La recherche agricole a joué un rôle crucial dans la sécurité alimentaire et le développement agricole en augmentant la production agricole afin de satisfaire la demande vivrière dune population en rapide croissance. La progression importante des rendements des céréales et autres cultures, des produits de lélevage et de la pisciculture a contribué de façon déterminante à laugmentation de 80 pour cent de la production alimentaire mondiale, enregistrée depuis le milieu des années 60.
Bien que les disponibilités alimentaires mondiales aient augmenté plus vite que la population, de persistants problèmes de pauvreté et de malnutrition font quaujourdhui encore, pour 20 pour cent des habitants des pays en développement, les besoins nutritifs ne sont pas couverts. Laccès à la nourriture reste impossible même lorsque les denrées sont disponibles sur le marché. Afin de nourrir et de sortir de la pauvreté lensemble de la population mondiale qui devrait atteindre 8,3 milliards de personnes en 2025, avec une pression de plus en plus forte sur la base de ressources, le monde ne pourra se passer daccroissements importants de la productivité agricole.
La technologie agricole dorigine scientifique, née à travers la recherche agricole, est essentielle pour accroître la productivité tout en préservant, ou mieux, en améliorant la durabilité des ressources naturelles et de lenvironnement. Les sciences sociales doivent fournir un appui plus ferme aux politiques visant à garantir un accès plus équitable et plus sûr à la nourriture.
Malgré lampleur de ces défis, les investissements de recherche dans les sciences naturelles et sociales en faveur de lagriculture et du développement rural ont diminué dans la plupart des pays en développement au cours des 10 dernières années, malgré de claires indications sur leurs grands avantages pour la société, autant directement que par lamélioration des économies rurales et par les échanges qui sétablissent avec les centres urbains. Il faut réellement craindre que lon ne puisse poursuivre les progrès réalisés jusquà présent dans le domaine de la productivité agricole et que lagriculture des pays en développement soit ignorée dans de nouvelles orientations scientifiques trop éloignées des besoins de ceux qui vivent dans linsécurité alimentaire.
Le programme de la recherche agricole doit répondre aux problèmes de linsécurité alimentaire, de la pauvreté et de la dégradation des ressources et de lenvironnement. Il sera déterminé par les choix dinvestissements et les stratégies de recherche formulés par les gouvernements et les institutions, autant des pays développés quen développement, avec la due répartition des domaines de recherche entre le secteur privé et le secteur public. Ce document indique trois grandes orientations pour un effort de recherche visant à réduire linsécurité alimentaire et développe plus à fond les questions présentant un intérêt particulier pour les pays en développement:
Les systèmes nationaux de recherche agricole (SNRA) y compris les institutions dépendant du gouvernement, les universités, les organisations non gouvernementales (ONG) et, de plus en plus, lindustrie privée sont et continueront dêtre la pierre angulaire du système mondial de recherche agricole. Eux seuls peuvent être responsables de létude de toute une série de problèmes de productivité et de durabilité dans leur pays. Etant donné la nature variée des conditions agroécologiques et la spécificité, liée aux conditions locales, de la petite agriculture et des problèmes de gestion des ressources naturelles, les SNRA devront jouer un rôle encore plus important en tant quinterface entre le système mondial de recherche agricole, dont ils sont un élément, et les agriculteurs et autres usagers des ressources naturelles. Le succès du système mondial de la recherche agricole dépend de la solidité des capacités nationales de recherche, complétée par un mécanisme efficace de transfert de la technologie. Un partenariat fort entre les SNRA, entre ces derniers et les institutions de recherche régionales et internationales, notamment celles du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI), constitue lautre condition essentielle pour accroître lefficacité du système mondial de recherche.
De plus en plus, lindustrie privée sintéresse à la recherche agricole, par exemple, à travers lapplication de la biotechnologie à lagriculture. Les efforts de recherche dans les industries agro-chimiques et ceux qui portent sur les outils agricoles sont aussi principalement le fait du secteur privé des pays industrialisés. Linsuffisance du soutien financier accordé à la recherche du secteur privé pour mettre au point des techniques dans les pays en développement a été combiné ces dernières années à une baisse généralisée de la participation internationale des SNRA des pays développés. Ces tendances doivent être renversées. Il est essentiel daugmenter considérablement le soutien financier à la recherche agricole dans les pays en développement, mais un surcroît de fonds ne suffira pas: des réformes institutionnelles profondes sont également nécessaires. En parallèle, le financement stable et adéquat des centres internationaux du GCRAI doit être assuré. Il est également nécessaire de mobiliser le vaste réservoir de ressources humaines disponibles dans les pays industrialisés pour cette tâche. Il ne faut pas permettre que ces ressources samenuisent face au défi de la sécurité alimentaire mondiale.
Un programme de recherche agricole en faveur de la sécurité alimentaire au sens le plus large, préparé et exécuté avec soin, soutenu avec détermination par tous les pays en développement et industrialisés, dans le secteur public comme dans le secteur privé, est lun des meilleurs instruments que la communauté internationale puisse concevoir pour oeuvrer en faveur de la sécurité alimentaire au cours des 20 à 30 prochaines années.
Bien que nombreux soient ceux qui nont pas un accès suffisant à la nourriture, le monde, dans son ensemble, a généralement réussi au cours des dernières décennies à satisfaire la demande alimentaire globale. Daprès les estimations effectuées par la FAO dans son étude intitulée Agriculture mondiale: Horizon 2010 (WAT2010), léquilibre global entre loffre et la demande effective daliments devrait pouvoir être maintenu, encore que lélimination de la sous-alimentation chronique demeure un autre défi formidable. Les investissements nécessaires pour atteindre cet objectif et assurer une distribution plus équitable des aliments nont pas été calculés jusquici. Rares sont les statistiques systématiques sur les investissements passés et il ny a pas de bons modèles étudiant les relations de cause à effet entre investissements dans le secteur agricole et disponibilités alimentaires.
Le présent document examine les facteurs qui favorisent les investissements agricoles et donne une estimation générale des types et des volumes dinvestissement nécessaires pour assurer laugmentation de la production vivrière requise dans les pays en développement pendant les 15 prochaines années. Les contributions attendues des secteurs privé et public, ainsi que le rôle de laide extérieure dans ces totaux y sont analysés. Cependant, les coûts directs dune aide ciblée ou durgence aux victimes de la sous-alimentation, pour urgente quelle soit, ne rentrent pas dans le cadre du document. Par ailleurs, la question complexe des rapports entre les investissements dans le secteur agricole dune part et la sécurité alimentaire et la durabilité du point de vue de lenvironnement de lautre mériterait dêtre traitée de façon plus approfondie quon na pu le faire dans le présent document.
Il convient de souligner que les estimations/projections fournies dans ce document ne sappliquent quaux pays en développement et quelles représentent les flux et montants des investissements nécessaires pour atteindre les objectifs alimentaires et agricoles indiqués dans WAT2010.
La dépendance vis-à-vis de cadres agroécologiques divers pour améliorer les disponibilités et la sécurité alimentaires exige des approches systémiques, la participation plus active des agriculteurs eux-mêmes à la création et au transfert de technologies, ainsi quun changement de mentalité chez les chercheurs et les vulgarisateurs afin quils se préoccupent des besoins des agriculteurs. Toute une série dinvestissements au niveau de lexploitation seront nécessaires dans les domaines suivants: irrigation, amélioration des terres, nouveaux outils et machines agricoles, races animales et variétés végétales. Une grande partie des investissements consistera dans le travail des agriculteurs eux-mêmes. Les investissements en amont et en aval fourniront de nouveaux types dintrants, de plantes cultivées et de races animales ou de machines, ainsi que des moyens de transformation, de commercialisation et de stockage, afin que les nouvelles formes dintensification durable soient à la fois rentables et réalisables. En facilitant les investissements dans les infrastructures rurales, on pourra lier les producteurs aux mégapoles, où vivra une partie croissante des consommateurs; et les services sociaux permettront aux populations rurales de tirer parti, physiquement et mentalement, des nouvelles possibilités qui soffrent à elles. Il faudra aussi veiller aux questions transfrontières et mondiales: il est plus rentable de regrouper les investissements que dagir individuellement, au niveau de chaque pays, pour résoudre les problèmes communs que posent les technologies et la gestion des ressources. Des alliances mondiales doivent être conclues pour suivre les tendances des disponibilités alimentaires mondiales qui se font jour et les menaces qui risquent de peser sur celles-ci.
