CCP: ME/HS 03/2

I. GÉNÉRALITÉS

1. À sa septième session en juin 2001, le Sous-Groupe a demandé au Secrétariat de procéder à une analyse empirique de l'incidence qu'ont la réglementation de l'environnement et les restrictions commerciales sur le secteur des cuirs et peaux bruts et du cuir tanné. Le présent document a été préparé en réponse à cette demande. L'incidence du coût de la réglementation environnementale, de la prévention de la pollution et des coûts de la dépollution est étudiée à partir d'un modèle d'équilibre partiel qui donne un tableau stylisé des marchés mondiaux des cuirs et peaux bruts et du cuir tanné et de la chaussure. Le traitement du cuir est une activité polluante et le secteur du tannage et du corroyage du cuir est parmi les secteurs industriels les plus toxiques¹. On estime que le durcissement de la réglementation en matière d'environnement aura une incidence sur l'implantation de cette branche d'activité dans la mesure où les coûts de dépollution risquent d'éloigner le traitement du cuir des pays dotés d'une réglementation stricte.

2. Dans la deuxième partie du document, l'analyse porte essentiellement sur la libéralisation du commerce. La réforme des politiques commerciales est un élément prioritaire des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), dans la mesure où cette libéralisation est considérée comme favorisant le bien-être économique et la croissance à long terme. Cette analyse a été menée à partir d’un modèle d'équilibre partiel des cuirs et peaux bruts et du cuir tanné. Ces modèles servent de plus en plus à résoudre des questions sensibles de politique telles que l’effet de la libéralisation du commerce sur la production, la consommation et le commerce, l'implantation industrielle et également sur la répartition des profits et des coûts entre pays et entre groupes de population.

II. INCIDENCE DES RÉGLEMENTATIONS ENVIRONNEMENTALES

A. GéNéRALITéS

3. La mesure dans laquelle les réglementations environnementales influent sur l'implantation des entreprises de traitement du cuir dépend de la sévérité de la réglementation et des coûts correspondants en matière de dépollution. D'une manière générale, il ressort des éléments d'information disponibles que les pays en développement qui soutiennent leur secteur national de traitement du cuir appliquent des normes environnementales moins strictes que les pays développés, dans la mesure où la faiblesse relative des revenus fait sans doute qu’il y aura une moindre demande de normes plus strictes source d’amélioration pour l’environnement. Par le passé, le durcissement de la réglementation a pu provoquer un déplacement relatif du secteur du traitement du cuir des pays développés vers les pays en développement du fait que les coûts de dépollution dus à l'application de la réglementation ont peut-être pesé sur la rentabilité.

4. Toutefois, la relocalisation des entreprises dans des régions où la réglementation en matière d'environnement est plus sévère ne se ferait que si ces coûts de dépollution représentaient une part notable du coût total du traitement du cuir. On estime que le coût du nettoyage des installations en Europe pourrait représenter 3 à 5 pour cent des coûts d'exploitation². Selon une estimation effectuée il y a un certain temps par l'ONUDI, le coût du traitement des eaux résiduaires représentait environ 4 à 6 pour cent du coût final³. Les progrès technologiques ainsi que l'exploitation en « grappes » d’un grand nombre d'installations de tannage ont fait baisser les coûts de dépollution. Aux États-Unis, les dépenses d'élimination et de recyclage dans le secteur du traitement du cuir en 1999 s'élevaient au total à 1 million de dollars EU, tandis que les coûts de la dépollution s'élevaient à 11,8 millions de dollars EU⁴. En partant de ces chiffres, on estime que l’élimination de la pollution née du traitement de 1 000 pieds carrés de cuir léger aux États-Unis coûte en moyenne environ 17,10 dollars EU.

5. On peut supposer que la dépollution dans les pays en développement qui n’imposent généralement pas de normes aussi strictes coûterait moins cher, mais que ce coût pourrait dépasser 5 pour cent des coûts d'exploitation si l'on essayait d’appliquer les normes propres aux pays développés sans disposer de la technologie existant dans ces pays. Les techniques du tannage et du traitement du cuir dans les pays en développement étant relativement moins modernes et de ce fait plus polluantes que dans les pays développés, le coût de la dépollution dans les premiers pourrait être bien plus élevé si l'on voulait respecter des normes plus strictes.

