On a acquis de nombreuses connaissances sur les sols, leur distribution et leur aménagement (voir encadré page suivante). Les principes biophysiques sur lesquels doit se fonder un aménagement durable du sol sont désormais bien connus. Malgré cela, nous avons vu que les systèmes daménagement durable ne sont pas suffisamment diffusés dans les régions qui en ont le plus besoin. Cela signifie que non seulement les agriculteurs des zones défavorisées ont du mal à assurer leur subsistance mais que cette situation risque de devenir de plus en plus difficile à mesure que les sols se dégradent davantage et que lapprovisionnement en eau est plus aléatoire.
On dispose des bases nécessaires pour remédier à cette situation grâce aux connaissances et à la compréhension actuelles des systèmes de production agricole. Il faut maintenant procéder à une évaluation de la manière dont les principes daménagement durable des sols sont ou doivent être appliqués dans les régions où la productivité agricole est en stagnation ou en baisse. Cette évaluation doit être faite compte tenu de la grande diversité des conditions biophysiques et socio-économiques dans ces régions. Ladoption de systèmes durables nécessite lutilisation dengrais et autres facteurs de production, y compris lutilisation dengrais organiques et le recyclage des éléments nutritifs provenant des résidus. Ces systèmes à faible apport dintrants et de recyclage impliquent souvent un recyclage similaires des conditions mêmes de la pauvreté. Lobjectif doit être déchapper au piège de cette pauvreté, et, bien quil faille probablement pour cela recourir aux intrants économiques appropriés, il ny a pas de raison pour quon ne puisse pas le faire dans le cadre dun système durable. A mesure que les pressions démographiques se feront plus fortes, les problèmes deviendront plus difficiles à résoudre, et des mesures doivent être prises sans tarder pour mettre un terme à la dégradation des terres et établir des systèmes durables dans les régions où sont actuellement utilisées des méthodes dexploitation agricole non durable. Beaucoup reste à faire pour évaluer la viabilité des systèmes de gestion des sols et des terres dans des environnements différents, et pour élaborer des politiques et mesures dincitation garantissant que ces systèmes soient socialement acceptables et économiquement attrayants.
IBSRAMLa principale responsabilité dans laction incombera aux gouvernements nationaux et aux services de lagriculture. Ceux-ci devront bénéficier de lappui sans réserve des organisations internationales et, bien sûr, des communautés agricoles et scientifiques. Parmi les organismes internationaux, la FAO continuera déjouer un rôle de chef de file, avec lappui de diverses organisations telles que lInternational Board for Soil Research and Management (IBSRAM). LIBSRAM apporte déjà son soutien à plusieurs programmes nationaux par le biais de divers réseaux qui réalisent des études sur lapplication des techniques daménagement des sols dans les régions à problèmes (Figure 29). Une aide en matière de recherche stratégique devra être apportée aux universités et à dautres organismes, notamment:
· les centres internationaux de recherche agricole bénéficiant dun appui du Groupe Consultatif pour la Recherche Agricole Internationale (GCRAI);· le Programme des Nations Unies pour lEnvironnement (PNUE);
· ceux qui étudient les changements climatiques mondiaux et leurs effets sur lagriculture;
· dautres organismes, y compris des organisations non gouvernementales.
Eléments de systèmes durable
daménagement des sols |
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zones tropicales humides |
zones tropicales subhumides |
zones tropicales semi-arides |
terres hydromorphes |
arbres pour le paillis: engrais chaulage cultures de relais et cultures intercalaires construction de terrasses et diguettes en courbes de
niveau |
arbres pour le paillis: engrais chaulage engrais verts construction de diguettes suivant les courbes de
niveau |
animaux engrais bandes, haies ou diguettes en courbes de
niveau planches en billons arbres coupe-vent irrigation et drainage |
construction de terrasses ou de diguettes mise en boue Irrigation engrais drainage de surface |
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Exemples de systèmes daménagement des
sols durables |
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zones tropicales humides |
zones tropicales subhumides |
zones tropicales semi-arides |
terrains marécageux |
plantations avec couverture de légumineuses |
systèmes dagroforesterie dans lesquels les arbres
sont dune bonne rentabilité |
pâturages amendés avec pâture
contrôlée, soit en continu soit en alternance avec des
cultures |
riziculture inondée avec approvisionnement en eau et
amendement contrôlés |
cultures itinérantes à longue
jachère |
système de paillis sans préparation du sol avec
apport dengrais et chaulage comme une source économique de
matière organique |
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Source: Lal R., 1994
Il est très rare de réaliser la durabilité gratuitement. La plupart des sociétés dans le monde développé ont financé le développement agricole dune façon ou dune autre, que ce soit par des subventions directes pour les engrais, le chaulage, lirrigation, le drainage et la lutte contre lérosion ou, indirectement, par des systèmes de soutien des prix des productions ou dinvestissement dans la recherche scientifique et technique. La viabilité actuelle de nombreux systèmes de riziculture irriguée doit beaucoup aux investissements qui ont été faits (en temps et en travail plutôt quen espèces) pour la mise au point de systèmes de maîtrise et de distribution de leau. Actuellement, il faut reconnaître que ces systèmes sont menacés - que ce soit par lérosion dans les bassins versants des réservoirs ou, dans les régions plus sèches, par la salinisation dans les zones desservies. Il se pourrait que des investissements beaucoup plus importants soient nécessaires pour que ces systèmes restent durables.
Il faut aussi admettre que dans la plupart des régions tropicales les systèmes actuels dexploitation agricole et daménagement des sols ne sont pas durables. De nombreuses expériences ont été menées qui montrent que la production à long terme des terres arables dans les régions humides et semi arides des tropiques nest possible que si lon maintient la teneur du sol en matière organique. Cela a été difficile à réaliser même dans le cadre dexpériences artificiellement entreprises et réussies dans les stations de recherche. Si la baisse inhérente de la fertilité du sol nentraîne pas toujours une diminution des rendements parce quon utilise plus de moyens et de ressources, la rentabilité unitaire des intrants aura toujours tendance à diminuer de sorte que le système ne sera plus viable économiquement.
La plupart des systèmes durables autochtones nécessitent le maintien de la teneur en matière organique et ne sont viables que tant que les terres restent abondantes. Les principales sources de matière organique sont les arbres et les pâturages. Pour que ces sources soient économiquement accessibles au petit agriculteur, des changements de politique générale seront peut-être nécessaires.
Les questions écologiques de portée plus vaste et les problèmes à long terme que pose la dégradation des ressources ne peuvent être laissés à la seule appréciation des agriculteurs niais sont aussi la responsabilité des gouvernements. Limportance de ces problèmes exige à présent quune action durgence soit entreprise tant au niveau national quinternational pour parvenir à une production durable et suffisante et mettre un terme à la dégradation des terres.
Deux milliards de personnes supplémentaires vivront dans les régions tropicales du monde dans moins de 25 ans. Si lon veut assurer leur subsistance, une augmentation massive de la productivité du potentiel de base des ressources en terres sera nécessaire. Actuellement, la productivité a tendance à diminuer plutôt quà augmenter. Un effort supplémentaire considérable est requis pour appliquer les connaissances et techniques existantes à une meilleure gestion des ressources en sol et en eau et rechercher de nouvelles technologies partout où les connaissances actuelles savèrent inappropriées.