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La télédétection comme moyen d'appui à la planification des ressources en eau (cas du Sud-Ouest du Burkina Faso)


Karim Traoré, Ministère de l'eau, Direction régionale de l'hydraulique,

Bobo Dioulasso, Burkina Faso

Résumé

Pays sahélien , le Burkina Faso est situé en Afrique de l'Ouest. La pluviométrie annuelle varie entre 500 mm au Nord et 1 200 mm au Sud, donnant naissance à des cours d'eau pérennes dans la partie Sud-Ouest du pays (Comoé, Mouhoun, Bougouriba).

Malgré le caractère sahélien du pays, la zone du Sud-Ouest, d'une superficie de 60 600 km2, recèle d'importantes ressources en terre et en eau. Cette zone connaît une intense activité de mobilisation et d'utilisation des eaux: périmètre sucrier de la SOSUCO (3 800 ha), périmètre rizicole de la Vallée du Kou (1 000 ha), 1 300 ha de bas-fonds améliorés avec l'opération riz Comoé, la plaine de Douna (400 ha), périmètre rizicole de Karfiguela (350 ha).

Ces potentialités expliquent la présence du nombre croissant de migrants sur les terres du Sud-Ouest où se développent simultanément divers projets et activités sans une vision prospective et sans cohérence dans les aménagements. A cela s'ajoute la faible croissance des ressources en terre et en eau en vue de leur planification et de leur gestion durable.

Face à ce constat, la Direction régionale de l'hydraulique des hauts-bassins, à travers le Programme de développement et de valorisation des ressources en eau dans le Sud-Ouest du Burkina Faso (RESO), sur financement du Fonds européen de développement (7ème FED), a entrepris la réalisation d'un schéma directeur de planification qui servira de cadre à la collecte de données indispensables pour la planification et la gestion des ressources naturelles, dans une approche fondée sur l'écosystème ; ces données seront intégrées dans un système d'information géographique (SIG).

Pour la réalisation de ces objectifs, l'utilisation de l'outil télédétection a été privilégiée. Ainsi, la caractérisation de la situation actuelle (occupation des sols, hydrologie, etc.) sera basée sur l'analyse des images Landsat-TM de 1994. L'évaluation de la dégradation des sols se fera à l'aide de deux séries d'images (Landsat MSS et TM) séparées d'une dizaine d'années (1984 et 1994). Dans certains cas, l'étude des photographies aériennes complètera les observations de terrain prévues de 1994 à 1997.

Abstract 

Burkina Faso, a Sahelian country, is located in West Africa. The yearly rainfall varies from 500 mm in the north to 1 200 mm in the south, giving rise to permanent waterways in the south-western part of the country (Comoé, Mouhoun, Bougouriba).

In spite of the Sahelian nature of the country, the south-west area covering a surface of 60 600 km2 contains important land and water resources. That area has an intensive activity of mobilization and use of water: the sugar plantation area of Sosuco (3 800 hectares), the rice area of the Kou Valley (1 000 hectares), 1 300 hectares of reclaimed lowlands for the Comé rice project, the plain of Douna (400 hectares), the rice surface of Karfiguela (350 hectares).

These potentialities constitute the reasons for the growing number of migrants on the south-west lands where various projects and activities are simultaneously developed without any management planning or coherence. In addition is the weak growth in land resources for sustainable management.

Faced with this reality the Regional Department of Hydology in the « hauts bassins », through the development and management of a Water Resources Programme (Reso) in the south-west of Burkina Faso, financed by the European Development Fund (7th EDF), has undertaken to carry out a Master Plan which will serve as a framework for the collection of indispensable data for the planning and management of natural resources with an ecosystem approach. These data will be integrated in a geographical information system (GIS).

To carry out these aims the use of remote sensing has been favoured. Thus, to characterize the present situation Landsat TM images of 1994 will be used. The assess-ment of soil degradation will be done with the help of two series of images (Landsat MSS and TM) with a 12-year interval (1984 and 1994). In certain cases the study of aerial photographs will complete the ground observations foreseen from 1994 to 1997.


Introduction

Dans le cadre du Programme de développement et de valorisation des ressources en eau du Sud-Ouest du Burkina Faso (RESO), financé par le Fonds européen de développement (FED), la télédétection occupe une place de choix dans l'inventaire des données spécifiques pour la planification et la gestion des ressources en eau.

