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Aperçu du programme forestier de terrain de la FAO

M.K. Muthoo

Maharaj K. Muthoo dirige le Service des opérations du Département des forêts de la FAO.

La FAO met ses compétences en matière de forêts directement au service des pays membres par son Programme de terrain. A l'appui de ce programme, elle apporte l'expérience accumulée et les activités du Programme ordinaire qui se poursuivent au siège de l'Organisation et dans ses bureaux régionaux. Ces activités sont en retour renforcées et actualisées par les activités de terrain, de sorte que Programme ordinaire et Programme de terrain sont étroitement imbriqués.

Le programme forestier de terrain comprend actuellement 330 projets d'assistance technique dans plus de 90 pays, avec 690 experts et consultants, appuyés par la plus forte concentration de spécialistes forestiers existant dans toutes les organisations internationales, répartis entre le Département des forêts et le Centre d'investissement de la FAO. Les projets forestiers de terrain font d'autre part de plus en plus appel à d'autres départements techniques de l'Organisation pour compléter leur gamme de compétences, répondre au caractère multisectoriel des problèmes forestiers et assurer l'approche interdisciplinaire requise pour traiter les problèmes de déboisement et de gestion des ressources naturelles renouvelables.

Compte non tenu de la contribution de contrepartie des pays en argent et en nature, le budget du programme forestier de terrain en cours est de l'ordre de 360 millions de dollars U.S. Le réapprovisionnement annuel du programme par l'approbation de nouveaux projets a atteint la barre des 100 millions de dollars, quintuplant ainsi depuis 1980.

FIGURE 1. Dépenses afférentes aux projets de terrain

FIGURE 2. Dépenses afférentes aux projets par région, 1990

La répartition géographique des projets forestiers de terrain répond à la tendance générale de tout le programme de terrain de la FAO. Au cours de l'exercice biennal 1989-1990, les dépenses en Afrique se sont élevées à plus de 46 pour cent du total du programme forestier; dans la région Asie-Pacifique, elles ont représenté 24 pour cent, au Proche-Orient et en Europe environ 17 pour cent, y compris les programmes interrégionaux, et dans la région Amérique latine-Caraïbes environ 13 pour cent. Les 20 pays où les dépenses de projets ont été le plus élevées durant le même exercice biennal étaient, par ordre décroissant: Zimbabwe, Sénégal, Indonésie, Soudan, Népal, Mauritanie, Pérou, Mozambique, Bangladesh, Viet Nam, Yémen, Ouganda, Inde, Malawi, Bhoutan, Tchad, Birmanie, Burkina Faso, Cap-Vert, Guinée.

Principaux domaines d'assistance forestière et nouveaux thèmes

On prend de plus en plus conscience dans le monde des conséquences du déboisement dans les tropiques, et de ses effets écologiques et socio-économiques. De nouveaux efforts doivent donc être entrepris pour améliorer nos connaissances scientifiques concernant la gestion de l'environnement et les problèmes forestiers qui s'y rattachent, en tant que composantes d'une stratégie globale du développement.

Recherche et développement technologique

Il faut intensifier la recherche en ce qui concerne les écosystèmes fragiles, comme les forêts tropicales humides, les zones arides, les bassins versants montagnards, les mangroves, qui sont tous exposés à une pression démographique croissante et aux répercussions de la pauvreté. Citons comme exemple d'action concrète dans ce domaine un nouveau projet FAO d'appui à la recherche forestière dans la région Asie-Pacifique, élaboré en coopération étroite avec la Banque asiatique de développement. Cette dernière fournit environ 1,4 million de dollars U.S., et un financement supplémentaire est offert par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Ce projet a pour objet de renforcer les institutions de recherche et de promouvoir la coopération entre pays dans le cadre d'un réseau de recherche.

Autre exemple de développement technologique, le Projet de lutte moderne contre les feux de forêt en Inde, avec un budget de 4,9 millions de dollars U.S. financé par le PNUD, est exécuté par la FAO. Grâce à de nouveaux ensembles de moyens techniques, le nombre et l'ampleur des feux de forêt ont accusé une réduction spectaculaire dans les zones pilotes. Simultanément, l'Inde a pu se donner les moyens de fabriquer elle-même des équipements appropriés de lutte contre le feu, et de fournir une assistance à d'autres pays.

