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Nouveaux systèmes de tenure clans le secteur forestier d'Europe orientale: la législation polonaise et albanaise

P. A. Barresi

Depuis la suppression du rideau de fer; un vent de réforme souffle sur l'Europe orientale. Les réformes concernant les terres, l'agriculture et l'environnement sont au centre de cette activité législative. En peu de temps, les forêts ont été entraînées dans le tourbillon. Les pays de la région considèrent depuis longtemps leurs forêts comme une ressource précieuse. Dans certains cas, les forêts font l'objet de lois spécifiques depuis des siècles.

Paul A. Barresi est avocat et spécialiste de l'environnement; il poursuit des études de haut niveau sur les politiques en matière d'environnement aux Etats-Unis. Titulaire d'une bourse de la Fondation Ford, il a travaillé dans le domaine du droit public international à la FAO en 1993 et entrepris une étude comparative des nouvelles lois sur la foresterie et les domaines connexes en Pologne et en Albanie; à cette occasion, il a mené des enquêtes approfondies dans ces deux pays.

Parmi les pays d'Europe orientale, la Pologne et l'Albanie font figure de pionniers en matière de réformes forestières. En automne 1991, la Pologne a passé une nouvelle loi détaillée sur les forêts. L'Albanie a suivi son exemple un an plus tard, avec la loi sur la foresterie et le Service des politiques forestières. Ces deux pays ont depuis développé leurs dispositions législatives - ou «statuts» - par le biais de plusieurs décrets gouvernementaux.

Tant la loi polonaise sur les forêts que la loi albanaise sur la foresterie et le Service des politiques forestières traitent de nombreuses questions traditionnelles, de la planification de l'aménagement à la lutte contre les incendies. Elles s'intéressent aussi à un certain nombre de problèmes apparus avec l'introduction ou l'expansion ces dernières années de la propriété privée et de l'économie de marché en Pologne et en Albanie. Comme nous le verrons, les statuts forestiers de ces deux pays ont répondu à cette évolution de manière sensiblement différente. Le statut polonais est le plus dynamique. Il examine en détail les conséquences de la plus large place accordée à la propriété privée, et applique avec fermeté certains principes de l'économie de marché à divers aspects de la foresterie. Le statut albanais a un caractère plus conservateur; il fait une distinction moins nette entre les forêts publiques et les autres types aux fins de réglementation et se lance avec moins d'audace dans l'économie de marché, avec néanmoins des résultats significatifs. La combinaison des statuts de la Pologne et de l'Albanie offre une vaste palette d'outils législatifs que les autres pays à économie de transition devraient examiner avant de se lancer dans une réforme de la foresterie.

Systèmes de tenure

La législation forestière, aussi détaillée soit-elle, n'est pas formulée à partir du néant. Elle ne constitue qu'un élément de l'infrastructure juridique d'un pays et est élaborée en fonction de celle-ci. Cela est particulièrement valable dans les pays qui passent d'une économie dirigiste à une économie de marché, où les statuts forestiers doivent tenir compte de la réorganisation en profondeur des liens juridiques fondamentaux, processus nécessaire à la transition. Cette réorganisation se constate à plusieurs niveaux de la hiérarchie des lois propres à un pays. Pour légaliser la propriété privée des terres, par exemple, il faudra peut-être modifier la Constitution. D'un autre côté, la privatisation, ou la reprivatisation, des biens publics est souvent rendue possible par la promulgation d'un simple statut par le pouvoir législatif national. Dans tous les cas, ces principes et procédures juridiques fondamentaux font rarement l'objet de lois secteur par secteur. Les statuts par secteur - la législation forestière, par exemple - tiennent généralement pour acquis ces principes et procédures fondamentaux et définissent sur cette base des règles plus détaillées.

Les statuts forestiers de la Pologne et de l'Albanie obéissent à ce schéma caractéristique. Par exemple, la loi polonaise s'applique à toutes les forêts, indépendamment de leur tenure. Elle reconnaît cependant que plusieurs types de droits de propriété forestière coexistent: propriété publique, propriété «privée» (qui comprend tant la propriété per se que la propriété municipale), et location à des particuliers de forêts publiques ou privées.