Cette communication a pour but de situer le contexte dans lequel intervient la télédétection, d'analyser les objectifs techniques visant à privilégier l'utilisation de cette source d'informations et, de présenter notre approche méthodologique afin de susciter des réflexions et commentaires.

Description de la zone

La zone d'intervention du Programme RESO couvre une superficie d'environ 60 600 km2 avec une densité de 35 habitants/km2. Elle regroupe les provinces de la Bougouriba, de la Comoé, du Houet, du Kénédougou et du Poni (figure 1). Elle est située entre les longitudes 3° O et 5° 50' O et les latitudes 9° 10' N et 12° 10' N.

Cette partie Sud-Ouest du Burkina recoupe pour l'essentiel les bassins versants de la Comoé et du Mouhoun qui sont les deux cours d'eau pérennes du pays (figure 2). Le réseau hydrographique est plus dense que partout ailleurs au Burkina.

La zone est comprise entre les isohyètes 900 mm et 1 200 mm. L'évapotranspiration moyenne annuelle est d'environ 1 750 mm. Le climat est de type soudanien avec deux saisons bien contrastées. La saison sèche s'étend de novembre à mai et la saison pluvieuse de juin à octobre.

FIGURE 1

Plan de situation

Environ 40 % de la région sont constitués de terrains sédimentaires et 60 % de roches métamorphiques ou granitiques.

Ressources en eau

Ressources en eaux souterraines

On distingue deux systèmes d'aquifère :

· le système aquifère de la zone du socle,

· le système aquifère de la zone sédimentaire.

FIGURE 2

Burkina Faso : carte des bassins versants

Les aquifères dans les roches cristallines (socle) ont une structure discontinue et les ressources en eau exploitables sont limitées aux fissures et aux niveaux altérés d'une épaisseur de 10 à plus de 50 mètres.

Dans les zones sédimentaires, on rencontre essentiellement une variété gréseuse. Parfois, les roches sont poreuses et contiennent des ressources en eau très importantes.

L'étude des ressources en eau souterraine de la zone sédimentaire de la région de Bobo Dioulasso par SOGREAH en 1993 a été limitée uniquement à une superficie de 1 600 km2 environ. Elle a mis en évidence des aquifères multicouches et identifié sur 20 km seulement quatre aquifères dont celui des grès à granules de quartz qui contient deux nappes hydrochimiquement distinctes (figure 3).

Les débits maxima obtenus par essais de débit au niveau de ces aquifères atteignaient 200 et 360 m3/h (pompage 1 semaine, remontée 1 semaine).

La zone se caractérise également par la présence de nombreuses sources dont les plus connues sont celles de la Guinguette (Qe >6 000 m3/h,), de Nasso (Qe >800 m3/h) et de Pesso (Qe >400 m3/h). D'autres sources à débit important existent dans la zone mais sont encore mal connues.

Ressources en eau de surface

Le réseau hydrographique de la zone est très dense et compte des rivières pérennes telles que le Mouhoun et la Comoé (cf. figure 2). Les ressources en eau de surface sont également abondantes. On y rencontre de nombreuses mares et chutes (mare aux hippopotames, chutes de Banfora et de Tourni, etc.) ainsi que de nombreux barrages et retenues d'eau dont les plus importants sont indiqués à la figure 2.

Tous ces barrages sont situés dans le bassin de la Comoé ou du Mouhoun. Le bassin du Niger ne comporte aucun grand ouvrage.

Des projets de barrages sont également à l'étude. Il s'agit du barrage de Noumbiel sur le cours inférieur du Mouhoun et du barrage de Samandéni sur le Mouhoun supérieur, d'une capacité de 400 millions de m3.

Ressources en terres

La zone du Sud-Ouest recèle d'importantes ressources en terres et connaît une intense activité d'utilisation de celles-ci à travers :

· les plaines irriguées existantes : périmètre sucrier de la SOSUCO (3 800 ha), périmètre rizicole de la vallée du Kou (1 000 ha), périmètre de Banzon (360 ha),

· l'Opération riz Comoé avec 1 300 ha de bas-fonds améliorés essentiellement exploités par des femmes,

· la valorisation de la culture irriguée par des initiatives de base autour des retenues d'eau ainsi que le long de la rivière Kou.

L'arboriculture, la production irriguée informelle essentiellement maraîchère ainsi que d'autres types de production occupent une place non négligeable dans l'utilisation des ressources en terre mais restent mal connues.

