Page précédente Table des matières Page suivante


D

Décentralisation

Dans les pays de tradition administrative française, la décentralisation est un mode d’aménagement des structures de l’administration dans lequel l’État transfère tout ou partie des attributions qu’il exerçait au niveau central, ou bien par l’intermédiaire de ses représentants territoriaux, à des institutions distinctes de lui, les collectivités publiques.

Ces institutions, dotées de la personnalité juridique et de l’autonomie financière exercent, sous la surveillance de l’État (garant de la légalité), librement le pouvoir de décision.

Dans les pays anglo-saxons, «le concept de décentralisation couvre la reconnaissance de compétences aux organisations de base et aux organisations non gouvernementales, et plus largement à tout ce qui ne relève pas du gouvernement central. Dans ce cas, le concept de décentralisation fait référence au niveau de prise de décision et englobe déconcentration, pouvoir des élus locaux et fonctionnement des communautés de base» (CUBRILLO M., 1998).

Depuis une dizaine d’années, les enjeux associés à la sécurisation foncière ont évolué. Les critiques de plus en plus ouvertes, formulées à l’encontre des systèmes politiques centralisés, les rencontres comme la conférence de Praïa, ont orienté les principes d’action sur le foncier dans le sens d’une décentralisation de l’État et du transfert de certaines de ses attributions à des instances locales.

La décentralisation devrait permettre aux communautés locales de s’organiser sous la forme de juridictions autonomes qui ont le pouvoir d’administrer, d’exploiter et de gérer ces ressources.

Le gouvernement national aurait une fonction d’arbitrage et garantirait l’équité.

La décentralisation semble aussi inspirée par l’urgence de trouver des solutions aux crises que de nombreux États traversent.

La prise en compte de l’existence d’un potentiel local est indispensable, ce qui suppose de traiter les populations comme de véritables partenaires dans les processus de négociation qui doivent accompagner la répartition des tâches de gestion.

Défens ou mise en défens

La mise en défens est le fait de défendre l’entrée d’un bois jeune aux bestiaux (bois en défens).

Par extension: mise sous protection de tout espace cultivé pour empêcher l’intrusion du bétail.

Défrichement

Action de mettre en culture un terrain resté en friche ou de rendre propre à la culture un terrain inculte (CLÉMENT J.-M., 1981).

Dans les défrichements accomplis en l'absence de moyens puissants (par exemple lorsqu’ils sont réalisés par le feu et la hache), il reste généralement des souches et des troncs.

Le terme est souvent employé dans le sens de déboisement ou de déforestation, mais il est plus général (BRUNET R. et al., 1993).

Fig. 16 - Défrichement
Source: www.fao.org/docrep/T1765F/t1765f0w.htm

Déguerpissement

Ce terme provient du verbe déguerpir dont le sens initial était d’abandonner la propriété d’un immeuble pour se soustraire à une servitude. En droit ancien, le déguerpissement c’est le droit du débiteur de se soustraire à volonté aux poursuites de son créancier en lui abandonnant la chose grevée de gage ou d’hypothèque.

«Le déguerpissement foncier consiste à chasser les occupants d’un sol par voie d’exécution forcée administrative, l’administration considérant que «ces gens n’ont aucun droit à être là.» L’évacuation du lieu se fait généralement par la force et sans en référer à l’autorité judiciaire (TRIBILLON J.-F., 1993). D’après J.-F. TRIBILLON, «Le déguerpissement pur et simple, sans aucun dédommagement ni ménagement, opéré par l’Administration elle-même ne se pratique plus guère, sauf peut-être à l’égard de gens qui se sont installés dans un site à aménager malgré la défense faite par les autorités. Ce qui le fait apparaître comme une sanction administrative appliquée à l’égard d’évidents contrevenants.»

Une idée répandue parmi les praticiens veut que les sols soient «libérés», débarrassés des droits fonciers qui l’encombrent, avant d’être aménagés.

J.-F. TRIBILLON (1993) y voit «une survivance de l’urbanisme colonial qui, de tout temps, n’a jamais accepté d’infléchir son dessein pour prendre en compte les traces d’une occupation indigène antérieure. Les techniques de «libération» des sols [...] se positionnent tant socialement que juridiquement par référence à deux modèles opposés et extrêmes: le déguerpissement pur et simple et l’expropriation».

Domaine

Ce terme d’origine latine provient de dominium, l’espace sur lequel s’exercent des droits possessifs exprimant l’idée de maîtrise plutôt que de propriété. «Jusqu’au XVIIIe siècle, c’est en terme de domaine que le rapport foncier est appréhendé et il continue à être ainsi organisé dans une grande partie des législations foncières francophones» (LE ROY E., 1998).

Le domaine est donc le pouvoir, le droit réel exercé sur un bien, afin d’en bénéficier et d’en disposer arbitrairement, sans aller à l’encontre de la loi ou d’un droit étranger.

Ce terme peut aussi être utilisé pour exprimer un territoire, une grande propriété, un ensemble de parcelles de terrain ou de bâtiments, groupés ou dispersés, exploités en bloc, ou divisés en fermes et métairies, mais appartenant à un seul et même propriétaire, ou à une association (FÉNELON, 1991). P. GEORGE (1993) ajoute que cette unité foncière, technique et économique, généralement de grande taille, fournit une importante production de caractère spéculatif, grâce à un équipement moderne.

Le Code Civil français, dans ses articles 537 et suiv., oppose aux biens qui appartiennent aux particuliers, ceux qui sont à la charge de l’État et désignés biens domaniaux. Le domaine est appréhendé en terme de domaine public ou de domaine privé.

Domaine public et domaine privé

Le domaine public est constitué de tous les biens qui sont affectés soit à l’usage du public, soit à un service particulier. En tant que tels ils sont soumis au régime de la domanialité publique.

Le régime de la domanialité publique implique l’inaliénabilité, l’imprescriptibilité et l’exclusion de la création de droits réels sur le domaine public. Ce dernier se subdivise en domaine naturel et en domaine artificiel, ces deux dépendances du domaine public sont dans de nombreuses législations définies par énumération. Ainsi en Côte-d’Ivoire, ils se décomposent comme suit, cité par LEY A. (1986, 104-106).

1. Le domaine public naturel

Le domaine public naturel est un ensemble de biens que la loi confie à l’Etat pour qu’il le mette à la libre disposition du public (TRIBILLON, 1993).

Il comprend:

- les rivages de la mer jusqu’à la limite des plus hautes marées;

- les cours d’eau navigables ou flottables...;

- les sources et cours d’eau non navigables ni flottables dans les limites déterminées par niveau des plus hautes eaux avant débordement;

- les nappes aquifères souterraines, quelles que soient leur provenance, leur nature et leur profondeur.

2. Le domaine public artificiel

Le domaine public artificiel est un ensemble formé des biens que l’Etat aménage spécialement pour servir à l’exécution de ses tâches et missions de service public et de puissance publique (TRIBILLON, 1993).

Il comprend:

- les canaux de navigation et leurs chemins de halage, les canaux d’irrigation et de dessèchement et les aqueducs exécutés dans un but d’utilité publique, ainsi que les dépendances de ces ouvrages;

- les chemins de fer, les routes, les voies de communication de toute nature et les dispositifs de protection de ces voies; les conduites d’eau, les conduites d’égouts, les ports et rades, les digues marines et fluviales, les sémaphores, les ouvrages d’éclairage et de balisage, ainsi que leurs dépendances;

- les lignes télégraphiques et téléphoniques et leurs dépendances, ainsi que les postes aériens des stations radio-électriques...;

- les ouvrages déclarés d’utilité publique en vue de l’utilisation des forces hydrauliques...;

- les ouvrages et fortifications des places de guerre ou des postes militaires...


En Afrique, l'emprise de l'Etat sur le territoire national est si jalousement revendiquée que l'environnement naturel est entièrement approprié par la puissance publique étatique. Au Mali, la loi définit la propriété publique dans sa composition domaniale, publique et privée.

Le domaine public, constitué «de l'ensemble des biens de toutes natures, immobiliers ou mobiliers, classés ou délimités dans le domaine public, affectés ou non à l'usage du public» (art. 5 du Code domanial et foncier), se décompose en un domaine naturel et en un domaine artificiel. Le domaine public naturel comprend les «sites naturels» que sont les cours d'eau, sources, lacs et étangs, nappe phréatique. La liste ne semble pas exhaustive mais seul le législateur décide de la domanialité naturelle, rejetant ainsi toute latitude d'interprétation au juge. Le domaine privé foncier de l'Etat comprend quasiment l'ensemble du sol malien: les terres faisant l'objet d'un titre foncier à son propre nom ainsi que toutes les terres non immatriculées, celles dites "vacantes et sans maîtres" (sur lesquelles ne s'exerce aucun droit traditionnel) et celles qui supportent des droits traditionnels. Le domaine privé de l'Etat et le domaine public naturel constituent un grand domaine national environnemental incluant en son sein les espaces de pêche, de chasse, forestier et des aires protégées constitutifs d'espace-ressources et superposant, plus ou moins, des fonctions spatialisées.

(http://www.FAO.ORG/DOCREP/W3723F/W3723F05.HTM)

Le domaine privé de l’État est quant à lui en principe constitué par tous les biens autres que ceux appartenant au domaine public. Ces biens peuvent être aliénés et grevés de droits réels au profit de particuliers.

Domaine éminent et domaine utile

Avec pour seule référence la "domanialité", un nouveau régime voit le jour entre 1899 au Congo français et 1901 en Côte-d’Ivoire, dans un contexte marqué par une vive concurrence entre les objectifs techniques des nouveaux services des domaines et les nécessités du maintien de l’ordre public que doivent assurer les administrateurs. Après avoir tenté de provoquer la transformation volontaire des droits coutumiers en droits de propriété, puis avoir prétendu que la colonie était propriétaire des terres par application de la théorie de la succession d’Etats, on redécouvre derrière la référence au domaine les notions du droit féodal. Ce droit féodal français distinguait deux domaines.

Le domaine éminent, terme d’origine latine dominium directum, appartenait au seigneur qui exerçait sur ces terres des compétences politiques, militaires, judiciaires et économiques. En effet, à l’époque féodale, en Europe de l’ouest, cette expression juridique désignait le droit premier (absolu) du roi ou du Seigneur d’exercer ces compétences.

D’après E. LE ROY, (1991, 33) «ces compétences ont été, à l’âge moderne, transférées à l’État».