Les modèles dinvestissement varieront dune région à lautre. En Asie, le risque de plafonnement des résultats des technologies céréalières de la révolution verte est un gros problème. La remise en état des périmètres dirrigation, le drainage et la création de marchés efficaces de leau pour faire face à la pénurie croissante deau sont des objectifs prioritaires. Vu la croissance massive de la population urbaine, des capitaux doivent être investis dans les infrastructures commerciales et dans les communications. En Afrique, linsuffisance ou la détérioration des infrastructures est un goulet détranglement important. Des investissements doivent aider à améliorer la gestion des terres non irriguées de façon à préserver la fertilité et la structure des sols et à mieux capter in situ leau des pluies incertaines. Les installations dirrigation peuvent être développées ou remises en état lorsque les conditions matérielles et socioéconomiques le permettent, pour peu que le rapport coûts-avantages soit acceptable, sans toutefois négliger dautres moyens de parvenir à la sécurité alimentaire. En matière de recherche et de développement, il importera davoir recours à des approches participatives pour moderniser progressivement les systèmes traditionnels dexploitation en Afrique, tout en tenant compte des coûts et des risques que les paysans pauvres et les exploitants orientés vers une agriculture de subsistance sont disposés à accepter. En Amérique latine, des réformes agraires reposant sur les mécanismes du marché pourraient grandement faciliter laccès des petits agriculteurs et des paysans sans terre aux réserves restantes de terres productives. On devra sattacher à mettre au point des systèmes durables de culture mécanisée, ainsi quà mettre en place les infrastructures de transformation et de commercialisation nécessaires à une population qui sera urbaine à 80 pour cent dici lan 2010. Dans toutes les régions, les zones rurales manquent dinfrastructures sociales, indispensables pour valoriser la plus importante des ressources productives, à savoir le capital humain.
Quelques chiffres très généraux sur les investissements courants peuvent être tirés des données de la FAO et dautres sources. Ils indiquent que les investissements nets effectués dans les améliorations à lexploitation dans le monde en développement pourraient sêtre élevés ces dernières années à 26 milliards de dollars EU par an (montant brut: 77 milliards de dollars) et dans le secteur postproduction, à 15 milliards de dollars (montant brut: 34 milliards de dollars).
Outre ces investissements en grande partie privés, les dépenses publiques pour la recherche et la vulgarisation dans les pays en développement peuvent être estimées à quelque 10 milliards de dollars par an et celles pour les infrastructures rurales à 20 milliards de dollars (chiffre très approximatif).
Une partie significative des investissements publics dans les secteurs ruraux des pays en développement a été assurée grâce au Financement public du développement (ODF). Laide internationale à lagriculture dans les pays en développement est passée de quelque 12 milliards de dollars par an au début des années 80 à près de 16 milliards de dollars en 1988. Depuis, elle a baissé, tombant à moins de 10 milliards de dollars par an en 1994.
Lefficacité des investissements est tout aussi importante que leur volume. Dans de nombreux pays, les ajustements macroéconomiques provoquent une réduction des subventions et transmettent des messages plus rationnels aux investisseurs privés dont dépend la croissance future de la production vivrière. Les pays et les donateurs sefforcent en outre de mieux tenir compte des besoins des bénéficiaires dans le financement public grâce à la décentralisation et aux approches participatives, dans la planification et la mise en oeuvre des programmes de développement et dans la privatisation partielle ou totale des services agricoles autrefois publics, lorsque les profits peuvent aller au secteur privé.
Quant aux investissements futurs, il ressort destimations provisoires que pour accroître la production vivrière dans les pays en développement conformément à la demande effective jusquen 2010, des investissements bruts de quelque 86 milliards de dollars seront nécessaires chaque année dans la production agricole primaire (y compris lirrigation), de 43 milliards de dollars pour les installations connexes postproduction et de 37 milliards de dollars pour les infrastructures et les services de soutien publics. Compte tenu de tous les facteurs en jeu et de leurs effets différents sur le niveau des investissements, notamment lévolution des prix réels des biens déquipement, les progrès technologiques et le désinvestissement passé, le chiffre de 31 milliards de dollars par an pour les investissements supplémentaires bruts qui en résulte pour la production primaire, le secteur postproduction, ainsi que les infrastructures et les services de soutien publics apparaît comme une estimation prudente mais réaliste. Sur cette base, le total des investissements bruts nécessaires pour soutenir les taux de croissance indiqués dans létude WAT2010 serait de quelque 166 milliards de dollars par an, soit quelque 23 pour cent de plus que la moyenne des investissements bruts totaux pour lagriculture au cours de la dernière décennie.
On estime que les investissements nets nécessaires pour accroître les biens déquipement, et partant les disponibilités alimentaires, sont à peu près du même ordre que ces dernières années, soit de quelque 42 milliards de dollars par an. Il y a cependant de grandes variations régionales. En Afrique subsaharienne, les investissements nets dans la production primaire devront sensiblement augmenter par rapport aux niveaux historiques pour satisfaire la demande future daliments. En Afrique du Nord, au Proche-Orient et dans une grande partie de lAsie toutefois, on mettra laccent sur lutilisation améliorée des biens déquipement existants, si bien que le volume des investissements supplémentaires nets nécessaire pour développer loffre daliments diminuera progressivement. En Amérique latine, les investissements nets devront dépasser considérablement les niveaux de ces dernières années et il faudra faire face à un arriéré significatif dinvestissements en ce qui concerne le remplacement et le renouvellement des biens déquipement existants.
Près des trois quarts des investissements futurs requis dans les pays en développement consisteront, comme par le passé, en engagements privés des agriculteurs pour lamélioration des terres, de nouveaux équipements, laugmentation du cheptel et lexpansion des plantations, souvent sous forme de travail des membres de la famille, et en investissements privés dans la chaîne postproduction. Le quart restant, représentant 41 milliards de dollars environ par an, consistera en investissements publics complémentaires pour créer et conserver un climat favorable aux investissements privés rentables dans le secteur agricole. Si laide financière extérieure de sources multilatérales et bilatérales pour ces investissements publics doit fournir la même part que par le passé, à savoir un tiers environ du total, les engagements extérieurs devront augmenter de 5 milliards de dollars environ par an, passant des 10 milliards actuels à 15 milliards par an, soit le montant déjà atteint à la fin des années 80.
Le tableau 1 présente une hypothèse de travail concernant les investissements annuels moyens supplémentaires dans les pays en développement qui seront nécessaires pour soutenir la croissance agricole, conformément aux projections du scénario WAT2010. Ces estimations ne portent pas sur les besoins des pays appartenant à dautres catégories ou sur les investissements requis pour réduire encore davantage les problèmes de la malnutrition (voir le document du SMA no 14, Evaluation des progrès réalisables en matière de sécurité alimentaire). Les investissements supplémentaires, indiqués selon le scénario de WAT2010, satisferont la demande du marché de la population existante et celle des 1,3 milliard dhabitants dans les pays en développement qui viendront sajouter dici lan 2010, bien que de 600 à 700 millions de personnes, dépourvues du pouvoir dachat nécessaire, souffriront encore de sous-alimentation chronique, à moins que des politiques et des mesures spéciales ne soient adoptées en leur faveur.