Télédétection et bases de données numériques

Le projet d'évaluation des ressources forestières mondiales en 1990, en cours d'exécution, rassemble les informations à jour sur les forêts tropicales mondiales, dont la communauté scientifique et les responsables du développement ont besoin pour formuler des stratégies d'action sur les problèmes interdépendants du déboisement, du changement climatique et de la diversité biologique. Des données statistiques informatisées sont rassemblées à des fins de recherche et analyse systématiques, tandis que les données spatiales sont analysées au moyen d'un système d'information géographique (SIG). Le projet a d'ores et déjà mis au point une méthode d'échantillonnage statistique pour l'observation continue des forêts, utilisant des données de télédétection qui proviennent de satellites à haute résolution (LANDSAT, SPOT). En outre, des données provenant du satellite à faible résolution NOAA AVHRR fourniront une carte à jour du couvert forestier tropical mondial. Une méthodologie est actuellement élaborée en vue d'évaluer l'impact écologique du déboisement et de la dégradation des forêts en ce qui concerne la biomasse, la désertification, la conservation biologique, la biodiversité, ainsi que l'absorption du bioxyde de carbone et le changement climatique.

En Inde, le projet de lutte moderne contre les incendies de forêt a permis une réduction spectaculaire du nombre et de l'importance des feux dans la zone intéressée

Ce projet est exécuté grâce à un fonds fiduciaire multilatéral de 2 millions de dollars U.S. fourni par la Finlande, la France, les Pays-Bas, la Suède et la Suisse. Son objectif ultime est de renforcer les capacités nationales en matière d'inventaire forestier continu et d'utilisation de la télédétection et autres technologies: des projets connexes sont en cours au Brésil, en Chine, en Inde, en Indonésie, au Kenya, en Malaisie et en Tunisie.

Biotechnologie et amélioration des arbres

La recherche forestière n'a pas encore tiré profit des progrès rapides de la biotechnologie, mais on commence à préparer le terrain dans ce domaine. Un projet FAO financé par un fonds fiduciaire, intéressant 17 pays du Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS) et de l'Office intergouvernemental pour la lutte contre la sécheresse et pour le développement (IGADD), a pour objet l'amélioration des ressources génétiques d'espèces ligneuses à usages multiples dans les régions arides et semi-arides d'Afrique tropicale où les conditions écologiques difficiles, la sécheresse prolongée et la pénurie de bois de feu ont entraîné une grave dégradation de la végétation ligneuse. Le projet a entrepris des études sur la répartition, la biologie, l'écologie et la variabilité d'espèces indigènes, et a d'autre part fourni une assistance pour la création et le renforcement de centres nationaux de semences, la récolte et la distribution de semences, l'amélioration et la conservation de matériels de reproduction.

Grâce a un projet mis en œuvre au Sénégal avec des fonds fiduciaires, la population locale prend de plus en plus conscience de l'importance que revêt le couvert forestier pour préserver l'environnement

Un stagiaire forestier. Avec l'aide de la FAO, le Chili a jeté de solides bases a la recherche et a la formation forestières

Un projet du Programme de coopération FAO/gouvernements (PCG), lancé par la FAO et le Gouvernement français, aide la Chine à améliorer des essences fixatrices d'azote en vue d'enrichir les sols et d'accroître la productivité. Plusieurs autres projets visent à relever les capacités nationales en matière de génétique, d'amélioration des arbres et d'aspects biotechnologiques connexes concernant un certain nombre d'essences indigènes et exotiques de plus en plus utilisées en reboisement.

Gestion de l'environnement

La dimension environnementale a toujours été un aspect important de l'aménagement forestier scientifique, mais c'est depuis peu de temps qu'elle est explicitement prise en considération dans les programmes forestiers. A côté des projets «classiques» portant sur les parcs nationaux, l'aménagement des bassins versants, la lutte contre la désertification, le reboisement - qui restent importants -, un nombre croissant de projets forestiers concernent exclusivement ou pour une large part la gestion de l'environnement. Un projet du Programme de coopération technique FAO (PCT) en cours, qui fournit une assistance technique au secrétariat temporaire du Traité amazonien de coopération pour la formulation de programmes et de projets identifiés par la Commission spéciale sur l'environnement, vise à encourager des activités en rapport avec le développement durable en Amazonie.

Le Centre de formation aux industries forestières de la SADCC a reçu sa première promotion d'étudiants en 1990

Grâce à un fonds fiduciaire japonais, un projet régional de recherche et de développement en matière d'agroforesterie a été lancé en Asie

Un projet de 1,9 million de dollars U.S. financé par le PNUD à Sri Lanka, et consacré à la gestion de l'environnement dans l'économie forestière, est actuellement exécuté par la FAO en collaboration avec l'Alliance mondiale pour la nature (UICN). Ce genre de coopération est certainement appelé à se développer dans l'avenir.