Dans les anciennes colonies européennes, les compétences exercées par la puissance coloniale sont passées, à l’indépendance, à l’Etat nouvellement indépendant, qui applique le droit moderne écrit. C’est ici que se situe le glissement entre les terres gérées en commun, selon le droit traditionnel non écrit et le droit codifié des anciennes puissances coloniales, au profit de la classe dirigeante mise en place au moment des diverses indépendances.

Le phénomène évoqué ci-dessus a eu et a toujours des conséquences extrêmement importantes.

Le titulaire du domaine éminent disposait d’un droit de propriété directe qui l’autorisait à percevoir une redevance. Il pouvait laisser utiliser une partie des terres du domaine éminent à un vassal.

Le domaine utile, terme également d’origine latine dominium utile, désignait les terres pour lesquelles un seigneur concédait à un vassal le droit d’usage contre le payement d’une redevance (le cens). Le vassal bénéficiait donc d’un droit de propriété utile qui lui donnait juste le droit d’utiliser la terre et de s’approprier de la production et rien de plus.

«Ces deux domaines «éminent» et «utile» sont complémentaires l’un de l’autre et doivent être distingués de «l’alleu», terre libre de toute relation féodale de sujétion et où peut s’exercer le plenum dominium (pleine propriété)» (LE BRIS, LE ROY, MATHIEU, 1991) en toute indépendance.

Domaine national ou domaine foncier national

Le domaine national ou selon les cas domaine foncier national est une catégorie juridique distincte utilisée dans plusieurs législations foncières pour désigner généralement les terrains non classés dans le domaine privé ou public de l’État moderne, ou bien non appropriés privativement selon les procédures de l’immatriculation cadastrale, par les particuliers (LE BRIS, LE ROY, LEIMDORFER, 1982).

Dans ce cas, par exemple, a disparu la dimension de compétence juridique sur les gens qui utiliseraient le domaine national et/ou les ressources de partie du domaine national.

L’accès à l’indépendance des anciens territoires coloniaux a engendré, entre autre, un bouleversement de la fonction de l’Etat africain. En effet, en transformant sa fonction de «conservation» des terres vacantes et sans maître relevant du domaine privé colonial en une «propriété», il se donne les moyens tantôt de se réserver l’usage et les fruits de l’appropriation des terres, tantôt de contrôler le droit d’en disposer, tantôt de pérenniser la politique coloniale et de généraliser la propriété privée (LE BRIS, LE ROY, MATHIEU, 1991).

Toutefois des nuances existent selon les pays quant à la définition du domaine national ou du domaine foncier national.

1. Le domaine national au Cameroun

L’ordonnance n° 74-2 du 6 juillet 1974, portant création du domaine national, intègre par défaut dans la catégorie Domaine national l’ensemble des terres du pays non immatriculées, soit au nom de particuliers, soit au nom de l’État.

La création du domaine national retire de fait aux collectivités coutumières les droits sur les terres qu’elles géraient traditionnellement.

2. Le domaine foncier national au Burkina Faso et au Togo

Le domaine national au Sénégal et le domaine foncier national au Togo sont des catégories légales spécifiques, distinctes de la propriété d'Etat et de la propriété enregistrée, individuelle ou collective. Tandis que l'Etat se réserve le droit de contrôle sur ces terres, cette propriété nationale appartient à la nation et les agriculteurs peuvent en obtenir l'accès moyennant l’autorisation de l'Etat et à condition d’accepter les restrictions imposées par celui-ci.

Au Burkina Faso, le domaine foncier national est une édification légale issue de la réorganisation agraire et foncière (RAF), et a pour objectif d’assurer la tenure et le contrôle par l’Etat de toute terre située dans les limites territoriales du pays (Ouédraogo, cité dans LE BRIS, LE ROY, MATHIEU, 1991). Sous la RAF, toute terre est devenue la propriété exclusive de l'Etat, unique propriétaire foncier. Toute autre entité publique ou privée légale et individuelle peut uniquement avoir des bâtiments pour propriété. Depuis que la terre fait partie de la propriété nationale du Burkina Faso, elle n'est dès lors plus soumise à des règles habituelles, est inaliénable et ne peut être appropriée. Cependant, elle peut être l’objet de divers droits d’usage, selon les objectifs visés par ceux-ci. Ces droits sont cependant accordés à condition que la terre soit mise en valeur, selon certaines limites et dispositions spécifiques. L'amendement de 1991 de la RAF régit l'attribution de la terre qui reste la propriété légale de l'Etat, mais peut, à l'avenir, être vendue ou transférée en tant que propriété privée à des personnes ou à des entités légales correspondant aux conditions du décret. La terre transférée de cette façon cessera dès lors d'être propriété de l'Etat (Ouédraogo, 1989, cité dans LE BRIS, LE ROY, MATHIEU, 1991).

Voir aussi: régime domanial.

Dot

En Occident, la dot constitue l’ensemble des biens qu’une femme apporte en se mariant. Il peut aussi s’agir des biens donnés par un tiers dans le contrat de mariage à l’un ou l’autre des époux. Cette pratique reste encore vivace dans les familles qui possèdent d’importants patrimoines.

Le terme dot est aussi souvent utilisé pour qualifier la compensation matrimoniale versée par le futur mari ou sa famille aux parents de sa future épouse.

Droit à la hache

Le droit d’usage des terres est souvent exprimé par la phrase «droit de feu» ou «droit à la hache» qui signifie que celui qui brûle ou coupe la végétation naturelle a le droit de culture (HOSKINS M. et GUIGONIS G., 1979).

Dans son article «Droit d’usage et propriété privée», Jean-Marc GASTELLU (1980) parle d’une «pyramide hiérarchique de droits qui s’emboîteraient les uns dans les autres: au sommet, un droit de feu; puis, des droits de hache; enfin des droits d’usage». Et il ajoute «le chercheur sur le terrain ne reconstitue qu’avec peine cette pyramide et se trouve confronté à de multiples conflits de légitimité, chaque usager prétendant être le maître de sa terre».

Droit coutumier

Le droit coutumier est l'ensemble des règles juridiques nées de l'usage dans une région ou un pays (CALSAT, 1993), établies par la coutume. Celle-ci représente une norme de droit objectif fondée sur une tradition populaire qui prête à une pratique constante, un caractère juridiquement contraignant et qui devient une véritable règle de droit mais d’origine non étatique (et en général non écrite) que la collectivité a fait sienne par habitude, dans la conviction de son caractère obligatoire. Elle peut également être une règle traditionnelle, de caractère savant ou plus technique, reçue par la jurisprudence ou issue d’une pratique professionnelle, parfois tirée d’un fonds d’anciennes maximes et souvent conservée sous forme d’adage.

Le droit coutumier dans le contexte africain fait référence à l’ensemble des lois et des coutumes indigènes passées et présentes. Des systèmes juridiques étatiques et non étatiques se trouvent dès lors imbriqués de façon complexe et, de cette imbrication entre droits traditionnels coutumiers, étatiques et populaires, naît une cohabitation ambiguë, sinon une confusion entre droit civil et «droit des gens», entre l’autorité reconnue aux chefs traditionnels et le pouvoir réservé exclusivement à l’administration (LE BRIS, LE ROY, MATHIEU, 1991).

Le régime colonial français a tenté d’établir des réponses définitives aux coutumes locales avec par exemple, la publication du «Grands Coutumiers de l’Afrique Occidentale Française» en 1939. Les Anglais ont également essayé de recueillir de telles connaissances, avec cependant un moindre penchant pour la codification. Dans les années 1950, A.N. ALLOT (1960) a mené un projet en vue d’inventorier systématiquement les règles coutumières dans les pays anglophones d’Afrique et d’étudier leur harmonisation avec les contextes juridiques et institutionnels modernes. Un certain nombre d'auteurs ont remis en cause la validité de telles règles et coutumes, et ont argumenté que les règles telles qu’inventoriées par les administrateurs coloniaux étaient souvent de simples reconstructions et parfois même de pures inventions de la part des chefs coutumiers, dans leur tentative de se faire légitimer de plus grands pouvoirs qu’ils n’en exerçaient du temps de la période pré-coloniale.

Droit d’abus

Le droit d’abus permet au titulaire du droit de propriété d’affecter volontairement ses biens.

Droit de feu

Le droit de feu permet à l’occupant de mettre le feu à la végétation en vue du défrichement d’une terre.

Selon LEPLAIDEUR (1985), l’appropriation d’un nouveau territoire était symboliquement marquée par la défécation du chef dans un trou creusé dans la terre afin de désigner les frontières naturelles du nouveau territoire. A l’intérieur du mvog, c’était le «droit de hache» - le droit d’abattre des arbres - et les droits d’usufruit qui devenaient alors le signe d’acquisition de la terre, car c’était principalement en défrichant des terres que les populations établissaient leurs droits d’utilisation sur une ou des zones de terres forestières. Dans d’autres régions d’Afrique, le droit de hache pouvait être remplacé par le «droit de feu», comme c’était le cas chez les lamanats de Sénégambie (associé à une déforestation massive au moyen âge). Presque partout, ces droits pouvaient toutefois être supplantés par le «droit indiscutable» de la conquête.

(http://www.ODIFPEG.ORG.UK/FRANCAIS/PUBLICATIONS/RDFN/21/RDFN-21E-FRANCAIS.PDF)

Droit de gestion

Le droit de gestion, sur la terre et les ressources naturelles qu’elle supporte, confère à son titulaire l’autorisation de réglementer les modes d’usage et de transformation des ressources. Il a ainsi le droit de procéder à des améliorations. Mais s’il le désire, être titulaire d’un droit de gestion l’autorise aussi à négliger la ressource sur laquelle ce droit porte.

Droit de jouissance

Dans un sens strict, le droit de jouissance est le droit de percevoir les fruits d’un bien (par exemple, les loyers d’un immeuble) sur sa seule signature et d’en disposer sans en être comptable (jouissance des revenus).

Dans un sens plus large, il englobe la jouissance au sens strict, ainsi que l’usage et la jouissance de toutes sortes de biens appartenant à autrui (le titulaire du droit de propriété ou une tierce personne) mais à charge d’en conserver la substance (CORNU, 2000). En effet, ce droit réel de jouissance attribué à l’usufruitier lui permet d’utiliser le bien, percevoir ses fruits et bénéfices (droit de jouissance), mais pas d’en disposer ou de l’aliéner.

BRUCE (1998) ajoute que ce terme s’utilise pour signaler un des trois attributs de la propriété: usage, usufruit et abus. Les droits d’usufruit sont des droits d’usage, individuels ou familiaux, qui existent sous les régimes fonciers coutumiers.

Droit de l’eau

De nombreux aspects relatifs aux droits de l’eau sont liés aux questions de tenure foncière. L'accès aux ressources aquatiques est crucial pour les besoins élémentaires de la subsistance de même que pour la production industrielle et agricole, la santé, l’abreuvement des animaux, la pêche et la navigation, ainsi que pour la production d'électricité.

