J.-P.Lanly et J. Clément
J.-P. LANLY est coordonnateur du projet PNUE/FAO de l'évaluation des ressources forestières tropicales, Département des Forêts, FAO. J. CLÉMENT est un forestier chargé de recherche au Centre technique forestier tropical, Nogent-sur-Marne, France.
La Consultation FAO d'experts sur la demande, l'offre et le commerce de la pâte et du papier dans le monde, qui s'est réunie à Tunis du 20 au 22 septembre 1977, a recommandé que, afin de permettre une évaluation plus réaliste des disponibilités de bois à pâte, la FAO, en collaboration avec un Groupe de travail de l'industrie modifié, élargisse l'étude1 sur les perspectives, de manière à couvrir tous les produits forestiers, y compris le bois de feu, et établisse, sur la base des prévisions mondiales, une relation entre la demande totale et les disponibilités prospectives mondiales de bois rond.
1 Le document a Perspectives mondiales de la consommation de pâte et de papier», présenté au cours de cette réunion au Comité consultatif FAO de la pâte et du papier, prévoit jusqu'en 1990 la consommation de papiers et cartons, le commerce interrégional de ces produits (et la fourniture de fibres correspondante) ainsi que la consommation de pâte chimique blanche.
Il a alors été convenu que la FAO effectuerait une étude sur les perspectives des ressources en fibre du monde en développement, dans le cadre de l'étude globale que l'on avait proposé d'effectuer sur la demande mondiale de fibres de feuillus et de résineux. Plus précisément, la FAO est chargée d'évaluer la base de ressources et les disponibilités en bois ainsi que leur évolution jusqu'à l'horizon 2000, pour les trois régions en développement suivantes:
- Amérique latine et Antilles, c'est-à-dire l'Amérique au sud des Etats-Unis.- Afrique au sud du Sahara (non compris l'Afrique du Sud).
- Asie et Extrême-Orient (non compris une partie de l'U.R.S.S., la Chine, la République démocratique populaire de Corée et la Mongolie).
Les pays en développement qui font l'objet de cette étude ont tous un climat tropical, à l'exception de six pays limitrophes à climat tempéré.
Etant donné le peu de temps disponible - cette partie de l'étude a été entreprise en mars 1978 et l'étude globale sur les perspectives de l'offre et de la demande devait être terminée en septembre 1978 - et l'objectif industriel de l'étude, il a été décidé que le bois de feu et le charbon de bois ne seraient pas étudiés parmi les produits fibreux, malgré l'importance qu'ils revêtent dans la plupart des pays en développement et l'incidence éventuelle sur les données concernant l'offre de bois industriel. On a donc établi une distinction, dans l'évaluation de la base de ressources, entre les forêts (naturelles ou artificielles) produisant du bois industriel et celles qui ne fournissent que du bois de feu ou du bois pour la fabrication de charbon de bois.
Amérique centrale et Amérique du Sud
Forêts naturelles de feuillus. En 1975, l'Amérique centrale et l'Amérique du Sud comptaient environ 823 millions d'ha de forêts naturelles de feuillus, dont 788 millions étaient situés dans les zones tropicales (soit 45 pour cent de toutes les forêts tropicales) et 35 millions en Argentine, au Chili et en Uruguay dans les zones tempérées. La plus grande partie des forêts tropicales de feuillus se trouve dans le bassin de l'Amazone, principalement au Brésil; 80 pour cent de ces dernières sont des forêts denses représentant 56 pour cent de la superficie mondiale des forêts denses tropicales de feuillus. Bien que 487 millions d'ha soient exploitables, la plupart de ces forêts ne peuvent être considérées comme faisant l'objet d'un aménagement intensif. Il est difficile d'obtenir une estimation fiable des superficies qui ont déjà été exploitées, mais le pourcentage de forêts vierges est élevé et atteint probablement plus de 95 pour cent des forêts denses exploitables.