Conservation des ressources renouvelables et aménagement forestier

L'évaluation, l'aménagement la conservation des ressources forestières constituent l'activité la plus marquante actuellement menée par la FAO. Celle-ci prend souvent la forme de conseils techniques spécialisés, d'inventaire des ressources et de planification. Cette dernière peut comporter l'élaboration de plans cadres, ou de plans d'aménagement détaillés pour une activité ou une région forestière déterminée; l'aménagement des bassins versants, la foresterie de zone aride et la lutte contre la désertification entrent également dans cette catégorie, de même que les projets de reboisement et de conservation de la faune sauvage.

La lutte contre la désertification est une des priorités du Gouvernement sénégalais. C'est à cette fin qu'a été entrepris un inventaire des forêts de la Casamance, suivi d'un plan d'aménagement qui est en cours d'élaboration pour la forêt de Dabo, dans le cadre de deux projets FAO/PNUD successifs (1,5 million de dollars U.S.). Dans d'autres régions du Sénégal, une série de projets de foresterie communautaire intégrée, avec participation de la population, sont en cours d'exécution au titre du Programme de coopération FAO/gouvernements; le financement est assuré par la Suède à Louga et à Bakel (4,7 millions de dollars), par la Finlande à Fatick dans le Bassin de l'arachide (3,4 millions de dollars), et par les Pays-Bas dans le nord-ouest à Tivaouane (5 millions de dollars). Plusieurs milliers de volontaires provenant d'organisations de développement rural et des populations locales travaillent au reboisement des savanes sèches, à la protection des terres irriguées et à l'aménagement pastoral. Ces projets ont amené la population du Sénégal à prendre conscience de l'importance du couvert arboré pour ralentir la dégradation de l'environnement.

Le déboisement et l'érosion dans le nord du Pakistan entraînent une réduction de la production agricole et de la durée de service des barrages hydroélectriques. Deux projets FAO/PNUD, d'un montant de 2,6 millions de dollars U.S., sont en cours, l'un à l'Institut forestier du Pakistan pour fournir une assistance en matière de recherche et d'enseignement relatifs aux bassins versants, l'autre près du barrage de Mangla pour démontrer des techniques améliorées de mise en valeur des terres, de reboisement et de conservation des sols. C'est un travail de longue haleine, même si des résultats très appréciables ont déjà été obtenus dans le renforcement des institutions locales.

Des enquêtes de la FAO ont montré que la viande de brousse est une source vitale de protéines, représentant jusqu'à 80 pour cent ou plus de la ration protéique dans certaines communautés, notamment dans les régions semi-arides où les animaux sauvages sont mieux adaptés au milieu que le bétail domestique. En conséquence, une enquête régionale détaillée sur l'utilisation de la faune sauvage en Afrique est actuellement conduite au titre d'un projet PCT. L'objectif est d'étudier des formes ordonnées et durables d'utilisation des ressources fauniques pour le développement rural, qui contribuent à l'amélioration de l'alimentation, à la diversification des revenus et à la conservation de l'environnement.

Institutions forestières

Les politiques de conservation et de mise en valeur des forêts doivent s'appuyer sur des institutions spécialisées assurant l'administration, la formation, la vulgarisation et la recherche. L'édification de ces institutions bénéficie en conséquence d'un appui considérable dans les programmes forestiers de terrain de la FAO.

Le Chili est un des premiers pays d'Amérique latine à avoir mis en place un enseignement forestier avec l'assistance de la FAO. Il possède maintenant une base solide de formation et de recherche, et des experts chiliens participent à des programmes forestiers dans d'autres pays.

Le Centre régional de développement de l'enseignement forestier, situé à l'Université des Philippines à Los Baños, est un exemple concret de coopération technique entre pays en développement. Créé avec l'assistance d'un projet PCG FAO/Suède, ce centre offre une formation aux enseignants de la région Asie-Pacifique et une assistance en matière d'élaboration de programmes d'études et de services après formation.