En Pologne, la reconnaissance dans les textes de loi des droits de propriété privée sur les forêts ne marque pas une révolution aussi importante que dans certains autres pays d'Europe orientale. Une part significative des 8,6 millions d'hectares de forêts que compte la Pologne est restée aux mains de particuliers pendant tout la période communiste. A la fin de cette période, 17 pour cent des forêts polonaises étaient détenus par des particuliers, et il en va encore ainsi aujourd'hui. Le Gouvernement polonais compte reprivatiser en cure un million d'hectares dans le futur, ce qui donnerait 30 pour cent de forêts privées.

L'existence de nombreux propriétaires forestiers privés en Pologne ouvre des possibilités aux responsables des réformes et constitue dans le même temps un défi, comme il est normal dans un pays qui enregistre de tels bouleversements économiques et politiques. D'un côté, cette catégorie constitue un vivier où les incitations économiques privées et l'intérêt bien compris de chacun servent directement l'aménagement forestier durable. D'un autre côté, les activités de ces forestiers en matière d'aménagement des forêts privées ont été étroitement contrôlées pendant des décennies par les autorités gouvernementales centrales, et ce dans les moindres détails; c'est pourquoi ils utilisent de façon parfois surprenante leur toute nouvelle autonomie.

L'Administration des forêts publiques est chargée d'aider les propriétaires forestiers privés de Pologne à aménager rationnellement leurs forêts. Cette administration fait partie du Ministère de la protection de l'environnement, des ressources naturelles et de la foresterie. D'après la loi sur les forêts, l'Administration des forêts publiques a trois échelons: le Directorat général, situé à Varsovie; les Directorats régionaux, au nombre de 17 et répartis dans tout le pays; et les Bureaux forestiers de district, présents dans chacun des 430 Districts forestiers divisant les régions. L'une des caractéristiques les plus marquantes de la loi sur les forêts est la délégation poussée de la prise de décision à l'échelon administratif le plus bas. Les Districts forestiers jouissent d'une indépendance appréciable vis-à-vis du Directorat général et des Directorats régionaux.

La loi sur les forêts attribue trois grandes fonctions à l'Administration des forêts publiques. Premièrement, elle gère dynamiquement les 83 pour cent de forêts actuellement détenus par l'Etat, Deuxièmement, à la demande des autorités provinciales, elle supervise l'aménagement des forêts privées pour veiller à sa conformité avec la loi. Troisièmement, elle sert d'agent de vulgarisation, et fournit aux propriétaires forestiers privés l'assistance technique et les conseils nécessaires à un aménagement durable des forêts. Ce troisième rôle est essentiel dans tout pays qui, comme la Pologne, assiste à l'émergence d'un secteur forestier privé ou en possédait déjà un, soudain libéré du strict contrôle de l'Etat, Même si les forêts privées ont subsisté pendant toute l'ère communiste en Pologne, le régime juridique en place à l'époque ne favorisait pas les initiatives en matière d'aménagement durable. Par exemple, les propriétaires des forêts étaient tenus d'obtenir la permission de l'Etat, pour abattre ne serait-ce qu'un arbre, ce qui en pratique les obligeait à voler du bois sur leurs propres terres. Ils étaient principalement chargés d'exécuter les ordres des autorités centrales et n'étaient guère encouragés à acquérir les connaissances techniques et les capacités décisionnelles qui leur auraient permis de gérer rationnellement les forêts. De ce fait, de nombreuses forêts privées sont plus dégradées sur le plan biologique que les forêts publiques et nombre de propriétaires privés ne sont absolument pas en mesure d'apporter dans un avenir proche, les améliorations importantes nécessaires. Conformément à la loi sur les forêts, les bureaux forestiers de district s'efforcent de combler cette lacune. Ils fournissent aux propriétaires forestiers privés des conseils en matière d'aménagement et une assistance technique, et ils sont parvenus à établir des relations très fructueuses avec eux.