«La distinction entre l'eau naturellement disponible et l'eau fournie grâce à une infrastructure est d'importance essentielle pour les droits de l’eau. Souvent, l'eau naturellement disponible est considérée comme une ressource d'accès libre. Les droits aux eaux souterraines sont habituellement accordés au propriétaire de la terre qui les recouvre si celui-ci possède une pompe. Les droits à l'eau fournie par une infrastructure sont généralement accordés aux personnes qui ont construit et qui maintiennent cette infrastructure. Pratiquement partout, des investissements en infrastructure légitiment les droits sur l’eau, rendue disponible grâce à eux» (NEDA, 1997). Le besoin d'investissements en capital pour les grands travaux d'irrigation impliquera souvent la participation du secteur public (Etat/donateur) ou privé. Dans ces deux cas, la terre qu’affecte une telle infrastructure peut être expropriée ou achetée par le gouvernement, ce qui soulève des questions de compensation pour les détenteurs traditionnels de droits fonciers (IIED, 1999).

A mesure que la densité de la population augmente et que l’utilisation de la terre s’intensifie, des conflits dans l'utilisation de l’eau (en particulier dans les régions plus arides), se multiplient également. La disponibilité en eau d'irrigation augmente la valeur de la terre, ce qui peut avoir pour effet que certains propriétaires fonciers revendiquent des anciens droits qu'ils ont loués, «donnés» ou prêtés à d'autres individus (femmes, locataires, parents, etc.) (NEDA, 1997). En raison de l'expansion de l’agriculture dans des zones marécageuses, il est de plus en plus difficile pour les éleveurs de maintenir leur ancien accès à ces précieuses zones humides de pâturage (IIED, 1999). Le conflit peut également surgir au niveau international lorsque d’importants cours d’eau traversent une ou plusieurs frontières nationales, tels que les fleuves Niger, Sénégal, Chari et Logone, au moment où des demandes accrues d’eau se font jour face à une disponibilité limitée de celle-ci pour l’industrie et l’agriculture.

L'appropriation et la gestion traditionnelles de la pêche intérieure sont fondées sur le contrôle de l'eau. Sur de nombreux points, l'appropriation de tels droits est semblable aux traditions relatives à l'appropriation de la terre. Les droits d’occupation auraient été accordés, dans le langage figuré populaire, par les esprits locaux, réels propriétaires des ressources, aux premiers arrivés dans la région. Cette croyance établit le fondement religieux pour le contrôle des ressources de l'eau et des poissons et explique l'apparition des chefs contrôlant l'eau, la terre, le pâturage, etc.

Dans de nombreux pays, les ressources en eau ont été nationalisées et les droits des chefs traditionnels à gérer et contrôler l’usage de l’eau ont été largement délimités par les règlements et les institutions nationales.

KASSIBO (2001) décrit la façon dont les ressources du delta intérieur du Niger au Mali central ont été appropriées d'une manière symbolique par les groupes les plus anciens dans la région en vertu des droits de la première occupation et identifie la façon dont les droits de pêche sont contrôlés.

Il explique que le ji tigiya (littéralement, le contrôle des eaux) est «un droit exclusif pour exploiter la pêche et peut être subdivisé en mares, plaines inondées, lacs, canaux, marigots, bras d'un fleuve, etc.». Un droit similaire mais quelque peu distinct existe pour les fleuves ouverts. «Il appartient à une lignée et est accordé de père en fils, selon le principe de l'ancienneté. Ce droit peut être transféré de trois manières: par le mariage (legs aux filles de la lignée); comme argent du sang - compensation pour un meurtre perpétré par un membre de la lignée- ou grâce à la reconnaissance de services fournis au chef de l'eau. Il peut être librement accordé pendant des opérations collectives de pêche, sans aliéner les privilèges des lignées propriétaires et peut temporairement être accordé à des tiers en dehors de la lignée, moyennant le payement d’une commission symbolique, équivalente à un tiers de la prise».

«Le chef de l'eau, d’une part, est le gérant du territoire aquatique et d’autre part, le chef de sa lignée. Ses fonctions comprennent l’établissement du calendrier de pêche, la réalisation de sacrifices pour l'esprit afin d’assurer la protection des pêcheurs, la reproduction et le renouvellement de la ressource et la réparation de toutes les fautes commises, la prohibition des mauvaises pratiques en matière de pêche, la constitution du règlement d'accès aux ressources et la mise à l’écart de certaines étendues d’eau afin d'assurer la conservation des ressources, l’arbitrage de conflits et la fixation de l’amende aux coupables, y compris le contrôle de son versement effectif, l’organisation d’expéditions spéciales de pêche et enfin l’octroi de droits provisoires moyennant le paiement d’une commission. Le chef de l'eau jouit de certaines prérogatives telles que l’accès au meilleur endroit pour la pêche et le droit d'être le premier à pêcher».

Droit de parcours

On distingue le droit de pacage et le droit de pâturage.

Alors que le droit de pacage fait référence au droit de faire pâturer en forêt ou sur des surfaces réduites (pouvant être occupées par les cultures pendant une période de l’année), le droit de pâturage se rapporte lui plus explicitement à l’accès aux pâturages.

Plus fondamentalement, en économie pastorale, le droit de pâturage renvoie au type de maîtrise exercé par les éleveurs sur les ressources (terres et eaux) et au problème de la sécurisation de cette maîtrise par le législateur moderne.

Droit de préemption

En droit français, «le droit de préemption est un droit qui permet à son titulaire d’acquérir par priorité un bien mis en vente par son propriétaire» (JACQUOT, 1989 in TRIBILLON J.-F., 1993). La loi institue le droit de préemption au bénéfice de particuliers tels que les fermiers ou de personnes morales telles que les collectivités locales. Le Code Civil français accorde également, dans le cas des biens indivis, un droit de préemption aux indivisaires (les tenants de l’indivis), lorsque l’un d’entre eux entend céder son bien, à titre onéreux, à une personne étrangère à l’indivision.

Le droit de préemption offre l’avantage aux collectivités publiques qui en sont titulaires (1) de disposer d’un procédé d’acquisition foncière plus souple que l’expropriation, (2) d’être tenu informé des intentions de vente du propriétaire et du prix de vente, et (3) de contrôler les prix (TRIBILLON J.-F., 1993).

Le nouveau Code foncier guinéen permet la création de périmètres d’intervention foncière dans un but d’intérêt général au bénéfice de personnes publiques que l’acte de création désigne. «Ces personnes y disposent d’un droit de préemption à l’égard de tout immeuble bâti ou non qui fait l’objet d’une aliénation volontaire à titre onéreux». La loi ne mentionne pas les modalités d’application de cette disposition légale et reste, d’après TRIBILLON (1993), trop imprécise. L’auteur doute par ailleurs de l’intérêt de cette loi dans le contexte des pratiques foncières guinéennes profondément informelles. Il reste sceptique quant à l’utilité de cet instrument d’intervention dans le cadre de la politique foncière guinéenne.

Le droit de préemption est également attribué aux collectivités locales pour des raisons de développement urbain ou de protection de l’environnement; il est également attribué à des organismes ruraux (par exemple la SAFER, en France) pour orienter les terres agricoles vers les agriculteurs qui en ont le plus besoin, pour installer des jeunes agriculteurs, améliorer le parcellaire, lutter contre la spéculation foncière. Ce droit permet de profiter du marché foncier pour orienter le foncier en vue de satisfaire diverses politiques.

Droit de propriété

Le droit de propriété est le droit réel le plus achevé car il permet d’user, de jouir et de disposer des choses d’une manière exclusive et absolue. Selon le Code Civil (article 544) seuls la loi et les règlements peuvent limiter l’exercice du droit de propriété. Ces lois et règlements sont fonction de «l’intérêt général» déterminé par l’État.

À la Révolution française, l’article 17 de la déclaration des Droits de l’Homme déclare que la propriété est un droit inviolable et sacré dont nul ne peut être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique légalement constatée l’exige évidemment et sous la condition d’une juste et préalable indemnité.

La prééminence de la propriété privée correspond à la volonté de favoriser une société dans laquelle l’autonomie de la propriété va de pair avec l’autonomie de l’individu.

D’après J. COMBY (1991), il convient de réviser notre interprétation du texte de 1789, dans lequel, d’après lui, il ne s’agissait pas de la propriété, mais des propriétés. La Révolution n’aurait donc pas créé la propriété, mais elle aurait consacré la suprématie d’un ayant droit sur les autres.

«La conception absolutiste de la propriété est un mythe créé grâce à l’invention sur mesure d’un droit romain imaginaire qui a influencé le Code Civil. Nous vivons sur ce mythe: notre législation commence toujours par faire semblant de croire à la suprématie du droit de propriété, pour multiplier ensuite les limites, contraintes et exceptions à son exercice. Retrouvons le pluriel de la Déclaration de 1789: ce n’est qu’en reconnaissant la pluralité des droits qui s’exercent légitimement sur l’espace et en mettant fin à la protection illusoire d’un régime mythique, que nous instituerons de véritables garanties.»

Le droit de superficie c’est le nom donné au droit de propriété qui porte sur les constructions et les plantations dans le cas où la propriété de ces choses est dissociée de la propriété du sol.

Le droit de superficie en droit français

«Le droit de superficie n’est pas régi par le Code Civil ni par une loi ultérieure. Si la loi l’ignore, la doctrine et la jurisprudence le considèrent comme un droit réel de plein exercice.

Ce droit a été introduit en Europe et aussi en Afrique au XX° siècle [...]. Le Code Civil français adopte le principe que le propriétaire du fonds est réputé propriétaire de ce qu’il contient, du «dessus», sauf preuve du contraire. Cette preuve peut évidemment résulter d’une convention expresse passée entre le propriétaire du fonds - le «tréfoncier» - et le propriétaire des constructions et plantations dénommé le «superficiaire».

La jurisprudence française reconnaît que le tréfoncier et le superficiaire sont également propriétaires de biens distincts physiquement superposés.... Le droit de superficie ne se rapporte pas seulement à deux biens existants. Il peut également caractériser le droit que détient celui qui s’apprête à construire à l’égard du propriétaire du sol. Ce dernier reconnaît à son co-contractant le droit de construire sur son sol un droit de propriété superficielle qui prend définitivement corps dès que la construction est édifiée» (TRIBILLON J.-F., 1993)

Le droit de disposition autorise un propriétaire à accomplir tous les actes matériels ou juridiques de transformation, de consommation, de destruction, d’abandon ou d’aliénation.