On estime qu'en l'an 2000 la superficie totale de forêts denses de feuillus sera de 575 millions d'ha, représentant une diminution d'environ 66 millions d'ha par rapport à 1975, qui affectera presque exclusivement les Forêts denses tropicales, dont plus de 10 pour cent auront été détruites en l'an 2000. La destruction sera surtout marquée dans les forêts de la côte du Pacifique de l'Amérique du Sud (Colombie, Equateur) et du bassin de l'Amazone. Toutefois, si l'on considère les tendances au niveau national, ce sont les forêts de l'Amérique centrale dont les superficies diminueront le plus relativement (17,6 millions d'ha en 1975 contre 12,5 millions d'ha en l'an 2000), soit une baisse de 29 pour cent pour l'ensemble de la région (Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua et Panama). Il se pourrait que l'on applique toujours plus rigoureusement des règlements détaillés d'exploitation dans ces forêts, mais l'on n'envisage pas de mettre en place au cours de cette période un système d'aménagement intensif sur de vastes superficies. Quant aux pays tempérés de l'Amérique du Sud, les superficies totales ne changeront pas de façon significative: de 13,9 millions d'ha en 1975 à 13,1 millions en l'an 2000; soit une diminution de 6 pour cent; cette différence sera surtout imputable aux défrichements opérés dans le nord de l'Argentine pour la création de vastes ranches.
Origine du présent article Cet article se fonde sur un document des mêmes auteurs et publié par la FAO en mai 1979 sous le titre «Superficie des forêts et des plantations sous les tropiques. Situation actuelle et prévisions», (FO:MISC/79/1). En raison du peu de temps disponible, les résultats de cette étude théorique effectuée au Siège de la FAO n'ont pas été examinés avec les institutions nationales intéressées, sauf dans quelques cas. La FAO collabore actuellement avec le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) à une réévaluation plus approfondie des ressources forestières tropicales qui sera revue par les pays en cause avant sa publication finale. |
Forêts de résineux. En 1975 l'Amérique centrale et l'Amérique du Sud possédaient 70 pour cent des forêts tropicales de résineux (32 millions d'ha sur un total mondial de 45,7 millions) et 74 pour cent des forêts tropicales de résineux exploitables (26,2 millions d'ha sur 35,2 millions). Ces forêts se trouvent principalement en Amérique centrale et aux Antilles, bien que le sud-est du Brésil en compte 5 millions d'ha auxquels il faut ajouter 100000 ha de peuplement de Podocarpus dans les Andes (cette espèce étant souvent associée aux feuillus). La plupart de ces forêts ne peuvent être considérées comme faisant l'objet d'un aménagement intensif, plusieurs d'entre elles ont déjà été exploitées et ne sont souvent pas en mesure d'assurer une production soutenue. Les pays tempérés d'Amérique du Sud possèdent environ 0,7 million d'ha de forêts naturelles de résineux situées dans la région méridionale des Andes dont environ 25 pour cent ne sont pas exploitables.
Tableau 1. Superficies estimées des forêts naturelles à la fin de 1975
On estime qu'en l'an 2000 la superficie des forêts de résineux sera tombée à 22,3 millions d'ha contre 32,7 millions d'ha en 1975. Cette diminution de 10,4 millions d'ha, soit 32 pour cent, intéresse presque entièrement la zone tropicale. La destruction des forêts se vérifiera dans tous les pays intéressés mais sera surtout marquée au Brésil (5,8 millions d'ha en 1975 contre 0,8 million d'ha en l'an 2000).
Cette destruction considérable des forêts tropicales de résineux pose le problème de la conservation des écotypes de pins, notamment aux Antilles, mais également dans d'autres pays tropicaux où ils sont utilisés pour le boisement.
Plantations industrielles. Toujours pour l'année 1975, base de nos estimations, 94 pour cent des plantations industrielles se trouvent en Amérique du Sud et 6 pour cent seulement en Amérique centrale; 91 pour cent des plantations tropicales sont situés en Amérique du Sud, la plupart au Brésil. Ces plantations comprennent à peu près autant de feuillus (surtout des eucalyptus) que de résineux (surtout des pins). Sur les trois régions tropicales étudiées, c'est en Amérique que la proportion des plantations à usage non industriel est la plus faible.