Les responsables des politiques dans les gouvernements et la communauté internationale des donateurs devraient continuer à accorder une attention particulière aux besoins ci-après:
Tableau 1 | ||||
Région | Secteur privé | Secteur public | Total | |
Intérieur | Financement extérieur du développement | |||
(milliards de dollars EU) | ||||
Afrique subsaharienne | 3.4 | 1.6 | 3.9 | 8.9 |
Proche-Orient/Afrique du Nord | -1.8 | -1.0 | -0.5 | -3.3 |
Asie | 9.0 | 3.3 | 1.2 | 13.5 |
Amérique latine/Caribbean | 8.0 | 3.1 | 0.4 | 11.5 |
Monde en développement | 18.6 | 7.0 | 5.0 | 30.6 |
Les producteurs de denrées alimentaires se trouvent confrontés à de nouveaux défis majeurs étant donné que, daprès les projections, la population mondiale devrait passer du chiffre actuel de 5,8 milliards de personnes à environ 8,3 milliards en lan 2025, tandis que la proportion par habitant de terre utilisable pour la production vivrière ne cesse de diminuer. On dispose, certes, des compétences scientifiques et des moyens technologiques nécessaires pour faire fructifier le sol, mais les politiques gouvernementales à courte vue et la répartition inégale des richesses et des ressources ont eu pour résultat de nombreux impacts sur lenvironnement qui auraient pu être évités.
Les terres qui, par leur relief, la qualité du sol ou le climat, se prêtent aux cultures ne représentent pas plus de 11 pour cent environ de la surface de la planète. Toutefois, à lexception peut-être de certaines régions limitées de lAfrique et de lAmérique latine, ce sont les terres déjà productives dune façon ou dune autre qui devront fournir le complément de nourriture nécessaire. Etendre les cultures à des terres plus ingrates signifie davantage dintrants, de risques de mauvaises récoltes et de dégradation de lenvironnement autant de facteurs qui contribuent à linsécurité alimentaire.
Tant dans le rapport de la Commission mondiale sur lenvironnement et le développement (1987) (Commission Brundtland) que dans le Programme Action 21 de la Conférence des Nations Unies sur lenvironnement et le développement CNUED (1992), lagriculture et le développement rural sont désignés comme des objectifs prioritaires de développement si lon veut parvenir à un développement durable. Pour que les ressources naturelles puissent être utilisées de façon durable, il faut que les progrès technologiques saccompagnent de politiques environnementales et sociales qui les consolident. Les schémas dutilisation des terres devront être modifiés, certaines terres étant utilisées de façon moins intensive et dautres de façon plus intensive. En tout état de cause, lexploitation des ressources naturelles devra se fonder sur leur potentiel physique et biologique lequel peut varier considérablement et dépend en grande partie des pratiques daménagement et des technologies appliquées. Dune façon générale, les pays devraient chercher à tirer parti des terres ayant un potentiel plus élevé de production vivrière et sefforcer den répartir équitablement les avantages.
Les sciences et les technologies utiles à la production vivrière se sont développées, pour la plupart, dans des pays (ou des centres de recherche) dont lenvironnement et le contexte socioéconomique sont différents de ceux des pays dans lesquels elles sont appliquées. Cest pourquoi, même sil existe certaines technologies qui permettent daccroître la production sans nuire à lenvironnement, nombre dentre elles exigent des changements radicaux dans les mécanismes utilisés pour les développer et les transmettre aux agriculteurs.
Indépendamment du contexte actuel qui suppose une intervention réduite en matière déconomie, les gouvernements ont un rôle privilégié à jouer dans lagriculture et le développement rural contrairement à ce qui se passe dans les autres secteurs. Ce rôle leur est dévolu par des traditions, des préoccupations et des valeurs culturelles qui sont enracinées dans la conscience nationale notamment lengagement dassurer de la nourriture à la population nationale et de préserver lhéritage naturel et rural du pays.
Il est essentiel daccroître la productivité tout en sauvegardant lenvironnement. Cela est possible si lon applique, à bon escient, toute une série doutils biologiques, sociaux, technologiques et économiques dans différents domaines, à savoir: planification participative de lutilisation des terres; conservation des terres et des eaux; évacuation des déchets; systèmes intégrés de production; liens entre la recherche, léducation et la vulgarisation; enfin, réforme des régimes fonciers.
Pour une agriculture respectueuse de lenvironnement, il faut accorder la priorité à la mise en place de systèmes intégrés de production saccompagnant de dispositifs qui facilitent le fonctionnement de tels systèmes, ainsi quà une meilleure utilisation des intrants extérieurs. Même si ces derniers impliquent un risque de dégradation de lenvironnement, ils offrent la possibilité, sils sont correctement utilisés, daméliorer la productivité et la sécurité alimentaire et de diminuer la pression exercée sur dautres terres. Lirrigation, les variétés améliorées et les produits agrochimiques apportent une contribution extrêmement importante à la production alimentaire 36 pour cent de toutes les cultures et 50 pour cent de lensemble des céréales proviennent de terres irriguées. Cependant, on na pas assez insisté sur les mécanismes qui permettent aux usagers dutiliser en toute sécurité ces intrants extérieurs. Pour ce faire, il faut faire porter davantage les efforts sur la formation et léducation des agriculteurs, le soutien technique et les infrastructures auxiliaires, de manière à réduire au minimum limpact négatif sur lenvironnement.
Il est amplement démontré que les innovations sont rapidement adoptées si les agriculteurs les jugent profitables. Le pari à gagner est donc de concevoir des innovations et des incitations qui soient à la fois économiquement rentables pour les producteurs, sans danger pour lenvironnement et profitables pour la société tout entière. Les enveloppes technologiques de protection intégrée (PI) et de systèmes intégrés de nutrition des plantes (SINP) répondent sans conteste à ces critères mais exigent la participation active des agriculteurs, des vulgarisateurs et des experts.
Il incombe aux gouvernements de prendre linitiative de cette démarche complexe en mobilisant tous les moyens disponibles, notamment les technologies et les instruments politiques appropriés, afin dinciter les agriculteurs, les marchés, les industries alimentaires, les instituts de recherche, les consommateurs, etc., à faire du développement de lagriculture une activité qui respecte lenvironnement.
Il est possible de sensibiliser lopinion publique et de parvenir à un consensus sur les méthodes de production écologiquement sûres de différentes façons, notamment en:
Les gouvernements devraient unir leurs efforts à ceux des agriculteurs et autres producteurs daliments, ainsi quà ceux des entreprises et des organisations non gouvernementales, pour accroître et améliorer la nourriture dont disposent les ruraux pauvres, cest-à-dire:
La rapidité avec laquelle les méthodes améliorées sont diffusées et adoptées et les autres conditions essentielles à une production alimentaire durable dépendent de trois éléments décisifs, à savoir: efficacité de lutilisation des ressources, mise en place dun cadre de planification et de mise en oeuvre et bonne administration.
Les principes énoncés dans la Déclaration de den Bosch (FAO,1991) et les objectifs définis dans le Programme Action 21 ne pourront se concrétiser que si les technologies et les politiques saccompagnent dune volonté de participation, déquité et de dialogue, ainsi que de mécanismes opérationnels, dune délégation de pouvoirs et de mesures dincitation. Cest seulement ainsi que lon pourra préparer la voie à une agriculture respectueuse de lenvironnement et à la sécurité alimentaire. Faute de respecter ces principes, les précieux outils technologiques et politiques dont nous disposons nauront aucun effet positif durable.
Le commerce est essentiel à la sécurité alimentaire mondiale. Sans lui, les pays dépendraient exclusivement de leur propre production; lensemble des revenus serait bien inférieur, le choix des produits serait beaucoup plus étroit et la faim serait plus répandue. Bien que tout cela soit évident, en particulier pour le commerce intérieur, la relation entre le commerce et la sécurité alimentaire pose un certain nombre de questions complexes qui sont examinées ci-après.
Le commerce mondial des biens et services en 1994 a atteint 5 190 milliards de dollars EU, le commerce des produits agricoles représentant 485 milliards de dollars EU. Depuis la Conférence mondiale de lalimentation de 1974, le volume des échanges agricoles a augmenté de 75 pour cent et leur valeur a plus que triplé, tout comme celle des échanges de produits alimentaires. A la suite de cycles successifs de libéralisation commerciale, le commerce mondial sest développé beaucoup plus vite que la production. En conséquence, léconomie mondiale est beaucoup plus intégrée aujourdhui quelle ne la jamais été: les pays comptent de plus en plus sur le commerce comme source de revenus et dapprovisionnement. Lintégration croissante de léconomie mondiale fait partie de la tendance générale à la globalisation.