«Le droit d’abuser n’est rien d’autre que celui de donner aux biens toute affectation possible et voulue par le titulaire de ce droit. Le droit de détruire inclus dans l’abusus n’est que l’expression radicale de l’absence d’obligation vis-à-vis d’autrui. Il constitue une révolution dans les rapports entre les hommes avant d’être une révolution dans les relations de l’homme aux choses. Autant les obligations dont est chargé le patrimoine assurent une existence et une reproduction des structures communautaires, autant l’absence d’obligations positives qui caractérise la propriété tend à autonomiser les individus dans la vie sociale et dans le cours du temps» (MADJARIAN G., 1991)

Le droit de détruire inclus dans l’abusus est toutefois limité dans la mesure où le propriétaire est tenu de gérer en bon père de famille, et que pour des raisons environnementales, de développement durable, les propriétaires seront de plus en plus tenus de respecter ou de faire respecter des règles de gestion garantissant le maintien des qualités de leurs biens.

Le droit d’accès fait référence au fait d’avoir le droit d’entrer dans une zone physique définie.

En droit civil, le droit d’usage, élément du droit de propriété, est un droit réel qui permet à son titulaire, l’usager, de se servir d’une chose appartenant à autrui, mais selon sa destination.

L’usager peut ainsi percevoir les fruits de cette chose, mais jusqu’à concurrence de ses besoins et de ceux de sa famille. Le droit d’usage constitue l’un des attributs de la propriété, l’usus et de l’usufruit.

En régime foncier africain, le terme «usage» ne se réfère pas au droit d’usage civiliste. «Il est lié à la communauté de résidence et perpétué par une occupation stable et définitive, affirmée par le travail d'une même lignée de cultivateurs» (GASTELLY, 1982, cité par CUBRILO M.,1996). Ce droit d’usage est exercé par les descendants des premiers occupants ou attribué sous forme de prêt, conditionné ou non.

Ce droit permet de décider des bénéficiaires potentiels du droit d’accès et des conditions d'obtention, de perte ou de transférabilité de ce droit (CUBRILO M., 1996).

Le droit d’exclure: l'exclusion des non-ayants droit d’accès est un élément central du régime de propriété commune. L'efficience du régime de propriété commune dépend en effet d'un système d'autorités pour légitimer et faire respecter les droits d’accès et pour établir les arrangements locaux. A ce niveau, l'État a un rôle important à jouer car il peut apporter une légitimité externe.

Typologie des droits de SCHLAGER et E. OSTROM (École des New Institutionalists)

Partant du postulat que, dans de nombreuses sociétés, il n'est pas suffisant, pour analyser des droits d’appropriation, d'opposer les statuts des propriétaires et des non-propriétaires, ces deux auteurs proposent une typologie de droits qui permet de combiner leurs différents aspects fonctionnels. Ils distinguent des droits de propriété à un niveau opérationnel (où les événements se déroulent) et des droits à un niveau collectif ou «droits d'administration» (où se prennent les décisions).

Les droits opérationnels, qui sont plutôt des droits individuels, sont les droits d’accès (droit d'entrée dans une zone) et les droits de prélèvement (droits de prélever une ressource particulière non aménagée). Au niveau collectif, ils distinguent les droits de gérer (right to manage, c'est-à-dire des droits de mise en valeur et d'aménagement), les droits d’exclure et d'inclure (les droits de transférer les droits précédents) et les droits d’aliéner (droits de disposer des autres droits, en particulier du droit d’exclusion, en principe seulement reconnu dans le cadre du droit privatif de type occidental).

Droit du premier occupant

Occupant: celui qui acquiert par occupation selon le principe: «la terre appartient au premier occupant».

Il s’agit donc de l’acquisition de la propriété résultant de la prise de possession d’une chose mobilière ou immobilière sans maître, avec l’intention de se l’approprier (BOUSQUET J., 1953).

Sur le plan coutumier, ce droit réfère:

- au premier défricheur, l’ancêtre fondateur du groupe, à partir duquel la terre lignagère est considérée comme inaliénable;

- au droit de feu et au droit à la hache.

Notons que ces deux derniers droits peuvent également ouvrir un droit d’usage sur une terre non cultivée avec l’accord de l’autorité éventuelle qui possède une maîtrise antérieure sur cette terre.

Ainsi du défrichement dans les «brousses», dont le retour au lignage se fait dès la culture terminée.

Le droit du premier occupant pose la question de la reconnaissance de la propriété effective de ces terres par la législation moderne. Ajoutons que l’incursion de la valeur négociable et aliénable de la terre dans les milieux ruraux met en danger les droits d’usage acquis par les populations allochtones auprès des lignages «maîtres de la terre» (VERDIER R., 1986).

Droit écrit

Le droit écrit consiste en l’ensemble des règles juridiques établies par les autorités investies du pouvoir législatif ou réglementaire et constatées par des textes officiels.

Dans la théorie juridique classique, le droit écrit s’oppose au droit oral.

Les théories juridiques classiques offrent en général une vision péjorative de l’oralité juridique. Celle-ci est définie négativement par rapport au droit écrit. Ce type de jugement est à notre sens fortement empreint d’évolutionnisme et doit être critiqué: il est certain que le passage de l’oral à l’écrit est le signe d’une profonde mutation, il est moins sûr que cette mutation soit un progrès, qui reléguerait l’oralité à un stade «primitif» de la pensée humaine (ROULAND N., 1988).

Droit foncier

D'un point de vue strictement juridique, le droit foncier est l’ensemble des dispositions comprenant les règles relatives à l’accès à la terre et à sa gestion. Le droit foncier est déterminé par la législation étatique et par la gestion au jour le jour des enjeux que poursuivent les communautés rurales et urbaines.

Mais il est également régi par des usages locaux instituant des droits et des pratiques foncières particuliers qui peuvent s'écarter largement du droit étatique et éventuellement s'opposer à lui.

Le droit foncier, en particulier le droit foncier coutumier, est toujours en rapport avec les structures sociales, le niveau de développement économique et la conception des rapports entre les hommes et les choses dont ils ont l’usage. Les relations des hommes et des groupes à propos de l'accès à la terre et de son usage induisent une très grande variété de dispositions foncières (principes, règles formelles, conventions et pratiques de toutes sortes). Il en résulte une formidable diversité et un enchevêtrement complexe de droits fonciers qui rend toute tentative de classification et de définition de ces droits périlleuse, et peut même devenir dangereuse si elle conduit à l'élaboration de politique foncière fondée sur des analyses normatives. Cette difficulté est renforcée par le fait que les droits fonciers sont très sensibles aux changements de conjoncture et que les conventions foncières sont toujours susceptibles d'être renégociées par les différentes parties en présence (coutumières et non coutumières) (voir CHAUVEAU J.-P., 1996, pour une discussion sur la cohérence des systèmes fonciers et la typologie des droits).

L'encadré ci-avant, comme les dérives de la thèse de HARDIN («La tragédie des communaux», voir communaux) montre qu'il importe de sortir d'une logique juridique binaire (propriété privée/communaux, domaine public/domaine privé), issue du droit romain et du Code napoléon, pour décrire et comprendre les logiques foncières en œuvre dans les sociétés dites «communautaires». En effet, «ces oppositions, qui fondent la vie juridique, ne sont propres qu'à des sociétés de type individualiste et dont le Droit est totalement assimilé à la loi émise par l'État» (LE ROY E., KARSENTY A., BERTRAND A., 1996).

On voit apparaître de nouvelles approches qui tentent d'échapper à la logique dite «moderne» (les systèmes juridico-institutionnels des pays développés) pour mieux rendre compte de la complexité et de l'imbrication des droits fonciers en vigueur dans les sociétés coutumières (qui ne sont en fait plus tout à fait coutumières mais ne sont pas prêtes non plus à assimiler telles quelles les dispositions foncières «modernes»).

Parmi ces tentatives, on peut citer l'approche de E. SCHLAGER et E. OSTROM (1992) qui part du postulat qu'il n'est pas suffisant d'opposer les statuts de propriétaires et de non-propriétaires pour analyser les droits d’appropriation (voir Droit de propriété). La distinction opérée par D. BROMEY et M. CERNEA (1989) entre quatre grands types de régimes fonciers va dans le même sens (voir Tenure). La théorie des maîtrises foncières (développée par E. LE ROY et son équipe), qui privilégie le critère d'affectation de l'espace à des usages multiples des ressources, est également une réponse à l'impasse des approches conventionnelles.

La théorie des maîtrises foncières

Il s'agit d'une démarche prospective fondée sur la constatation d'un nouveau droit de la pratique sur base d'un métissage des dispositifs de régulation foncière: les dispositifs endogènes traditionnels et les techniques «propriétaristes» modernes issues de la colonisation.

Elle combine dans un tableau à deux entrées (une «matrice foncière») les modes d’appropriation (l'axe horizontal), allant de la maîtrise indifférenciée (droit d’accès) à la maîtrise exclusive absolue (droit d’aliéner), et les modes de co-gestion (axe vertical), allant de la co-gestion par tous à la gestion réservée à une seule personne. L'axe horizontal, qui s'inspire de la typologie de E. SCHLAGER et E. OSTROM, définit le niveau de compétence foncière reconnu à l'ayant droit, tandis que l'axe vertical définit le niveau social de la gestion des droits (du niveau le plus collectif au niveau le plus individuel). Les droits fonctionnels distingués par E. SCHLAGER et E. OSTROM peuvent donc tous être alternativement gérés de manière collective ou individuelle. La matrice définit de la sorte vingt-cinq modes de régulation (voir le tableau explicatif sous le terme «propriétaire foncier»).

Pour une description complète et une explication de la théorie des maîtrises foncières, voir LE ROY E., KARSENTY A., BERTRAND A. (1996). Des applications au pastoralisme et à la foresterie y sont proposées.

Droit foncier colonial

Le régime foncier colonial français peut être caractérisé par l'introduction du concept de la propriété d'Etat et par la tentative de favoriser la propriété privée parmi la population locale, par l'intermédiaire des programmes d'enregistrement foncier. Même si le système français cherchait à favoriser la conversion de la terre publique en propriété privée et à établir une clause légale pour enregistrer des terres au nom d’autochtones, ceci a eu en réalité peu d'impact et les systèmes coutumiers ont persisté avec peu d’interposition directe de la part des autorités. La législation en Afrique occidentale francophone est fondée sur le code civil français, avec une attention particulière sur l’uniformisation juridique et la codification. Les autorités françaises n’ont cependant jamais reconnu la possession de terres par des chefs traditionnels (IIED, 1999).

