FAO/SMIAR: Rapport
sur l'Afrique - Mai 1997
PREMIERE PARTIE: VUE D'ENSEMBLE
Malgré les récentes conditions climatiques défavorables
en Afrique de l'Est et la poursuite des troubles civils dans la région
des Grands Lacs, les perspectives générales des approvisionnements
vivriers concernant l'Afrique subsaharienne se sont relativement améliorées
grâce à de bonnes récoltes dans plusieurs régions
au cours de l'année 1996 et aux perspectives favorables des récoltes
céréalières de la campagne 1996/97, que l'on devrait
commencer à rentrer à partir du mois de mai en Afrique australe.
Cependant, les difficultés d'approvisionnement alimentaire persistent
dans de nombreux pays de la sous-région, par suite des troubles
civils, de la sécheresse, des inondations ou d'une combinaison de
ces facteurs, et des millions de personnes en sont affectées. En
Afrique de l'Est, les conditions climatiques défavorables au cours
des derniers mois ont créé de grosses difficultés
d'approvisionnement alimentaire touchant de vastes secteurs au Kenya, en
Tanzanie, en Somalie, en Ethiopie et en Ouganda; plus de 3 millions de
personnes y sont tributaires des secours vivriers. Dans la région
des Grands Lacs, les troubles civils sont à l'origine d'un besoin
persistant d'aide alimentaire. Dans l'est du Zaïre, notamment dans
les régions inaccessibles, les réfugiés rwandais connaissent
la famine. En Afrique occidentale, les problèmes d'approvisionnement
alimentaire persistent toujours au Libéria et en Sierra Leone, malgré
une certaine reprise de la production, tandis que dans le Sahel, l'absence
de précipitations a entraîné des difficultés
localisées d'approvisionnement alimentaire dans plusieurs pays.
Les besoins globaux d'aide alimentaire concernant l'Afrique subsaharienne
pour 1997 seront nettement inférieurs à ceux de 1996; ils
demeurent toutefois élevés, puisque la FAO les estime à
1,9 million de tonnes. Mi-avril, les contributions d'aide alimentaire totalisaient
1,5 million de tonnes, dont 800 000 tonnes ont déjà été
livrées. Compte tenu de la tendance à la baisse de l'aide
alimentaire mondiale au cours des dernières années - tendance
qui semble se confirmer pour l'avenir -, mais aussi de la faible capacité
d'importations commerciales de l'ensemble de la sous-région liées
aux difficultés de balance des paiements, il importe que les pays
à faible revenu et à déficit alimentaire de l'Afrique
subsaharienne prennent d'urgence des mesures destinées à
augmenter leur production alimentaire afin de préserver la sécurité
alimentaire de leurs populations. Le Programme spécial de sécurité
alimentaire de la FAO (voir l'encadré, page 6) a pour objet d'aider
en particulier ces pays à entreprendre un tel effort; ce programme
fixe comme priorités une meilleure exploitation des ressources hydrographiques,
l'intensification et la diversification de la production, et l'identification
et l'élimination des entraves socio-économiques à
l'augmentation de la production alimentaire.
SITUATION ALARMANTE AU PLAN
HUMANITAIRE DANS L'EST DU ZAIRE ET PRECARITE DES PERSPECTIVES DANS D'AUTRES
SECTEURS DE LA REGION DES GRANDS LACS
Dans l'est du Zaïre, la situation alimentaire des réfugiés
rwandais est des plus alarmantes. C'est par centaines qu'ils meurent de
faim et de maladie, tandis que des dizaines de milliers d'entre eux souffrent
de malnutrition avancée. La poursuite des troubles civils, la faiblesse
des infrastructures, l'insécurité et l'obstruction opposée
par la population locale rendent très difficiles les efforts des
organismes de secours pour fournir une aide alimentaire et médicale
aux réfugiés, qui sont très largement dispersés
et parfois impossibles à atteindre.
Les quelque 80 000 réfugiés qui s'étaient fixés
dans les camps à proximité de Kisangani ont récemment
été forcés de fuir, et sont aujourd'hui dispersés
dans les forêts environnantes sans qu'il soit possible de les localiser
avec précision. Les préparatifs qui avaient été
amorcés par les organismes de secours en vue d'un rapatriement de
grande envergure ont été sérieusement compromis par
la remise en cause du projet, de la part des autorités, de même
que par le pillage des secours vivriers par les populations locales. Le
27 avril 1997, les chefs rebelles ont accordé aux organismes de
secours 60 jours pour rapatrier tous les réfugiés rwandais.
La tâche n'est pas mince, compte tenu du fait que les réfugiés
sont très dispersés et que l'infrastructure locale est en
piteux état. De plus, il faut compter avec le rapatriement prévu,
vers Goma et Bukavu, d'environ 20 000 Zaïrois déplacés
de l'intérieur. Cette opération complexe nécessitera
un soutien logistique de même que d'énormes quantités
de carburant, lequel manque actuellement à Kisangani et à
Goma. Une aide substantielle de la part des donateurs s'impose donc de
façon urgente afin d'accélérer l'opération,
d'atténuer les souffrances humaines et d'éviter la famine
sur grande échelle.
Au Burundi, la situation politique et de sécurité
reste extrêmement instable, avec encore des foyers de combats et
des actes de violence dans plusieurs secteurs du pays. On estime qu'en
mars, près de 500 000 personnes avaient déjà été
déplacées ou dispersées et que 300 000 personnes environ
séjournaient dans des camps de regroupement établis par le
gouvernement afin de relocaliser les populations provenant de zones dangereuses.
La production agricole souffre de l'insécurité qui règne
dans les régions touchées par le conflit. Quant aux approvisionnements
alimentaires, ils restent précaires en raison d'une mauvaise première
récolte pour 1997, en raison de l'intensification des troubles civils
fin 1996, mais aussi de conditions climatiques défavorables par
endroits et de pénuries de semences, d'engrais et de pesticides
liées aux sanctions économiques imposées par les pays
voisins. Ajoutons que, jusqu'à très récemment, l'approvisionnement
en denrées alimentaires a été entravé par les
réductions d'importations de céréales et d'autres
vivres résultant de l'embargo économique. Tous ces facteurs
ont contribué à la brusque augmentation des prix des denrées
vivrières, en particulier des haricots, des bananes et des produits
d'importation. La situation alimentaire d'importantes tranches de la population
s'en est trouvée aggravée. Ces catégories demeurent
tributaires de l'assistance vivrière et l'on observe une augmentation
de la malnutrition chez les enfants séjournant dans les camps de
regroupement de même que chez les personnes déplacées.
