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Plan pour l'industrie autrichienne du sciage

Par ÅKE SIMONSSON, fonctionnaire de l'assistance technique de la FAO en Autriche

Un programme radical est en cours d'exécution pour moderniser la très ancienne industrie du sciage. Pour l'Autriche et pour ses marchés d'exportation traditionnels dans les autres pays européens, le fait que l'industrie du sciage n'ait bénéficié d'aucune amélioration technique ou industrielle pendant la guerre et pendant l'après guerre immédiat, a suscité de sérieuses préoccupations. Actuellement avec l'aide des fonds de compensation prélevés sur les crédits en dollars du Plan Marshall, un programme, basé sur les propositions faites par la mission de la FAO en Autriche en 1950, a été établi pour passer des méthodes anciennes aux méthodes modernes.

L'importance de cette industrie pour l'Autriche est évidente, si l'on considère qu'au moins 38 pour cent de la superficie du pays sont couverts de forêts. Le bénéfice total provenant des forêts et produits forestiers entre pour environ 9 pour cent dans le revenu annuel brut de l'Autriche. Sur le marché international, l'Autriche vient au troisième rang, après la Suède et la Finlande, comme exportatrice de sciages. L'année dernière, ce pays a exporté environ 2.370.000 m³, soit une légère augmentation sur 1950.

L'importance de l'Autriche comme pays exportateur de sciages provient en partie du fait que les pays voisins, hautement industrialisés, ont besoin d'une importante quantité de bois pour leurs industries de transformation. L'Italie, marché traditionnel de longue date, absorbe au moins 50 pour cent des exportations de sciages de l'Autriche. Les autres débouchés importants sont l'Allemagne, la Suisse et les pays méditerranéens. En dehors de ses voisins continentaux, l'Autriche trouve maintenant de nouveaux marchés dans les pays d'outre-mer, où les disponibilités en résineux sont restreintes. Les sciages autrichiens sont particulièrement demandés sur les marchés étrangers à cause des dimensions que peut fournir ce pays.

L'importance de ces exportations se répercute sur les quantités disponibles pour le marché intérieur. Par exemple, par suite de la concurrence intense créée sur le marché par la demande étrangère, il est extrêmement difficile aux industries nationales utilisatrices de bois de satisfaire leurs besoins à des prix raisonnables. Pour cette raison une faible proportion de la production de sciages de cette année sera utilisée par les industries de transformation du pays. La plus grande partie des 1.005 millions de schillings de sciages restants sera probablement exportée.

Il faut souligner également l'importance du bois scié de résineux, par rapport aux autres industries forestières d'Autriche. Le sciage est la plus ancienne de toutes les industries du bois de ce pays, et, tandis que se développent d'autres industries (telles que l'industrie de la pâte et celle des panneaux de fibre), elle demeure la plus importante consommatrice de bois ronds. Les estimations pour 1952, envisagent une consommation totale de grumes de 868 millions de schillings. Sur la production prévue de 2.874 millions de schillings de produits finis et mi-finis, beaucoup plus d'un tiers consiste en sciages.

Le programme d'investissement

Dans son programme visant à réorganiser l'industrie du sciage suivant une conception moderne, l'Autriche essaie d'effectuer ces réformes sans entraver la production courante, la stabilité économique ni la main-d'œuvre, et, en particulier, sans entraîner de gaspillage de capitaux. Les efforts tendant à rééquiper et moderniser l'industrie font partie d'un programme à long terme, embrassant les principales industries du bois et des produits dérivés. Ce programme comprenant des investissements de capitaux et une aide financière importante a été proposé par la mission de la FAO en Autriche en collaboration avec l'administration autrichienne et avec l'Administration de Coopération Economique des Etats-Unis.