Tableau 2. Superficies estimées des forêts naturelles a la fin de 1980
La part de l'Amérique du Sud tropicale, et notamment du Brésil, dans les plantations industrielles de l'Amérique tropicale devrait se maintenir au-dessus de 90 pour cent jusqu'à l'an 2000, date à laquelle cette région viendrait en tête des trois régions tropicales pour les plantations industrielles.
Afrique au sud du Sahara
Forêts naturelles. En 1975, l'Afrique tropicale possédait 645 millions d'ha de forêts tropicales de feuillus, soit environ 37 pour cent du total mondial. Elle comprenait 443 millions d'ha de forêts claires et 202 millions d'ha de forêts denses (soit 18 pour cent seulement des forêts denses tropicales mondiales).
Le rendement en bois n'est pas la considération la plus importante dans le domaine de la sylviculture. Les forêts naturelles produisent moins à l'hectare que les plantations, mais leur perte peut avoir des conséquences plus graves...
Les forêts claires se trouvent dans toutes les sous-régions, sous forme de savanes plus ou moins boisées, dont 75 pour cent peuvent être exploitées pour la production de bois d'uvre et de bois de mine. Les forêts denses sont principalement des forêts humides de plaines situées surtout en Afrique centrale (171 millions d'ha dont 115 millions sont exploitables sur un total de 134 millions d'ha exploitables pour l'ensemble de l'Afrique tropicale).
Tableau 3. Superficies estimées des forêts naturelles en 2000
Les forêts encore exploitées représentent environ 90 pour cent des forêts de l'Afrique centrale: 104 millions d'ha dont 65 millions au Zaïre, 14,2 millions au Cameroun, 8,8 millions au Congo et 13,4 millions au Gabon. Bien que ces forêts denses contiennent généralement plus de 300 m3/ha (toutes les essences dont le diamètre à hauteur d'homme est de plus de 20 cm, fûts et branches), le volume du fût qui mesure plus de 60 cm de diamètre à hauteur d'homme ne représente que 60 à 120 m3/ha dont 6 à10 m3 sont actuellement exploités sous forme de grumes commerciales. En dehors des 400000 ha en Afrique orientale et occidentale, la très grande majorité de ces forêts ne fait l'objet d'aucun aménagement intensif ou extensif.
En l'an 2000, on estime que la superficie totale des forêts denses tropicales aura diminué de 15 millions d'ha (7,5 pour cent) pour s'établir à 187 millions d'ha. Cette destruction sera inégalement répartie parmi les sous-régions: en Afrique occidentale, les superficies passeront de 14 millions d'ha en 1975 à 7,5 millions d'ha en 2000 (soit une baisse de 47 pour cent), en Afrique orientale, les chiffres correspondants seront de 16,8 millions d'ha en 1975 contre 13,7 millions d'ha en 2000 (baisse de 18 pour cent) tandis qu'en Afrique centrale, où la pression exercée par la population est faible, la baisse sera inférieure à 3 pour cent (170,6 millions d'ha en 1975 contre 165,7 millions d'ha en 2000). La diminution des forêts denses de feuillus exploitables est un sujet de grande préoccupation pour l'Afrique occidentale (12,1 millions d'ha à 5,5 millions d'ha, soit une baisse d'environ 55 pour cent) et pour l'Afrique orientale (6,3 millions d'ha à 3,1 millions d'ha, soit une baisse d'environ 50 pour cent). Sous l'effet de la forte pression démographique qui s'exerce en Afrique occidentale, on instaurera probablement un système d'aménagement intensif du domaine forestier productif qui a subi une forte réduction; environ 1,5 million d'ha pourraient ainsi faire l'objet d'un aménagement intensif en 2000.
En 1975, la superficie des forêts naturelles de résineux était inférieure à1,9 million d'ha, soit 4 pour cent seulement de la superficie totale des forêts tropicales de résineux. Elles se trouvent en Afrique orientale, mais 90 pour cent sont inexploitables en raison des difficultés d'accès.
