Previous Page Table of Contents Next Page


NOTE D'INFORMATION SUR L'ELEVAGE DES OVINS ET CAPRINS EN BENIN

S.L. Chabi
Professeur-Assistant de Zootechnie
Faculté des Sciences Agronomiques
Université Nationale du Bénin
B.P. 526, Cotonou, Rép. Populaire du Bénin

INTRODUCTION

La République Populaire du Bénin est un pays essentiellement agricole où l'élevage tient une place relativement secondaire par rapport aux productions végétales. Néanmoins dans la plupart des familles paysannes béninoises, on peut trouver quelques volailles, une ou quelques têtes de petits ruminants (ovins et/ou caprins). Quelques individus aisés possèdent des bovins généralement confiés aux Peulhs, éleveurs professionnels.

Les éleveurs traditionnels représentent environ 3 pour cent de la population. Mais l'élevage au Bénin intéresse des espéces animales qui sont actuellement très modestes du point de vue potentialité génétique; par contre, ces animaux sont bien adaptés au milieu caractérisé.

Si l'aviculture et, dans une moindre mesure, l'élevage bovin bénéficient actuellement de techniques modernes, l'élevage de petits ruminants, par contre, reste de type traditionnel extensif, archaïque et donc peu rentable.

Ceci explique sans doute l'évolution trés lente constatée du cheptel ovin et caprin durant les dix dernières années (tableau no1). C'est dire que le développement de la production de moutons et de chèvres au Bénin connaît des problèmes. Mais depuis quelques années, des chercheurs s'y intéressent de plus en plus.

Après avoir brièvement passé en revue les contraintes essentielles au développement des productions ovine et caprine, nous signalons quelques essais de recherche et leurs résultats ainsi que les perspectives d'avenir pour le développement de ces productions.

LES PROBLEMES DU DEVELOPPEMENT DE LA PRODUCTION DE MOUTONS ET DE CHEVRES AU BENIN

Perçus de façon sommaire, les problèmes du développement de la production de moutons et chèvres au Bénin sont essentiellement d'ordre socio-économique et technique.

Sur le plan socio-économique:

Il faut reconnaître qu'actuellement le gouvernement et les chercheurs béninois consentent des efforts considérables pour la promotion de la production de l'élevage ovin et caprin. Mais ces efforts sont encore insuffisants par rapport à l'attention accordée aux bovins ou aux volailles. L'élevage de moutons et de chèvres demeure l'affaire des petits exploitants agricoles. Pour ceux-ci, l'élevage est une activité très secondaire par rapport aux productions végétales (cultures vivrières, cultures de rente). Par conséquent ils lui consacrent très peu ou pas du tout d'investissements en termes monétaires et en termes de travail.

Tableau 1

Année
Province
19771978197919801981
OvinsCaprinsOvinsCaprinsOvinsCaprinsOvinsCaprinsOvinsCaprins
Atacora164 670199 204169 620205 180174 702211 335189 282221 206196 864230 054
Atlantique14 50031 21014 93632 16715 38333 13215 84434 12416 47835 489
Borgou367 484284 109378 509292 632389 730301 411401 422310 454417 479322 872
Mono74 39270 67476 64072 79278 92374 97981 29177 22884 54380 317
Ouémé59 95573 18061 75775 37563 61177 63665 51980 17672 30083 383
Zou109 986189 915205 856195 613212 032201 481218 393207 525224 129215 826
R.P.B.880 861848 292907 318873 759934 381899 974971 751930 7131 011 793967 941


Année
Province
19821983198319851986
OvinsCaprinsOvinsCaprinsOvinsCaprinsOvinsCaprinsOvinsCaprins
Atacora204 739239 256214 000250 000222 600260 000231 500270 400466 249 
Atlantique17 13736 90617 90038 60018 60040 00019 50041 50098 700 
Borgou434 178335 790547 000466 000571 900485 00059 200504 000708 221 
Mono87 92583 53091 60087 30095 30090 80099 00094 500184 858 
Ouémé75 19286 71878 30090 60081 50094 20084 50098 000154 294 
Zou233 094224 459243 600234 600253 300244 000263 500254 000407 987 
R.P.B.1 05 2651 006 6591 192 4001 167 1001 243 2001 214 0001 290 0001 262 4002 020 309 

Le paysan-éleveur ne consomme les produits de son élevage qu'à de rares occasions de cérémonies (mariages, baptêmes, fêtes, funérailles, etc.). Il ne les vend que lorsqu'il ressent le besoin pressant de liquidités. Bref, tout en reconnaissant l'utilité occasionnelle de l'élevage de moutons et de chèvres, le paysan-éleveur reste encore ignorant du rôle économique important que peut jouer cet élevage dans son exploitation agricole.