B. SIMULATION DU DURCISSEMENT DES RéGLEMENTATIONS ENVIRONNEMENTALES

6. On a procédé à une analyse de l'effet du durcissement de la réglementation de l'environnement au moyen d'un modèle d'équilibre partiel portant sur les secteurs du cuir brut et du cuir léger bovin et de la chaussure fabriquée à partir de ce cuir dans le monde en développement et le monde développé. En résumé, les modèles d'équilibre partiel donnent un tableau statistique de l'économie et dégagent les interactions entre l'offre, la demande, les échanges commerciaux et les prix. Le modèle correspondant au cuir de bovin et aux articles de ce cuir a été mis au point par le Service des matières premières et des produits tropicaux et horticoles de la FAO sur la base de séries de données internes sur la production, la disponibilité apparente, le commerce⁵ et les informations sur les tarifs d'importation obtenues du simulateur du commerce mondial intégré de la Banque mondiale⁶. Le modèle est statique et ne présente donc qu'une situation d'équilibre à long terme que l'on escompte voire régner une fois effectuée l'adaptation aux nouvelles conditions du marché.

7. Un durcissement des réglementations environnementales se traduira par un relèvement correspondant des coûts de dépollution. La réglementation environnementale applicable au secteur du traitement du cuir consiste souvent en valeurs maximales d’émissions dans l'atmosphère, d'effluents liquides et de déchets solides par unité de production. À tout renforcement de la réglementation correspondrait une baisse de ces valeurs maximales. Faute de connaître avec précision les valeurs maximales aux États-Unis, ni la structure des coûts de dépollution ni le rapport entre la quantité de polluants éliminés et le coût des techniques de traitement par unité de polluant, il est impossible de calculer le coût de dépollution qui correspond à un durcissement proportionnel de la réglementation environnementale. Cependant, partant de l'hypothèse que les coûts moyens de dépollution en Amérique du Nord, en Europe, en Océanie et dans le reste des pays développés sont semblables à ceux enregistrés aux États-Unis, on a procédé à une expérience de simulation sur la base d'une augmentation de 200 pour cent du coût de dépollution dans ces régions afin d'étudier la réactivité du traitement du cuir aux changements apportés à la réglementation environnementale dans les pays développés.

8. En supposant que le secteur du tannage dans les pays développés soit contraint d'absorber l'augmentation de 200 pour cent du coût de dépollution, sans faire supporter cette augmentation par les consommateurs, on a simulé une augmentation du coût des intrants de 34,20 dollars EU à 51,30 dollars EU pour 1 000 pieds carrés de cuir léger. On a considéré que la réactivité des tanneurs à l'augmentation du coût de dépollution était semblable à leur réactivité aux changements du prix auquel ils vendent le cuir. Il s'agit là d'une démarche plutôt simpliste dans la mesure où la réaction du secteur du cuir à une augmentation du coût des intrants dépend de la structure de ses coûts et de la rentabilité correspondante. Mais, il n'a pas été possible de retenir un modèle plus complexe qui tienne compte du rapport entre le coût des intrants et la production, faute de données et d'informations sur la structure des coûts du secteur du traitement du cuir. On peut donc voir dans les résultats de la simulation une indication de l’effet d'un renforcement des normes en matière d'environnement et il convient de les interpréter avec prudence.

Tableau 1 - Effet d’une hausse de 200 pour cent des coûts de dépollution dans les pays développés sur la production, la consommation et le commerce net du cuir léger (changements en pourcentage)

Source: Modèle de simulation concernant les cuirs et articles en cuir de bovin.

9. Les résultats de la simulation (voir tableau 1) amènent à penser que l'effet d'un durcissement des normes environnementales dans les pays en développement risque d'être faible. Selon cette simulation, la production a baissé d'environ 1,3 pour cent en Amérique du Nord, en Europe et en Océanie et de 1,1 pour cent dans le reste des pays développés, ce qui amène à penser que les installations de traitement ayant effectivement subi des pertes et cessé la production sont en petit nombre. Tandis que la production et les exportations de ces pays baissent, les prix aussi bien intérieurs qu'internationaux augmentent pour rétablir l'équilibre du marché à la fois dans la région et à l'échelle mondiale. Les augmentations de prix font baisser la demande et croître la production dans les autres régions. Dans la simulation, l'Afrique et l'Amérique latine voient leur production de cuir augmenter de 0,2 pour cent tandis qu'au Proche-Orient et en Extrême-Orient l'augmentation est insignifiante.