En Albanie, la reconnaissance de droits de propriété privée sur les forêts a été une étape beaucoup plus révolutionnaire qu'en Pologne. Sous le régime communiste, toutes les forêts étaient détenues par l'Etat, La nouvelle loi sur la foresterie et le Service des politiques forestières, qui se démarque nettement des pratiques antérieures, reconnaît trois formes de tenure, à savoir: i) les forêts publiques; ii) les forêts privées; et iii) les forêts communautaires, qui sont détenues par l'Etat, mais exploitées en commun par la population locale dans le cadre d'un contrat entre l'Etat, et la communauté concernée.

Ces modes de propriété ressemblent - du moins superficiellement - à ceux de la Pologne, où les forêts publiques, privées et communautaires ont toutes un rôle à jouer. Des différences significatives apparaissent cependant juste au-dessous de la surface, dues principalement à l'absence de propriété forestière privée dans l'histoire récente de l'Albanie.

Près de 95 pour cent des forêts albanaises appartiennent à l'Etat, Les 5 pour cent restants sont des forêts privées que quelques paysans ont plantées sur les terres nouvellement acquises. Les autorités forestières albanaises n'ont pas l'intention de privatiser une partie importante des forêts publiques, bien que la nouvelle loi sur les privatisations leur en donne les moyens. Les autorités forestières estiment que les forêts publiques sont bien aménagées et n'ont rien à gagner d'une privatisation.

Les forêts communautaires, concept que les rédacteurs du statut forestier albanais ont emprunté au droit français, devaient servir à créer des forêts juridiquement à michemin des forêts publiques et des forêts privées. Les autorités albanaises ont toutefois longtemps hésité à établir des forêts communautaires, par crainte que la population locale ne les exploite à l'excès par intérêt économique à court terme ou pour couvrir ses besoins de subsistance immédiats. Cette crainte est effectivement fondée. Les dangers présentés à court terme par le relâchement du contrôle de l'Etat, sur les forêts ont été nettement démontrés lors de la période d'instabilité qui a suivi l'effondrement du régime communiste en 1990, dont l'Albanie ne s'est pas encore relevée; à cette époque, même les oliviers cinq fois centenaires de la capitale ont été abattus par la population locale pour servir de bois de chauffage.

Les autorités forestières albanaises ont deux principaux échelons administratifs: le Directorat général, situé à Tirana; et les Directorats de district du Service des politiques forestières, répartis sur tout le territoire. Le pouvoir décisionnel au sein de cette structure reste nettement plus centralisé que dans l'Administration des forêts publiques de la Pologne. Selon la loi sur la foresterie et le Service des politiques forestières, les autorités forestières assument deux fonctions essentielles. Premièrement, elles gèrent les 95 pour cent des forêts albanaises aux mains de l'Etat, Deuxièmement, elles réglementent l'aménagement des forêts qui n'appartiennent pas à l'Etat, et exercent dans ce domaine un plus grand pouvoir que leurs homologues polonais. D'après le statut, les autorités forestières ont pratiquement les mêmes droits et devoirs envers les forêts privées et communautaires qu'envers les forêts publiques, même si elles savent qu'elles devront moduler leur action en fonction des divers modes de propriété. Vraisemblablement, le rôle polyvalent que les autorités forestières comptent jouer sera énoncé dans des décrets gouvernementaux, mais il restera dans les limites imposées par un statut à vacation apparemment plus monolithique.

Contrairement à la loi polonaise sur les forêts, le statut albanais n'insiste pas sur la fonction de vulgarisation des autorités forestières. Il se contente de noter que l'Etat, aide à développer l'agrosylviculture et à mettre en place un secteur forestier privé grâce à des investissements et à une assistance technique. L'aide que les autorités forestières peuvent apporter est très limitée du fait des difficultés financières actuelles du gouvernement, et jusque-là, les investissements et l'assistance technique ont été rares, voire nuls.

Modèle économique

L'un des aspects les plus intéressants de la loi polonaise sur les forêts est l'affirmation de l'Administration des forêts publiques en tant qu'entité autonome sur le plan financier. L'Administration produit l'essentiel de ses propres revenus et paye ses factures, mais elle peut toujours recourir à l'Etat, en cas de déficit grave dû à une situation d'urgence. L'organisme tire des revenus de plusieurs sources: 90 pour cent viennent de la vente de bois par les bureaux forestiers de district (environ 16 à 18 millions de m, par an). Des fonds supplémentaires sont fournis par l'Etat, qui finance certaines activités liées aux acquisitions forestières, à la conservation des forêts et à la protection de l'environnement. Enfin, de petites recettes viennent des diverses cotisations, amendes et autres sommes que l'Administration des forêts publiques est habilitée à percevoir auprès des usagers de la forêt ou de ceux qui l'exploitent abusivement dans certains cas.