Sur le plan technique

De type sédentaire extensif, le système d'élevage des petits ruminants est celui où les animaux sont généralement laissés à eux-mêmes pour la recherche de leur nourriture et de leur abreuvement, sans abris, ni contrôle sanitaire particulier. Les saillies ne sont évidemment pas contrôlées au sein des troupeaux.

Tout cela montre que chez la plupart des paysans-éleveurs, il n'existe pas de notion de gestion de l'élevage. Il n'est donc pas étonnant d'enregistrer au niveau de cet élevage de faibles taux de croissance et des taux élevés de mortalité, surtout chez les jeunes avant le sevrage (jusqu'à 40 pour cent et plus). Cette mortalité est due à la malnutrition et aux maladies (notamment gastro-intestinales, peste des petits ruminants) des mères gestantes et allaitantes.

Dans ces conditions, il est évident que l'évolution de la productivité numérique et pondérale des petits ruminants sera faible.

LES RECHERCHES ENTREPRISES ET LEURS RESULTATS POUR L'AMELIORATION DE LA PRODUCTION OVINE ET CAPRINE (Cas de la FSA/UNB)

Pour la promotion de la production ovine et caprine, des études sont entreprises à différents niveaux, notamment à la Recherche Agronomique et à la Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université Nationale du Bénin. Ces études concernent, pour l'essentiel, des systèmes de production en milieu villageois, ainsi que des essais d'alimentation et de contrôle sanitaire en station.

Les activités de recherche sur les petits ruminants à la Faculté des Sciences Agronomiques

Recherche en milieu villageois: L'amélioration d'un système de production passe nécessairement par la connaissance approfondie de ce système. Pour cette connaissance approfondie, des études d'enquête sont indispensables.

1. Etude préliminaire d'enquête: En 1984–1985, une série d'enquêtes sur l'élevage des ovins et des caprins a été entreprise dans la partie sud de la République Populaire du Bénin, allant de la côte jusqu'à la latitude 8°

Nord. Cette zone couvre ainsi les provinces du Mono, de l'Atlantique et de l'Ouémé en entier, et une portion de la province du Zou (limite supérieure : Savé).

Le choix de cette zone d'étude se justifie pour deux raisons principales: d'une part, c'est une zone affectée au sud par un climat subéquatorial à quatre saisons (deux saisons des pluies et deux saisons sèches avec une pluviométrie décroissante d'est en ouest (1 400 mm à Porto-Novo et 950 mm à Grand-Popo) et au nord par un climat soudanien humide à saisons contrastées. D'autre part, c'est une zone à forte démographie, du moins dans sa partie méridionale et surtout par rapport aux deux grandes provinces du nord (Borgou et Atacora). C'est donc une zone à espace réduit pour tolérer à grande échelle l'élevage extensif de gros bétail. Il faut par conséquent chercher à y développer le petit élevage, notamment celui des petits ruminants.

L'objectif de cette étude était de reconnaître, au niveau de quelques villages-sites, les systèmes de production ovine et caprine et les divers types de races élevées par la détermination du poids vif et la mensuration ainsi que par les observations morphologiques (robe, cornes, etc.).

a - Systèmes d'élevage

L'élevage des petits ruminants dans la zone se fait exclusivement selon le mode sédentaire divagant total ou partiel. Sa caractéristique principale est son association à l'agriculture. Le troupeau est de petite taille et est considéré comme une épargne sur pied, utilisé surtout pour des dépenses imprévues, les fêtes et les cérémonies.

Elevage sédentaire à divagation totale

Ce type d'élevage se rencontre dans la partie nord de la zone d'étude, où le problème de la terre à cultiver ne se pose pas encore avec acuité; les paysans peuvent dans ce cas aller cultiver leurs champs loin des habitations. Dans cette situation, les animaux sont presque sans surveillance.