10. On a également procédé à une simulation d'une hausse des coûts de dépollution en Afrique, en Extrême-Orient et dans toutes les régions du monde en développement. Pour cette expérience, on a supposé que les pays en développement devaient respecter la même réglementation que les pays développés. Mais, dans les pays en développement les techniques étant sans doute plus polluantes que dans les pays développés, il a été décidé de simuler une hausse de 68,40 dollars EU des coûts de dépollution. Cette hausse devrait bien traduire un renforcement des normes environnementales compte tenu du caractère moins moderne des techniques de traitement du cuir.

Tableau 2 - Effet d’une hausse de 200 pour cent des coûts de dépollution en Afrique sur la production, la consommation et le commerce net du cuir léger (changements en pourcentage)

Source: Modèle de simulation concernant les cuirs et articles en cuir de bovin.

11. En Afrique, selon la simulation, la hausse des coûts de dépollution aboutit à une baisse de 2,4 pour cent de la production du cuir dans la mesure où une partie des entreprises africaines de traitement du cuir peuvent cesser de produire par suite de la réduction de leurs bénéfices (tableau 2). Les importations nettes de cuir augmenteraient également de 19 pour cent pour répondre aux besoins du secteur national de la chaussure et des articles de cuir. La demande accrue d’importations en Afrique exercerait une légère pression à la hausse sur les cours, ce qui entraînerait de très faibles accroissements de la production de cuir dans d'autres régions.

12. Une hausse semblable des coûts de dépollution en Extrême-Orient entraînerait une baisse de la production de la région moindre que celle simulée pour l'Afrique. Les résultats de la simulation montrent que la production de cuir en Extrême-Orient ne baisserait que de 0,7 pour cent alors que les importations augmenteraient de 1 pour cent ce qui amène à penser que les entreprises de traitement du cuir en Extrême-Orient sont capables d'absorber les hausses de coûts de production (voir tableau 3). La demande accrue d’importations en Extrême-Orient exercerait une pression relativement plus forte sur les cours, ce qui entraînerait des augmentations plus marquées de la production du cuir dans les autres régions.

13. On trouvera au tableau 4 les résultats de la simulation d’une hausse des coûts de dépollution dans toutes les régions du monde en développement. Il ressort de cette simulation que le renforcement des normes environnementales appliquées dans les pays en développement pourrait entraîner une baisse de 2,7 et 2,1 pour cent de la quantité de cuir traité en Amérique latine et en Afrique respectivement, ce qui amène à penser que certaines entreprises de traitement pourraient arrêter la production. Au Proche-Orient et en Extrême-Orient, la production pourrait baisser d'environ 0,6 pour cent. On s'attend à ce que la baisse des quantités de cuir fournies sur le marché mondial se traduise par une hausse du prix international et le rétablissement d’un nouvel équilibre qui prendrait la forme d’un renforcement de la production dans les pays développés et d’une réduction de la demande dans le monde entier. L’Amérique du Nord et l’Europe pourraient augmenter leur production de 0,4 pour cent et 0,5 pour cent respectivement, tandis que les exportations nettes de ces régions augmenteraient, selon la simulation, de 2,1 et 7,9 pour cent.

Tableau 3 - Effet d’une hausse de 200 pour cent des coûts de dépollution en Extrême-Orient sur la production, la consommation et le commerce net du cuir léger (changements en pourcentage)

Source: Modèle de simulation concernant les cuirs et articles en cuir de bovin.
Tableau 4 - Effet d’une hausse de 200 pour cent des coûts de dépollution dans les régions en développement sur la production, la consommation et le commerce net du cuir léger (changements en pourcentage)

Source: Modèle de simulation concernant les cuirs et articles en cuir de bovin.

14. Les résultats de la simulation laissent voir qu'un durcissement des normes environnementales n'aura guère d’effet sur l'implantation des entreprises. Cette conclusion correspond aux études qualitatives antérieures d'où il ressortait que même si l'on considère le traitement du cuir comme une branche d'activité relativement polluante, les variations d'un pays à l'autre en ce qui concerne les normes environnementales semblent n’avoir qu'un effet insignifiant sur l'implantation des entreprises⁷.