Le commerce international influence la sécurité alimentaire de multiples façons. En premier lieu, le commerce permet à la consommation alimentaire de dépasser la production vivrière dans les pays où lexpansion est limitée. Sur la période 1970-1990, la consommation de produits agricoles a augmenté de 10 pour cent plus vite que la production dans 93 pays en développement couverts par létude FAO de 1995 Agriculture mondiale: Horizon 2010 (WAT2010). Cest grâce aux importations en général que lon peut couvrir les besoins de consommation alimentaire à un coût moindre que sil fallait compter seulement sur la production intérieure. Certains pays peuvent avoir des raisons particulières de chercher à atteindre lautosuffisance alimentaire, il est en général plus judicieux du point de vue économique dadopter la politique plus souple de lautonomie alimentaire, à condition que les importateurs puissent compter sur le marché mondial comme source fiable et efficace de ravitaillement et que les exportateurs disposent de débouchés pour leurs produits. Malgré les obligations de notification et de consultation faites aux membres de lOrganisation mondiale du commerce (OMC) en ce qui concerne les restrictions dexportation, les pays importateurs sinquiètent et se demandent si les importations seront disponibles au moment voulu et sil y a des risques dembargo commercial. Dans une certaine mesure, lexpansion du commerce mondial des céréales devrait écarter les craintes concernant les approvisionnements mondiaux mais les importateurs continuent à sinquiéter des mesures limitant les exportations. En ce qui concerne le rôle du marché mondial comme source de recettes pour les pays en développement, la forte expansion du volume de leur commerce sest accompagnée dun déclin des termes de léchange pour leurs produits, ce qui a considérablement érodé les gains attendus. De plus, la capacité des pays en développement dimporter des produits alimentaires est souvent limitée par leurs lourdes obligations concernant le service de la dette.
Le commerce des produits alimentaires a également un rôle important à jouer dans la stabilisation des approvisionnements et des prix intérieurs. En labsence de commerce, les fluctuations de la production intérieure devraient être compensées par des ajustements de la consommation et/ou des stocks. Le commerce permet donc de faire face aux fluctuations de la consommation et libère les pays dune partie du fardeau de la constitution de stocks. Toutefois, pour tous les importateurs (et exportateurs) réguliers, linstabilité des cours internationaux peut créer un problème pour les consommateurs, les producteurs, les transformateurs et les gouvernements.
Le commerce international a un effet déterminant sur laccès aux vivres car il influence les revenus et lemploi. Alors que des politiques commerciales plus libérales contribuent à terme à la croissance économique, la question principale du point de vue de la sécurité alimentaire est de savoir si celle-ci profite aux pauvres. Même si dans la plupart des pays en développement, il semble que les industries dexportation utilisent davantage de main-duvre que les industries de substitution des importations et que lemploi tende à augmenter dans les économies orientées vers lextérieur, les liaisons entre le commerce, la croissance, lemploi et la pauvreté ne sont pas évidentes car chacune de ces variables est influencée par dautres facteurs.
A condition que des politiques nationales soient en place pour assurer que les gains tirés du commerce profitent aux pauvres et pour protéger ces derniers des éventuels effets négatifs, la libéralisation du commerce peut jouer un rôle important dans lamélioration de la sécurité alimentaire même si lajustement au nouveau régime commercial ne va pas sans problèmes. Les estimations des effets de la libéralisation du commerce, y compris du Cycle dUruguay, diffèrent beaucoup, mais des études laissent à penser quil y aura dimportants gains de revenu dans les prochaines années. Si lon ajoute les effets, difficilement mesurables, des améliorations des règles commerciales et de lAccord du Cycle dUruguay sur les Services, le Cycle dUruguay devrait permettre daméliorer le niveau des revenus et donc la sécurité alimentaire. Les difficultés que les pays pourraient rencontrer pendant le processus de réforme ont été reconnues et les pays en développement bénéficient dun traitement spécial et différentiel, essentiellement sous la forme de périodes dajustement plus longues et dengagements de réduction moins lourds. Les accords du Cycle dUruguay reconnaissent aussi que pendant le processus de réforme, les pays les moins avancés et importateurs nets de produits alimentaires auront peut-être des difficultés à importer des denrées de base à des conditions raisonnables. En conséquence, il faut assurer lapplication rapide de la Décision du Cycle dUruguay relative aux Mesures concernant les effets négatifs possibles du programme de réforme sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires.
Il convient de noter que le Cycle dUruguay pourrait ne pas beaucoup modifier le volume de laide alimentaire; en effet, si les quantités liées à lécoulement des excédents sont susceptibles de baisser, le volume de laide accordée au titre de la décision susmentionnée pourrait bien augmenter. Les pays qui ne fournissent pas daide en nature devraient envisager activement de recourir à des transactions triangulaires daide alimentaire et à dautres moyens dassistance technique et financière pour accroître la productivité dans les pays touchés.
La libéralisation du commerce telle quelle est reflétée dans le Cycle dUruguay ne modifiera sans doute pas sensiblement la disponibilité nette de produits alimentaires au niveau mondial, car la réduction de la production dans les pays où les coûts sont élevés sera généralement compensée par une production accrue dans dautres pays. Etant donné lévolution probable à moyen terme en faveur des prix relatifs des produits alimentaires, les pays devraient envisager de réviser leurs politiques agricoles et de répercuter les accroissements des cours mondiaux sur leurs secteurs nationaux afin de stimuler les investissements dans la production vivrière. Les effets du Cycle dUruguay sur la stabilité des cours mondiaux des produits alimentaires sont incertains. Quatre facteurs entrent en jeu: les effets positifs de la tarification, les effets négatifs du déclin des stocks mondiaux de produits alimentaires, leffet positif résultant du fait quune part plus importante des stocks est détenue par le secteur privé et les effets incertains du déplacement des lieux de production.
Dans lensemble, en encourageant la croissance des revenus, en élargissant la gamme et la variété des produits alimentaires disponibles sur le marché local, en réduisant les risques liés aux fluctuations de la production intérieure et en permettant à la sécurité alimentaire mondiale dêtre assurée de manière plus efficace, la libéralisation du commerce contribue à améliorer la sécurité alimentaire dans ses trois dimensions qui sont laccès, la disponibilité et la stabilité. Toutefois, du fait de la libéralisation du commerce, on peut craindre que les changements structurels qui accompagnent la croissance économique entraînent une baisse de la sécurité alimentaire dans les pays et les ménages très pauvres incapables de profiter des nouvelles possibilités commerciales; les importations de produits alimentaires pourraient devenir plus coûteuses; linstabilité des cours mondiaux des produits alimentaires pourrait augmenter si les stocks mondiaux baissent; et dautres préoccupations non commerciales subsistent, par exemple les conséquences pour lenvironnement et lavenir des communautés rurales. Chaque pays doit faire en sorte que ces préoccupations éventuelles soient dûment prises en compte dans les politiques nationales.
Le commerce, lenvironnement, la durabilité et la sécurité alimentaire sont également étroitement liés. A long terme, la sécurité alimentaire mondiale dépend du maintien et de la conservation de la base de ressources nationales pour la production vivrière. Le commerce affecte lenvironnement de trois manières, à savoir: il augmente les revenus, ce qui stimule la demande de biens tirés de lenvironnement et les moyens de satisfaire cette demande; il modifie les lieux de production et de consommation; et lactivité commerciale elle-même utilise des ressources et peut entraîner des gaspillages et autres dommages pour lenvironnement.
On se préoccupe de plus en plus des effets des normes écologiques plus strictes sur le commerce des produits agricoles et donc aussi sur les gains à lexportation des pays en développement et sur leur sécurité alimentaire. La communauté internationale élabore actuellement de nouvelles politiques dans ce domaine. Ces questions figureront sans doute en bonne place dans les futures discussions commerciales multilatérales.