Elevage sédentaire à divagation contrôlée

Les animaux errent aux abords des rues et des ruelles pendant la saison sèche mais la plupart des troupeaux sont confinés dans des abris de fortune (une partie du salon, dans la cuisine), ou parqués ou attachés en période de cultures. Ces animaux sont nourris sur place une ou deux fois par jour (herbes ou sous-produits de récolte, déchets de cuisine, son de maïs, épluchures de manioc ou d'igname).

b - Détermination des types de race

Les ovins : A partir du poids vif et des mensurations effectuées sur 324 brebis, ainsi que des observations morphologiques, il a été possible de distinguer deux groupes de race ovine:

Quelques mensurations moyennes des animaux des groupes A et B

Mensurations (en cm)Hauteur au garrot (HG)Profondeur de poitrine (pp)Tour de poitrine (TP)Longueur du tronc (LT)
Groupe A49,924,968,349,7
Groupe B55,526,572,352,3

Les caprins : en ce qui concerne les caprins, les résultats des mensurations effectuées sur 268 chèvres adultes ont donné comme moyenne 20,5 kg pour le poids vif et 42,5 cm pour la hauteur au garrot. Ces chiffres correspondent généralement à ceux qui caractérisent les chèvres Djallonké.

2. Etude approfondie des techniques d'élevage villageoises des petits ruminants: Elle a débuté seulement en mars 1987. Les résultats ne sont pas encore disponibles.

C'est une étude qui se déroule dans le plateau Adja (Province du Mono), et qui s'inscrit dans le cadre des travaux de recherche pluridisciplinaire (recherche - développement en milieu réel) initiés depuis 1984 par le Département d'économie et de sociologie rurale de la Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université Nationale du Bénin.

L'équipe d'économistes et de sociologues a dans une première phase réalisé une étude de reconnaissance des systèmes d'exploitation agricole dans l'ensemble du plateau Adja pour identifier trois (3) villages-types où devront se mener des études approfondies pluridisciplinaires impliquant, outre l'équipe précitée, des pédologues, des phytotechniciens et les zoo-techniciens de la Faculté des Sciences Agronomiques.

L'intervention de l'équipe de zootechniciens, dans les travaux pluridisciplinaires de la Recherche-Développement, consistera essentiellement à :

Enfin, eu égard à tout ce qui précède, de petits essais se conduiront en station (Ferme Expérimentale de la Faculté des Sciences Agronomiques), en vue d'établir le système de feed-back “milieu réel - station”.

Mais pour l'instant, les travaux se déroulent depuis seulement mars 1987 dans le cadre de la supervision d'un étudiant et portent sur l'élevage villageois de moutons et de chèvres dans deux (2) des trois villages choisis. Il est encore trop tôt maintenant pour parler des résultats de ces travaux.

Recherche en station: Parallèlement aux activités de recherche en milieu réel, des essais d'alimentation sont conduits à la Ferme Expérimentale de la Faculté des Sciences Agronomiques. Pour l'essentiel, ces essais consistent à complémenter en azote les pâturages naturels de graminées qui ont toujours constitué la plus grande partie de l'alimentation des petits ruminants dans les villages.

Les sources d'azote apporté sont, soit des plantes fourragères légumineuses (Leucaena leucocephala, Gliricidia sepium), soit des sous-produits agro-industriels (graine de coton, tourteau de coton, drèche de brasserie).

Chez les petits ruminants, ces apports azotés permettent d'améliorer la productivité.

Par exemple, dans un essai d'alimentation, 28 ovins des 2 sexes âgés de moins de 12 mois (donc en période de croissance), mis sur pâturage naturel, ont recu (ou pas), pendant 12 mois, des compléments azotés de 3 sources : 1/ graine de coton (GC); 2/ tourteau de coton (TC) et 3/ drèche de brasserie (DB), selon trois niveaux d'apport (0, 1 et 2) de matières azotées correspondant à : Og, 60g et 90 g (tableau no2).