III. EFFET DE LA LIBÉRALISATION DU COMMERCE

A. GéNéRALITéS

15. Les mesures prises en matière de commerce telles que la tarification douanière des importations et les taxes à l'exportation, les contingents d'importation et d'exportation et les contingents tarifaires isolent les marchés nationaux en créant un écart entre les prix intérieurs et les prix internationaux et servent à transférer les richesses d'un groupe de population à un autre. Les tarifs d’importation et les contingents d'importation visent à protéger les producteurs et les entreprises de traitement du cuir. Ces instruments de politique réduisent la vulnérabilité des entreprises nationales de production ou de traitement aux changements survenant sur le marché international et encouragent l’augmentation de la production en faisant monter le prix intérieur au détriment des consommateurs. Ces politiques ont plusieurs raisons d'être. Il pourrait s'agir soit de soutenir le revenu des producteurs nationaux soit de protéger une branche d'activité naissante jusqu'à ce qu'elle soit suffisamment bien établie pour pouvoir entrer en concurrence avec celles plus développées d'autres pays. En revanche, les contingents d'exportation et les taxes à l'exportation visent à faire baisser le prix intérieur par rapport au prix international et à redistribuer la richesse des producteurs aux consommateurs. Ces mesures visent à accroître les disponibilités de matières premières sur le marché intérieur, ce qui baisse les prix pour les producteurs et les fabricants nationaux.

16. On trouvera au tableau 5 les droits de douane applicables au cuir brut, au cuir léger et à la chaussure de cuir bovin appliqués par des régions du monde en développement et du monde développé. L'accès au marché en fonction des tarifs douaniers constitue un problème majeur tant pour les matières premières que pour les produits transformés sur les marchés des pays en développement comme sur ceux des pays développés. Les tarifs à l’importation de cuir bovin brut varient en moyenne de 0 pour cent (Amérique du Nord et Océanie) à 11,7 pour cent (Afrique). La progressivité des droits de douane ressort à l'évidence du niveau de protection, exprimé en droits de douane pour les pays développés et les pays en développement et augmentant au fur et à mesure qu'on avance dans la chaîne de transformation. Les tarifs douaniers applicables au cuir fini varient en moyenne de 2,5 pour cent (Océanie) à 16,4 pour cent (Afrique), tandis que ceux applicables à la chaussure varient de 5,6 pour cent (zone de l'ancienne Union soviétique) à 37,5 pour cent (Océanie).

Table 5 - Tarifs douaniers sur les importations de cuir brut, de cuir tanné et de chaussures de cuir de bovin, 2002

Source: World Integrated Trade Solution

17. En théorie, la suppression des barrières tarifaires sur les cuirs et les peaux bruts et les articles de cuir devrait renforcer la prospérité économique mondiale puisque la production de ces produits s’en trouve encouragée dans les régions et les pays en vertu de la loi de l'avantage comparatif et en fonction de la disponibilité de ressources telles que la terre, les troupeaux de bétail, la main-d'oeuvre et la technologie. La suppression des barrières douanières applicables aux cuirs et aux peaux bruts ainsi qu'aux articles de cuir devrait entraîner un relèvement des prix internationaux des matières premières et des produits transformés. La suppression des droits de douane aboutirait à une baisse des prix à la consommation dans les pays qui protègent leur marché, ce qui stimulerait la demande du cuir et des produits dérivés renforçant ainsi les prix internationaux. Le traitement du cuir devrait donc augmenter et son implantation devrait évoluer en fonction de la libéralisation.

18. La situation peut être différente dans les pays producteurs dotés d'un important marché intérieur jusqu'ici protégé où la libéralisation peut entraîner, au moins à court terme, une baisse des prix liée à un afflux d'importations entrant en concurrence avec les produits nationaux. À long terme, la libéralisation pourrait se traduire dans ces pays par une augmentation des revenus née d'un renforcement de la compétitivité et de l'efficacité. Banse et Gerken ont évalué naguère (1992) l'impact de la libéralisation du commerce dans le secteur des cuirs et peaux bruts et des articles de cuir en recourant à un modèle d'équilibre partiel. Cette étude a été communiquée à la troisième session du Sous-Groupe⁸. Cependant, cette étude ayant été menée il y a plus de dix ans, on a estimé qu'il faudrait simuler une libéralisation du commerce à partir de données récentes sur les droits de douane, la production, la consommation et le commerce afin de mieux faire ressortir jusqu'à quel point la libéralisation du commerce aura un effet dans les régions développées et les régions en développement.

