Table des matières Page suivante


Introduction

Troisième Consultation sur la génétique forestière

promesses et prévisions

A l'aimable invitation du gouvernement australien et comme recommandé par la précédente consultation, qui avait eu lieu à Washington D.C. en 1969, la troisième Consultation mondiale sur la génétique forestière s'est tenue à Canberra (Australie) du 21 au 26 mars 1977. Elle a été organisée conjointement par le gouvernement australien, l'Union internationale des instituts de recherches forestières (IUFRO) et l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). La Commonwealth Scientific and Industrial Research Organization (CSIRO) de Canberra a généreusement prêté ses installations, tandis que le Bureau des forêts de Papouasie Nouvelle-Guinée, l'Institut des recherches forestières de Nouvelle-Zélande et les services forestiers des Etats australiens de Nouvelle-Galles du Sud, du Queensland, de Victoria et d'Australie-Occidentale ainsi que le territoire fédéral de Canberra ont organisé et accueilli des voyages d'étude. Le succès de la consultation tient, dans une large mesure, à l'excellente organisation de ces voyages et aux préparatifs méticuleux du comité australien responsable. Les plus vifs remerciements doivent aussi être adressés à l'organisme australien d'aide au développement qui, en instaurant un cours international de formation à la génétique forestière en même temps que la consultation, a permis à des participants de pays en développement d'assister à cette dernière, ce qui autrement leur aurait peut-être été impossible.

un catalyseur

Cette troisième consultation, qui a réuni près de 200 scientifiques et forestiers venant d'une cinquantaine de pays, ainsi que des représentants de la FAO et de l'IUFRO était la dernière d'une série de consultations techniques internationales auxquelles ont coopéré ces deux organisations. La première, tenue à Stockholm en 1963, a fait le point des informations sur les principes scientifiques de la génétique forestière et de l'amélioration des arbres, et elle a été jugée de bon augure. La deuxième, qui s'est déroulée à Washington en 1969, s'est pour sa part concentrée sur les avantages pratiques de la sélection des arbres et les moyens de produire et d'utiliser en grand des variétés à haut rendement. Ses travaux ont été jugés comme revêtant un caractère très prometteur et prophétique. Quant à la troisième consultation, peut-être lui attribuera-t-on le mérite d'avoir joué un rôle de catalyseur puisqu'elle s'est avant tout attachée à la nécessité de stratégies génétiques plus complètes et qu'elle a lancé un appel pour que s'intensifie la coopération internationale, en particulier dans le domaine de la conservation et de l'amélioration génétique des essences tropicales.

conservation de la diversité génétique

Les techniques de la génétique forestière ont fait, ces huit dernières années, des progrès aussi sensibles que l'espérait la réunion de Washington, tandis que, de plus en plus, on a pris conscience de la nécessité de conserver le patrimoine génétique. Le savoir et les investissements en matière de génétique forestière restent encore, dans une large mesure, l'apanage de la zone tempérée et portent surtout sur les résineux, encore que ces dernières années, les possibilités de gains rapides que semblent offrir les régions tropicales et subtropicales aient amené à y entreprendre toujours davantage de nouveaux programmes de sélection. Beaucoup, parmi les plus récents de ces programmes, visent des feuillus aussi bien que des résineux et sont décrits dans des communications présentées à la consultation. Dans le même temps, il est devenu très important de conserver la diversité génétique qui constitue une garantie et un complément indispensables à l'obtention de génotypes supérieurs à des fins spécifiques. L'attention a été appelée sur ce problème par le Groupe FAO d'experts des ressources génétiques ainsi que par l'intérêt et le soutien financier qu'a accordés aux ressources génétiques forestières le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE).

la génétique forestière doit améliorer la qualité de la vie

Dans son discours inaugural, M. J.B. Zobel, professeur de sylviculture à l'université de la Caroline du Nord et titulaire de la chaire E.F. Conger, a brossé un tableau global et clairvoyant des défis que doivent relever les spécialistes de l'aménagement du territoire en général et les généticiens forestiers en particulier pour améliorer la qualité de la vie. Sur cette toile de fond, les participants ont fait le point, sous l'angle technique, des récents progrès en matière d'amélioration des arbres, des problèmes actuels et perspectives, tous thèmes qui ont été développés lors de séances techniques consacrées a) à la prospection, à l'utilisation et à la conservation des ressources génétiques, b) aux réalisations touchant à la sélection des espèces et provenances, c) à l'amélioration des populations, d) aux obstacles aux progrès et e) à l'analyse des coûts et avantages de l'amélioration des arbres. Pour choisir des stratégies futures, la sixième séance technique a rassemblé les informations issues des séances précédentes et tenté d'indiquer les types de stratégies et de programmes d'action à adopter dans les dix années à venir si l'on veut que, dans un monde où se rétrécissent sans cesse les terres forestières, la génétique apporte toute sa contribution à l'offre soutenue de produits et de services forestiers indispensables au bien-être de l'homme.