FIGURE 3. Part respective des sources de financement des projets

Industries forestières et commerce des produits forestiers

L'assistance à la promotion des industries forestières et du commerce des produits forestiers bénéficie de la position internationale de la FAO en matière d'information et de consultation relatives à la forêt. A l'heure actuelle, près de la moitié des exportations de bois des pays en développement se fait encore sous forme de grumes. Il est donc toujours nécessaire de créer des industries du bois et des autres produits forestiers, et d'améliorer les installations existantes, ce qui contribuera à une meilleure utilisation de la forêt et, par suite, à sa conservation.

Le projet forestier le plus important exécuté à ce jour par la FAO, qui est financé par un fonds fiduciaire italien de 27,39 millions de dollars U.S., vise à améliorer les industries forestières dans les pays de la Conférence de coordination du développement de l'Afrique australe (SADCC) en formant des techniciens et des gestionnaires d'usines. Un centre de formation aux industries forestières moderne et bien équipé est en cours d'installation au Zimbabwe, et la première promotion d'étudiants venant des 10 pays de la SADCC a été récemment admise pour un cycle d'études de deux ans. La capacité d'accueil du centre sera accrue' et il sera bientôt en mesure de fonctionner de manière autonome à son rythme de croisière.

Bois de feu, foresterie communautaire et privée

La catégorie d'assistance qui connaît l'expansion la plus rapide est celle de la forêt au service du développement rural; elle comporte une large part d'activités de foresterie communautaire et le développement du bois de feu, et inclut un certain nombre d'approches nouvelles, notamment la participation de la population à des actions visant à accroître la production locale de bois de feu, fourrage, perches de construction, rotin et bambous, fruits et noix, plantes médicinales et autres produits forestiers, et à créer des emplois et des revenus dans les zones rurales grâce à des entreprises forestières appropriées.

Pour les 6 millions d'habitants de la cordillère péruvienne, dont le bois est la source traditionnelle d'énergie, le déboisement a entraîné une pénurie aiguë de bois de feu. Les paysans utilisent les déjections animales, l'herbe et d'autres matières végétales, ce qui aggrave encore les problèmes de dégradation des sols. Un projet PCG FAO/Pays-Bas de 10,8 millions de dollars U.S. est en cours pour lancer des activités autonomes en vue de satisfaire les besoins domestiques de bois, d'améliorer la productivité des cultures et de l'élevage et de créer un supplément de revenus. L'évaluation du projet a montré que la notion de foresterie communautaire gagne du terrain parmi les paysans andins.

La politique forestière novatrice récemment instaurée au Népal prévoit des actions de foresterie communautaire menées par des groupes d'usagers locaux en vue de gérer et d'exploiter rationnellement leurs propres ressources forestières. L'exécution du Programme de foresterie communautaire et privée (C&P) nécessitera un financement de 692 millions de dollars U.S. sur les 20 années à venir. Parmi les activités en relation avec ce programme, citons le projet FAO/ PNUD de foresterie communautaire à l'appui du programme national, une assistance technique FAO/CEE dans la région du Terai avec un prêt de 17 millions de dollars U.S. de la Banque mondiale, un projet FAO/ASDI dans deux districts pilotes pour la création de revenus et d'emplois grâce à la diversification des activités basées sur la forêt, et un nouveau projet PCG FAO/Pays-Bas d'appui au développement forestier et fourrager en montagne d'un montant de 14 millions de dollars financé par le FIDA. Ce dernier projet est à la pointe des nouvelles approches visant à intégrer forêt, agriculture et élevage grâce à des mécanismes locaux autonomes.

En Chine, un projet du PCT, récemment achevé, a aidé le Service forestier à prendre des mesures d'urgence contre les invasions de diaspidés dans les forêts de pins

Approches multidisciplinaires

On observe une tendance à axer les projets sur une meilleure connaissance du rôle des forêts et des arbres et une utilisation plus complète de leurs produits et de leurs services, dans un contexte de mise en valeur polyvalente et intégrée. Les liens entre le secteur forestier et les autres secteurs, tels qu'agriculture, énergie, conservation de l'environnement, sont de plus en plus pris en compte dans les activités forestières de terrain. C'est dans cet esprit qu'a été lancé le projet PCG FAO/Japon de recherche-développement en agroforesterie en Asie, qui a pour objet de promouvoir l'agroforesterie comme moyen de parvenir à une productivité durable en agriculture traditionnelle. Un projet FAO/PNUD à fins multiples au Costa Rica, portant sur la mise en place d'institutions, le reboisement et l'aménagement des bassins versants, associe l'assistance technique de la FAO avec un apport financier bilatéral de l'Agence pour le développement international (AID) d'un montant de 2 millions de dollars U.S.