On estime qu'en 2000 la superficie des forêts naturelles de résineux sera de 1,7 million d'ha, ce qui correspond à une diminution de 9 pour cent. Cette destruction sera surtout marquée dans les zones exploitables qui passeront ainsi de 370000 ha à 200000 ha, soit une diminution de 46 pour cent.
Plantations industrielles. En 1975, la superficie totale des plantations industrielles en Afrique tropicale représentait environ 50 pour cent de celle des plantations industrielles dans chacune des deux autres régions tropicales.
En outre 75 pour cent étaient des plantations à faible rendement. Les plantations de bois de feu, bien que représentant 39 pour cent de la superficie totale, restent tout à fait insuffisantes dans les sous-régions de savane au nord et en Afrique occidentale.
Pays étudiés
Sur un total de 146 pays, 97 ont fait l'objet d'une étude approfondie. Le potentiel de ressources forestières des autres pays ne sera que peu important d'ici à 2000. Les pays étudiés en détail ont été groupés dans les tableaux de la façon suivante:
AMERIQUE TROPICALE
Amérique centrale
Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique, Nicaragua, Panama
CARICOM (Marché commun des Caraïbes)
Belize, Guyane, Jamaïque, Trinité-et-Tobago
Autres pays des Antilles
Bahamas, Cuba, République Dominicaine, Guadeloupe, Guyane, Haïti, Martinique, Suriname
Amérique latine tropicale du Sud
Bolivie, Brésil, Colombie, Equateur, Paraguay, Pérou, Venezuela
Amérique du Sud tempérée
Argentine, Chili, Uruguay
AFRIQUE TROPICALE
Région septentrionale de savane
Cap-Vert, Tchad, Gambie, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Haute-Volta
Afrique occidentale
Bénin, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Côte-d'Ivoire, Libéria, Nigéria, Sierra Leone, Togo
Afrique centrale
Angola, Cameroun, République centrafricaine, Congo, Guinée équatoriale, Gabon, Sao Tomé-et-Principe, Zaïre
Afrique orientale et îles
Burundi, Djibouti, Ethiopie, Kenya, Madagascar, Malawi, Maurice, Mozambique, Réunion, Rwanda, Somalie, Soudan, Tanzanie, Ouganda, Zambie
Afrique australe tropicale en développement
Botswana. Namibie, Zimbabwe (Rhodésie)
Afrique australe tempérée en développement Lesotho, Swaziland
ASIE ET EXTREME-ORIENT TROPICAUX
Asie du Sud
Bangladesh, Bhoutan, Inde, Népal, Pakistan, Sri Lanka
Asie du Sud-Est continentale
Birmanie, Thaïlande
Asie du Sud-Est insulaire
Brunéi, Indonésie, Malaisie, Philippines
Asie tropicale à économie centralement planifiée
Kampuchea, Lao, Viet Nam
Océanie en développement
Fidji, Nouvelle-Calédonie, Nouvelles-Hébrides, Papouasie Nouvelle-Guinée, îles Salomon, Samoa occidental
Asie de l'Est en développement
République de Corée, Taiwan
Tableau 4. Superficies estimées des plantations à la fin de 1975
Régions/sous-régions |
Feuillus |
Plantations industrielles |
Plantations non industrielles* feuillus et résineux |
|||
a fort rendement |
a faible rendement |
total |
résineux |
total feuillus et résineux |
||
milliers d'ha |
||||||
Amérique tropicale |
||||||
Amérique centrale |
9 |
9 |
18 |
15 |
33 |
59 |
CARICOM |
14 |
0 |
14 |
13 |
27 |
- |
Autres pays de la région des Antilles |
15 |
50 |
65 |
44 |
109 |
40 |
Amérique latine tropicale du Sud |
110 |
730 |
840 |
888 |
1728 |
462 |
Total |
148 |
789 |
937 |
960 |
1897 |
561 |
Amérique du Sud tempérée |
80 |
181 |
261 |
628 |
889 |
242 |
Total Amérique centrale et du Sud |
228 |
970 |
1198 |
1588 |
2786 |
803 |
Afrique tropicale |