Les approvisionnements alimentaires demeurent précaires au Rwanda
où environ 2,6 millions de personnes, soit un tiers de la population,
ont besoin d'aide alimentaire. En dépit d'une amélioration
générale, la production alimentaire liée à
la première campagne de 1997 est restée inférieure
à celle de la période précédant les troubles
civils. La récolte de haricots, principale denrée de la campagne,
a été durement affectée par une surabondance de pluies,
tandis que dans les préfectures du sud la sécheresse était
à l'origine de récoltes médiocres. Ces facteurs, associés
au retour massif, fin 1996, de réfugiés qui n'avaient pu
pratiquer aucune culture au cours de la dernière campagne, expliquent
l'augmentation des besoins d'aide alimentaire. La détérioration
de la sécurité au cours des derniers mois, notamment dans
les quatre préfectures qui bordent le Zaïre, a suscité
des difficultés de distribution qui n'ont guère amélioré
la situation alimentaire. En outre, il faut s'attendre à ce que
l'insécurité ait perturbé les activités agricoles
dans certains secteurs de ces préfectures.
EN AFRIQUE DE L'EST, GRAVES
PENURIES ALIMENTAIRES PROVOQUEES PAR DES CONDITIONS METEOROLOGIQUES DEFAVORABLES
La sécheresse aiguë qui a sévi au cours des derniers
mois, de même que les inondations qui ont frappé certaines
régions, sont à l'origine des graves problèmes d'approvisionnement
alimentaire que connaissent plusieurs pays d'Afrique orientale.
Au Kenya, la situation des approvisionnements alimentaires est
critique dans les provinces du nord-est et de l'est ainsi que dans certaines
parties des provinces centrales et côtières, affectées
par la sécheresse durant la campagne des "petites pluies" de 1996/97.
Dans les régions de pâturage de ces provinces, les petites
pluies sont essentielles à la reconstitution des réserves
d'eau et des pâturages après la longue saison sèche,
tandis que dans les zones de culture, la récolte de la campagne
des petites pluies fournit la plus grande partie des approvisionnements
vivriers annuels. Le gouvernement, après avoir déclaré
la sécheresse désastre national, a lancé un appel
à la communauté internationale pour lui demander secours
jusqu'à la prochaine récolte, au mois de juillet. On estime
en effet que 1,4 million de personnes nécessitent une aide alimentaire,
en particulier dans les districts pastoraux de Wajir, Garissa, Isiolo,
Mandera et Marsabit, où 500 000 personnes - soit près de
90 pour cent de la population - souffrent de l'insécurité
alimentaire en raison d'une augmentation marquée du taux de mortalité
du bétail. En outre, on a enregistré de mauvaises récoltes
dans les districts agricoles marginaux de Machakos, Makueni, Kitui, Mwingi,
Mbeere et Tharaka-Nithi de la province orientale, ainsi que dans les districts
de Kajiado et Taita Taveta de la vallée du Rift et des provinces
côtières. Le prix du maïs a beaucoup augmenté
dans ces régions tandis que baissait celui du bétail, affectant
le pouvoir d'achat des pasteurs. On observe une augmentation de la malnutrition
et une dégradation des conditions de santé; par ailleurs,
la pénurie d'eau rend nécessaire une assistance permettant
de répondre aux besoins de la population et du bétail, de
même qu'une assistance portant sur les médicaments vétérinaires
destinés au bétail et les semences destinées à
la saison des "grandes pluies" de 1997, déjà partiellement
amorcée.
Compte tenu des trois mauvaises campagnes successives dans de nombreux
districts, des précipitations suffisamment abondantes sont essentielles
à l'amélioration de la sécurité alimentaire
dans les provinces septentrionales et orientales. Grâce aux bonnes
pluies du mois d'avril, les prévisions initiales sont favorables;
cependant, des précipitations substantielles demeurent nécessaires
tout au long de la période de croissance.
En Tanzanie, les petites pluies (vuli) ont en grande partie été
insuffisantes dans les régions de pluies bi-modales du nord, du
nord-est et de la côte, sur le continent, de même que dans
les îles de Zanzibar et de Pemba, entraînant de graves difficultés
alimentaires tant pour les cultivateurs que pour les éleveurs de
bétail. Sur le continent, on estime à 700 000 le nombre de
personnes nécessitant une aide alimentaire, avec des chiffres comparables
pour les îles. Le gouvernement a demandé que soient acheminés
des secours vivriers à la population touchée par la sécheresse.
En outre, de graves inondations ont frappé Lindi, dans le sud-est,
entraînant le déplacement d'un grand nombre de familles avec,
comme corollaire, d'importantes pertes matérielles.
Dans les régions de pluie uni-modale du centre, du sud et du
sud-ouest, le régime des précipitations pour la période
des grandes pluies de 1996/97 (de novembre à avril) n'a pas été
normal et constitue une source d'inquiétude. les pluies, qui avaient
commencé tardivement, sont restées sporadiques pendant les
deux premiers mois, pour être suivies d'une longue période
sèche au mois de décembre et reprendre à nouveau de
façon sporadique et en quantité inférieure à
la moyenne dans la plupart des zones de culture au mois de février
et début mars, affectant les rendements potentiels. Les fortes pluies
qui sont tombées en mars et début avril, causant des inondations
dans certaines régions méridionales, ont été
trop tardives pour empêcher la détérioration des rendements.
Compte tenu de la situation déjà précaire des approvisionnements
alimentaires, due à la mauvaise récolte de petites pluies
liée à la sécheresse, il est recommandé aux
autorités nationales et à la communauté internationale
des donateurs de prévoir des plans d'urgence afin de parer au risque
de difficultés majeures en matière d'approvisionnement.
En Ouganda, on enregistre des difficultés d'approvisionnement
alimentaire dans les districts de l'est et du nord-est, où la récolte
de petites pluies de 1997 a considérablement souffert de l'insuffisance
des précipitations, ainsi que dans les districts septentrionaux
où l'insécurité et les conflits civils ont entraîné
des déplacements massifs de la population locale et la perturbation
des activités agricoles. Dans l'est et le nord-est, la production
alimentaire a été entravée par des pluies tardives
ou inférieures à la normale durant la campagne, ainsi que
par des inondations dans certaines régions et une infestation par
la mosaïque du manioc dans d'autres secteurs. Les zones les plus touchées
ont été les districts de Palissa, Kumi, Tororo, Mbale et
Soroti, où la sécheresse a été la plus longue,
ainsi que dans les districts à déficit alimentaire chronique
de Kotido et de Moroto, dans la région de Karamoja. On estime à
341 000 le nombre des personnes le plus directement affectées et
nécessitant des secours alimentaires jusqu'à la prochaine
récolte principale, à partir du mois de juin. Les besoins
alimentaires ont été estimés à 12 276 tonnes
de céréales et 3 825 tonnes de vivres non céréalières.