Le fait que le protectionnisme agricole soit encore très répandu plaide en faveur dune libéralisation commerciale plus poussée dans lagriculture, malgré les progrès déjà réalisés. En effet, lAccord du Cycle dUruguay sur lagriculture a reconnu que lobjectif à long terme des réductions progressives importantes de lappui et de la protection résultant dune réforme fondamentale était un processus permanent. Des négociations à ce sujet commenceront en 1999.
On définit ici lassistance alimentaire comme lensemble des initiatives prises par les gouvernements, souvent en collaboration avec des organisations non gouvernementales et des membres de la société civile et, lorsque nécessaire, avec laide extérieure, pour améliorer le bien-être nutritionnel de leurs citoyens qui, sans cela, nauraient pas accès à une nourriture suffisante pour mener une vie saine et active. On identifie les principales catégories de personnes qui ont besoin dune assistance alimentaire en insistant sur les principaux moyens den assurer lefficacité.
Ceux qui sont chroniquement sous-alimentés sont ceux qui ont un revenu bas et incertain, des avoirs limités, peu de compétences commercialisables et un pouvoir dachat insuffisant, et qui nont personne de haut placé pour les défendre. La faim est débilitante: manifestation de la pauvreté, elle est elle-même une cause de pauvreté. En portant remède à la faim qui sévit actuellement, on contribue à éradiquer la pauvreté et on progresse vers la sécurité alimentaire. Lassistance alimentaire apportée à des individus qui en ont un besoin critique à des stades particuliers de la vie (nouveau-nés, enfants en bas âge et femmes enceintes et mères allaitantes) ou à certaines époques de lannée, contribue effectivement à plus longue échéance à leur sécurité alimentaire. Et, bien sûr, pour ceux qui sont éprouvés par des catastrophes naturelles ou des crises dorigine humaine, la survie vient avant toute autre considération et lassistance alimentaire offre lunique espoir.
La faim existe même au milieu de laffluence et sévit dans les villes comme dans les campagnes. Néanmoins, elle est plus répandue et plus grave dans les sociétés pauvres et parmi ceux qui connaissent le moins labondance. La majorité de ceux qui en souffrent vivent dans des pays à faible revenu et à déficit vivrier où la population est encore essentiellement rurale. Il sagit surtout de pays dAfrique et dAsie du Sud.
Le tableau ci-après présente les estimations de la population vivant au-dessous du «seuil de la faim» dans les pays en développement (93 pays représentant 95 pour cent du total) et illustre quelques dimensions du problème:
Tableau POPULATION TOTALE ET POPULATION SOUS-ALIMENTÉE DES PAYS, | ||||
Groupe de pays (DEA moyenne/habitant) | 1990-1992 | 2010 | ||
Total | Sous-alimentés | Total | Sous-alimentés | |
(millions) | ||||
< 2 100 Calories | 402 | 191 | 286 | 141 |
2 100-2 500 Calories | 1 543 | 371 | 736 | 186 |
2 500-2 700 Calories | 332 | 47 | 1 933 | 220 |
> 2 700 Calories | 1 811 | 231 | 2 738 | 133 |
93 pays en developpement | 4 088 | 840 | 5 693 | 680 |
Ces estimations, qui rendent compte de la situation présente ou escomptée, prennent en considération les efforts entrepris pour améliorer la situation alimentaire, à savoir leffet positif de politiques et dinitiatives visant directement et indirectement à réduire la pauvreté et ses conséquences, et elles font donc apparaître la dimension de la tâche restante, maintenant et dans lavenir. Toutefois, dans la mesure où elles ne montrent pas la très grande fréquence de la malnutrition autre que la sous-alimentation chronique et où elles ne font pas apparaître le caractère essentiellement saisonnier ou temporaire des pénuries alimentaires ni la malnutrition liée aux situations durgence, elles sous-estiment lampleur de la tâche à venir.
La faim dans le monde est un problème local. Cest aux gouvernements quil appartient en dernier ressort dassurer la sécurité alimentaire de tous leurs citoyens. A léchelle de la planète, le volume des ressources provenant de sources intérieures (publiques et privées) dépasse de loin celui des ressources fournies par laide alimentaire internationale. Dans les pays en développement, la part des programmes dassistance alimentaire dans les dépenses totales des gouvernements est rarement inférieure à 5 pour cent; elle a même atteint 45 pour cent (en Egypte en 1980-1981). Dans de nombreux pays développés, des sommes encore plus grandes sont consacrées à des programmes nationaux dassistance alimentaire. Le Gouvernement fédéral des Etats-Unis, par exemple, a dépensé en 1995 quelque 38 milliards de dollars EU pour les 16 programmes dassistance alimentaire administrés par le Département de lagriculture des Etats-Unis. Laide alimentaire internationale, lorsquelle a atteint son maximum en 1988, se chiffrait quant à elle à moins de 4 milliards de dollars EU. Même dans les pays où laide alimentaire extérieure représente une proportion notable de lassistance alimentaire totale, les ressources nationales sont habituellement mobilisées en premier pour sauver les vies des victimes de situations durgence.
Dans les pays développés comme dans les pays en développement, les programmes nationaux daide alimentaire ont généralement été amputés pendant les années 80 et 90. Les politiques associées à la stabilisation macroéconomique dans de nombreux pays en développement ont fait monter les prix des produits alimentaires en raison des réalignements des taux de change et de la réduction des subventions pour lalimentation. Les coupes effectuées dans les dépenses et les services sociaux ont affecté les pauvres qui sont les plus tributaires du soutien du secteur public; les ajustements économiques ont entraîné une augmentation du chômage dans des secteurs particuliers ou à léchelle globale et une réduction du revenu de beaucoup. Récemment, on a commencé à insister à nouveau à léchelle internationale sur la réduction de la pauvreté et la mise en place de dispositifs de protection sociale pour ceux qui ne sont pas en mesure de tirer parti des possibilités offertes par des programmes de réforme économique.
La faim locale est un problème mondial. Le droit de chacun à la nourriture est énoncé dans un certain nombre de déclarations et de pactes des Nations Unies. Donnant suite à des considérations humanitaires fondamentales, la communauté internationale apporte une aide alimentaire pour aider à combattre la faim. Mais laide alimentaire a également diminué, tombant de presque 17 millions de tonnes (en équivalent céréales) en 1992-1993 à environ 9 millions de tonnes en 1994-1995, et de plus de 11 millions de tonnes à environ 6 millions de tonnes dans le cas des pays à faible revenu et à déficit vivrier. Dans lintervalle, laccroissement du nombre et de la complexité des situations durgence a eu pour résultat daccroître la part revenant aux secours (de 30 à 50 pour cent en deux décennies) dans laide alimentaire totale. En outre, laide alimentaire devient de moins en moins un moyen découler les excédents des pays industrialisés; elle prend de plus en plus la forme dachats en numéraire de produits alimentaires dans des pays en développement, et elle doit maintenant soutenir la concurrence dautres formes dassistance au développement dans des budgets daide restreints.
Outre la tendance générale à restreindre les budgets, une importante raison qui explique les modifications observées dans la structure et le volume aussi bien des programmes nationaux dassistance alimentaire que de laide alimentaire a été la perception générale que certains programmes passés ont été un gaspillage inefficace. De fait, des programmes daide alimentaire mal conçus et mis en uvre peuvent avoir des effets pervers sur le développement et la sécurité alimentaire future: ils peuvent entraîner une instabilité financière, faire baisser la production intérieure, manquer les bénéficiaires visés, créer une dépendance à légard de laide avec des habitudes alimentaires calquées sur létranger. Tout simplement, labus de lassistance alimentaire peut être contre-productif.
Les programmes futurs dassistance alimentaire devront être mieux conçus et devenir plus efficaces, afin de faire davantage avec peu de ressources. Le principe de base, qui est datteindre au juste moment ceux qui en ont le plus besoin et de manière à avoir des effets durables tout en apportant une aide à court terme, se traduit en trois objectifs.