Stratégies pour le futur

Dans le cadre de cette consultation sur la génétique forestière tenue en Australie rien de plus logique que de couronner les séances techniques par la conférence d'un invité spécial, le professeur L.D. Pryor, de l'Australian National University, qui a parlé aux participants des habitudes de reproduction de l'eucalyptus dans le contexte des activités d'introduction et d'amélioration menées de par le monde.
Chaque séance technique s'est ouverte sur un exposé de la situation générale, rédigé et présenté par un rapporteur principal. Ces exposés, remaniés en fonction des débats, constituent les chapitres du présent rapport. De leur côté, des corapporteurs ont présenté des communications spéciales, de portée plus limitée et touchant expressément au thème débattu par telle ou telle séance. Ces communications ont été ensuite discutées sous la direction d'un président technique. Une fois terminés ces débats, le président et les rapporteurs de chaque séance ont formulé des recommandations qui ont été amendées et approuvées en séance plénière. Ces recommandations sont incorporées au présent rapport, ainsi que le discours inaugural, la conférence de l'invité spécial et les mémoires généraux. Y figurent aussi la liste des titres et auteurs de toutes les communications présentées, celle des membres du bureau et des participants, ainsi qu'un compte rendu des suites données aux recommandations émanant de la deuxième consultation. La CSIRO de Canberra s'occupe d'imprimer le texte in extenso des délibérations de la consultation.

Essais de sélection et de provenances

Pendant la consultation, les participants ont effectué un voyage d'étude d'une demijournée pour observer les travaux de l'Australian National University sur la sélection aux fins de résistance chez les peupliers et voir quelques exemples d'amélioration de sujets de Pinus radiata et de peuplements naturels d'eucalyptus dans le territoire fédéral de Canberra. Quatre voyages d'étude antérieurs et deux postérieurs à la consultation ont permis de constater les progrès considérables de la génétique pour diverses essences australiennes. A l'occasion d'un voyage d'étude en Papouasie Nouvelle-Guinée, avant la consultation, les participants ont pu voir des peuplements naturels et des plantations d'araucarias et assister à des essais de sélection et de provenance avec le teck, I'araucaria et le pin tropical. Les méthodes de greffage sont bien avancées en ce qui concerne l'araucaria, tandis qu'on a obtenu des résultats prometteurs avec des croisements à pollinisation contrôlée de P. merkusii. Les travaux d'amélioration du teck ont bien progressé et l'on dispose maintenant d'un verger qui produit des semences améliorées.
Les participants au voyage d'étude en Nouvelle-Zélande ont été très impressionnés par la rigueur scientifique du programme de génétique forestière mis en œuvre dans ce pays et qui a donné le départ à d'autres travaux dans le monde entier. En assez peu de temps, l'exploitation de peuplements monospécifiques a fait naître, en Nouvelle-Zélande, une industrie importante. Dans les plantations en première rotation de P. radiata, on a effectué un criblage pour obtenir des phénotypes supérieurs, tandis qu'on programme exhaustif d'essais de descendance est maintenant en cours. Ces essais fournissent le matériel nécessaire aux stratégies de multiplication des générations avancées qu'applique désormais la Nouvelle-Zélande.