Dans les districts septentrionaux comme dans le district occidental de
Kasese, déchirés par les conflits civils, le nombre total
de personnes déplacées nécessitant des secours vivriers
serait d'environ 150 000. Les besoins alimentaires destinés à
ces populations seraient de 18 000 tonnes de céréales et
de 3 825 tonnes de vivres non céréalières, sur une
période de dix mois. En outre, il faut prévoir une aide alimentaire
pour quelque 269 000 personnes actuellement réfugiées en
Ouganda, principalement à partir du Soudan.
En Ethiopie, les régions de pâturage de l'est et
du sud bordant la Somalie et le Kenya, qui ont une campagne de petites
pluies entre octobre et décembre, ont souffert d'une rapide détérioration
des conditions de pâturage due à des précipitations
irrégulières et très inférieures à la
moyenne, à des pénuries d'approvisionnement en eau et à
des conditions défavorables concernant le bétail. Les zones
les plus touchées sont celles de Degehabur et de Liban de la région
Somali, et les waredas de Dire et de Yabello dans la zone de Borena. Les
approvisionnements vivriers sont très difficiles. Le prix des céréales
et de l'eau y a considérablement augmenté, tandis que les
cours du bétail sont tombés nettement en dessous de la vente
de survie. Le gouvernement a demandé qu'une aide alimentaire et
non alimentaire soit prodiguée de toute urgence. On estime à
81 000 tonnes de céréales les besoins en aide alimentaire
pour le million de personnes affectées par cette situation.
En Somalie, la récolte de céréales secondaires
"Der" a été considérablement réduite du fait
des pluies irrégulières et des infestations de ravageurs,
de même que par l'insécurité dans plusieurs secteurs.
Il s'agit de la deuxième mauvaise récolte consécutive
dans la plupart des régions, et la situation alimentaire est tendue.
Les stocks céréaliers sont à l'étiage et les
prix, qui ont décliné de façon normale après
la récolte, connaissent une forte remontée depuis janvier.
Par contraste, le prix du bétail connaît une baisse marquée
en raison des ventes massives pratiquées par les pasteurs afin de
couvrir leurs besoins personnels et d'assurer la survie de leurs troupeaux.
On observe des mouvements massifs de populations à la recherche
de travail et d'activités génératrices de revenus,
parallèlement à une aggravation brutale de la malnutrition.
Il faudrait pouvoir compter, de toute urgence, sur une aide alimentaire
internationale; cependant, l'insécurité régnante entrave
les opérations de secours.
Au Soudan, la situation des approvisionnements alimentaires s'est
détériorée dans plusieurs régions occidentales
du Kordofan et du Darfour, où, en dépit d'une récolte
céréalière exceptionnelle à l'échelle
nationale en 1996, la production a considérablement souffert des
mauvaises conditions climatiques. Etant donné que ces régions
connaissent leur deuxième année consécutive de mauvaise
récolte, les stocks et les mécanismes d'adaptation des agriculteurs
affectés sont épuisés, et une aide alimentaire s'impose.
La situation alimentaire est également tendue dans les régions
méridionales, troublées par une guerre civile prolongée.
La distribution d'aide alimentaire aux quelque 2,6 millions de personnes
affectées par la guerre continue d'être entravée par
l'insécurité.
En Erythrée, on prévoit, pour les prochains mois
et jusqu'à la prochaine récolte principale de novembre, des
difficultés d'approvisionnement alimentaire liées à
une production céréalière en net déclin pour
1996. De nombreuses tranches de populations, qui en temps normal ne couvrent
déjà pas leurs besoins de subsistance, nécessitent
une assistance alimentaire.
L'AIDE ALIMENTAIRE DEMEURE
NECESSAIRE AU LIBERIA ET EN SIERRA LEONE, PENURIES ALIMENTAIRES LOCALISEES
DANS PLUSIEURS PAYS SAHELIENS
Fin 1996, les principaux pays producteurs d'Afrique occidentale ont rentré
des récoltes moyennes ou supérieures à la moyenne.
Dans le Sahel, en dépit des périodes de sécheresse
enregistrées dans la plupart des pays en juin ou en juillet, les
conditions de croissance des récoltes ont été généralement
satisfaisantes pour la deuxième partie de la saison des pluies,
et les attaques des ravageurs sont restées relativement limitées.
Dans les pays riverains du golfe de Guinée, les conditions de croissance
des récoltes ont été généralement favorables
au cours de l'année 1996. La première récolte de maïs,
effectuée en juillet, a été bonne dans la majorité
des pays riverains. La deuxième récolte de maïs, plantée
fin août/début septembre, a bénéficié
de conditions de croissance satisfaisantes et notamment de pluies bien
réparties en septembre. Après plusieurs années de
récoltes relativement bonnes dans la sous-région, on s'attend
à ce que les approvisionnements demeurent satisfaisants, en 1997,
pour la plupart des pays. Cependant, des difficultés d'approvisionnement
alimentaire persistent dans certaines régions, du fait de l'insécurité
et de sécheresses localisées.
Au Libéria, malgré la mise en oeuvre du processus
de paix et d'une amélioration générale de la situation,
des combats sporadiques continuent d'entraver les activités agricoles.
Le programme de désarmement et de démobilisation des combattants
a, dans l'ensemble, donné les résultats escomptés.
La force de maintien de la paix est aujourd'hui déployée
dans l'ensemble du pays et l'on prévoit la tenue d'élections
en mai 1997. La FAO estime la production de riz, pour 1996, à environ
95 000 tonnes grâce à une amélioration de la sécurité
dans les principales régions rizicoles et à une meilleure
distribution des semences et des outils. Ce volume, très nettement
supérieur à celui de 1995, ne représente néanmoins
qu'environ 30 pour cent du niveau précédant les troubles
civils.
La situation des approvisionnements alimentaires devrait demeurer difficile
en 1997. La distribution d'aide alimentaire se poursuit, étant donné
que le pays compte essentiellement sur cette aide pour combler ses besoins.
