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Éditorial

Arbres hors forêts

Durant ces 15 dernières années, les préoccupations à l'égard des forêts de la planète se sont hissées parmi les principaux points à l'ordre du jour de la politique mondiale. Mais pour des millions d'individus vivant dans les environnements les plus divers du globe - dans les régions arides ou sur les versants de montagne dégradés sous l'avancée des cultures ou des hommes, ou encore dans les centres urbains - les forêts proprement dites ne font pas partie du cadre de vie quotidien. Dans certaines de ces zones, il n'y a jamais eu de forêts; ailleurs, en revanche, elles ont disparu. Et pourtant, même là où les forêts sont absentes, les arbres constituent encore un facteur essentiel du bien-être économique, environnemental et social.

Les arbres hors forêts - c'est-à-dire les arbres et les systèmes arborés que l'on rencontre notamment sur les terres agricoles, dans les prés et les pâturages, sur les sols improductifs et dans les villes et autres établissements humains - jouent des rôles divers et revêtent de multiples fonctions. Ils apportent une contribution notable à l'agriculture durable, à la sécurité alimentaire et à la diversification des économies familiales. Ils procurent maints produits (bois de feu et de construction, fruits, écorces et produits vivriers, notamment) et services (diversité biologique, refuges pour la faune, stabilisation du microclimat). Ils protègent les cultures et le sol contre l'érosion par l'eau et par le vent, combattant ainsi la sécheresse et la désertification et sauvegardant les ressources en eau. Ils fournissent de l'ombrage et bornent les propriétés.

Ce numéro d'Unasylva est centré sur les enjeux de la conservation et de l'utilisation des arbres hors forêts. Nombre de ces questions ont été mises en évidence lors de l'Atelier sur les ressources forestières hors forêts, qui s'est tenu à Arusha (République-Unie de Tanzanie) en juillet 1999; on trouvera dans la section "Le monde forestier" une synthèse des observations et des recommandations formulées à cette occasion.

Le point de départ fondamental pour une approche exhaustive des arbres hors forêts est une terminologie claire et convenue, associée à une vue d'ensemble de l'ampleur et de l'état des ressources. L'article de C. Kleinn, par lequel s'ouvre le présent numéro, est centré sur l'inventaire et l'évaluation des arbres hors forêts. L'article offre notamment quelques exemples relatifs à l'Amérique latine.

Dans les régions semi-arides d'Afrique de l'Ouest, les cultivateurs de subsistance ont maintenu au cours des siècles le système traditionnel d'utilisation du sol, celui des "parcs agroforestiers" où des arbres à maturité parsèment les champs cultivés ou récemment labourés. J.-M. Boffa fait un tour d'horizon des principaux enjeux de la gestion de ces parcs et donne un aperçu des stratégies de recherche-développement à mettre enœuvre pour leur conservation et leur gestion améliorée.

Dans l'article suivant, R. Carucci se concentre sur l'Afrique pour étudier le potentiel des arbres aux fins du renversement et de la prévention du processus de désertification. Les observations et les conclusions sont le fruit de l'expérience d'un projet de développement rural assisté par la FAO à Keita (Niger).

Une utilisation des arbres à l'intérieur des systèmes de culture, qui remonte aux premiers temps de l'agriculture domestique, concerne la production de fourrage pour les animaux. H.M. Shelton évalue les potentialités d'une utilisation durable des arbres fourragers pour la couverture des besoins du cheptel et, ainsi, pour une productivité accrue des systèmes culturaux.

Il existe intérêt croissant à l'égard d'éventuels partenariats entre le secteur privé et les communautés ou les individus pour la production de biens et de services provenant des forêts, ainsi que des arbres hors forêts. J. Mayers examine les avantages et les inconvénients d'une gamme de relations nouvelles entre entreprises et communautés, intéressant les arbres hors forêts.

Dans les paysages agricoles tempérés en Europe, les arbres et les arbustes sont surtout des arbres fruitiers et des arbres pour haies ou pour tampons ripicoles. F. Herzog décrit brièvement ces systèmes, en récapitule l'histoire et examine leurs principales fonctions écologiques, socioculturelles et économiques.

Les arbres constituent également un élément vital du paysage urbain. G. Kuchelmeister souligne l'importance des arbres urbains et de la végétation associée situés dans ou près de zones à forte densité humaine, tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement. Une large place est faite à la coopération au service du développement, à la lutte contre la pauvreté, aux partenariats innovateurs entre le secteur public et le secteur privé, et à la gestion multiressource.

Ces dernières années, on s'est intéressé notamment, et à juste titre, au processus de dégradation et de déboisement qui continue d'affecter les forêts dans le monde, et aux moyens à mettre enœuvre pour le renverser. Mais les défis qui touchent plus particulièrement les arbres hors forêts méritent eux aussi une attention particulière. Cette attention, dans le cadre d'une approche holistique de la gestion des arbres et des forêts à l'échelle mondiale, est nécessaire pour exploiter pleinement les potentialités de ces ressources aux fins d'un développement durable.

Le présent numéro d'Unasylva contient en outre le texte intégral de l'allocution prononcée par le Président finlandais Martti Ahtisaari, à la trentième session de la Conférence de la FAO (12-23 novembre 1999), sur la gestion durable des forêts en Finlande. Cette sanction de la foresterie et l'expression de la recherche d'un développement durable des forêts de la part d'une personnalité nationale constituent un véritable encouragement pour tous ceux qui ont ces objectifs à cœur. 


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