Le régime foncier colonial britannique se rattachait à un ensemble différent de principes. La terre était définie en termes de terre coloniale blanche d'une part et de réserve et terres coutumières (ou «autochtones») de l'autre. La distribution de la terre entre les deux groupes était clairement établie et aucune tentative n'a été entreprise afin de favoriser la propriété foncière individuelle dans les réserves. Les Anglais ont cherché à établir le contrôle territorial et administratif en formant des alliances avec les grands chefs coutumiers ou les chefs suprêmes, c'est-à-dire avec les chefs qui avaient la haute main sur le territoire. Dans la pratique, les pouvoirs coutumiers exercés par les autorités locales dans les pays de l'Afrique occidentale d'expression anglaise ont souvent été délimités par l'Etat colonial, notamment par l’annonce au Journal Officiel de la mise en réserve de forêts et celle de la création des concessions minières. En outre, les Anglais ont introduit un régime de propriété foncière inaliénable dans certaines régions, comme en Sierra Leone. Le système de location à bail était largement répandu, habituellement avec des baux de 99 ans pour des propriétés tenues par les colons.

Des études récentes indiquent que vers la fin de l'ère coloniale, dans la plupart des pays anglophones de l'Afrique, les systèmes juridiques autochtones, en général, ainsi que ceux relatifs à la loi de propriété en particulier étaient dominés par les concepts, les doctrines et les valeurs élaborés et imposés par la loi anglaise (OKOTH-OGENDO cité dans RAINTREE, 1987).

Cependant, dans l'ensemble de l'Afrique occidentale, en raison des grandes difficultés d’application de la loi foncière, les décisions prises au sujet des demandes de terre ont reflété plus souvent la puissance et l'influence des différents partenaires, plutôt que l’application à la lettre de la loi.

Droit foncier coutumier

De droit coutumier: ensemble des règles juridiques non écrites que constituent les coutumes (opposé à droit écrit) (NATIONS UNIES, 1996).

Le droit foncier coutumier régule les droits sur la terre.

Dans «Systèmes fonciers à la ville et au village», Raymond VERDIER précise la dimension du droit dans les sociétés agraires.

«... l’homme, la nature et la société sont régis par la même loi; le droit n’est pas constitué en domaine propre, ayant un système autonome de règles et un champ d’application spécifique; il se définit en référence à l’ensemble du système des idées et valeurs qu’il faut prendre en compte dans sa totalité. En ce sens, les droits sur la terre sont fonction de la valeur de la terre au plan relationnel et non substantiel» (VERDIER R., 1986).

Le foncier n’est donc pas un rapport social autonome. Et le droit coutumier qui le gère doit donc être interprété à la lumière de l’ensemble des relations sociales et des significations qui s’y rattachent.

Notons qu’un «système juridique ne peut demeurer en vigueur que si les conditions sociales qui l’ont fait naître se maintiennent.» (LEVY-BRUHL H., 1990).

La thèse classique

La thèse classique défend l'idée d'une inadéquation actuelle des régimes fonciers coutumiers qui entrave l'efficience économique (et en particulier freine le passage à l'intensification agricole) et justifie le remplacement des droits de propriété commune par des droits de propriété privée pouvant faire l'objet d'un libre échange.

Elle est particulièrement défendue par les théoriciens du droit de propriété (Property Rights School). Leur thèse peut être résumée de la façon suivante (PLATTEAU J.-P, 1993): Les droits «collectifs», au sens de droits généraux d'utiliser une ressource qui n'incluent pas le droit d'interdire aux autres de l'utiliser, prédominent généralement dans les sociétés traditionnelles comme celles de l'Afrique subsaharienne. Le problème avec ce type de droits est que ces derniers ne prévoient pas l'internalisation des coûts et avantages externes (externalités). En d'autres termes, les effets externes que les individus provoquent en utilisant une ressource ne sont pas amenés à peser sur eux, de sorte qu'ils tendent à exercer leurs droits sans tenir compte de toutes les conséquences de leurs actions.

Tant que la ressource est abondante, l'absence de droits de propriétés privées n'a pas de conséquences graves. Il est même rationnel de maintenir des droits collectifs dans ce contexte tant que les avantages de l'internalisation sont supérieurs aux coûts. Mais quand la ressource se fait plus rare et que la compétition pour son usage s'accroît, le maintien de la propriété commune entraîne des effets négatifs sous la forme d'une mauvaise gestion et/ou d'une surexploitation de la ressource. Les efforts visant à améliorer la gestion et la conservation de la ressource sont perdus, ce qui décourage les investissements visant l'amélioration.

Les théoriciens du droit de propriété préconisent alors le remplacement des droits de propriété collective en droits de propriété privée. Pour ce faire, il faut permettre la création d'un marché foncier libre. Cette évolution devrait provoquer le passage de l'agriculture de subsistance à l'agriculture commerciale et l'émergence d'une classe de paysans-entrepreneurs capables d'investir dans l'agriculture. En effet, une idée répandue consiste à considérer que les arrangements fonciers coutumiers n'assurent pas une sécurité de jouissance suffisante pour encourager les possesseurs de terres à investir et entreprendre les innovations nécessaires pour passer de la culture extensive à la culture intensive.

Des critiques de plus en plus nombreuses s'élèvent contre les arguments de la thèse classique. Ces critiques peuvent être résumées en trois points (voir PLATTEAU, 1993):

- les théoriciens du droit de propriété ont parfois confondu le régime d'accès libre et le régime de propriété commune;

- la supériorité des droits de propriété privée sur les autres régimes de propriété est loin d'être décisive pour ce qui est de l'internalisation des effets externes;

- les défenseurs de la thèse classique sous-estiment souvent la sécurité de tenure en régime foncier coutumier, de même que la souplesse et l'adaptabilité des arrangements fonciers traditionnels.


Au Maroc, le système foncier se caractérise par une pluralité de statuts juridiques de la terre constitués tout au long de l’histoire du pays. Différentes grandes étapes de la formation du système peuvent être distinguées:

  • Avant l’Islam, le régime foncier dominant était la terre de la tribu dont l’étendue et la localisation dépendaient de la charge démographique, de la capacité du groupe tribal à asseoir et à maintenir sa domination sur le territoire, et des conventions passées avec les tribus voisines.

  • Avec l’Islam, une distinction est effectuée entre la propriété éminente dont le droit appartient à la communauté musulmane et est exercé par le souverain au nom de la communauté, et l’usufruit qui est accordé aux occupants des terres en tant que groupe social (la tribu). Par l’adoption massive de la nouvelle religion par les tribus autochtones -et donc la soustraction de celles-ci au régime fiscal pour les non-musulmans-, une baisse des rentrées fiscales de l’Etat a eu lieu et l’a amené à une réforme des terres. Trois catégories de statuts fonciers sont dès lors apparues: les terres melk, les terres de kharaj et les terres de l’Etat. Les premières sont des propriétés privées de type individuel et sont constituées de terres acquises par les conquérants arabes par voie de colonisation, d’achat ou par conversion des tribus autochtones intervenue avant la réforme. Les secondes sont formées des terres appartenant à des non-musulmans à la date de cette réforme; en réalité, ce sont essentiellement les terres de tribu qui prendront plus tard la dénomination de terres collectives. Les troisièmes sont composées des immeubles sans maître, des terres conquises ou confisquées, ainsi que des terres tombées en déshérence, sur lesquelles le pouvoir central a opéré des concessions et des attributions, soit à des tribus guich -pour s’assurer des contingents fidèles, les sultans avaient réparti la plupart des terres entourant les grandes villes du Maroc entre un certain nombre de tribus dites guich, par altération du terme djich signifiant «troupe armée»- en contrepartie de services militaires, soit à des fondations religieuses, soit à des notables locaux ou à des représentants du pouvoir central.

  • Sous le protectorat et suite à la pénétration européenne, des achats privés de terres melk, la confiscation et l’installation de périmètres de colonisation eurent lieu, tant sur les terres réclamées par l’Etat que sur les terres collectives. Ce mouvement fut renforcé par l’arrivée en grand nombre de colons d’Algérie dont l’occupation, vers la fin du protectorat, s’évaluait à près d’un cinquième des terres cultivables et, en général, les meilleures. Parallèlement à cette installation, l’Etat colonial entreprit de mettre en place l’arsenal juridique nécessaire pour légaliser l’occupation des terres par les colons. Le domaine de l’Etat fut ainsi étendu et sa tutelle fut restaurée et renforcée sur les terres collectives. De plus, un nouveau système d’immatriculation foncière -inspiré de l’Acte Torrens australien- fut instauré afin de garantir les droits des acquéreurs. En outre - dans le double objectif de protéger la propriété coloniale et de retenir la paysannerie à la campagne pour limiter l’exode rural et les dangers de l’urbanisation - un dispositif juridique de protection des terres de tribu -dites terres collectives- fut mis en place, les rendant inaliénables, insaisissables et imprescriptibles. Par conséquent, un certain nombre de terres ont été préservées contre les démembrements, mais les collectivités sont cependant maintenues dans un état de dépendance totale et soumises à la tutelle de l’administration. Ainsi, à la veille de l’indépendance du pays, le régime foncier institué par la colonisation se caractérise par l’émergence de la grande propriété privée capitaliste dont le droit de propriété est garanti par l’instauration de l’immatriculation foncière et le cantonnement de la grande masse de la paysannerie marocaine sur des terres collectives. De plus, ces terres collectives, malgré les mesures de protection dont elles font l’objet, vont connaître diverses formes d’appropriation de la part des colons, de certains notables, de melkites riverains, ou des ayants droit mieux placés que les autres. La propriété melk s’étend ainsi au détriment des autres statuts fonciers et se consolide par concentration et par introduction de processus de production capitaliste.

  • Depuis l’Indépendance, en 1956, une partie du patrimoine récupéré des anciens colons fit l’objet, dans le cadre de la réforme agraire, de redistribution à des petits agriculteurs et à des paysans sans terre. Ceux-ci ont été regroupés en coopératives ayant pour objet de faciliter l’exploitation des lots qui, afin d’éviter tout morcellement ultérieur, ont été déclarés impartageables, inaliénables -sauf au profit de l’Etat- et insaisissables.