Deux des possibilités de prélever des recettes prévues par la loi sur les forêts sont particulièrement intéressantes. Premièrement, le statut autorise l'Administration des forêts publiques à s'associer avec des sociétés à responsabilité limitée ou des entreprises mixtes, à condition que les forêts ne constituent pas le capital d'amorçage de ces sociétés. L'organisme a actuellement des parts dans une cinquantaine de sociétés, qui s'occupent aussi bien de la commercialisation du bois, de la cueillette des fruits que de la construction liée aux forêts. Deuxièmement, le statut autorise l'Administration des forêts publiques à obtenir des crédits bancaires, à condition que leur montant total annuel ne dépasse pas 30 pour cent des ventes de l'année précédente. Les crédits peuvent être garantis par les biens de l'Administration des forêts publiques, à l'exception des forêts elles-mêmes.

Tout cela fait de l'Administration des forêts publiques une entité peu ordinaire. Sous de nombreux aspects, elle ressemble à une entreprise privée, surtout en ce qui concerne les clients, les partenaires commerciaux et les créanciers. Cette similitude est accentuée par les pratiques de l'Administration en matière d'allocation des ressources financières, qui s'articulent autour d'un Fonds pour la foresterie institué par la loi. Les districts effectuent des versements sur ce fonds, dont le montant varie en fonction des conditions naturelles et économiques qui existent dans chacun d'eux. La plupart des autres recettes de l'Administration y sont également versées.

Le Fonds pour la foresterie est utilisé à deux fins. Premièrement, il sert à financer les déficits des districts qui sont défavorisés par leurs conditions naturelles ou économiques - par exemple, si la plupart des peuplements forestiers sont trop jeunes pour être exploités. Le Fonds permet donc de transférer des ressources des districts les plus prospères aux districts les moins prospères, de la même manière qu'une branche rentable d'une entreprise privée finance parfois les activités des branches provisoirement déficitaires. Deuxièmement, le Fonds permet d'octroyer des incitations au rendement aux différentes sous-unités de l'Administration des forêts publiques, notamment dans les domaines de la sylviculture, de la protection des forêts, de la recherche et du développement de l'infrastructure nécessaire à la gestion de l'économie de la forêt. Il fait donc partie intégrante d'un système de prime, semblable à celui mis en place par une entreprise privée pour accroître les rendements de ses diverses subdivisions.

Le fait que l'Administration des forêts publiques soit en même temps le principal fournisseur de bois polonais et l'organisme chargé d'aider l'industrie privée naissante du pays la place dans une position délicate. D'un côté, en tant qu'entité autonome qui tire 90 pour cent de ses recettes de la vente de bois, il est dans l'intérêt de l'Administration des forêts publiques d'obtenir une aussi large part que possible du marché polonais. D'un autre côté, la présence de l'Administration sur le marché pourrait devenir trop forte, au point d'éliminer les forestiers privés. L'Administration repose sur trois facteurs pour éviter que son incidence économique sur les forestiers privés ne soit trop négative. Premièrement, la vigoureuse législation antitrust de la Pologne, qui vise à maintenir la compétitivité des marchés en évitant la création de monopoles. Deuxièmement, le potentiel de commercialisation limité de la plupart du bois provenant des forêts publiques, très touchées par la pollution atmosphérique. Troisièmement, sa coopération active avec les forestiers privés afin de garantir leur survie, fondée sur la conviction que les forêts polonaises appartiennent à un domaine commun de ressources naturelles renouvelables, et que toutes les forêts privées doivent être aménagées rationnellement afin de garantir la santé des forêts publiques. La loi sur les forêts a codifié cette coutume en partie en attribuant à l'Administration des forêts publiques le rôle d'agent de vulgarisation.