Le premier objectif à nimporte quel moment est dapporter des secours rapides, appropriés et suffisants. Les principales victimes des situations durgence sont les femmes et les enfants. Il faut faire participer les femmes à la conception et à la gestion de lassistance alimentaire, et il faut quelles en deviennent les bénéficiaires directes. Les interventions durgence doivent se transformer progressivement, dès que possible, en aide au relèvement après la crise, afin daméliorer la faculté de récupération des ménages et des économies rurales et permettre au développement de simplanter. Là où lagriculture se révèle être la meilleure ou la seule voie possible pour soulager linsécurité alimentaire après la crise, lassistance alimentaire pour le redressement de ce secteur peut stimuler sa relance dans la période consécutive à une situation grave.
Ceux qui ont chroniquement faim ne peuvent guère réaliser leur potentiel humain ou économique. Le deuxième objectif est donc dapporter une assistance alimentaire à ceux qui, sans cela, nauraient pas accès à ce moyen de vie essentiel, en portant une attention spéciale à ceux qui ont des besoins critiques à certaines époques de lannée ou à certains stades du cycle biologique.
Le troisième objectif est de faire de lassistance alimentaire un outil de développement, en mettant au premier plan la population. Les interventions permettant daméliorer le statut nutritionnel peuvent bénéficier à ceux qui ont faim sur le plan de la santé, de léducation, de lacquisition de compétences et de la création de revenu. En ce sens, lassistance alimentaire relève de la médecine préventive.
Dans certains pays et dans certaines conditions, les efforts entrepris à léchelle nationale ne peuvent suffire. Le tableau montre les limites de la redistribution dans les pays où les DEA moyennes sont très faibles. Si lassistance alimentaire additionnelle était entièrement axée sur des individus qui en ont besoin et entièrement consommée par eux sous forme de produits alimentaires, le pouvoir dachat à transférer à ceux qui sont mal nourris équivaudrait en moyenne, à léchelle mondiale, à quelque 13 dollars EU par personne et par an. Leffort requis pour éliminer la faim actuelle et pour lempêcher dans lavenir dépasse de loin les ressources qui lui sont actuellement consacrées. Mais on ne peut dire quil soit impossible à léchelle mondiale. Cela devrait encourager tous les gouvernements et leurs partenaires engagés dans des programmes daide humanitaire et sociale à redoubler defforts pour identifier ceux qui ont faim et les lieux où ils se trouvent, et pour concevoir des programmes ayant un bon rapport coût-efficacité en vue de leur apporter directement une assistance alimentaire. Le flux de ressources nationales et internationales dans des programmes restructurés dassistance alimentaire accélérerait lui-même le moment, au XXIe siècle, où la nécessité de tels programmes se ferait nettement moins sentir.
Les perspectives actuelles, telles que présentées dans le document du Sommet mondial de lalimentation (SMA) no 1, Alimentation, agriculture et sécurité alimentaire: évolution depuis la Conférence mondiale de lalimentation et perspectives, font apparaître que, en lan 2010, dans un grand nombre de pays en développement, les disponibilités alimentaires par habitant (mesurées par leurs disponibilités énergétiques alimentaires [DEA] moyennes indicateur largement utilisé de la consommation alimentaire) seraient encore totalement insuffisantes pour réduire sensiblement lincidence de la sous-alimentation. De fait, un nombre obstinément élevé de personnes environ 680 millions en 2010 continueraient dêtre affectées, ce qui représenterait une très faible réduction par rapport aux 840 millions des années 1990-1992.
Un résultat moins sombre ne peut être escompté que dune combinaison de deux facteurs: un partage plus équitable des possibilités et des droits à un plus large accès à une nourriture suffisante, et une augmentation plus rapide des disponibilités alimentaires et par conséquent des DEA. Fondamentalement, il sagit surtout daméliorer laccès à la nourriture, mais aucune solution ne peut se substituer à laccroissement des disponibilités alimentaires dans les pays où les DEA moyennes sont si faibles quune grande proportion de la population est sous-alimentée et quune minorité seulement du reste a une consommation alimentaire supérieure aux niveaux recommandés. Sur le plan économique, ces pays sont aussi fondamentalement tributaires de lagriculture.
Une DEA de 2 700 Calories correspond à une situation où, à condition que laccès aux disponibilités alimentaires soit suffisamment équitable, on peut faire en sorte que seulement 3 pour cent ou moins de la population soit sous-alimentée. Mais il semble que de nombreux pays ne seront pas à même datteindre ce niveau de DEA avant lan 2010, et ils compteront au total 3 milliards dhabitants dont près de 550 millions de mal nourris. De fait, pour ceux dentre eux où les DEA sont actuellement très faibles, il faudrait, pour atteindre lobjectif de 2 700 Calories en lan 2010, que la consommation alimentaire globale augmente à raison de 5 pour cent par an ou même davantage, selon les tendances démographiques. Ce rythme de croissance suppose des perspectives économiques globales bien meilleures que ce que lon peut actuellement raisonnablement escompter pour nombre de ces pays (par exemple, selon la plus récente évaluation faite par la Banque mondiale, le revenu par habitant naugmentera que de 0,9 pour cent par an en Afrique subsaharienne où se trouve la majorité des pays à très faible DEA). On analyse dans ce document à la lumière de ces considérations la nature, les conditions et les implications dun objectif réalisable de réduction de la sous-alimentation.
Laccroissement de la production alimentaire mondiale requis pour répondre à la demande accrue que cela suppose est faible par exemple 2 pour cent de la consommation mondiale de céréales en lan 2010 pour cet élément du panier alimentaire. Toutefois, ce chiffre global modeste résulte dune croissance rapide des disponibilités alimentaires globales dans plusieurs pays à faible DEA. Lexpérience pratique acquise dans le passé démontre quun certain nombre de pays considérés sur des périodes dune à deux dizaines dannées comme cela se justifie ici aux fins de la comparaison ont été en mesure daccroître rapidement leur consommation et/ou production alimentaire, dans la plupart des cas durant des périodes de redressement après des crises. Nombre des pays où il faudra accélérer dans lavenir la croissance des disponibilités alimentaires partent de situations de crise ou du même genre, reflétant dans une large mesure la confluence de facteurs négatifs (guerre ou conditions analogues, catastrophes naturelles, économiques ou politiques). Le redressement consécutif peut créer les conditions préalables du succès de politiques visant à améliorer la sécurité alimentaire à un rythme accéléré.
Lanalyse montre quune croissance accélérée des disponibilités alimentaires dans les pays à faible DEA exige la combinaison dune croissance plus rapide et plus équitable des revenus avec en particulier un développement agricole et rural vigoureux comme il convient aux pays qui sont très tributaires de lagriculture avec des améliorations particulières de laide sociale et de laide alimentaire. La production alimentaire intérieure et les importations nettes doivent contribuer à stimuler des progrès dépassant ceux projetés dans létude Agriculture mondiale: Horizon 2010 (WAT2010) (FAO, 1995).
Le présent document conclut quil est faisable et réaliste de viser une réduction du nombre de personnes sous-alimentées en lan 2010 à environ la moitié de ce quil était au début des années 90, en assurant que tous les pays qui nauraient pas sans cela atteint le niveau de 2 700 Calories réussissent à accélérer la croissance de leurs disponibilités alimentaires par habitant qui devrait atteindre 1 pour cent par an, progression modulée de manière à assurer un minimum de 2 300 Calories dans nimporte quel pays, en considérant le chiffre de 2 700 Calories comme un niveau autorisant effectivement des progrès plus importants grâce à la réduction de linégalité daccès (ordre de priorité plus juste) à des disponibilités qui pourraient même être encore plus importantes.