Ainsi, le démantèlement du secteur de la colonisation donne naissance à deux statuts fonciers nouveaux: celui de la réforme agraire et celui des terres domaniales gérées par des sociétés d’Etat. Néanmoins, ces deux types de terre ne représentent qu’un pourcentage insignifiant par rapport aux terres sous statut de melk privé ou de terres collectives. Constatant une diversité de statuts juridiques, les morcellements excessifs, les propriétés consécutives aux dévolutions successorales et l’existence de modes de faire-valoirs indirects dont la précarité décourage l’investissement, les pouvoirs publics ont élaboré une politique foncière novatrice et axée sur la substitution de formes modernes de propriété et d’exploitation aux institutions traditionnelles, accompagnées de mesures d’incitation à l’investissement. A l’heure actuelle, on peut distinguer six types de régimes fonciers différents:

- les terres melk;

- les terres collectives et guich;

- les terres habous: institution de droit musulman qui se présente sous forme d’un bien qu’un donateur peut destiner au service d’une œuvre religieuse charitable, humanitaire, sociale, voire même d’esthétique publique; ces terres peuvent évoluer en d’autres formes de propriété et faire l’objet de titres privés des ayants-droit, qui en auront la pleine jouissance jusqu’à l’extinction éventuelle de leur descendance au moment où le bien sera versé dans le patrimoine de habous public;

- le régime foncier des terres distribuées dans le cadre de la réforme agraire;

- les terres du domaine privé de l’Etat;

- les modes de faire-valoir: systèmes de métayage et de location intervenant lors de l’émergence d’inégalités dans la répartition de la propriété foncière et des moyens de production nécessaires à son exploitation et fondés sur l’association de facteurs de production différents, qui intègrent le partage des risques et celui des résultats en fonction des apports de chacun.

Le sens de l’évolution actuelle laisserait prévoir, dans un avenir proche, un régime foncier unifié et simplifié dans lequel ne subsisteraient que deux catégories de terres: celles du domaine public et la propriété privée (TALEB, 1998).

Droits fonciers délégués

Les «procédures de délégations de droits» (ou «droits délégués») sont les mécanismes par lesquels un acteur négocie et obtient d’un tiers ne faisant pas partie du groupe familial, selon des clauses plus ou moins précises, le droit d’exploiter, à titre non-définitif, une parcelle agricole. Ce terme englobe une large gamme de modalités, des prêts traditionnels sans limitation de durée aux locations à court terme, qui relèvent toutes d’un tel transfert non définitif du droit de culture à un tiers. Notons néanmoins que le terme «droits» est pris ici au sens descriptif (ensemble de prérogatives et de devoirs localement reconnus) et non au sens juridique du terme et met particulièrement l’accent sur la relation contractuelle entre les deux acteurs et sur le continuum qui existe entre ces différentes formes.

Bien que particulièrement fréquentes dans les systèmes d’accès à la terre et aux ressources, ces procédures de délégation de droits sont assez mal connues et totalement ignorées par la loi (LAVIGNE-DELVILLE, TOULMIN, CHAUVEAU, 2001).

Droit forestier

Formellement, il s’agit de l’ensemble des dispositions comprenant les règles relatives à l’exploitation, à la protection des forêts ainsi que celles réglementant les pouvoirs de l’administration dans les forêts soumises au régime forestier.

Droit immobilier: voir immeuble/immobilier

Le droit immobilier comprend l’ensemble des dispositions qui se rapportent à la gestion, à la transmission et à la conservation des immeubles.

Par opposition, le droit mobilier est l’ensemble des dispositions qui se rapportent à la gestion, la transmission et la conservation des meubles.

Droit ou Droit objectif

Il s’agit de l’ensemble des règles de Droit, explicitement édictées par les autorités qualifiées à cet effet, qui s’imposent aux membres de la société et régissent leurs rapports.

Comme le rappellent O. et C. BARRIÈRE (1997), le droit est avant tout un produit, voire un fait social caractérisé par un dispositif normatif et un ordre de contrainte. Il émane d'un groupe social et est l'expression de ses rapports sociaux. Il représente donc une façon de penser ces rapports sociaux, différente selon les sociétés. Il n'y a donc pas de conception universaliste du droit, pas plus qu' une seule définition.

Le droit de disposition, ou droit d’abuser, est l’un des trois principaux attributs du droit de propriété: l’abusus. Les deux autres attributs étant l’usus et le fructus.

Droit positif

Le Droit positif est l’ensemble des règles de Droit effectivement en vigueur dans un État (CORNU, G., 1990).

Droits fonciers pastoraux

Il s’agit de l’ensemble des dispositions qui régissent les relations qu’entretiennent entre eux groupes et individus en ce qui concerne le statut et l’usage de la terre et de l’eau dans le cadre d’une activité socio-économique donnée: l’élevage. Ces dispositions concernent les modalités d’accès à l’eau et aux pâturages car l’utilisation d’une terre à des fins pastorales est conditionnée par la présence de l’eau. Ces deux ressources, au centre de la problématique du foncier pastoral, sont intimement liées.

Ces dispositions, légitimées par une expérience souvent immémoriale, donnent lieu à des règles de comportement qu’il est fortement recommandé de respecter. Les communautés pastorales disposent de droits d’accès prioritaires et réservent, sur une base consensuelle, un droit d’accès à des groupes allochtones.

Aujourd’hui se pose notamment la question de la mise en forme juridique de cette gestion coutumière des terroirs d’attache. L’objectif est d’atteindre une sécurisation foncière minimum.

Droits multiples

Dans beaucoup de systèmes juridiques, les droits de propriété sont liés à l'exercice de certains droits par d'autres personnes n’étant pas les propriétaires du fonds. Cependant, la loi civile française met particulièrement l’accent sur la réduction du nombre des différents droits qui peuvent s'appliquer à la parcelle de terre, et à l'unité de propriété dont l'«essence», selon le politicien révolutionnaire français Mirabeau, est «d’appartenir à une seule personne» (CUBRILO ET GOISLARD, 1998).

En vertu de la loi européenne provenant du système légal civil romain, le propriétaire de la terre est considéré comme propriétaire, pas simplement au niveau du sol, mais de toutes les propriétés dans ses limites a coelo usque ad centrum (des cieux au centre de la terre).

En Afrique, la plupart des régimes coutumiers identifient de multiples droits sur une parcelle de terrain en fonction des différents niveaux de titulaires de droits ou groupes à différents moments. Par conséquent, à n'importe quel moment, le chef, sa lignée, le propriétaire foncier, le locataire, le métayer, ou l’emprunteur, leurs épouses, leurs parents et voisins peuvent jouir de droits de coexistence sur ce terrain. D'ailleurs, ces droits peuvent être limités dans le temps, ou à un groupe de personnes qui peut avoir le droit d’utiliser la terre une fois que la moisson est terminée, ou quand les arbres commencent à porter des fruits.

Droits sur les arbres

En Afrique, les arbres ont joué un rôle très important en tant que ressources associées à l’utilisation de la terre à long terme. Les récoltes d'arbres tels que le cacaotier, le palmier à huile ont rapidement été intégrées dans les économies locales des régions humides forestières, entraînant des changements similaires dans les régimes fonciers, qui ont conduit à un ensemble d'arrangements portant sur la tenure, la location et le métayage. Dans les régions semi-arides, l’accent mis par les gouvernements sur l’arachide et les cultures commerciales a réduit les plantations traditionnelles de gomme arabique, les forêts villageoises et les bois sacrés (SENE, 1980, cité par RIDDELL, 1987).

FORTMAN (1987) explique que «le droit sur les arbres se compose d'un ensemble de droits qui peuvent être tenus par différentes personnes à différents moments. Quatre catégories principales de droits composent cet ensemble: le droit de propriété ou d’héritage, le droit de planter un arbre, le droit de l’utiliser et le droit d’en disposer». La plantation d'un arbre en Afrique peut donner au planteur des droits sur la terre où celui-ci est planté, même si elle ne lui appartient pas à l'heure de la plantation. Par conséquent, la plantation d’arbres peut être utilisée comme un moyen d'acquérir ou de maintenir des droits sur la terre et peut être considérée avec hostilité par le propriétaire initial de cette terre. RIDDELL (1987) précise que sur le continent, il y a une grande réticence à permettre à des métayers, à des locataires et à tout autre détenteur indirect de planter des arbres. «Dans d'autres cas, le planteur peut devenir propriétaire de l'arbre et en acquiert ainsi le droit d’accès. De tels droits d’accès peuvent encourager la plantation d’arbres mais peuvent être extrêmement perturbateurs pour d'autres utilisations de la terre» (FORTMAN, 1987).

«Différentes règles peuvent être observées selon que l’arbre ait été planté délibérément ou que la plantation se soit effectuée de manière naturelle. Cette distinction est fondée sur la théorie que la mise en valeur crée des droits. Le principe de base général est que les arbres spontanés ou par plantation naturelle deviennent propriété de la communauté» (BROKENSHA ET GLAZIER, 1973; CORY, 1970; CROCOMBE, 1964; DUNCAN, 1960; SWANSON, 1979). D’autre part, les arbres sauvages poussant sur une terre privée, au dire de certains, seraient devenus propriété du propriétaire de la terre (LLOYD, 1963). «Les arbres plantés appartiennent donc généralement soit au planteur soit au propriétaire de la terre» (FORTMAN, 1987).

«Les règles qui s'appliquent à l’exploitation pour la subsistance diffèrent souvent de celles qui s'appliquent à l’usage commercial. Les arbres qui servent à la subsistance, en particulier ceux qui poussent sur les terres communes, sont souvent à la disposition de tous. En revanche, l'utilisation d’arbres à des fins commerciales peut être limitée aux arbres poussant sur la propriété du vendeur ou peut être tout à fait interdite selon l'utilisation» (BROKENSHA ET NJERU, 1977; POGUCKI, 1970, cités dans FORTMAN, 1987). Le bois de chauffe a également été traditionnellement une ressource en libre accès, bien que les règles régissant son accès puissent varier selon sa rareté. L'utilisation d’arbres à objectifs communautaires, tels que les plantations sacrées ou les arbres d'ombre, peut être restreinte (FORTMAN, 1987).

«Les femmes en tant que catégorie sociale ne sont pas nécessairement limitées dans leurs droits. Parmi les Ibos, les femmes ont des droits très précis concernant les arbres (OBI, 1963). Cependant, dans les sociétés où les femmes ne sont pas autorisées à posséder des terres, leurs droits par rapport aux arbres sont souvent restreints. On peut leur interdire de planter des arbres afin de les empêcher d’utiliser ce subterfuge pour obtenir du terrain. Les droits des femmes sur les arbres et sur la terre peuvent varier selon la résidence et le statut matrimonial» (FORTMAN, 1987).

E

Échelle

L’échelle est le rapport entre la représentation des phénomènes sur la carte (ou le plan) et leur mesure dans la réalité.

On appelle échelle graphique la représentation graphique de l'échelle d'une carte consistant en une ligne graduée en distances réelles.