||||||
Afrique - région septentrionale de savane |
3 |
1 |
4 |
0 |
4 |
18 |
Afrique occidentale |
128 |
28 |
156 |
0 |
156 |
45 |
Afrique centrale |
75 |
35 |
110 |
20 |
130 |
98 |
Afrique orientale et îles |
193 |
15 |
208 |
321 |
529 |
403 |
Afrique australe tropicale en développement |
0 |
30 |
30 |
57 |
87 |
5 |
Total |
399 |
109 |
508 |
398 |
906 |
569 |
Afrique australe tempérée en développement |
0 |
19 |
19 |
72 |
91 |
12 |
Total Afrique en développement au sud du Sahara |
399 |
128 |
527 |
470 |
997 |
581 |
Asie et Extrême Orient tropicaux |
||||||
Asie du Sud |
458 |
209 |
667 |
62 |
729 |
1542 |
Asie du Sud-Est continentale |
94 |
11 |
105 |
5 |
110 |
40 |
Asie du Sud-Est insulaire |
778 |
45 |
823 |
123 |
946 |
465 |
Asie tropicale à économie centralement planifiée |
19 |
0 |
19 |
41 |
60 |
90 |
Océanie en développement |
19 |
2 |
21 |
34 |
55 |
|
Total |
1368 |
267 |
1635 |
265 |
1900 |
2137 |
Asie de l'Est en développement |
0 |
183 |
183 |
809 |
992 |
1680 |
Total Asie et Extrême-Orient en développement |
1368 |
450 |
1818 |
1074 |
2892 |
3817 |
TOTAL PAYS TROPICAUX |
1915 |
1165 |
3080 |
1623 |
4703 |
3267 |
* Non destinées aux industries de transformation du bois mais plutôt au bois de feu, à la fabrication du charbon de bois ou à la foresterie de protection.
On estime qu'en 2000 la superficie totale des plantations industrielles n'atteindra que 2,1 millions d'ha. L'Afrique occidentale sera loin d'avoir compensé la perte de ses ressources en forêts naturelles et la situation de l'offre sera tendue dans la sous-région. La proportion de plantations à haut rendement devrait augmenter entre 1975 et 2000.
Asie et Extrême-Orient
Forets naturelles. En 1975, la superficie totale des forêts tropicales de feuillus était de 327 millions d'ha (19 pour cent du total mondial), mais 89 pour cent d'entre elles étaient des forêts denses (26 pour cent du total mondial); ce chiffre est supérieur au chiffre correspondant pour l'Afrique tropicale. Toutefois, étant donné la forte proportion de forêts denses inexploitables (35 pour cent), le pourcentage de forêts exploitables rapporté à tous les pays tropicaux n'est que de 23 pour cent. Mais cette légère différence est plus que compensée par la grande valeur commerciale de ces forêts dont le rendement net sous forme de grumes commerciales varie de 20 à 80 m3 ou plus par hectare, soit en moyenne plus de quatre fois les quantités extraites par hectare en Afrique et en Amérique. La proportion de forêts soumises à un aménagement intensif est relativement importante: 42 millions d'ha sur 188 millions d'ha de forêts exploitables, situées principalement en Inde et en Birmanie. La province de Taiwan et la République de Corée possèdent 4 millions d'ha de forêts dans les zones tempérées et sub-tropicales, dont un tiers est improductif ou ne joue qu'un rôle de protection.
La superficie totale des Forêts tropicales denses de feuillus dans la région a été estimée à 243 millions d'ha pour 2000, soit une diminution de 48 millions d'ha (17 pour cent). Cette perte est relativement plus importante si l'on considère les forêts denses de feuillus exploitables puisqu'elle atteindra environ 24 pour cent. Les sous-régions les plus touchées sont les îles de l'Asie du Sud-Est et le sous-continent indien. Malgré les progrès prévus dans l'aménagement intensif de ces forêts, leur superficie totale diminuera en raison des empiétements auxquels on s'attend.