Les chiffres suivant, représentant les investissements de capitaux proposés, font entrevoir l'envergure de ce programme:


Millions de schillings

Sciage

157

Fabrication de caisses et d'emballages

14

Maisons et éléments préfabriqués

4

Industrie du meuble

20

Afin que la production d'éléments préfabriqués et de mobilier normalisés puisse se développer d'après des conceptions modernes, la modernisation et le développement des autres industries utilisatrices de bois est également indispensable. Les programmes d'investissement intéressent donc également les industries suivantes:


Millions de schillings

Manufacture de panneaux de fibre

123,8

Contreplaqués et panneaux

29,5

Placages et déroulages

3,0

Sur les 157 millions de schillings proposés pour l'industrie du sciage, 80 millions doivent être dépensés pendant une période de trois ans, d'après le programme d'investissement qui vient d'être approuvé. Ceci ne peut être considéré que comme un début pour une industrie dont la production annuelle dépasse 1 milliard et l'on devra, pour l'avenir, trouver de nouveaux moyens de financement.

Problèmes concernant la réorganisation de l'industrie du sciage

Pendant des siècles, l'industrie du sciage représenta la seule industrie forestière essentielle de l'Autriche. Les problèmes auxquels doit faire face sa réorganisation sont donc bien plus compliqués que ceux des industries relativement beaucoup plus jeunes. Cette industrie est caractérisée par un grand nombre de petites installations indépendantes. Il y existe très peu de scieries créées avec d'importants capitaux et équipées de l'outillage le plus moderne, telles qu'on en rencontre en d'autres pays Européens.

En tout, l'Autriche possède 6.000 scieries, dont environ 2.400 scies alternatives multiples et 3.800 scies alternatives simples. La capacité de production théorique est de 8 à 9 millions de mètres cubes de grumes, mais le rendement maximum réel n'est que de 45 à 50 pour cent. Ce taux d'utilisation peu élevé est dû en grande partie au fait que ces scieries ne fonctionnent que par intermittence, ne produisant que pour les besoins locaux. Elles appartiennent à des fermiers, à des propriétaires de petits bois, qui ne les mettent en marche que lorsque les eaux sont abondantes et que la main-d'œuvre ne peut être employée ailleurs avec plus de profit. Le nombre élevé de ces petites scieries locales est dû aux caractéristiques géographiques du pays, à ses nombreuses vallées étroites, encaissées entre de hautes montagnes. Beaucoup de régions sont en réalité encore en partie inaccessibles, ce qui rend le transport des grumes vers les centres industriels extrêmement coûteux et difficile.

En examinant le programme de modernisation, on s'aperçut que la modernisation de toutes ces petites scieries ne ferait qu'entraîner de sérieuses difficultés sociales et politiques, et l'idée fut abandonnée. L'application de ce programme fut donc limitée aux scieries importantes produisant les sciages pour la consommation industrielle intérieure ou pour l'exportation. Mais ici encore, des prêts ne sont consentis qu'à certaines entreprises choisies, exploitant des scieries de modèles et d'importances variées pouvant servir de modèles aux autres. Quelques scieries récemment installées ont été visitées par des techniciens venant de toutes les régions du pays.

Écoles pour les ouvriers de scierie

Il est recommandé aux différentes entreprises de l'industrie du sciage de coopérer entre elles pour leur bénéfice mutuel. Ce genre de coopération est une des caractéristiques de l'industrie américaine du bois, et a également joué un rôle important dans le rétablissement de l'industrie finlandaise après guerre. En Autriche, les crédits nécessaires à l'érection d'une école pour les ouvriers de l'industrie du sciage sont dûs en grande partie à une association récemment mise sur pied par cette industrie en vue de résoudre les problèmes communs. Financée par l'European Recovery Program, cette école assumera les fonctions qui, en d'autres pays, sont remplies par les grandes entreprises elles-mêmes. Elle enseignera aux ouvriers les méthodes et techniques modernes, et, de plus, essaiera les nouveaux types de machines, afin que les propriétaires de scieries puissent se rendre compte du matériel qui convient le mieux à leurs besoins.

Les cours de l'enseignement théorique et pratique de cette école seront les suivants:

1. Ecole d'enseignement pratique technique pour le personnel des scieries, donnant les séries de cours suivants:

a) Trois années d'apprentissage: Lorsque la scierie expérimentale aura été terminée, une école d'enseignement pratique sera ouverte, comportant une série de cours d'une durée de trois ans pour 45 à 60 apprentis; les apprentis seront admis à la fin de leurs études primaires et recevront un enseignement théorique et pratique complet sur la technique du sciage.

b) