiques et touristiques accrues.

Aux Etats-Unis, les agences gouvernementales et les organisations du secteur privé ont formé un partenariat en 1998 pour restaurer la forêt de montagne du bassin versant de l’Upper South Platte, qui couvre près de 500 000 ha de terres publiques et privées dans les montagnes Rocheuses. C’est une zone vulnérable aux feux de friches, aux insectes et aux maladies ainsi qu’à l’établissement d’immeubles résidentiels et commerciaux, à l’exploitation forestière, à l’augmentation de la population et à l’intensification du tourisme.

Dans la région de Bong-Ahafo au Ghana, les fonctionnaires publics, les chercheurs et des ONG ont établi un groupe de travail et un plan d’action nationaux sur la restauration du paysage forestier en 2004. L’UICN, l’Institut de recherche forestière du Ghana et les organisations locales entreprennent de concert des activités de gestion communautaire des incendies et de restauration, à l’aide d’espèces indigènes choisies par les collectivités. Dans l’ouest du Ghana, un projet est en train d’introduire l’espèce arborescente indigène Allanblakcia floribunda dans les plantations de cocotiers pour fournir de l’ombre et restaurer les paysages dégradés.

Pour plus d’informations sur le Partenariat mondial et les modalités d’adhésion, veuillez consulter le site: www.unep-wcmc.org/forest/restoration/globalpartnership

La restauration du paysage forestier autour du Loch Katrine au Royaume-Uni permettra d’améliorer la disponibilité et la qualité de l’eau, la conservation de la nature et le tourisme
J. CARLE

Membres du Partenariat mondial sur la restauration des paysages forestiers

  • Union mondiale pour la nature (UICN)
  • Fonds mondial pour la nature (WWF)
  • Alliance of Religions and Conservation (ARC)
  • CARE International
  • Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique (CDB)
  • Centre pour la recherche forestière internationale (CIFOR)
  • Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)
  • Mécanisme mondial de la Convention sur la lutte contre la désertification
  • Centre international pour la recherche en agroforesterie (CIRAF)
  • Union internationale des instituts de recherches forestières (IUFRO)
  • Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT)
  • Programme sur les forêts (PROFOR)
  • Secrétariat du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF)
  • Centre mondial de surveillance de la conservation du PNUE
  • Institut de recherche forestière du Ghana (FORIG)
  • Gouvernements d’El Salvador, de Finlande, d’Italie, du Japon, du Kenya, du Liban, d’Afrique du Sud, de Suisse, du Royaume-Uni et des Etats-Unis

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