On appelle échelle numérique le rapport existant entre une longueur et sa représentation sur la carte. Exemple: 1 mm représente 100 m à l’échelle du 1:100 000.

Les échelles sont classées en trois catégories, la grande échelle jusqu’au 1/25 000, la moyenne échelle du 1/25 000 au 1/1 000 000, et la petite échelle au-dessus de 1/1 000 000. Plus une carte est détaillée plus son échelle est grande.

Pour avoir une représentation à l’échelle d’un continent ou d’une fraction de continent, on utilise des cartes à petite échelle qui sont au 1/1 000 000 et parfois même au-delà.

Le découpage des cartes est basé sur la carte internationale du monde au 1/1 000 000.

Echelle spatiale

Une échelle spatiale correspond à un niveau d’organisation d’une société donnée (niveaux local, national et international).

L'analyse en terme d'échelle doit être conçue en relation avec un effet de distance entre acteurs, donc en rapport avec la nature des communications qui peuvent s'établir au sein d'un collectif mais surtout entre ces divers collectifs. Elle doit également être associée à la nature des diverses rationalisations à l'œuvre, certaines autorisant, comme l'idéalisme des juristes occidentaux, une prétention à l'universalisme qui n'a pas de correspondance dans les théories indigènes sur la terre d'Afrique. Elle a aussi partie liée à la pondération de la valeur attachée à des ressources matérielles comme des "enjeux" affectant le mode de qualification des statuts de nos différentes populations (humaines ou non). Ce qui est vrai à une échelle ne l'est pas nécessairement à une autre en vertu d'une qualification différente, donc d'un usage spécifique.

En effet, l'une des questions-clés sur lesquelles butent les politiques de développement est de rendre compatibles des déterminations émergeant à des échelles différentes: les injonctions de la Banque mondiale en matière d'ajustement structurel sont fondées selon les critères de macro-économie et de mondialisation des échanges mais contredisent des pratiques politiques à l'échelle nationale et risquent de ne pas prendre en considération les capacités d'adaptation des producteurs à l'échelle locale (question de l'ajustement social et culturel). Elles risquent donc le rejet ou le sabotage si elles ne sont pas relayées par des politiques adaptées au contexte local.

On travaille dès lors cette dimension avec trois niveaux d'analyse: les échelles internationale, nationale et locale, chacune pouvant être démultipliée selon les besoins de l'analyse (LE ROY, 1996).

Élevage

Selon le Larousse agricole (1981), l'élevage est l'ensemble des méthodes mises en œuvre pour produire des animaux, dans le dessein de satisfaire les besoins de l'homme. Il concerne donc les animaux domestiques ou utiles.

Cette définition est trop restrictive car l'élevage peut aussi désigner l' «action d'élever», non seulement des animaux, mais également d'autres choses telles que la vigne ou le vin.

L'élevage peut également être considéré en tant qu'ensemble productif (DE BONNEVAL, 1993). Il désigne alors soit un secteur économique: ensemble des activités productives et des productions générées par une spéculation animale ou par toutes les spéculations (son sens fait pendant à celui sensu stricto d'agriculture), soit une unité de production animale définie par l'espèce (un élevage de pintades) et/ou par l'acteur (l'élevage de untel ou unetelle).

Notons enfin que l'élevage n'a pas toujours de visée économique ou de production. Il peut constituer une source de prestige ou de reconnaissance sociale, comme c'est le cas dans de nombreuses régions d'Afrique.

Définir les différents types d’élevage consiste à les analyser selon la combinaison d’au moins quatre paramètres:

- le mode de vie;

- les caractéristiques des ressources naturelles (eau, pâturage), soit permanentes, soit saisonnières, et dont le niveau de productivité est en outre variable;

- les relations avec les autres activités agricoles;

- les types de déplacement effectués.

Sur base de ces paramètres, on distingue l'élevage nomade, l'élevage transhumant et l'élevage sédentaire.

· L'élevage nomade: il s’agit ici d’un type d’élevage qui se confond totalement avec le mode de vie des groupes qui le pratiquent.

L’élevage nomade ne se fait ni en complémentarité ni en association avec le travail de la terre. Il s’agit de l’activité principale d’un groupe (tribu), organisée à partir d’un réseau de points d’eau.

On parlera aussi d’un «système d’élevage pur» organisé au départ d’un point d’eau (préférentiel) de saison sèche (FAO, 1996).

· L'élevage transhumant: de façon très générale, la transhumance est un déplacement périodique de troupeaux pour exploiter des pâturages saisonniers. Le terme provient de humus, sol en latin. Il s'applique également au système d'élevage fondé sur le déplacement périodique des troupeaux. Celui-ci s’impose dans des situations de pénurie saisonnière des ressources.

L’élevage transhumant concerne la gestion et l’exploitation de troupeaux au cours de déplacements plus ou moins importants à partir d’un même terroir et vers les pâturages saisonniers. Une fois sur place, les troupeaux peuvent évoluer à partir de terroirs d’attache spécifiques. Cet élevage suppose une forte spécialisation de la population villageoise (les uns, pasteurs, les autres, cultivateurs).

En Europe, la transhumance est pratiquée entre des régions de basses altitudes (mise à l'étable des animaux en hiver) et des pâturages de moyenne montagne (alpages). La transhumance ovine est connue depuis fort longtemps dans le bassin méditerranéen. Elle persiste encore en Espagne, en Italie, dans les Balkans et en France méridionale.

En Afrique sub-saharienne, où la mobilité des animaux est sans doute la caractéristique essentielle de l'élevage et constitue dans de nombreuses régions une condition de sa survie, la transhumance demeure fort pratiquée.

· L'élevage sédentaire: on peut le situer dans un contexte d’abondance des ressources naturelles durant toute l’année. Cet élevage concerne la gestion et l’exploitation de troupeaux dont les déplacements sont limités au sein d’un même terroir. Cette activité se pratique en association ou en complémentarité avec le travail de la terre. On parlera ainsi d’un système agro-pastoral constitué autour des villages.

Ellipsoïde

Dans le cadre d’un système géodésique de référence, l’ellipsoïde est le modèle mathématique utilisé pour représenter la surface terrestre. La surface terrestre ayant la forme générale d’une sphère aplatie, le modèle utilisé pour la représenter correspond le plus souvent à un ellipsoïde de révolution, ou sphéroïde. Dans ce cas, les demi-grands axes et demi-moyens axes restent égaux tout autour de l’axe de rotation de la terre, ce dernier correspondant au demi-petit axe de l’ellipsoïde.

Fig. 17 - Ellipsoïde:
a, grand axe; b, petit axe;, aplatissement = (a - b)/a
Source: www.cnig.fr/commun/proserv/ficheamo/fserie2/fiches/12.htm (juin 2004)

Enregistrement des transactions

L’enregistrement des transactions officialise un acte auprès de l’État par sa mention sur un registre officiel. Cette formalité, obligatoire ou volontaire, donne lieu à la perception d’un droit par l’État et confère date certaine aux actes passés sous seing privé.

Espace

Dans le vocabulaire courant, l’espace est un lieu plus ou moins bien délimité où peut se situer quelque chose (LE PETIT ROBERT, 1993).

Mais comme P. BOHANNAN (1963) le rappelle, chaque peuple a une carte qui représente le pays où il vit, chaque peuple dispose d’une série de concepts pour parler des rapports qu’il entretient avec les choses. L’aspect spatial de son organisation sociale trouve une expression ouverte en paroles et en actes.

Ainsi d’après E. LE ROY (1991, 14-15), «Dans les sociétés caractérisées par l’animisme et le communautarisme, la représentation de l’espace est topocentrique

La conception topocentrique de l’espace

Le rapport des groupes à l’espace est organisé en fonction d’endroits autour desquels leurs activités (agriculture, cueillette, pêche, élevage...) sont centrées; par exemple: la terre pour l’agriculture, les arbres pour la cueillette, l’eau et la terre pour l’élevage.

C’est à partir de ces endroits que les membres des différents groupes exercent un contrôle sur l’usage ou la gestion des sols.

Ce contrôle est fonction de leur ordre d’arrivée et du type d’activité qu’ils exercent.

Chaque activité implique une maîtrise particulière de cet espace.

Les activités et les usages de l’espace sont idéalement pensés comme complémentaires et interdépendants.

Dans les sociétés occidentales, l’espace est unifié et banalisé par la carte géographique. Délimité, il est réduit à sa superficie et l’étendue du globe est ainsi mesurée pour donner à l’espace une valeur d’échange. Cette conception géométrique de l’espace s’exprime dans l’organisation territoriale publique. Celle-ci est en effet l’expression de la souveraineté étatique où la notion de frontière est fondamentale. L’organisation foncière est identifiée à partir du cadastre qui enregistre la localisation, la situation et la superficie du terrain selon des données géodésiques.

Il ne faut pas penser ces deux grandes conceptions de représentation de l’espace en terme de dichotomie, car chacune d’entre elles a été influencée par l’autre.

De même lorsque l’on aborde l’espace en fonction des activités productives auxquelles il sert de support (par exemple: la pêche, l’agriculture, l’élevage), les termes: espace halieutique, espace agricole, espace pastoral, espace forestier, espace récréatif, espace de conservation de la nature (parcs, réserves naturelles) sont alors employés pour désigner l’entité spatiale utilisée pour mener à bien ces différentes activités.

On tend ainsi à séparer et à cloisonner ces espaces. Pourtant ils peuvent se superposer et s’entrecroiser, selon les saisons et en fonction du type de ressources renouvelables qui y sont prélevées ou cultivées.

Cette spécialisation de l’espace laisse donc entendre qu’il est impossible que plusieurs usages se superposent sur un même lieu, pourtant il n’en est rien, par exemple:

- un champ une fois cultivé peut être utilisé en vaine pâture: il sort à ce moment de son utilisation agricole et appartient alors à l’espace pastoral;

- un point d’eau naturel peut servir d’espace de pêche puis, quand il est asséché, d’espace de culture;

- À l’intérieur de l’espace urbain, il existe des espaces agricoles et l’élevage urbain est une réalité qu’on ne peut nier lorsque l’on voit le nombre de troupeaux de ruminants qui peuvent circuler dans les villes des pays dits en développement et qui se nourrissent des arbustes, herbes et déchets qu’ils rencontrent sur leur passage;

- dans de nombreuses villes, les espaces verts sont fréquemment occupés de manière illégale et de fait couverts de constructions.

L’espace aquatique, qui comprend le terroir aquatique des paysans pêcheurs et le territoire des marins-pêcheurs, est une réalité mouvante.