19. Il y a lieu de noter que le modèle sur le cuir bovin brut et les articles de ce cuir portant sur des régions entières et non sur des pays, il faudra interpréter les résultats avec prudence. L'agrégation de données pour plusieurs pays et pour des régions entières aboutit à une perte d'information sur la position commerciale de tel ou tel pays (notamment lorsqu’il s’agit de déterminer si un pays est exportateur ou importateur et quelle est l'incidence effective des tarifs d’importation sur le marché intérieur). Par exemple, si un pays impose un droit de douane à l'importation de 20 pour cent sur les cuirs bruts bovins mais ne procède à aucune importation parce que autosuffisant ou exportateur, le droit de douane n'intervient pas dans le prix intérieur. C'est pourquoi on est parti de l'hypothèse que la mesure dans laquelle les droits de douane interviennent dans la formation des prix intérieurs des régions importatrices dépend de la quantité d'importations par rapport à la consommation. On a considéré que les producteurs et les consommateurs des régions fortement exportatrices se trouvent confrontés au prix du marché international.

B. EFFET DE LA LIBÉRALISATION DU COMMERCE

20. On trouvera au tableau 6 les résultats de la libéralisation du commerce des cuirs et des peaux bruts. Supprimer les tarifs douaniers devrait provoquer une hausse de 9,3 pour cent des cours mondiaux des cuirs bovins bruts salés verts qui bénéficierait aux régions exportatrices telles que l'Afrique où les tarifs douaniers sont considérés comme n’étant pas effectivement appliqués. Les régions importatrices qui imposent des droits de douane élevés, telles que le Proche-Orient, devraient enregistrer une baisse du prix intérieur. La suppression des barrières douanières et le changement de prix qui s’ensuivrait entraîneraient des changements dans les quantités fournies, demandées et échangées. La baisse des prix dans des régions où les droits de douane sont élevés stimulerait la demande. Les échanges mondiaux augmenteraient de 4,4 pour cent et la production passerait à des régions présentant un avantage comparatif telles que l'Afrique. L'offre et les exportations nettes du cuir bovin brut en Afrique augmenteraient respectivement de 7,5 et 36,7 pour cent. La prospérité économique mondiale augmenterait ne serait-ce que légèrement. Les producteurs de cuirs bruts de bovin en Afrique et dans certaines régions développées en sortiraient gagnants, tandis que ceux des régions où les droits de douane sont élevés, telles que le Proche-Orient et l'Europe, subiraient un effet négatif.

Tableau 6 - Résultats de la simulation de la libéralisation* du commerce: cuirs bruts de bovin (changements en pourcentage)

Source: Modèle de simulation concernant les cuirs et articles en cuir de bovin.
*Suppression des tarifs d'importation

21. Il ressort des résultats présentés au tableau 7 que la suppression des droits de douane dans le secteur du cuir léger augmenterait les échanges à l'échelle mondiale de 26,9 pour cent. Les cours mondiaux du cuir léger augmenteraient de 19,2 pour cent. Malgré cette hausse, les régions importatrices appliquant des droits de douane élevés et soutenant fortement leur prix intérieur enregistreraient une baisse de leurs prix postérieurs à la libéralisation. En Afrique, la suppression de droits de douane allant de 5 à 38 pour cent ferait baisser de 13,6 pour cent le prix du cuir léger. De même, le prix intérieur, en Extrême-Orient, baisserait de 11,7 pour cent en cas de suppression de droits de douane qui vont de 9,4 à 35 pour cent. Les secteurs du cuir dans les pays exportateurs qui se protègent peu ou pas du tout verraient le prix intérieur augmenter. En Amérique latine, la suppression des droits de douane entraînerait une hausse des prix intérieurs de 8,35 pour cent. La baisse des prix dans les pays en développement importateurs stimulerait la demande mais réduirait également l'intérêt que présente l'augmentation de la production nationale et aboutirait de ce fait à une augmentation des importations. En Afrique, les importations de cuir passeraient de 29 millions à 81 millions de pieds carrés, tandis qu'au Proche-Orient elles passeraient de 15 millions à 48 millions de pieds carrés. La demande accrue serait satisfaite par une production accrue en Amérique du Nord, en Europe, en Océanie et en Amérique latine. Les résultats tirés du modèle laissent également penser que la libéralisation du commerce ferait croître de 2,5 pour cent la prospérité économique mondiale. En Afrique et au Proche-Orient, les avantages pour les consommateurs de cuir augmenteraient de 35,4 et de 17,3 pour cent respectivement.

Tableau 7 - Résultats de la simulation de la libéralisation du commerce: cuir léger (changements en pourcentage)

Source: Modèle de simulation concernant les cuirs et articles en cuir de bovin.