Les régions les plus vulnérables sont situées dans
les parties ouest et sud-est du pays. Les personnes déplacées
de l'intérieur ainsi que les réfugiés qui se trouvent
dans les pays voisins rentrent spontanément dans leurs foyers et
reprennent leurs activités agricoles. Une récente évaluation
des besoins indique qu'environ 10 000 familles vulnérables manquent
d'intrants agricoles et que la production agricole de 1997 pourrait être
entravée par une pénurie d'instruments légers, l'insuffisance
des stocks de semences et le manque de temps accordé aux agriculteurs
pour préparer la terre, notamment dans la région sud-est
où la saison des pluies a déjà commencé.
Les programmes de relèvement permettent de distribuer des semences,
des outils et des intrants agricoles aux plus vulnérables. Compte
tenu de l'augmentation prévue de la population, qui devrait passer
à 2 millions, par suite du retour partiel des personnes encore réfugiées
dans les pays voisins, on estime à 115 000 tonnes les besoins d'aide
céréalière pour 1997.
En Sierra Leone, l'agriculture se remet lentement des conséquences
de la guerre civile qui a affecté le pays pendant les sept dernières
années. Cependant, le pays continue d'être essentiellement
tributaire de l'aide alimentaire. Grâce à la mise en oeuvre
du processus de paix, des programmes d'assistance alimentaire destinés
à la réinstallation des populations ont été
lancés et plus de 500 000 personnes déplacées ont
regagné leurs foyers, notamment dans les régions méridionales.
Le rapatriement d'environ 200 000 réfugiés se trouvant encore
dans la Guinée voisine et de 118 000 personnes réfugiées
au Libéria devrait commencer au mois de juin. Cependant, la situation
demeure instable dans les districts de Kailahun, de Moyamba Est et dans
certaines parties de Tonkolili, où les combats n'ont pas complètement
cessé.
La production de riz pour 1996 est estimée à 392 000 tonnes;
ce niveau, supérieur à celui de 1995, ne représente
toutefois qu'environ 70 pour cent du niveau précédant les
troubles civils. La production de racines a également augmenté
et atteindrait 328 000 tonnes. On estime à 260 000 tonnes les besoins
d'importations céréalières pour 1997, dont 81 000
tonnes sous forme d'aide alimentaire.
Au Tchad, la récolte rentrée en 1996, estimée
à 840 000 tonnes, est inférieure à la moyenne. La
production a diminué, notamment dans la zone sahélienne.
Les perspectives concernant les récoltes de contre-saison, principalement
le berbere et le sorgho de décrue sont également médiocres,
du fait de la réduction des emblavures et des faibles rendements.
En outre, le niveau du lac Tchad ayant augmenté ces dernières
années, les agriculteurs ont perdu certaines surfaces plantées
en maïs et en blé dans les polders.
Du fait de cette récolte réduite, on s'attend à
une situation alimentaire tendue en 1997, notamment dans la zone sahélienne
où les prix des céréales sont déjà beaucoup
plus élevés qu'au cours des années précédentes.
En outre, la réserve alimentaire nationale, dont le niveau recommandé
est de 22 000 tonnes, est complètement épuisée. Le
Système national d'alerte rapide (SAPR) estime que les besoins des
populations vulnérables de la zone sahélienne sont d'environ
19 500 tonnes de céréales, distribuées sur un semestre
à partir de mars. Les populations les plus affectées se trouvent
dans la préfecture de Biltine, qui subi sa deuxième année
de sécheresse et d'attaques de ravageurs. Le gouvernement a fait
livrer, dans la région, du sorgho vendu à des prix subventionnés.
On prévoit également des difficultés d'approvisionnement
alimentaire dans la préfecture de Batha, par suite des effets de
la sécheresse sur les récoltes et des dégâts
causés par les sauteriaux et les oiseaux granivores. Début
décembre, le gouvernement a lancé un appel pour une aide
extérieure de 50 000 tonnes de céréales. Cependant,
le total des contributions actuelles n'est que de 2 000 tonnes et il faudra
prévoir des contributions supplémentaires.
En Mauritanie, après plusieurs évaluations successives,
on estime à présent la production céréalière
de 1996 à 130 450 tonnes, dont 74 150 tonnes de riz et 56 300 tonnes
de céréales secondaires. On met actuellement la dernière
main à l'Enquête sur la production nationale.
La situation d'ensemble, pour ce qui est des approvisionnements supplémentaires,
devrait être tendue pour les populations affectées par une
mauvaise récolte dans les régions d'agriculture non irriguée,
notamment dans les régions de Brakna, Gorgo et Tagant. Le prix des
céréales est nettement plus élevé que pour
les périodes correspondantes des années précédentes,
et l'on observe des taux de malnutrition très élevés
dans de nombreuses régions affectées. Une opération
de secours approuvée conjointement par le Directeur général
de la FAO et le Directeur exécutif du PAM, permettra de couvrir
les besoins de quelque 200 000 personnes affectées. Le gouvernement
a également amorcé des distributions alimentaires dans les
wilayas de Nouakchott et de Nouadhibou, ainsi que dans d'autres wilayas
non couvertes par l'opération. Une aide alimentaire est également
distribuées aux réfugiés Tuaregs dans un camp situé
dans l'est du pays.
Au Niger, une récolte céréalière
nationale supérieure à la moyenne a été réalisée
en 1996; elle a été estimée à 2,3 millions
de tonnes, sous réserve de confirmation ultérieure. Cependant,
malgré cette bonne récolte d'ensemble, les approvisionnements
alimentaires sont tendus dans plusieurs régions où l'on a
rentré de mauvaises récoltes, dont certaines pour la deuxième
année consécutive. Selon le Système national d'alerte
rapide, neuf arrondissements, ceux de Ouallam, Tahoua, Tanout, Tchintabaraden,
N'guigmi, Arlit, Tchirozerine, Bilma et Agadez, sont particulièrement
vulnérables. Vingt-quatre autres arrondissements sont également
classés comme moyennement vulnérables et doivent être
suivis de près. La situation est particulièrement préoccupante
dans la région de Tanout et dans le département de Zinder,
où l'on a observé des mouvements substantiels de populations.
Les prix des céréales sont beaucoup plus élevés
que l'an dernier à la même époque et les céréales
manquent parfois sur les marchés.
La situation varie considérablement dans les villages, mais une
aide s'impose d'urgence dans l'arrondissement de Tanout et dans les régions
voisines de l'arrondissement de Dakoro. Il faut également prévoir
une assistance dans les zones urbaines où se sont concentrés
les migrants provenant des régions touchées, notamment à
Zinder. En outre, la Réserve alimentaire nationale est pratiquement
épuisée. En décembre, le gouvernement a lancé
un appel pour une aide extérieure se montant à 118 000 tonnes
de céréales. Mi-avril, environ 40 000 tonnes de céréales
avaient été promises par différents donateurs, sous
forme d'achats locaux, d'achats dans les pays étrangers ou d'importations.