Les formes de son appropriation sont anciennes et variées. Elles reposent sur de multiples combinaisons entre des ressources, des techniques et des acteurs. Ces combinaisons sont à l’origine de pratiques diverses, mais souvent conflictuelles. L’appropriation des espaces de pêche est opérée par les groupements de base des communautés de pêcheurs, selon des systèmes de droits hiérarchisés. Ainsi sur un même espace, des droits d’appropriation et d’usage différents peuvent cœxister et varier saisonnièrement. (CORNIER SALEM M.C., 1995).

La notion d’espace aquatique renvoie aussi aux notions d’accès, aux ressources et à leur usage (points d’eau pour les animaux d’élevage, droits de pêche, contrôle des ressources en eau d’irrigation, servitudes, etc.), ainsi qu’à la maîtrise des eaux.

Espace lignager

Espace faisant l’objet d’une appropriation collective, par groupements lignagers, par familles et par ménages et dont la transmission se fait respectueusement de génération en génération.

Sur la rive mauritanienne du fleuve Sénégal, dans le oualo (terres inondées chaque année par la crue du fleuve), le système foncier Toucouleur illustre bien cette appropriation collective de l’espace par les lignages.

«La terre n’appartient pas à l’individu. Elle appartient à des groupes sociaux plus étendus, lignages ou collectivités. Au sein de ces groupes sociaux, les terres sont réparties entre les familles pour que celles-ci les cultivent. C’est donc en fait le groupement lignager qui possède les terres réparties entre les familles. Les terres sont gérées par le doyen du lignage qui les distribue par parcelles à tous les adultes mâles de la descendance. Cette attribution se fait en général lors d’un mariage ou d’un décès pour la durée de l’existence [...].»

«Le domaine du lignage (colangal) reste donc constamment indivis. En plus, il est inaliénable à la fois entre membres du lignage et à l’égard des tiers étrangers. Aucun individu, et le doyen lui-même, n’ont le droit de le céder définitivement à un tiers. C’est le lignage «personne collective» et non le doyen qui en est propriétaire. A la mort du doyen, seul le lignage peut en hériter collectivement et la gestion passe alors entre les mains du chef de concession le plus âgé» (CROUSSE B., 1986).

Espace pastoral

L’espace est le support d’activités multiples et variées qui l’utilisent de façon alternée ou simultanée. L’eau (eaux de surface et eaux souterraines, aménagées ou non), les aliments consommés par le bétail (pâturages herbacés, aériens, champs cultivés, bourgoutières, terres salées...) et les voies de déplacement du bétail constituent l’espace pastoral. Toutes les ressources et tous les aménagements (couloirs de passage, pistes de transhumance...) qui permettent l’activité d’élevage sont inclus dans l’espace pastoral. La gestion de l’espace pastoral est donc soumise à des règles qui régissent les modalités de son utilisation entre les différents acteurs qui se le partagent.

Chez les Touareg Kel Dinnik, dans la région de Tahoua (Niger), cet espace ne fait pas l’objet d’une appropriation en tant que telle mais plutôt d’un droit de priorité dans l’utilisation.

«Celui qui a creusé un puits dispose de l’eau, n’empêche pas un étranger d’y boire mais il a la priorité: l’étranger ne saurait, sans indemnités, abreuver avant lui...».

«On ne peut empêcher un étranger d’y venir aussi, la limite de ce droit est le danger qu’il fait courir au premier occupant en envahissant le pâturage, et le préjudice causé à ses bêtes...» (NICOLAS, 1950).

Espace périurbain

Le terme périurbain désigne l’espace rural situé en périphérie d’une ville et de sa banlieue. Cet espace périurbain est l’objet de profondes transformations fonctionnelles, démographiques, sociales, voire politiques.

Espace sacré

Dans de nombreuses sociétés africaines traditionnelles, la terre est sacrée car elle sert d’intermédiaire entre les vivants et les ancêtres. En quelques endroits, tels que les bois sacrés ou les lieux ancestraux d’inhumation, le caractère immatériel de la terre est particulièrement respecté et le propriétaire de ces zones est considéré comme étant en contact avec les esprits. Généralement, les premiers colonisateurs d’une portion de terre doivent formuler une requête aux esprits locaux, afin que ceux-ci accordent une bonne récolte, demande qui doit habituellement être renouvelée chaque année.

Espace vert

Un espace vert, dans le vocabulaire de l’urbanisme «moderne» est une surface couverte par des espèces végétales (il peut s’agir de pelouse, d’espace arboré allant jusqu’aux bois et forêts, de golfs, d’aires de jeux,...), ménagée entre les constructions.

Selon A.M. MEKOUAR (1997), «Désormais, en effet, la double fonction des espaces verts, écologique - équilibre naturel du milieu - autant que social - équilibre psychique des êtres humains - est largement reconnue en droit comparé. C’est par exemple le cas du plan régional de développement de Bruxelles, qui prescrit un «verdoiement systématique» de l’espace, un maillage vert constitué de parcs publics, promenades vertes, parcours paysagers, pistes cyclables... À Madagascar, les travaux nécessaires à la conservation des espaces verts urbains peuvent être déclarés d’utilité publique.»

Essart/Essartage

L’essart (du latin ex-sarire, sarcler) est une terre rendue cultivable après défrichement; essart (et ses dérivés «sart», «écart») a donné naissance dans le sud de la Belgique et le nord de la France à de nombreux toponymes qui sont une source de renseignements sur l’ampleur de la première vague de défrichements (XIe s.).

L’essartage désigne le défrichement lui-même.

Exploitation agricole

On désigne par exploitation agricole l'action de mettre en valeur un domaine agricole. Mais l'expression signifie également le lieu de l’exploitation (ACCT, 1977).

En Occident, les unités de production, de résidence, de consommation et d’accumulation coïncident entre elles. Les centres de décision qui correspondent à ces fonctions ne font également qu’un.

Mais on trouve dans les sociétés rurales du Sud des modèles d’exploitation agricole dans lesquels ne coïncident ni les quatre unités fonctionnelles, ni les centres de décision correspondants.

La notion d’exploitation agricole est donc ici indissociable des relations de parenté, des relations de propriété et de la façon dont se structurent les différents centres de décision (BILLAZ R. et DIAWARA Y., 1991).

«L’exploitation agricole wolof coïncide soit avec le carré, soit avec une fraction de celui-ci, le ménage exploitant. Elle est constituée d’un centre de décision principal et de plusieurs centres de décision secondaires:

- l’exploitation principale, conduite par le chef d’exploitation;
- les sous-exploitations, conduites individuellement par chaque homme ou femme qui dépend du chef d’exploitation pour sa nourriture»

(KLEENE P., 1976, cité par BILLAZ R. et DIAWARA Y., 1991).

Expropriation/expropriation pour cause d’utilité publique (U.P.)

L’expropriation est une procédure par laquelle la puissance publique contraint un particulier à lui céder ou bien la propriété d’un immeuble ou bien certains droits réels immobiliers, moyennant le paiement d’une indemnité, en vue d’une réalisation d’intérêt général qui l’emporte sur l’utilité privée. Le concept d’expropriation est fondé sur le pouvoir supérieur de la collectivité publique sur le territoire.

«Au Ghana, les retards dans l’achèvement des procédures d’expropriation de terrains et dans le paiement de l’indemnisation dépassent, dans certains cas, vingt ans; les organisations et leurs employés ne sont pas au courant des procédures à suivre; des terrains sont acquis par des organismes publics qui n’ont pas les moyens de les payer ou de les aménager et les objections du public sont ignorées. Par conséquent l’utilisation de cet instrument est souvent jugée arbitraire par la population et provoque un ressentiment grandissant.» (FARVACQUE-VITKOVIC C., MCAUSLAN P., 1993).

Extensif/Intensif

Les termes d'extensif et d'intensif (ou ceux d'extensification et d'intensification si l'on se réfère aux processus) sont des concepts relatifs qui possèdent plusieurs sens qu'il convient de bien distinguer.

En économie classique, ils expriment un rapport entre les facteurs de production: la terre, le travail et le capital. Plus exactement, ils décrivent la place (ou l'importance) relative des facteurs travail et capital par rapport à la terre.

Est considéré comme intensif «ce qui utilise beaucoup de facteurs de production autres que la terre» (COUTY, 1991, cité par SERPANTIE G. et MILLEVILLE P., 1994). Dans ce sens, l'intensification est donc un accroissement du travail et/ou du capital par unité de surface. On parlera d'itinéraire technique «intensif en travail» ou «intensif en capital». Cette conception met l'accent sur les quantités d’intrants (inputs) par unité de surface.

Mais le terme d'intensif est aussi utilisé par référence aux produits (outputs) ou niveaux de production. L'intensification désigne alors une augmentation de la productivité de la terre, c'est-à-dire du volume de production par unité de surface récoltée.

H. RUTHENBERG (1960) et E. BOSERUP (1970) ont utilisé le concept d'intensification en se référant à la fréquence de mise en culture par unité d'espace et de temps. La dimension temporelle introduit la notion d'intensité culturale (ou taux d'utilisation de l'espace). L'intensité culturale exprime le rapport entre la surface récoltée et la surface totale mobilisée, y compris les jachères. Lorsqu'une terre est cultivée 3 ans (avec une récolte par an) et mise ensuite en jachère pendant 30 ans, son intensité culturale est de 0,1. Une intensité de 3 signifie que sur une même terre, 3 récoltes par an sont réalisées (certains systèmes irrigués présentent une telle intensité).

Tant que la terre est disponible, il est souvent plus rentable pour une exploitation agricole de cultiver sur une grande superficie en utilisant peu de travail et/ou de capital (extensification), de manière à optimiser le produit (ou revenu) par actif, plutôt que d’intensifier la production.

La pratique de l’agriculture extensive ne résulte cependant pas toujours d’une logique économique. Dans le cas des latifundia, la consommation de terre est également une marque de prestige. Au Sahel, dans le cadre des mouvements de colonisation foncière, les autochtones défrichent de manière à garder le contrôle sur la plus grande superficie de terre possible, étant donné que «la terre est à celui qui la cultive».

Externalité

Il s'agit d'un mot francisé issu de la terminologie anglaise: «externality».

Une externalité se produit quand une action individuelle a un impact sur le bien-être des autres en-dehors de l’échange marchand. C’est une situation où une action d’un agent économique affecte l’utilité ou les possibilités de production d’un autre agent, d’une manière qui n’est pas prise en compte par les lois du marché. L’externalité peut se produire dans l’espace, ou dans le temps (actions qui affectent les générations futures). Elle peut être positive ou négative.

Economiquement parlant, l’externalité est la différence entre le coût marginal social et le coût marginal privé.


Page précédente Début de page Page suivante