Selon lobjectif ainsi défini, le nombre de personnes sous-alimentées dans les pays en développement tomberait à quelque 440 millions en lan 2010 et cet effectif pourrait être encore moindre si laccès à la nourriture devenait plus équitable, notamment dans les pays où lobjectif est de plus de 2 700 Calories. Mais cela ne signifie pas que lobjectif de la projection de base décrit dans le document du SMA no 1 sera lui-même atteint en labsence de politiques déterminées et bien adaptées à tous les niveaux.
Les causes de linsécurité alimentaire sont nombreuses et interdépendantes. Les réponses politiques au problème seront variables dun pays à lautre, mais quelques généralisations sont possibles quant aux ingrédients essentiels du succès (voir les documents du SMA nos 1, 2 et 3). Parmi les facteurs conditionnant laccroissement des besoins alimentaires, la population sera, en combinaison avec les différents régimes diététiques observables dans lensemble du monde, le plus important jusquà une époque où lon parviendra à la stabilisation (voir le document du SMA no 4).
La paix à lintérieur de la société et entre les nations vient au premier plan. Maîtrise, transparence, participation, degré croissant dégalité entre les hommes et les femmes sont des facteurs déquité, defficience et de stabilité sociale. Le potentiel des initiatives privées doit être complètement libéré dans un environnement politique favorable qui dépend lui-même de la stabilité macroéconomique (voir le document du SMA no 3).
Un gouvernement ne peut être remplacé dans son rôle de fournisseur de biens collectifs que ce soit directement ou indirectement par lintermédiaire des agents indépendants nécessaires pour assurer lefficacité et lefficience pour la mise en place dinfrastructures, de services de recherche, déducation et de santé, ainsi que pour la création de conditions propres au bon fonctionnement des marchés des biens, services et facteurs (documents du SMA nos 3, 8, 9 et 10).
Réduire la pauvreté et, finalement, la faire disparaître est la condition fondamentale dune sécurité alimentaire durable au niveau des ménages. Une politique économique propre à créer des possibilités demploi avec une juste rémunération du travail, et à élargir et assurer laccès aux ressources productives spécialement les terres et les eaux , ainsi quune politique sociale permettant de développer les compétences et les capacités humaines, en portant une attention particulière aux zones et aux populations rurales, sont des bases indispensables dans nimporte quelle société. Pour réduire linsécurité alimentaire, des politiques axées sur la population doivent sattaquer à ses causes aussi multiples que diverses et aux manifestations de la malnutrition aux niveaux local et individuel, en insistant clairement sur les femmes qui revêtent une importance critique dans le complexe nutritionnel (voir les documents du SMA nos 2, 3, 5 et 6).
Linsécurité alimentaire continuera daffecter des centaines de millions de personnes pendant des années. Laide alimentaire, sous des formes permettant déviter les maux du gaspillage, de la dépendance et de labsence de durabilité économique, devrait être fournie en mobilisant les gouvernements, la société civile et la solidarité internationale. La préparation et la réaction en temps voulu aux situations durgence restent une priorité, une place de premier plan devant être faite à la transition des secours au redressement et au développement (voir les documents du SMA nos 5 et 13).
Le rôle capital du commerce, à léchelle nationale et internationale, pour favoriser la sécurité alimentaire doit être reconnu et il y a lieu de faciliter le flux de la nourriture des zones excédentaires vers les zones déficitaires, ainsi que léchange de biens et de services, au profit mutuel des partenaires commerciaux. Les coûts sociaux pour des secteurs ou des régions de chocs économiques imputables au commerce sont toutefois réels: on ne peut laisser sans soutien ceux qui sont vulnérables et dans un état dinsécurité alimentaire parce que de nouvelles possibilités ont été créées pour dautres (voir le document du SMA no 12).
Des politiques propres à assurer un développement agricole et rural durable simposent pour atteindre lobjectif de la sécurité alimentaire universelle, pour quil soit possible daccroître la production alimentaire à des prix abordables tout en gérant les ressources naturelles dune manière respectueuse de lenvironnement. Il est indispensable de trouver un équilibre entre les priorités, à savoir dune part des progrès rapides, durables et économiquement valables de la production alimentaire des zones à potentiel élevé et, de lautre, la mise en mesure de la population dépendante de lagriculture dans des zones à faible potentiel daccroître ses possibilités de gain dans et hors exploitation et daccéder à la nourriture sans dégrader la base de ressources. Les concepts de la nouvelle révolution verte, dutilisation et de contrôle plus efficaces de leau, et dadaptation de toute linfrastructure et de ladministration de la chaîne alimentaire aux changements provoqués en particulier par lurbanisation rapide, ont un rôle essentiel à jouer (voir les documents du SMA nos 1, 5, 6, 7, 8, 9 et 11).
Le volume global des ressources à destiner dans les pays en développement à linvestissement net dans la production agricole primaire, dans les secteurs consécutifs à la production, dans le développement de linfrastructure rurale et dans le développement humain nest pas extraordinairement supérieur à ce quil a fallu dans le passé, mais la répartition par région fait apparaître un accroissement important des besoins dans la plus grande partie de lAfrique, de lAmérique latine et des Caraïbes, tandis que linvestissement brut devra augmenter pour remplacer un capital social croissant (voir le document du SMA no 10). Le présent document montre que, dans les pays qui ont actuellement des DEA très faibles et des taux élevés de sous-alimentation, ces investissements devraient être de quelque 20 à 30 pour cent supérieurs à ceux requis selon les projections de WAT2010, pour soutenir la croissance accélérée du secteur agricole dont ils ont besoin pour réduire la pauvreté rurale et accroître les disponibilités alimentaires dans la mesure requise pour atteindre lobjectif encore modeste de 2 300-2 700 Calories en lan 2010, comme envisagé plus haut.
Des politiques sont essentielles pour créer les conditions qui permettront aux ressources privées qui sont la source principale daffluer et dêtre utilisées de façon fructueuse. Linvestissement public a toutefois un rôle indispensable à jouer et les allocations faites aux divers secteurs doivent refléter la nécessité de remédier à la coûteuse négligence du développement agricole et rural dans les priorités passées. Le renforcement, la plus grande efficacité et le recentrage de la recherche agricole sont reconnus être une priorité fondamentale de la production alimentaire, de la réduction de la pauvreté et de lamélioration de la sécurité alimentaire (voir les documents du SMA nos 9 et 10).
Lincidence de la sous-alimentation est définie comme le pourcentage de la population qui na pas accès à une quantité de nourriture suffisante pour satisfaire ses besoins en disponibilité énergétique alimentaire (DEA) (Calories). Bien que lon puisse prévoir une diminution de la proportion de la population mondiale chroniquement sous-alimentée, comme cela est le cas depuis plusieurs décennies, la sous-alimentation reste très répandue, notamment dans certaines régions. En outre, daprès les projections établies jusquen 2010, il est peu probable que le nombre absolu de personnes chroniquement sous-alimentées varie sensiblement si des mesures concertées et résolues ne sont pas adoptées.
Laccroissement démographique, qui est le principal facteur à lorigine de laugmentation des besoins alimentaires, contribue à accroître la pression qui sexerce sur les ressources naturelles (voir carte sur la dégradation des terres). Les pays confrontés à un accroissement démographique rapide doivent relever des défis particulièrement difficiles pour assurer leur sécurité alimentaire. La stabilisation rapide de la population mondiale est une condition de la sécurité alimentaire durable. (Source: Nations Unies)
La structure des modes dalimentation diffère sensiblement dune région à lautre. Les changements de population associés à chaque catégorie varient considérablement. Les régimes alimentaires à lintérieur des pays se modifient aussi lentement avec le temps.
Si la DEA (Disponibilité énergétique alimentaire moyenne, par habitant et par jour, mesurée en Calories) a augmenté sensiblement en moyenne dans le monde depuis 1970, dans de nombreux pays les niveaux demeurent très bas. Sauf si des efforts déterminés modifient le cours des choses, la sous-alimentation chronique et dautres formes de malnutrition resteront très répandues pendant des dizaines dannées encore.