BONNE RECOLTE EN PERSPECTIVE
EN AFRIQUE AUSTRALE EN DEPIT DES DEGATS CAUSES PAR LES INONDATIONS DANS
CERTAINES REGIONS
Les perspectives sont généralement favorables pour la récolte
de céréales secondaires 1996/97, qui devrait commencer au
cours des prochaines semaines. En dépit d'un démarrage relativement
tardif des pluies dans plusieurs régions et du temps sec enregistré
durant certaines périodes de la campagne, les précipitations
ont jusqu'ici été généralement abondantes,
voire excessives dans plusieurs régions productrices. En Angola,
au Botswana, au Lesotho, en Namibie et au Swaziland, on prévoit
une nouvelle année de bonnes récoltes, sous réserve
de la poursuite des conditions favorables jusqu'à la fin du mois
d'avril. Au Malawi, au Mozambique, en Zambie et au Zimbabwe, les pluies
modérées ou intenses observées de façon ininterrompue
en janvier et février ont entraîné des crues importantes
des cours d'eau, forçant les populations à se déplacer
et causant dégâts matériels et pertes de récolte.
Compte tenu de l'engorgement des sols signalée dans plusieurs provinces,
les rendements agricoles risquent d'en être affectés. Ces
conditions défavorables pourraient également réduire
la récolte de maïs exceptionnelle attendue en Afrique du Sud,
en Zambie et au Zimbabwe.
A Madagascar, les perspectives sont généralement favorables
pour la récolte de riz de 1997, même si les cyclones qui ont
sévi en janvier et en février ont entraîné des
pertes localisées de récolte. Signalons toutefois qu'une
récente invasion de criquets nomades dans les régions méridionales
risque d'affecter les récoltes, à moins que des mesures immédiates
ne soient prises avec l'aide de la communauté internationale.
UN SUPPLEMENT D'ENGAGEMENTS
D'AIDE ALIMENTAIRE S'IMPOSE, AINSI QUE L'ACCELERATION DES LIVRAISONS
On s'attend à une réduction du volume des besoins en importations
de céréales dans les pays d'Afrique subsaharienne pour la
période 1996/97, du fait des récoltes généralement
bonnes en Afrique occidentale et dans certaines parties de la Corne en
1996, ainsi que des perspectives favorables en Afrique australe. Les estimations
du SMIAR pour la production de 1996 et les besoins en importations et en
aide alimentaire pour 1996/97 sont résumées au tableau 2.
Les besoins globaux en aide alimentaire de ces pays sont estimés,
pour 1996/97, à environ 1,9 million de tonnes, à comparer
au volume de 2,4 millions de tonnes de l'an dernier. Les contributions
en aide alimentaire céréalière, pour 1996/97, se montent
à 1,55 million de tonnes à la mi-avril, dont 780 000 tonnes
seulement ont été livrées à ce jour. C'est
pourquoi il y a lieu d'exhorter les donateurs à augmenter leurs
contributions afin de couvrir les besoins encore non satisfaits de plusieurs
pays et d'accélérer la livraison des contributions déjà
promises.
DOSSIER
SPECIAL: Le Programme spécial de la FAO: Production alimentaire
à l'appui de la sécurité alimentaire dans les pays
à faible revenu et à déficit alimentaire (PFRDA)
[ Les PFRDA
sont les pays dont le revenu par habitant correspond au niveau ouvrant
droit, selon les critères de la Banque mondiale, aux prêts
au titre de l'AID, et présentant une balance commerciale négative
en matière de céréales lorsqu'on établit la
moyenne des cinq années précédentes.]
Le
contexte
Les tendances observées dans de nombreux pays à faible
revenu et à déficit alimentaire indiquent que, depuis les
années 70, la production alimentaire ne réussit pas à
suivre l'évolution des besoins d'une population croissante. Il s'ensuit
une augmentation marquée des importations commerciales ainsi qu'un
déclin de la consommation alimentaire moyenne par habitant dans
la plupart de ces pays. En outre, du fait des obligations liées
au service de la dette et des difficultés de balance des paiements,
ces pays ont du mal à importer des denrées alimentaires disponibles
sur le marché mondial, tandis que l'on s'entend pour reconnaître
les carences de l'aide alimentaire comme solution durable aux problèmes
chroniques d'approvisionnement alimentaire.
Avec la poursuite de la croissance démographique, la disponibilité
de superficies arables par habitant est vouée à décroître
encore. C'est pourquoi, si l'on veut répondre aux besoins alimentaires
croissants à partir d'un patrimoine foncier en diminution, il importe
d'intensifier la production agricole. "L'agriculture doit relever ce défi,
en premier lieu en intensifiant la production sur les terres déjà
exploitées, et en évitant de nouveaux empiétements
sur des terres ne convenant que marginalement à la mise en culture".
(Programme Action 21, chapitre 14.1) [ Ce programme s'appuie sur le programme
Action 21 adopté à l'unanimité par la Conférence
des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUCED)
à Rio de Janeiro en 1992.] . L'intensification de la production
agricole a les meilleures chances de réussir sur les terres dont
l'exploitation se fait déjà au moyen de techniques permettant
une production durable, ou sur lesquelles les méthodes modernes
peuvent aider à concilier durabilité et production plus intensive.
Le Programme spécial de la FAO pour la sécurité
alimentaire (PSPA) est une initiative approuvée à l'unanimité
à la cent sixième session du Conseil de la FAO, en mai et
juin 1994, pour faire face au défi à peine évoqué.
Le PSPA, qui privilégie les PFRDA, est un programme axé sur
l'action visant à augmenter rapidement la disponibilité alimentaire
au niveau des pays, de stabiliser la production vivrière et de créer
des emplois et des revenus dans le secteur agricole comme dans d'autres
secteurs, de manière à endiguer l'incidence croissante de
l'insécurité alimentaire et de la malnutrition. Le programme
intéressera tous les PFRDA, actuellement au nombre de 82, dont 41
en Afrique subsaharienne.
Le PSPA sera un véhicule essentiel de la mise en oeuvre du Programme
d'action du Sommet mondial de l'alimentation en matière de sécurité
alimentaire dans les PFRDA aux niveaux individuel, familial et national.
La mise en oeuvre du programme se fera en deux phases, à savoir
une phase pilote, d'une durée de trois ans en général,
suivie d'une phase d'expansion.