Au cours de la même année de référence, la superficie totale couverte par les forêts naturelles de résineux était de 11,9 millions d'ha soit 26 pour cent de la superficie mondiale des forêts tropicales de résineux, auxquelles il faut ajouter 2,8 millions d'ha dans la province de Taiwan et dans la République de Corée. Soixante-treize pour cent des forêts tropicales de résineux étaient exploitables et 3,5 millions d'ha de ces dernières (40 pour cent) étaient soumis à un aménagement intensif.
Tableau 5. Superficies estimées des plantations industrielles à la fin de 1980
Régions/sous-régions |
Feuillus |
Résineux |
Feuillus et résineux |
||
a faible rendement |
a haut rendement |
total |
|||
milliers d'ha |
|||||
Amérique tropicale |
|||||
Amérique centrale |
15 |
12 |
27 |
24 |
51 |
CARICOM |
15 |
0 |
15 |
16 |
31 |
Autres pays de la région des Antilles |
23 |
65 |
88 |
65 |
153 |
Amérique latine tropicale du Sud |
188 |
945 |
1133 |
1502 |
2635 |
Total |
241 |
1022 |
1263 |
1607 |
2870 |
Amérique du Sud tempérée |
88 |
261 |
349 |
909 |
1258 |
Total Amérique centrale et du Sud |
329 |
1283 |
1612 |
2516 |
4128 |
Afrique tropicale |
|||||
Afrique - région septentrionale de savane |
4 |
1 |
5 |
0 |
5 |
Afrique occidentale |
168 |
50 |
218 |
20 |
238 |
Afrique centrale |
78 |
50 |
128 |
31 |
159 |
Afrique orientale et îles |
199 |
16 |
215 |
453 |
668 |
Afrique australe tropicale en développement |
0 |
30 |
30 |
57 |
87 |
Total |
449 |
147 |
596 |
561 |
1157 |
Afrique australe tempérée en développement |
0 |
19 |
19 |
72 |
91 |
Total Afrique en développement au sud du Sahara |
449 |
166 |
615 |
633 |
1248 |
Asie et Extrême-Orient tropicaux |
|||||
Asie du Sud |
615 |
286 |
901 |
103 |
1004 |
Asie du Sud-Est continentale |
121 |
19 |
140 |
7 |
147 |
Asie du Sud-Est insulaire |
779 |
85 |
864 |
151 |
1015 |
Asie tropicale à économie centralement planifiée |
94 |
5 |
99 |
106 |
205 |
Océanie en développement |
91 |
11 |
42 |
80 |
122 |
Total |
1640 |
406 |
2046 |
447 |
2493 |
Asie de l'Est en développement |
0 |
273 |
273 |
953 |
1226 |
Total Asie et Extrême-Orient en développement |
1640 |
679 |
2319 |
1400 |
3719 |
TOTAL PAYS TROPICAUX |
2330 |
1575 |
3905 |
2615 |
6520 |
Entre 1975 et 2000, on s'attend à une diminution de 1,2 million d'ha, ce qui réduira la superficie totale de forêts tropicales de résineux à 10,7 millions d'ha. Cette perte se vérifiera surtout dans le sous-continent indien et, dans une moindre mesure, dans la péninsule indochinoise.
Plantations industrielles. En 1975, les pays tropicaux d'Asie et d'Extrême-Orient comptaient autant de plantations industrielles que l'Amérique tropicale (1,9 million d'ha) et la sous-région de l'a Asie de l'Est en développement» autant que les sous-régions de l'a Amérique du Sud tempérée s. Cette analogie des deux régions ne s'applique pas à la composition des plantations industrielles, ni à la superficie totale des plantations non industrielles, beaucoup plus élevée en Asie et en Extrême-Orient. Les plantations de feuillus à faible rendement représentent 72 pour cent des plantations industrielles totales des pays tropicaux d'Asie et d'Extrême-Orient contre moins de 8 pour cent en Amérique tropicale. C'est de loin l'Asie du Sud et les îles du Sud-Est asiatique (notamment l'Indonésie) qui possèdent les plus grandes superficies de plantations industrielles et non industrielles; il faut également noter l'effort considérable fait par la République de Corée dans ce domaine.