Vergers porte-graines

Un voyage d'étude effectué avant la consultation au Queensland du Nord a surtout porté sur la sélection de P. caribaea sous latitudes tropicales et subtropicales. Les études de provenance et de sélection de P. caribaea var. hondurensis ont donné assez rapidement de précieux résultats. Les participants ont observé avec un intérêt particulier les vergers de clones porte-graines de P. caribaea var. hondurensis, ainsi que les possibilités des hybrides intervariétaux de la var. hondurensis et de l'hybride interspécifique avec P. elliottii. Le voyage comprenait une visite à la division CSIRO de la station régionale de recherches forestières à Atherton qui se livre actuellement à des travaux sur la taxonomie, la floraison et l'écologie des feuillus tropicaux indigènes.
Lors du voyage d'étude dans le sud-est de l'Australie, les visiteurs ont pu voir des forêts d'eucalyptus très différentes tant sur le plan de la morphologie que sur celui de la productivité. Les progrès accomplis dans la sélection des pins sont bien illustrés par les programmes qui commencent à appliquer des stratégies de multiplication des générations avancces. Les visiteurs ont pris un intérêt particulier au programme de sélection touchant Eucalyptus regnans, qui met en jeu de nouvelles études extensives de cette essence dans toute son aire naturelle, ainsi que l'exploitation d'un verger porte-graines.
Après la consultation, deux voyages d'étude avaient été organisés, l'un dans la partie nord de la Nouvelle-Galles du Sud et au Queensland méridional; l'autre en Australie-Occidentale. Près du port de Coffs, en Nouvelle-Galles du Sud, les participants ont observé les techniques en pépinière et les méthodes d'établissement pratiquées dans cette région, et suivi les travaux de génétique forestière, dont une démonstration intéressante des possibilités de la culture tissulaire. Une étape marquante a été la visite de l'impressionnante forêt naturelle de Bruxner Park. Au Queensland méridional, les participants ont examiné les travaux désormais bien connus dont font l'objet les pins à aubier originaires des Etats-Unis. Les essais en champ de ce programme justifient amplement, du point de vue économique, la poursuite des travaux de génétique forestière.
Quant au voyage d'étude effectué en Australie-Occidentale, il a surtout porté sur la sélection de Pinus pinaster. C'est un programme inhabituel en ce sens qu'il prévoit des sélections à partir d'une réserve génétique établie il y a fort longtemps en Australie-Occidentale, en même temps que du matériel soigneusement choisi dans des forêts portugaises et importé sous forme de greffons et de pollen. On a obtenu des résultats impressionnants, surtout du point de vue de la rectitude du fût.
Pendant la consultation, des groupes de travail de l'IUFRO ont tenu le soir des réunions informelles pour débattre des processus de reproduction (S 2.01-05, 22 mars), de la sélection du pin de Monterey (S 2.03-09, 22 mars), ainsi que des provenances et de la sélection d'eucalyptus (S 2.02-09 et S 2.03-10 conjointement, 24 mars).
En outre, l'Australian Forest Research Working Group on Forest Genetics s'est ré uni à Canberra immédiatement avant la consultation (20 mars), tandis que les groupes de travail de l'IUFRO sur les provenances d'essences tropicales (S 2.03-01) ont tenu une réunion conjointe à Brisbane du 4 au 7 avril, c'est-à-dire après le voyage d'étude dans le nord de la Nouvelle-Galles du Sud, postérieur à la consultation.

Les arbres ignorent les frontières politiques

En conclusion, le professeur Max Hagman a bien rendu, dans son allocution de clôture, l'esprit de cette consultation, lorsque, au nom de l'IUFRO, il a déclaré: «Il est de notre devoir à nous, êtres conscients, de réfléchir à ce que nos travaux apporteront de bon à la société. Quand les premiers explorateurs ont laissé derrière eux notre vieux monde, ils ne savaient quasiment rien de ce qui les attendait au-delà de la ligne d'horizon. Maintenant, l'exploration géographique de la Terre touche à son terme et il ne reste plus à connaître que l'immensité bleue et profonde des océans.
«Cette masse d'azur qui baigne ce merveilleux continent qu'est l'Australie est aussi un trait d'union entre nous tous. C'est cette unité que l'on retrouve depuis les temps les plus reculés dans l'esprit de fraternité et de liberté qui anime les hommes de la mer. Mais il est un autre océan où souffle ce même esprit de liberté, l'océan verdoyant de la forêt. Les arbres ignorent les frontières politiques, tout comme la science devrait les ignorer...
«Nous sommes tous d'accord, je pense, pour reconnaître que c'est à peine si nous avons effleuré un autre immense océan, celui de la connaissance... Je ne crois pas me tromper en disant que, de l'avis des participants à cette consultation, certains hommes de science devraient tenter d'en quitter les rives verdoyantes qui leur sont familières pour s'aventurer sur les eaux profondes de l'inconnu en quête de l'univers mystérieux qui s'étend au-delà de l'horizon de notre savoir actuel.
«Je ne saurais dire quels seront les fruits d'une telle expédition, car l'homme est petit et cet océan si vaste. Tout ce dont je puis vous assurer c'est que, pour reprendre les propos de T.S. Elliot, nous ne cesserons jamais d'explorer et que le but ultime de toutes nos explorations sera de revenir à notre point de départ et de le découvrir ainsi pour la première fois.»


Début de page Page suivante