La phase pilote, constituée de quatre volets solidaires et complémentaires,
est programmée et mise en oeuvre par les gouvernements et par les
communautés rurales concernées, grâce à la mobilisation
et à la formation de personnel local et à l'approvisionnement
en semences, outils et équipements dans le cadre de la participation
populaire et d'activités de promotion de l'égalité
des sexes. L'assistance technique et financière proviendra de sources
nationales aussi bien qu'internationales. Les quatre volets sont les suivants:
i) collecte de l'eau sur petite échelle, systèmes d'irrigation
et de drainage mettant à profit les précipitations, les écoulements
d'eau, les petits cours d'eau, les nappes phréatiques, etc.; mise
en valeur des terres agricoles en vue de préserver la production
contre les fluctuations climatiques;
ii) utilisation plus intensive des systèmes de production végétale
durable grâce au transfert des technologies appropriées et
accessibles à tous, y compris l'utilisation efficace de variétés
à haut rendement, de systèmes intégrés de nutrition
végétale, de gestion intégrée des ravageurs
et de techniques appropriées de manutention post-récolte,
d'entreposage et de transformation, associés à des programmes
adéquats de commercialisation et de crédit. L'objet de ces
activités doit être, entre autres, de favoriser la création
de revenus par la valeur ajoutée;
iii) diversification de la production, notamment par le biais de l'aquaculture,
de l'élevage des petits animaux et des cultures forestières.
Il faudra, dans ce cas également, accorder une attention particulière
aux activités post-production pertinentes afin de promouvoir la
création de revenus par la valeur ajoutée;
iv) analyse des obstacles à la sécurité alimentaire.
Une attention particulière sera accordée à l'analyse
des obstacles d'ordre socio-économique à l'extension de la
phase pilote, en fonction du sexe ou de l'appartenance à des groupes
spécifiques. Cette analyse visera en particulier à identifier
les entraves à la rentabilité au niveau de l'exploitation
agricole et à l'accès aux technologies, aux terres, aux intrants,
aux techniques d'entreposage, de commercialisation, de transformation et
de crédit, ainsi qu'une évaluation des potentiels institutionnels
et humains permettant de gérer des systèmes de production
durable. L'analyse comportera également un volet d'évaluation
de l'incidence écologique de la phase d'expansion. Cette analyse
se poursuivra tout au long du processus, non pas comme activité
distincte mais comme partie intégrante de chacun des trois volets
décrits ci-dessus.
La phase d'expansion se compose de deux volets:
i) un programme d'initiatives portant sur la sécurité
alimentaire et sur le secteur agricole, destiné à écarter
les entraves socio-économiques agissant au niveau macro et à
offrir un cadre favorable à la production, à la transformation,
à la commercialisation et aux échanges de denrées
agricoles de même qu'à l'accès aux produits alimentaires;
ii) un volet d'investissements agricoles sur trois ans, révisé
annuellement et destiné à surmonter les barrières
physiques, y compris l'infrastructure, et à intensifier le financement
privé et public des activités et des services du secteur
agricole.
On voit donc que ce Programme spécial ne se limite pas à
agir sur la productivité, la production et l'instabilité
des approvisionnements, mais qu'il porte également sur les échanges
et l'accès à la production alimentaire et les autres aspects
de la sécurité alimentaire. Cependant, en l'absence d'une
augmentation stable de la production parallèlement à celle
de la demande, on risque de voir apparaître des pénuries nécessitant
le recours à des importations coûteuses, ce qui rendrait l'accès
à la nourriture plus difficile, notamment pour les catégories
pauvres et vulnérables.
Point
de la situation
Le PSPA est en cours d'application dans 18 pays. Cependant, compte tenu
des résultats généralement positifs et de la disponibilité
de nouvelles ressources, il est maintenant étendu à de nouveaux
pays. Nous présentons, ci-dessous, les principaux résultats
du Programme spécial dans les dix pays d'Afrique subsaharienne qui
en ont été les premiers bénéficiaires:
Burkina Faso: En 1990, le gouvernement a inclus la sécurité
alimentaire parmi ses trois principaux objectifs lors de la formulation
de son programme d'adaptation agricole. C'est ainsi qu'il fut décidé
d'élaborer des programmes prioritaires et des mesures spécifiques
à l'intention du secteur céréalier, notamment le riz
et le maïs. En 1994, l'accent a été mis sur la nécessité
d'augmenter la production rizicole grâce aux cultures irriguées
et à l'exploitation des Basse-Terre, et à l'introduction
de riz de culture non irriguée là où cela était
possible. C'est dans ce contexte que le PSPA a été élaboré.
La phase pilote du PSPA a été lancée en janvier 1995
dans les régions de Comoé, des Hauts bassins et de Mouhoun,
avec comme cultures cibles le riz et le maïs. Le rendement du riz
irrigué, pour 1996/97, se situe entre 5 et 6,6 tonnes/ha, soit moins
que l'objectif fixé de 7 tonnes/ha. Une comparaison, effectuée
sur un des sites seulement, fait état d'une augmentation d'environ
20 pour cent sur les parcelles de démonstration, relativement au
groupe témoin. Le rendement du riz de culture non irriguée
a doublé en 1996/97, par comparaison avec les 2,4 tonnes/ha de 1995/96.
Erythrée: Le renforcement de la sécurité
alimentaire en Erythrée nécessite une augmentation généralisée
de la production alimentaire destinée à être consommée
ou échangée localement; il ne s'agit donc pas d'augmenter
seulement les excédents pouvant être vendus dans les zones
urbaines. A long terme, l'obstacle le plus important à une augmentation
de la croissance agricole tient peut-être au climat aride et variable
du pays. C'est pourquoi les programmes destinés à réduire
la vulnérabilité de l'agriculture à la sécheresse
joueront un rôle déterminant. Les objectifs du PSPA vont dans
le même sens que la politique et la stratégie du gouvernement
en matière de sécurité alimentaire, qui visent à
augmenter la sécurité alimentaire au niveau national en intensifiant
la production de denrées de base destinées à la consommation
des ménages ainsi que celle des produits agricoles à forte
valeur destinés à l'exportation. La phase pilote du PSPA
est entrée en oeuvre en juillet 1995 dans trois zones agro-écologiques:
les Hautes-terres centrales, les Basses-terres de l'ouest et les Basses-terres
de l'est. Les cultures cibles sont le teff, le blé, le sorgho, l'orge
et le sésame. En 1995/96, année de sécheresse, les
parcelles pilotes ont généralement obtenu de meilleurs résultats
que les autres parcelles locales. Cependant, les résultats n'étaient
pas économiquement rentables. Les résultats préliminaires
de la campagne 1996/97 sont très positifs, avec des augmentations
de rendement d'au moins 100 pour cent.