Des trois facteurs qui limitent la manipulation du marché du bois par l'Administration des forêts publiques, le premier est le plus important, car c'est le seul qui impose une limite juridiquement contraignante à son pouvoir économique. Même la qualité et la quantité des services de vulgarisation fournis par l'Administration dans le cadre de la loi sur les forêts, dont les forestiers privés ont un avantage évident à tirer, dépendent dans une large mesure du bon vouloir de l'Administration. Il reste à voir si celle-ci voudra ou pourra poursuivre cette politique à travers les vicissitudes économiques ou politiques qu'elle rencontrera dans le futur. Dans tout pays où l'organisme forestier public reste un protagoniste essentiel sur le marché du bois, une loi catégoriquement antitrust ou une contrainte juridique de cette nature limitant son pouvoir économique est un garde-fou utile qui permet de garantir la santé d'une industrie forestière privée émergente.

Plus que l'Administration des forêts publiques polonaise, les autorités forestières albanaises apparaissent comme un pur organisme d'administration du secteur public. Toutefois, elles se sont aventurées dans une certaine mesure sur la voie du marché libre. La principale innovation concerne le débardage du bois dans les forêts publiques. Quelques mois après la promulgation de la nouvelle loi sur la foresterie, l'Albanie a commencé de privatiser les entreprises publiques de débardage. A ce jour, toutes ou la plupart des entreprises privées sont albanaises. Même si elles tendent à manquer de capitaux, ce qui entrave leur capacité d'acheter le matériel nécessaire ou d'exploiter le bois de la manière la plus rationnelle et rentable, elles ont déjà prouvé leur compétitivité par rapport aux entreprises publiques, obligeant ainsi ces dernières à devenir plus efficaces.

La constitution d'entreprises mixtes avec des partenaires étrangers, désormais légale en Albanie, pourrait rendre ce secteur encore plus compétitif. Trois entreprises mixtes avec des entreprises publiques de débardage se sont constituées dès l'été 1993. Deux ou trois entreprises mixtes privées ont également été envisagées, mais elles n'en sont pour l'instant qu'au stade de proposition.

Conclusion

Tout pays qui souhaite se démarquer rapidement et nettement d'un modèle de tenure et d'une structure économique de type dirigiste dans le secteur forestier ferait bien de s'inspirer de la loi sur les forêts de la Pologne. En donnant aux bureaux forestiers de district une autonomie considérable par rapport au Directorat général et aux directorats régionaux, elle a créé une vaste sphère où les motivations psychologiques et matérielles canalisent les initiatives individuelles. En faisant de l'Administration des forêts publiques une entité financièrement autonome, la loi sur les forêts a suscité un grand élan institutionnel en faveur de l'aménagement rationnel des forêts publiques. En outre, la loi sur les forêts tente de reconnaître les besoins spécifiques des propriétaires forestiers privés, et de leur fournir une aide sous forme de services de vulgarisation assurés par les districts forestiers. Tout cela semble favorable à la réussite à long terme de la foresterie privée polonaise.

Le statut albanais, de son côté, contient un certain nombre de dispositions peut-être plus intéressantes pour un pays désireux d'adopter une approche progressive. Il autorise les autorités forestières à exercer un contrôle très étroit sur tous les types de forêts, indépendamment de leur mode de propriété, ce qui peut être bénéfique à court terme là où l'expérience récente suggère que les particuliers ne sont pas encore en mesure d'aménager les forêts en vue de s'assurer des profits à long terme plutôt qu'à court terme. L'expérience apparemment réussie de l'Albanie en matière d'appel d'offre compétitif parmi les entreprises publiques et privées pour l'extraction de bois des forêts publiques suggère que cette approche peut être viable, avec des avantages aussi bien pour l'industrie publique que pour l'industrie privée.

La faiblesse de l'approche plus progressive est qu'elle peut aboutir à la stagnation à long terme. Par exemple, un statut qui ne tiendrait pas compte des besoins et des intérêts différents de la foresterie privée et publique, ni de la nécessité d'adapter en conséquence la fonction réglementaire des autorités forestières publiques, finirait par limiter l'expansion de la foresterie privée. Tout pays qui vise à mettre en place un secteur forestier capable de se développer au maximum de ses possibilités doit être conscient que l'approche progressive ne peut être que provisoire.


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