Tableau 6. Superficies estimées des plantations industrielles en 2000
Régions/sous-régions |
Feuillus |
Résineux |
Feuillus et résineux |
||
a faible rendement |
a haut rendement |
total |
|||
milliers d'ha |
|||||
Amérique tropicale |
|||||
Amérique centrale |
50 |
50 |
100 |
130 |
230 |
CARICOM |
20 |
0 |
20 |
50 |
70 |
Autres pays de la région des Antilles |
45 |
100 |
145 |
140 |
285 |
Amérique latine tropicale du Sud |
615 |
3655 |
4270 |
3165 |
7435 |
Total |
730 |
3805 |
4535 |
3485 |
8020 |
Amérique du Sud tempérée |
115 |
630 |
745 |
1940 |
2685 |
Total Amérique centrale et du Sud |
845 |
4435 |
5280 |
5425 |
10705 |
Afrique tropicale |
|||||
Afrique - région septentrionale de savane |
10 |
- |
10 |
0 |
10 |
Afrique occidentale |
315 |
205 |
520 |
180 |
700 |
Afrique centrale |
95 |
130 |
225 |
90 |
315 |
Afrique orientale et îles |
225 |
40 |
265 |
715 |
980 |
Afrique australe tropicale en développement |
0 |
30 |
30 |
55 |
85 |
Total |
645 |
405 |
1050 |
1040 |
2090 |
Afrique australe tempérée en développement |
0 |
20 |
20 |
70 |
90 |
Total Afrique en développement au sud du Sahara |
645 |
425 |
1070 |
1110 |
2180 |
Asie et Extrême-Orient tropicaux |
|||||
Asie du Sud |
1330 |
690 |
2020 |
640 |
2660 |
Asie du Sud-Est continentale |
240 |
95 |
335 |
55 |
390 |
Asie du Sud-Est insulaire |
795 |
525 |
1320 |
515 |
1835 |
Asie tropicale à économie centralement planifiée |
500 |
25 |
525 |
485 |
1010 |
Océanie en développement |
75 |
50 |
125 |
260 |
385 |
Total |
2940 |
1385 |
4325 |
1955 |
6280 |
Asie de l'Est en développement |
235 |
390 |
625 |
1360 |
1985 |
Total Asie et Extrême-Orient en développement |
3175 |
1775 |
4950 |
3315 |
8265 |
TOTAL PAYS TROPICAUX |
4315 |
5595 |
9910 |
6480 |
16390 |
En 2000, la superficie totale des plantations industrielles sera multipliée par 3,3 dans les pays tropicaux d'Asie et d'Extrême-Orient contre un coefficient de 4,2 pour l'Amérique tropicale et de 2,3 seulement pour l'Afrique tropicale. On suppose que la proportion des plantations de feuillus à faible rendement aura diminué pour s'établir à 47 pour cent, chiffre encore élevé. En ce qui concerne certaines parties de l'Afrique tropicale, quelques sous-régions ne seront pas parvenues à compenser la perte de leurs forêts naturelles par des plantations équivalentes.
Les estimations et prévisions concernant les superficies des forêts naturelles et des plantations industrielles de la plupart des pays en développement ont servi de base à l'évaluation des quantités enlevées nettes de bois à usage industriel jusqu'à 2000. Le système de classification utilisé a été conçu en fonction des objectifs particuliers de cette étude. Aussi a-t-on accordé plus d'attention aux forêts et aux plantations produisant du bois industriel qu'à celles ne fournissant que des services et du bois à usage non industriel. C'est pourquoi on ne s'est pas attaché à prévoir l'évolution des superficies de forêts claires et des plantations non industrielles, bien que ces deux grandes catégories jouent un rôle très important dans nombre de ces pays.
Conclusions
Bien que partielles et limitées, ces estimations permettent de formuler quelques conclusions:
1. Tout d'abord, le rythme de la destruction des forêts denses tropicales (140 millions d'ha en 25 ans) apparaît moins alarmant que ne le laissent supposer les chiffres généralement avancés (perte nette de 50000 ha par jour par exemple). Mais ceci appelle quelques observations complémentaires:
· Le rythme actuel de déboisement devrait ralentir à l'avenir, non pas tant en raison d'une meilleure utilisation des terres, mais surtout parce que le a cur»des forêts tropicales de feuillus (nord de l'Amazone, bassin du Congo) ne devrait pas être soumis à une forte pression, la plupart des zones plus peuplées ayant été converties à des utilisations non forestières.