Ethiopie: L'insécurité alimentaire et la malnutrition
sévissent dans une grande partie de l'Ethiopie. On estime qu'au
moins 50 pour cent de la population connaît la précarité
alimentaire, dont 75 pour cent pour les pauvres des campagnes et 25 pour
cent pour les pauvres des villes. L'insécurité alimentaire
transitoire est plus répandue dans les zones exposées à
la sécheresse, même parmi les agriculteurs relativement aisés
et parmi les pasteurs. Le PSPA s'inscrit dans le cadre de la stratégie
gouvernementale d'industrialisation mue par le développement agricole,
qui vise à utiliser le secteur agricole comme tremplin du développement
socio-économique général. Cette stratégie est
en outre centrée sur l'amélioration de la productivité
des petits exploitants agricoles et la poursuite de l'objectif d'autonomie
alimentaire à moyen terme pour le pays. La phase pilote du PSPA
a commencé en janvier 1995 dans les districts de Wofla, Habra et
Gonder Zuria. Les récoltes cibles sont le teff, le blé, le
maïs et le sorgho. En 1995/96, les rendements ont généralement
plus que doublé dans les zones de démonstration, avec, en
moyenne, un rapport valeur/coût (VCR) d'environ 2,42 relativement
aux parcelles voisines exploitées selon les méthodes traditionnelles;
de ce fait, le revenu net des agriculteurs participant à l'expérience
a généralement doublé.
Guinée: Le PSPA est conforme aux objectifs de la stratégie,
fixés en matière de développement agricole par la
Lettre sur la politique de développement agricole (LPDA). Dans ce
document, il est déclaré que la réduction des importations
de riz, par le biais de la restauration de la production rizicole locale,
est l'un des piliers de la sécurité alimentaire nationale
ainsi que le moyen le plus sûr d'optimiser les revenus agricoles
et de restaurer l'équilibre de la balance des paiements. Une nouvelle
LPDA, la LPDA 2, est en cours d'élaboration; on y évoque
de façon spécifique le PSPA. Ce dernier est entré
en vigueur en mai 1995 dans les régions de Guinée Maritime
et de Haute Guinée. La récolte cible est le riz. La production
de la récolte 1995/96 a connu une augmentation de rendement allant
de 71 à 146 pour cent relativement à 1994/95. Une analyse
coût/bénéfice conduite parallèlement a donné
des résultats positifs. Quant aux résultats de la récolte
de 1996/97, aujourd'hui achevée, ils ne sont pas encore parvenus.
Kenya: L'économie continue d'être dominée
par le secteur agricole, qui représente 30 pour cent du PNB, emploie
78 pour cent de la main-d'oeuvre et compte pour plus de 60 pour cent de
la valeur des exportations. La production alimentaire n'a pas suivi le
rythme de la croissance démographique, si bien que la production
céréalière par personne représente la moitié
de celle d'il y a 20 ans. Près de 40 pour cent de la population
souffre de sous-nutrition chronique, et 46 pour cent des familles rurales
vivent en-deçà du seuil de pauvreté. Compte tenu du
taux de croissance démographique élevé (plus de 3
pour cent par an), les projections jusqu'à l'an 2010 indiquent qu'il
faudra augmenter de façon substantielle la production alimentaire
par habitant si l'on veut éviter le creusement du déficit.
Il existe une convergence d'ensemble entre les politiques gouvernementales
concernant la sécurité alimentaire aux niveaux national et
familial et l'approche adoptée par le Programme spécial.
Le PSPA est entré en vigueur en janvier 1995; amorcé dans
la région ouest, il a été progressivement élargi
aux régions centrales et côtières pour les éléments
non irrigués basés sur la culture du soja et du maïs,
de même que pour un module d'irrigation dans les régions est
et côtières. On ne dispose pas encore de résultats
chiffrés pour le maïs, étant donné que la première
campagne faisant appel à la pleine participation des agriculteurs
devrait commencer en mars 1997. En ce qui concerne le soja, les résultats
obtenus ont été satisfaisants.
Mauritanie: Le PSPA est pleinement en accord avec la stratégie
du gouvernement en matière de sécurité alimentaire,
laquelle prévoit la remise en état des systèmes d'irrigation
et une meilleure exploitation de l'eau afin d'augmenter la production de
riz, de sorgho et de maïs. La phase pilote du PSPA a commencé
en juin 1995 dans le Traza (Vallée du Sénégal) et
le Gorgol; le Brakna a été ajouté pour l'agriculture
irriguée. Les récoltes cibles sont le riz (irrigué),
les légumes, le maïs de décrue et le sorgho. Dans les
parcelles de démonstration, on a enregistré une augmentation
de la production de riz allant de 24 à 32 pour cent relativement
aux parcelles témoins avec, en moyenne, un rendement atteignant
jusqu'à 7 tonnes/ha. L'analyse coût/bénéfice,
qui a porté exclusivement sur les engrais, semble positive.
Niger: Le PSPA est en harmonie avec la politique gouvernementale
de sécurité alimentaire à l'échelle nationale,
qui s'appuie sur une approche et des composantes participatives. La phase
pilote a commencé en mai 1995 dans les départements de Tillaberi
et Maradi. Les récoltes cibles sont le mil, le sorgho, le riz et
les légumes. En 1995, les zones de culture non irriguée ont
donné des résultats négatifs, en raison de la sécheresse
qui a sévi cette année. Les résultats concernant les
zones de culture non irriguée pour 1996 font état d'une augmentation
de 30 à 60 pour cent sur les parcelles de démonstration,
relativement aux parcelles témoins.
Sénégal: Le PSPA est conforme à la politique
de développement agricole du gouvernement, qui accorde la priorité
à l'amélioration de la sécurité alimentaire.
Cette politique accorde la priorité à l'amélioration
des systèmes d'irrigation, la promotion de l'agriculture non irriguée
et un renforcement de la production de viande et de lait, selon une approche
participative. La phase pilote du PSPA a démarré en juin
1995 dans les régions de Casamance et du fleuve Sénégal.
Les récoltes cibles sont le riz, le mil, le sorgho et le maïs.
En 1995/96, les rendements rizicoles dans les parcelles pilotes de la vallée
du fleuve Sénégal allaient de 4,2 à 6,7 tonnes/ha.
Dans les vallées intérieures de Kourouck, Sounaye et Banny
de Casamance, les rendements variaient de 1,1 à 1,9 tonne/ha. Cependant,
certains agriculteurs de Kourouck ont obtenu des rendements atteignant
4,5 tonnes/ha.