FIGURE 3

Carte des unités hydrogéologiques (zone sédimentaire de Bobo-Dioulasso)

 

Problématique de la planification des ressources en eau dans le sud-ouest

Cette problématique se traduit par :

· la présence de bois sacrés et de zones boisées non accessibles,

· l'existence de cours d'eau avec débit d'étiage nul,

· la faible connaissance des ressources en terre et en eau, à l'exception de la Guinguette,

· la pression démographique qu'accélère l'afflux de migrants venant du Centre et du Nord du pays ce qui favorise les aménagements spontanés sans concertation entre les différents utilisateurs.

Ainsi, au niveau des surfaces cultivées et des berges, des indices de dégradation sont de plus en plus perceptibles sans que l'on puisse caractériser leur ampleur spatiale ni leur impact réel sur les ressources en eau, conditions essentielles pour l'évaluation de leurs évolutions.

Afin de pallier cette situation et de gérer de façon durable les ressources naturelles, et plus particulièrement les ressources en eau, une collecte de données, spécifiques de l'approche fondée sur l'écosystème, sera réalisée au moyen de l'outil télédétection. Le fonctionnement de la Guinguette avec diverses sources en rive droite et gauche en est un exemple (cf. figure 4).

Approche méthodologique

Les images à utiliser seront celles de Landsat MSS et TM. Ce choix est guidé par l'objet de la photo-interprétation (occupation et dégradation des sols, hydrologie), l'échelle de travail ainsi que la disponibilité des images.

Dans la présente étude, il s'agit d'une collecte des données à l'échelle régionale pour l'élaboration d'un schéma directeur de planification des ressources en eau et, dans ce but, l'échelle finale de restitution au 1/200 000, correspondant aux feuilles topographiques de l'Institut géographique du Burkina (IGB), est acceptable.

L'évaluation des indices de dégradation et de l'évolution du paysage sera basée sur l'interprétation des images Landsat MSS de 1984 et des images Landsat TM de 1994.

L'analyse de la situation actuelle sera effectuée essentiellement à partir de la série d'images récentes Landsat TM de 1994. Il s'agit d'une analyse visuelle de tirages au 1/200 000 de cartes images (images découpées au format des cartes IGB). Les photographies aériennes ainsi que les informations issues des enquêtes de terrain seront utilisées en complément.

Par ailleurs, il est prévu selon les besoins :

· une photo-interprétation d'autres compositions colorées sur écran,

· un traitement numérique spécifique pour certains thèmes.

Les résultats définitifs interprétés sur transparent seront présentés sous deux formes :

· des cartes au trait sur support reproductible,

· des cartes numérisées pour exportation vers le SIG.

FIGURE 4

La guinguette à Nasso. Schéma des points de mesure du débit des différentes sources principales

Les résultats attendus concernent essentiellement la caractérisation qualitative et spatiale des éléments suivants :

· types de végétation, zones de culture, plantations, habitat, etc.;

· bassins versants, réseau hydrographique, retenues d'eau, sources, etc.;

· phénomènes érosifs et dégradation du réseau hydrographique;

· raison d'être et fonction hydrologique ou hydrogéologique des bois tropicaux.

La géomorphologie, l'étude des linéaments et l'agropédologie seront également traitées. Tous les résultats feront l'objet d'études approfondies puis seront intégrés dans un SIG pour être valorisés dans le cadre du schéma directeur de planification.

Quelques remarques sur le choix des images

La différence de résolution géométrique au niveau de l'analyse diachronique va affecter la qualité des résultats, mais l'interprétation des photographies aériennes, pour compléter certaines données spécifiques, pourra contribuer à rehausser le niveau de détail de la situation ancienne (1984).

Par ailleurs, les deux saisons de prise de vue (novembre et avril/mai) étant différentes pour les deux séries d'images, les clés d'interprétation seront différentes pour les deux situations.

Conclusion

La mise en oeuvre du projet est assurée par la Direction régionale de l'hydraulique des hauts-bassins qui a confié l'acquisition des images à la Société géoconseil en novembre 1995 pour un montant de 374 170 FF.

Les travaux d'inventaire, y compris l'interprétation des images et la cartographie des états de surface, seront réalisés par un groupement de bureaux d'étude Sahel Consult-Fet appuyé par un expert du groupe des utilisateurs de la télédétection du Languedoc-Roussillon de Montpellier. Le délai contractuel est de 12 mois (hors hivernage) pour un coût de 3 350 000 FF.

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