Le problème de la carence en vitamine A est lun des principaux problèmes de sous-alimentation, dû essentiellement à un régime alimentaire insuffisamment varié. Le nombre denfants dâge préscolaire vivant dans des régions confrontées à des problèmes de carence en vitamine A, avec les conséquences que cela comporte (cécité, accroissement de la mortalité, diminution du degré dimmunité), est estimé à quelque 200 millions. Tous les ans, 250 000 à 500 000 enfants deviennent aveugles et les deux tiers meurent quelques mois plus tard. (Source: Organisation mondiale de la santé)
Un environnement propice à une croissance économique équitablement partagée est indispensable pour atténuer la pauvreté et permettre à chacun davoir accès à la nourriture. Un très faible produit intérieur brut (PIB) par habitant et une sous-alimentation chronique généralisée vont généralement de pair avec une forte dépendance vis-à-vis de lagriculture, avec le rôle économique majeur de ce secteur et avec une part élevée du PIB agricole dans le PIB total (ainsi quune proportion élevée de la population rurale par rapport à la population urbaine). Il est indispensable douvrir le secteur agricole au progrès économique pour accroître les revenus des pauvres et favoriser laccroissement des disponibilités alimentaires. (Source: Banque mondiale)
Dans la grande majorité des pays, la production alimentaire a fortement augmenté au cours de la période considérée et les disponibilités alimentaires mondiales ont augmenté plus vite que la population, sans que les prix relatifs des denrées alimentaires naugmentent sur une longue période. La recherche, linvestissement et ladoption de politiques pertinentes sont des conditions indispensables pour assurer les besoins futurs en nourriture de la population mondiale.
La production alimentaire a augmenté plus vite que la population dans le monde, mais pas dans tous les pays. Nombre de pays sont mal armés pour acquitter une facture toujours plus élevée des importations de nourriture (voir carte sur le degré de dépendance vis-à-vis des importations de nourriture).
Sous leffet de facteurs tels que la révolution verte, des progrès spectaculaires ont été obtenus en ce qui concerne les rendements céréaliers ces 30 dernières années. Les gains de productivité ne sont cependant pas les mêmes dans toutes les régions. Le progrès ne peut être continu que si la recherche et lenseignement agricoles sont assurés en permanence et que les principes de la participation des populations locales et du développement rural durable sont respectés. Bien que cette carte ne décrive les rendements que dune seule denrée alimentaire importante (les céréales assurent 51 pour cent de lapport en Calories et 47 pour cent de lapport en protéines dune ration alimentaire moyenne), des gains de productivité sont indispensables pour toutes les autres grandes catégories de denrées alimentaires également. Le programme de recherche est aussi vaste quil a dimportance.
Une terre irriguée peut produire trois à 10 fois plus de produits alimentaires en valeur quune terre non irriguée (grâce à des rendements accrus ou à la culture de produits à valeur plus élevée). Une utilisation efficace des sources dirrigation tant existantes que potentielles, de même quune amélioration de lhydraulique agricole en général, sont indispensables pour améliorer la productivité de lagriculture et réduire les variations de production.
Le degré dintensité dutilisation de leau varie considérablement à lintérieur dun même pays, mais aussi dun pays à lautre.
Lutilisation de plus de 100 pour cent des ressources en eau renouvelables donne à penser que leau est désormais un
obstacle à la production dans les endroits où les ressources en eau sépuisent plus vite quelles ne se reconstituent. A
linverse, un faible degré dutilisation de leau indique que celle-ci pourrait être mieux employée. Lagriculture est un secteur
gros consommateur deau dans de nombreux pays.
Laccroissement de la consommation dautres secteurs villes en particulier exige absolument une utilisation efficace de
leau. Ladoption de technologies et de politiques mieux adaptées, et la mise en oeuvre des moyens et des incitations
nécessaires pour les appliquer, rendraient plus efficace lutilisation de leau dans lagriculture et la production alimentaire.
Les activités humaines entraînent souvent une dégradation des ressources en terre. Or, celles-ci sont la condition même dune sécurité alimentaire durable. Lévaluation mondiale de la dégradation anthropique des sols (GLASOD) a fait apparaître que 15 pour cent des terres de la planète sont touchées (13 pour cent légèrement ou moyennement et 2 pour cent gravement ou très gravement), essentiellement pour les raisons suivantes: érosion, perte déléments fertilisants, salinisation et compactage. Ces problèmes entraînent souvent une baisse des rendements. La conservation et la régénération des terres sont des aspects essentiels du développement agricole durable. Si lon trouve des sols gravement dégradés dans la plupart des régions du monde, cest dans les pays dont le revenu est le plus tributaire de lagriculture que les conséquences économiques de la dégradation des sols risquent dêtre les plus graves. (Source: GLASOD)
Le poisson est une importante source de protéines, et les pêches et laqua-culture conditionnent la sécurité alimentaire dans de
nombreux pays, notamment pour les communautés pauvres des zones côtières. Or, la surexploitation menace de nombreux
stocks, quil sagisse de la pêche en mer ou de la pêche en eau douce, en partie parce que les pêches restent caractérisées
par la liberté daccès. Il importe de prendre des mesures efficaces de conservation et de gestion durable des pêches, tant
continentales que maritimes, aux niveaux national et international pour les ressources biologiques aquatiques afin de pouvoir
continuer de répondre aux besoins nutritionnels de la population mondiale. En outre, il est possible dexploiter davantage le
potentiel des
pêches continentales et de laquaculture.
Dans le monde, les forêts représentent une source de revenus, demplois et de nourriture, et présentent dautres avantages, notamment sur les plans de lhabitat et de la protection de lenvironnement. Dans de nombreuses régions, le déboisement a atteint un rythme inquiétant. Pour améliorer laménagement des forêts, il faut mettre laccent sur leur utilisation durable.
Tous les pays ont recours à divers degrés aux importations de nourriture pour satisfaire les demandes de leur population sur le plan de la quantité et de la diversité; dans les pays pauvres, où les importations de nourriture représentent une part importante du commerce extérieur, la sécurité alimentaire dépend de la capacité à importer des vivres.
Les populations de nombreux pays en situation dinsécurité alimentaire sont essentiellement rurales. Or, lurbanisation progresse à un rythme rapide dans les pays en développement, et plus de 60 millions de personnes viennent grossir chaque année la population des villes. Les conséquences de lexode rural sont préoccupantes dans de nombreux pays. La transformation des systèmes de production, de traitement, de commercialisation, de transport et de distribution que suppose une urbanisation rapide représente un important défi pour tout le secteur alimentaire. (Source: Nations Unies)
Le commerce extérieur permet aux pays déchanger ce quils possèdent contre ce dont ils ont besoin. La libéralisation des échanges favorise la croissance économique, accroît le revenu global et représente une source demplois avec le temps. Néanmoins, les avantages ne sont pas automatiques et certains groupes peuvent ne pas en bénéficier dans un premier temps. Pour que le revenu global augmente, un pays doit disposer de systèmes de production adaptables et de politiques incitatives, ainsi que de moyens de protéger les catégories de la population qui supporteront les conséquences de lajustement que suppose la libéralisation des échanges. (Source: Nations Unies)
Les troubles civils et les conflits armés, qui provoquent souvent des flux de réfugiés, outre quils font obstacle à lamélioration de la sécurité alimentaire, sont même une importante cause dinsécurité dans ce domaine. Dimportants flux de réfugiés peuvent en outre causer des problèmes de sécurité alimentaire dans des régions accueillant déjà des réfugiés. Un monde pacifique est une condition essentielle de la sécurité alimentaire. (Source: Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés)
Laide alimentaire internationale est indispensable aux secours durgence en périodes de crise et peut appuyer considérablement les activités de développement lorsquon lutilise avec précaution de sorte que les marchés restent pour les producteurs de denrées alimentaires une incitation à produire davantage. A partir de lexpérience acquise dans lévaluation des conséquences de laide alimentaire, on a conçu de nouveaux moyens de fournir, en temps de crise alimentaire, une assistance qui limite au minimum les effets négatifs possibles sur le secteur agricole des pays bénéficiaires ou les habitudes de consommation alimentaire non durables.