· Les forêts exploitables sont beaucoup plus exposées à la destruction que celles, improductives ou inexploitables de façon permanente, qui sont situées sur des terres impropres à l'agriculture; en outre, le reste des Forêts exploitables verra décroître sa proportion de forêts vierges et augmenter la part des forêts exploitées, temporairement improductives.
· La destruction des forêts de résineux est plus grave en termes relatifs que celle des forêts denses de feuillus, bien que moins importante en chiffres absolus.
· Pour avoir une idée d'ensemble de l'évolution du couvert forestier tropical dans le monde' il faut ajouter à la destruction des forêts denses celle des forêts claires; bien qu'aucune estimation précise n'ait été faite, un bref examen montre que cette destruction porterait sur plus de 70 millions d'ha entre 1975 et 2000 (plus de 33 millions d'ha en Amérique tropicale, plus de 31 millions d'ha en Afrique tropicale et plus de 6 millions d'ha dans les pays tropicaux d'Asie et d'Extrême-Orient).
... L'agriculture, les régimes hydriques, la qualité de la vie humaine et animale dépendent beaucoup de la conservation des forêts naturelles, surtout sous les tropiques.
En outre, pour de nombreuses forêts claires, le lent processus de détérioration se poursuivra en raison de la surexploitation (principalement pour le bois de feu) et des incendies.
2. L'effort de boisement envisagé jusqu'à 2000 est faible en comparaison du déboisement total. Il faut, toutefois, se rendre compte que ce nouveau boisement vient s'ajouter au remplacement de plantations exploitées, ainsi qu'au reboisement de quelques forêts naturelles et de plantations à usage non industriel (bois de feu, charbon de bois et arbres fruitiers).
3. Les perspectives d'approvisionnement en bois d'industrie des pays tropicaux sont tirées en partie de cette étude: approximativement, les quantités enlevées nettes, d'ici à 2000, devraient être deux fois et demie supérieures à celles de 1975. Bien que cela représente une augmentation importante, les effets combinés de la croissance démographique et économique des pays tropicaux, et de l'accroissement de la demande locale de produits forestiers qui en découlera, déboucheront sur une diminution progressive de leur potentiel global d'exportation de produits forestiers tropicaux et sur une aggravation des pénuries locales. Il se pose de plus le problème critique de la pénurie de bois de feu dans les régions moins boisées.
La production de bois n'est pas le plus important...
Lorsque l'on examine les statistiques relatives à la superficie des forêts ou que l'on en étudie les variations, il ne faut pas perdre de vue deux faits. L'un est qu'à superficie égale la plantation donne beaucoup plus de bois industriel que la forêt naturelle; l'autre est que la destruction de la forêt naturelle a des conséquences qui vont bien au-delà du simple manque à gagner. Elle signifie la transformation, la détérioration ou la perte d'écosystèmes tout entiers, la disparition d'espèces végétales et animales, la destruction de bassins versants, l'apparition de l'érosion, la modification éventuelle de tout le régime hydrique des plaines et des vallées. L'aménagement de la forêt ne vise pas seulement à produire du bois mais également à maintenir l'intégrité et la productivité de l'environnement dans son ensemble, y compris des zones urbaines et agricoles limitrophes et même éloignées.
Cette étude a mis en lumière l'insuffisance, aux niveaux national et régional, des données sur la situation actuelle des ressources forestières tropicales. Il faut certainement mettre au point des procédures de surveillance des ressources forestières dans la plupart des pays tropicaux. Il faudrait aussi, en même temps, recueillir et rassembler régulièrement des données aux niveaux régional et mondial. C'est précisément ce que le Département des forêts de la FAO s'emploie à faire actuellement avec l'aide du Programme des Nations Unies pour l'environnement et de son Système mondial de surveillance de l'environnement.