Le Plan d'action forestier tropical (PAFT), qui est l'un des programmes spéciaux d'action prioritaires de la FAO, offre un exemple remarquable d'approche multidisciplinaire. Reposant sur une approche intersectorielle de la planification et du développement du secteur forestier, il constitue un moyen unique de canaliser l'aide internationale d'une manière concertée. Un projet sur fonds fiduciaire provenant de donateurs multiples (à l'heure actuelle, Allemagne, Autriche, Belgique, Finlande, France, Italie, Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède et Suisse) renforce le rôle de la FAO en fournissant un soutien à des missions sur le terrain et à des tables rondes.

Evolution de l'emploi d'experts et de consultants dans les projets forestiers de terrain


1980

1990


(Nombre)

(%)

(Nombre)

(%)

Experts (long terme)

223

65

191

34

Consultants (court terme)

119

35

376

66

Associer forêt et agriculture est une nécessité si l'on veut freiner la dégradation des forêts tropicales qui subsistent. Sur la côte est de Madagascar, au climat tropical humide, un projet FAO/ PNUD a pour objectif d'atténuer la pression de l'agriculture itinérante sur un couvert forestier en constante régression. Dans la zone du projet, il faut notamment convaincre les paysans de la nécessité de renoncer aux feux de brousse et d'appliquer des mesures de conservation des sols. Associée à des améliorations de la riziculture irriguée intensive, cette action a permis d'obtenir des rendements de quatre à cinq fois supérieurs à ceux de la culture traditionnelle sur brûlis. En outre, des boisements privés et communautaires sont créés, et l'économie paysanne est diversifiée par l'introduction de nouvelles activités telles que la fabrication améliorée de charbon de bois, l'apiculture, la pisciculture et l'aviculture.

Modalités d'association

La croissance du programme forestier de terrain et sa diversification progressive traduisent bien la priorité élevée qui lui est attribuée par les pays membres. D'une part, il existe une demande croissante d'assistance technique en vue de développer les capacités des pays de gérer eux-mêmes leurs forêts et ressources connexes pour favoriser un développement socio-économique durable; d'autre part, on fait toujours appel aux compétences de l'Organisation pour canaliser les ressources provenant des donateurs, qui continuent de s'accroître, même si elles sont loin de répondre aux demandes d'assistance adressées à la FAO.

Programme de coopération FAO/ gouvernements

La croissance la plus rapide du programme de terrain est le fait des fonds fiduciaires, qui représentent maintenant plus de 56 pour cent du total. La composante la plus importante est le Programme de coopération FAO/gouvernements (PCG), qui reçoit des ressources de gouvernements donateurs: Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Danemark, Finlande, France, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse. En outre, plusieurs de ces pays et certains autres, tels que les Etats-Unis, participent au programme de terrain en détachant des jeunes cadres au titre du système de cadres associés; plus d'une centaine sont actuellement affectés à des projets forestiers.

Le PCG a tendance à encourager une «approche de programme» à long terme, comportant des ensembles de projets et programmes connexes proposés par les gouvernements, pour lesquels la FAO fournit des apports de formulation, de gestion et de suivi des projets ainsi qu'une assistance technique. Par exemple, le programme de financement multilatéral «Les forêts, les arbres et l'homme» appuie le travail de la FAO en matière de foresterie communautaire en rassemblant, analysant et diffusant des connaissances sur les stratégies et techniques de foresterie participative, et soutient les activités de terrain dans les pays en développement.

Fonds fiduciaires unilatéraux

Les fonds fiduciaires unilatéraux (FFU), qui constituent la deuxième, par ordre d'importance, des catégories de fonds fiduciaires de la FAO, concernent des projets financés par des gouvernements au moyen de crédits mis à leur disposition par des banques de développement et autres institutions de financement, ou de leur propre budget. Citons un projet de 2,1 millions de dollars U.S. en Arabie saoudite, financé par le gouvernement de ce pays dans le cadre duquel la FAO fournit des experts pour l'aménagement des parcs nationaux et le renforcement du Département des forêts et de l'aménagement pastoral.

En Indonésie, le volet d'assistance technique d'un prêt de la Banque mondiale de plus de 60 millions de dollars U.S. est exécuté sous forme d'un projet FFU FAO/Banque mondiale d'études forestières de 2,34 millions, qui a pour objet une évaluation du secteur forestier et l'élaboration d'un Plan d'action forestier national. La FAO participe à des actions similaires d'assistance technique au titre des FFU dans plusieurs autres pays, dont le Ghana, la Guinée équatoriale, le Soudan, Sri Lanka, la Tunisie et la Turquie.