Les résultats de ces essais ont montré que:

  1. il existe un niveau optimum de l'apport de l'azote. Par exemple, il n'y a pas eu de différence significative entre GC1 et GC2;

  2. la nature des sources d'azote supplémentaire importe peu chez les petits ruminants; en effet, on n'a pas constaté de différence entre les traitements TC1 et DB1, d'une part, entre TC2 et DB2 de l'autre. Les gains moyens quotidiens (GMQ) obtenus par animal et par jour sont moyens (de l'ordre de 33 g) et ne sont pas significativement différents entre les traitements.

  3. Les animaux témoins se sont maintenus approximativement à leur poids initial du début d'expérimentation (GMQ = O) (Tableaux no2 et 3)

  4. La production d'un kilogramme de croît est onéreuse avec le tourteau de coton. Par contre, le grain de coton constitue le complément azoté le plus économique (tableau no4). La complémentation azotée en grain de coton a, en outre, donné des croissances satisfaisantes, en dépit des problèmes d'appétence qu'elle peut poser pour les animaux trop jeunes.

Tableau no2 Gains de poids et niveaux azotés

Niveau de matière azotée totale (g/j) animal06090
Nombre d'animaux41212
Gain moyen quotidien GMQ (g/j) animal0,000b35,318a35,713a

a, b, = les moyennes de la même ligne qui portent les mêmes lettres en indice ne sont pas statistiquement différents (p = 5 p.100).

Tableau no3 Gains de poids et type de compléments

ComplémentsGCTCDBO
Nombre d'animaux8884
GMQ(g/j) Animaux33 185ab28 863b44 494a0,000c

a, b, c = les moyennes de la même ligne qui portent les mêmes lettres enindice ne sont pas statistiquement différents (p = 5 p.100).

Tableau no4 Coût de l'aliment de complément pour produire un kg de croît

SourceGraine de cotonTourteau de cotonDreches de brasserie
Prix de cession FCFA/kg208025
Efficience Alimentaire6,565,546,64
Coût par kg de croît (FCFA)131,2443,2166,0

Efficience alimentaire =Quantité d'alimemt (kg)
Quantité de croît (kg)

Conclusion partielle: Notre effort a été d'essayer de présenter la philosophie de la Faculté des Sciences Agronomiques pour la promotion des productions ovine et caprine :

Il est à constater que nous sommes tout à fait à notre début. Aussi, espérons-nous beaucoup apprendre au cours de ce séminaire.

UN APERCU DU POTENTIEL DE DEVELOPPEMENT DES PRODUCTIONS OVINE ET CAPRINE

Pour notre part, le premier facteur favorable au développement des productions ovine et caprine est l'existence manifeste de la volonté des gouvernements, des chercheurs et des organismes internationaux d'accorder désormais à ce problème l'importance qu'il mérite. Ce séminaire en est une preuve. C'est dire que les Petits Ruminants ne seront plus des “parents pauvres” dans les programmes de recherche et de développement agricole.

Pour nous, chercheurs, l'accent devra suffisamment être mis sur les aspects essentiels suivants :

  1. L'alimentation. Les pâturages naturels sont insuffisants pour la croissance et le développement des ovins et des caprins. Les apports d'autres sources d'azote et d'énergie, à faible coût, sont nécessaires (sous-produits agro-industriels, plantes fourragères légumineuses, résidus de récolte, etc.). Il faudra déterminer les niveaux optima de ces apports selon les états physiologiques des animaux.

  2. La santé. Les maux dont souffrent les petits ruminants sont aujourd'hui à peu près connus (peste des petits ruminants, parasitoses, notamment). Ici encore s'imposent des recherches pour détecter tous les maux des petits ruminants et surtout en établir les médications adéquates. Cette action sanitaire viendra renforcer celle de l'alimentation.

  3. L'amélioration génétique mettra l'accent sur la sélection massale à l'intérieur d'un même type de race. Peut-être pourra-t-on penser à l'introduction de sang étranger aux types de race locale.

  4. La commercialisation. L'assurance du débouché des produits ovins et caprins encouragera les éleveurs.

  5. La création et le développement d'un réseau entre les chercheurs de différents pays concernés pour des échanges d'idées, d'expériences et même pour l'élaboration et l'exécution de programmes communs de recherche.


Previous Page Top of Page Next Page