Tanzanie: La sécurité alimentaire continue de poser
un grave problème dans les régions souffrant d'un déficit
vivrier chronique. On estime que 51 pour cent de la population vit en-deça
du seuil de pauvreté, principalement dans les villages ruraux. Le
PSPA a été conçu pour s'inscrire dans le cadre général
du programme national tanzanien de sécurité alimentaire globale
(CFSP). La phase pilote du PSPA est entrée en opération en
juillet 1995 dans les régions de Dodoma et de Morogoro. Les récoltes
cibles sont le maïs et le riz. Les résultats obtenus indiquent
que, relativement à 1994/95, la production de riz pour la campagne
1995/96 a enregistré, sur les parcelles pilotes, un doublement de
la production du riz et plus d'un doublement de la production de maïs.
Zambie: Le programme d’investissement dans le secteur agricole
(ASIP) de la Zambie est le premier d’une série de programmes quadriennaux
visant à mettre en oeuvre les objectifs gouvernementaux à
moyen et à long terme d’amélioration de la sécurité
alimentaire nationale et familiale. Le PSPA sera mis en oeuvre dans le
cadre de l’ASIP. La phase pilote du PSPA a commencé en août
1995 dans les districts Kalomo et Kaoma. Les récoltes
cibles sont le maïs, le mil, les légumes et le manioc. Des
études portant sur les budgets des exploitations agricoles sont
en cours dans tous les secteurs pilotes. Cependant, les résultats
de la campagne 1995/96 indiquent que les rendements varient considérablement
sur les sites de démonstration, pour le maïs (de 1,2 à
7,4 tonnes/ha) comme pour le mil (de 0,024 à 1,2 tonne/ha).
La mise en oeuvre du Programme spécial devrait être élargie,
en 1997, à un certain nombre d’autres pays: Angola, Mali et Mozambique.
L'élaboration du programme a été entamée pour
Madagascar et devrait l'être également pour un grand
nombre d'autres pays.
Mécanismes
de financement
Le Programme spécial a démarré en 1994/95 avec
un modeste budget destiné à "amorcer la pompe" alloué
à partir du Programme ordinaire de la FAO. A mesure que se présentent
de nouvelles sources de financement extérieures ou nationales, les
soutiens au programme se diversifient: gouvernements participants, FAO
et donateurs. C'est ainsi qu'un certain nombre de donateurs bilatéraux
et multilatéraux apportent déjà leur soutien au Programme
spécial. Certaines institutions financières internationales
ont exprimé un intérêt à l'égard d'un
partenariat dans le cadre duquel la FAO fournirait le savoir-faire technique
et leur laisserait la direction des aspects liés aux questions socio-économiques
et aux investissements. C'est dans ce cadre qu'ont été signés
des protocoles d'accord avec la Banque mondiale et la Banque africaine
de développement. Des contacts ont également été
établis avec la Banque islamique de développement et des
pourparlers sont prévus avec la Banque européenne pour la
reconstruction et le développement, la Banque européenne
d'investissement et le Fonds européen de développement. Par
ailleurs, un certain nombre de donateurs bilatéraux (dont l'Italie,
la Belgique, les Pays-Bas, le Canada, l'Espagne, la France et le Japon)
soutiennent déjà le programme ou devraient commencer à
le faire sous peu; cependant, d'autres appuis sont nécessaires.
L'Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI)
est le premier organisme membre du Groupe consultatif pour la recherche
agricole internationale (GCRAI) à avoir décidé de
participer au Programme spécial, notamment à l'étude
sur les barrières d'ordre socio-économique.
En outre, une initiative de Coopération Sud-Sud a été
lancée dans le cadre du PSPA. En vertu des dispositions prises à
cette occasion, un grand nombre d'experts (près d'une centaine)
sont détachés par un pays en développement avancé
auprès d'un autre pays en développement afin de travailler,
pendant une période de deux ou trois ans, avec des agriculteurs
et des communautés rurales participant au PSPA, afin de créer
la masse critique permettant d'obtenir l'impact souhaité.
Cette coopération est déjà amorcée dans
certains pays, notamment en Ethiopie, qui tient des pourparlers avec la
Chine afin de mettre au point une coopération en vertu de laquelle
la Chine fournirait à l'Ethiopie un nombre élevé d'experts
en irrigation, de même qu'au Sénégal, où l'on
attend la venue de 52 experts vietnamiens. Les neuf premiers experts vietnamiens
sont déjà arrivés au Sénégal, et on
en attend 34 autres au cours du premier trimestre de 1997. L'Inde et le
Maroc se sont également déclarés intéressés
par une participation à cette initiative. |
DE NOUVEAUX DEFIS POUR LA COMMUNAUTE
INTERNATIONALE
La situation humanitaire dans la région des Grands Lacs reste préoccupante
et constitue un défi de taille pour la communauté internationale,
notamment dans l'est du Zaïre où un grand nombre de réfugiés
rwandais meurent actuellement de faim et de maladies. Au Burundi, au Libéria,
au Rwanda et en Sierra Leone, la situation alimentaire continue d'être
précaire, alors qu'elle est devenue incertaine dans plusieurs pays
d'Afrique de l'Est. Il y a lieu d'attirer l'attention de la communauté
internationale sur les quatre secteurs suivants, pour lesquels une assistance
est nécessaire:
Premièrement, ne ménager aucun effort pour atténuer
les souffrances extrêmes des réfugiés rwandais de l'est
du Zaïre.
Deuxièmement, compte tenu de la situation précaire
des approvisionnements alimentaires au Kenya, en Somalie, en Tanzanie et
en Ouganda, par suite de la récente sécheresse, il est nécessaire
de prévoir des plans d'urgence afin de se prémunir contre
un éventuel désastre dans le cas où les pluies principales,
dont la saison est déjà entamée ou commence à
peine, devraient se révéler insuffisantes pour assurer une
production alimentaire normale.
Troisièmement, il y a lieu de poursuivre les secours vivriers
à l'intention des populations affectées du Burundi, du Rwanda,
du Libéria et de la Sierra Leone, qu'il s'agisse des réfugiés,
des personnes déplacées de l'intérieur ou des autres
groupes vulnérables.
Quatrièmement, l'appui des donateurs est nécessaire
pour le Programme spécial de la FAO: Production alimentaire à
l'appui de la sécurité alimentaire, notamment en Afrique.
Cette aide permettra aux pays à faible revenu et à déficit
alimentaire de la région d'améliorer leur sécurité
alimentaire en augmentant et en stabilisant leur production alimentaire.