D'autres exemples récents de fonds fiduciaires, avec la participation financière d'organismes du système des Nations Unies, sont les opérations entreprises en association avec le Fonds d'équipement des Nations Unies en Mauritanie pour la fixation de dunes et la construction de barrages, et avec le Bureau des Nations Unies pour la région soudano-sahélienne (BNUS) au Soudan et ailleurs pour la foresterie en zone aride et la lutte contre la désertification.

Programme de coopération technique

Le Programme de coopération technique de la FAO (PCT), qui a débuté il y a 15 ans, fournit un financement sur le Programme ordinaire à des petits projets de courte durée destinés à servir de catalyseur; 390 projets forestiers PCT, d'un montant total de 30 millions de dollars U.S., ont ainsi été réalisés depuis 1976. L'Afrique a bénéficié de la plus grande part (154 projets), suivie par la région Asie-Pacifique (95), la région Amérique latine-Caraïbes (93), et le Proche-Orient et l'Europe (47).

La principale catégorie d'assistance PCT est la formation à la base, suivie par la promotion de l'investissement. Un projet agroforestier PCT a formé, dans l'extrême nord du Cameroun, 30 chefs de stations agricoles, qui démontrent, à leur tour, les techniques agroforestières aux populations locales. Un projet novateur PCT a été réalisé au Brésil sur la formation et la préparation des investissements en vue de la mise en valeur de forêts amazoniennes. Ce projet a démontré les conditions préalables à un aménagement forestier qui prenne en compte explicitement l'impact sur l'environnement et concilie les aspects techniques, écologiques et économiques. La zone de projet, qui couvre 600 000 ha à Tapajós dans la région amazonienne, a depuis lors été classée comme forêt nationale - la première en Amazonie brésilienne -, et des fonds d'investissement ont été alloués pour sa protection et sa mise en valeur.

L'assistance d'urgence en cas d'attaques de parasites ou de maladies, d'incendies de forêt, d'inondations ou de cyclones est un autre secteur important du PCT. Ainsi, un projet PCT récemment achevé en Chine a aidé le service forestier à prendre des mesures d'urgence pour arrêter les invasions de diaspidés dans les forêts de pins, et notamment à organiser des essais d'insecticides et l'introduction d'ennemis naturels de ces cochenilles.

Les services de conseil sur des points critiques sont une composante essentielle de tous les projets PCT. Un projet PCT en cours en Pologne a pour objet d'aider l'Institut polonais de recherche forestière à améliorer sa capacité d'identifier et d'évaluer les effets de la pollution atmosphérique sur les forêts. Une assistance bilatérale consécutive a maintenant été obtenue pour poursuivre ces activités.

Programmes nationaux du PNUD

La quasi-totalité des 203 projets forestiers, d'un montant total de 206 millions de dollars U.S., financés par le PNUD durant le quatrième cycle de programmes nationaux (1987- 1991) a été exécutée par la FAO. Sur ce total, 140 projets sont en cours, représentant près de 40 pour cent du programme de terrain de la FAO.

On peut s'attendre à une nouvelle expansion du programme forestier de terrain, en raison de l'augmentation des programmes nationaux dans le prochain cycle (1992-1996), en particulier dans les pays les moins avancés et d'autres où la conservation et la mise en valeur des forêts justifient une action multilatérale plus poussée en vue de promouvoir un développement durable. Toutefois, on s'inquiète des conséquences possibles des changements qui vont être apportés aux modalités d'exécution des projets financés par le PNUD, et de leur incidence sur le programme de terrain futur.

Promotion de l'investissement

Outre l'exécution des volets d'assistance technique de projets d'investissement, la FAO coopère avec la Banque mondiale, les banques régionales de développement et d'autres institutions de financement, dans la préparation des investissements, grâce à son Centre d'investissement. Entre 1975 et 1985, des projets forestiers identifiés et élaborés par le Centre ont été approuvés pour un montant total de 2,307 milliards de dollars U.S., dont 885 millions en prêts de la Banque mondiale et d'autres organismes de prêt multilatéraux. Au cours de la période 1986-1990, la Banque mondiale a financé 26 projets forestiers d'un montant total de 1,2 milliard de dollars; 17 de ces projets ont été préparés par le Centre d'investissement de la FAO.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) apporte également des ressources d'investissement importantes pour des projets forestiers sous forme d'activités vivres contre travail, notamment dans des programmes de développement rural. Sur un total de 328 projets de développement PAM en 1990, une centaine étaient consacrés aux forêts ou comportaient un volet forestier, pour un montant de 566 millions de dollars U.S. contre 230 millions en 1980. La FAO fournit une assistance lors de la formulation des projets et un appui technique durant leur mise en œuvre.