22. S'agissant de la chaussure de cuir, il ressort des résultats (tableau 8) que la suppression des tarifs d'importation entraînerait une augmentation de 69,7 pour cent des échanges commerciaux et la fabrication des chaussures passerait de pays développés aux pays en développement. Les prix internationaux augmenteraient de 11,4 pour cent pour atteindre une moyenne de 14 539 dollars EU pour 1 000 paires de chaussures. Toutefois, dans les régions importatrices nettes dotées de droits de douane élevés, telles que l'Europe et l'Amérique du Nord, les prix intérieurs baisseraient par suite de la libéralisation ce qui entraînerait une augmentation de la demande mais réduirait par ailleurs l'intérêt que présenterait un renforcement de la production nationale. En revanche, les régions en développement exportatrices nettes de chaussures bénéficieraient de la hausse des prix internationaux, ce qui entraînerait une augmentation de l'offre et des exportations. En Afrique, les exportations nettes augmenteraient de 263,5 pour cent pour atteindre environ 43 millions de paires de chaussures, alors que les exportations nettes en provenance du Proche-Orient augmenteraient pour atteindre environ 75 millions de paires. La prospérité économique mondiale augmenterait de 8 pour cent. Dans les pays en développement, l'amélioration escomptée des avantages pour les producteurs compenserait la baisse des avantages pour les consommateurs, ce qui aboutirait à une modification positive des avantages économiques globaux.

Tableau 8 - Résultats de la simulation de la libéralisation du commerce: chaussures (changements en pourcentage)

Source: Modèle de simulation concernant les cuirs et articles en cuir de bovin.

IV. CONCLUSIONS

23. La libéralisation du commerce dans les secteurs du cuir brut et du cuir tanné de bovin pourrait avoir un effet notable sur l'environnement. Tout d'abord, l'augmentation de la production mondiale a un effet d'échelle. Cet effet tend à aggraver la pollution, même si une utilisation plus efficace des ressources peut faire baisser la pollution par unité de production. Le deuxième effet est compositionnel, la production passant à des régions qui bénéficient d'un avantage comparatif. Toutefois, à l'intérieur d’un pays, le secteur du traitement du cuir est très polluant et toute augmentation de la production du cuir traité accroît la pollution dans une mesure déterminée par l'application de la législation existante, la technologie disponible et les dépenses consacrées à la dépollution et au traitement du cuir. En tout état de cause, l'exercice de simulation mené dans la première moitié de ce document, amène à penser que la réglementation environnementale peut ne pas être un facteur déterminant de l'implantation de l'industrie du cuir. Un troisième effet concerne le transfert de technologie. La réforme du commerce qui implique une économie plus ouverte devrait encourager la mise en oeuvre de techniques plus efficaces, qui réduisent la quantité de pollution dans le monde. D'une manière générale, les exercices de simulation menés dans le présent document semblent montrer que la suppression des droits de douane entraînerait une augmentation du traitement du cuir dans les pays développés alors qu'un durcissement des réglementations environnementales aurait peu d'effet sur l'implantation de l'industrie.

¹ Hettinge, H., P. Martin, M. Singh et D. Wheeler (1995). The Industrial Pollution Projection System. Banque mondiale, Département de la recherche, Politiques de développement.

² FAO 2001, ‘Liens entre les politiques commerciales et les politiques de l’environnement dans le secteur des cuirs et peaux bruts et du cuir tanné’, CCP: ME/HS 01/3, Rome.

³ FAO 1994, 'Aspects environnementaux de la transformation et du commerce des cuirs et peaux', CCP: ME/HS 94/9, Rome.

⁴ Bureau du recensement des États-Unis,1999, Pollution Abatement Costs and Expenditures, Washington.

⁵ World Statistical Compendium for Raw Hides and Skins, Leather and Leather Footwear, 2001

⁶ On ne disposait pas de renseignements sur d’autres politiques commerciales telles que la taxation des exportations ou d’autres restrictions à l’exportation, souvent appliquées dans les pays en développement. On étudie donc seulement la suppression des tarifs d’importation.

⁷ FAO 2001, ‘Liens entre les politiques commerciales et les politiques de l’environnement dans le secteur des cuirs et peaux bruts et du cuir tanné’, CCP: ME/HS 01/3, Rome.

⁸ Banse, M, et A. Gerken (1992). Impact of Protectionist Measures Affecting Imports and Exports of Hides and Skins and Their Derived Products. Institut d’économie agricole, Université de Göttingen.

CCP: ME/HS/92/4. Impact of Protectionist Measures Affecting Imports and Exports of Hides, Skins and their Derived Products, Rome 21-24 April 1992.