Nouvelles tendances et formation

Autrefois, la FAO avait pour rôle essentiel de mettre en route, organiser et appuyer les projets de terrain. Il n'en est plus de même actuellement. La plupart des projets forestiers de terrain sont coordonnés par des directeurs nationaux, et on fait de plus en plus appel à des experts venant de pays en développement, qui représentent maintenant la moitié des experts affectés aux projets de ce genre.

Bien que les conditions d'exécution de ces projets forestiers varient selon les pays, les vues des pays en développement et des gouvernements ou organismes donateurs se rapprochent de plus en plus en ce qui concerne les grands objectifs du programme forestier de terrain: il s'agit de parvenir à une autonomie globale, fondée sur l'atténuation de la pauvreté rurale, la participation des populations, l'accroissement des revenus et de l'emploi, et de renforcer la contribution de la forêt à l'amélioration de l'environnement.

Cette orientation se traduit par une complexité croissante des projets sous divers aspects. Les grands projets autonomes ont progressivement fait place à des projets de durée relativement courte et de caractère multidisciplinaire. Les exigences techniques de ces projets sont plus grandes, en raison du savoir-faire accru des pays en développement. On fait davantage appel à des consultants en mission de courte durée et à des directeurs de projet nationaux, de sorte qu'un appui et des apports techniques de plus haut niveau et plus spécialisés sont nécessaires.

Les projets exécutés par le pays bénéficiaire en association avec la FAO requièrent, au moins aux stades initiaux, un suivi et un appui plus intensifs que des projets de type traditionnel. Ces nouvelles tendances traduisent les progrès accomplis dans les pays en développement, qui méritent d'être encouragés selon chaque cas particulier.

Les projets forestiers de terrain évoluent de plus en plus de l'assistance technique vers la coopération technique, en accord avec l'objectif d'autosuffisance nationale. Il faut, pour pouvoir atteindre cet objectif, qu'il existe dans le pays des capacités adéquates de gestion, d'administration et de technique susceptibles de prendre le relais pour tout ou partie des activités de projets. Les gouvernements, comme les organismes de financement, doivent donc travailler plus énergiquement à former du personnel national en matière de formulation, gestion et évaluation des projets. La formation est plus que jamais un élément primordial du programme forestier de terrain.

Depuis 1983, la FAO organise chaque année à son siège des séminaires de formation pour le personnel forestier de terrain, y compris les directeurs et les personnels de projets nationaux. Ces séminaires, qui visent à recueillir davantage d'information en retour du terrain et sont axés sur des thèmes techniques d'importance nouvelle, font mieux comprendre la coopération technique en expliquant les orientations et les procédures des programmes de terrain, en stimulant la coopération entre pays en développement, et en permettant au personnel de terrain de réexaminer les projets avec les agents de soutien technique, opérationnel et administratif.

En outre, un cycle analogue de sessions régionales a été lancé pour la formation du personnel national et international de projets forestiers de terrain. Des sessions se sont déjà tenues à Bangkok pour la région Asie-Pacifique, à Kampala pour la région Afrique et à Concepción (Chili) pour la région Amérique latine-Caraïbes. Un deuxième cycle est en cours, avec une réunion distincte pour les Etats arabes.

Simultanément, la FAO a entrepris une formation de responsables nationaux à la gestion des projets, sous forme de séminaires organisés avec le concours du Groupe de la formation du personnel et d'autres services techniques.

Les bourses individuelles sont un moyen important d'envoyer le personnel national se perfectionner dans des universités spécialisées, des centres de recherche et d'autres institutions à l'étranger. C'est la catégorie de formation la plus intensive, et 2 035 bourses ont été octroyées au cours des 10 dernières années. Près de la moitié des boursiers actuels étudient dans une institution d'un autre pays en développement, le plus souvent dans la même région.

Sur un autre plan, les projets forestiers de terrain ont organisé plus de 600 voyages d'étude au cours du dernier exercice biennal. Ces voyages intéressaient surtout des homologues nationaux, qui ont pu ainsi se rendre dans d'autres pays pour se perfectionner en participant à des réunions techniques, séminaires et conférences, ou observer sur le vif des activités en rapport avec la situation de leur propre pays. A ces activités organisées il faut ajouter la formation sur le tas dont ont bénéficié les milliers d'homologues nationaux qui travaillent avec les experts et consultants de la FAO.

Évaluation et durabilité

Tous les projets forestiers de terrain font l'objet d'examens intérimaires et d'évaluations, afin que l'on puisse suivre et améliorer leurs résultats. Environ 10 pour cent des projets sont évalués pendant chaque exercice biennal, indépendamment des examens réguliers de tous les grands projets menés en étroite coopération avec les pays bénéficiaires et les bailleurs de fonds.

Ces évaluations et examens montrent que, si les résultats du programme forestier de terrain de la FAO sont généralement satisfaisants, des améliorations et des ajustements restent possibles en cours d'exécution. Cela est d'autant plus important que la situation évolue pendant la durée d'un projet donné, et à cet égard il serait souhaitable d'intensifier le suivi et l'appui.

L'exploitation des résultats des projets après leur achèvement, et la permanence des effets de l'assistance fournie, exigent une évaluation formelle a posteriori. Celle-ci n'est généralement pas prévue dans les projets, mais il est important de l'organiser si l'on veut avoir une information précise sur les résultats durables de la coopération technique en foresterie.

Dans de nombreuses activités forestières, la démonstration et la formation sur le tas contribuent à assurer la durabilité des résultats, en particulier dans les projets de foresterie communautaire et d'aménagement de bassins versants. Le transfert de technologie et la formation ne peuvent toutefois à eux seuls garantir cette durabilité; il faut un équilibre optimal entre la formation et les autres activités d'appui directement lices à la production et à la protection.

L'orientation multidisciplinaire de plus en plus nette des projets forestiers oblige à porter une attention particulière à la conception, notamment à prendre explicitement en considération l'environnement du projet et les corrélations entre les activités forestières et les autres secteurs de l'économie, en particulier l'agriculture. En outre, les critères de durabilité doivent être pris en compte dès ce stade, avec la souplesse voulue pour permettre les adaptations nécessaires au cours de l'exécution du projet. En même temps, il convient d'intensifier le suivi, l'examen et l'évaluation des projets afin de mieux tirer profit de leur expérience et en prévision d'exigences accrues en matière d'environnement, de participation et de durabilité.

Conclusion

Depuis 10 ans, le programme forestier de terrain de la FAO a connu une croissance spectaculaire, tant en volume qu'en diversité. Plus que le changement quantitatif, toutefois, c'est le changement de perspective qui importe, en vue des tâches qui nous attendent à l'aube du 21e siècle.

La pression démographique croissante sur des ressources limitées en terres et en eau a mieux fait comprendre la relation étroite qui existe entre développement socio-économique durable et gestion de l'environnement. C'est dans le contexte d'une stratégie globale du développement que le programme de terrain évolue. Les nouveaux projets ont pour double objectif de réduire la pauvreté rurale et d'améliorer l'environnement. Ils ne se limitent donc plus aux problèmes classiques de sylviculture et de production ligneuse, mais comportent aussi des activités multidisciplinaires en vue de l'aménagement intégré des forêts et des ressources naturelles renouvelables qui s'y rattachent. Cela exige des approches novatrices pour répondre à de nouvelles préoccupations: participation des populations, impact sur l'environnement, gestion des écosystèmes, technologies «douces» et rentables, informatisation, télédétection, génétique et biotechnologie, intégration des femmes dans le développement, création de revenus et d'emplois, planification des énergies renouvelables, etc.

La plupart des gouvernements ne disposent pas des ressources nécessaires pour lancer ces innovations, pour exploiter et améliorer les techniques et le savoir-faire locaux, pour lutter contre le déboisement et la désertification, pour conserver et restaurer les bassins versants et la vie sauvage, pour créer de nouveaux boisements. La coopération internationale est donc indispensable, et le programme de terrain de la FAO contribuera de plus en plus à harmoniser l'aide des donateurs avec les priorités et les besoins des pays en développement.

La FAO, tirant les leçons de l'expérience passée, restera, en association avec les gouvernements et institutions concernés, attentive aux besoins et priorités de chaque pays, et cherchera à maintenir le plus haut degré de qualité possible dans l'exécution des projets de terrain qui lui sont confiés.


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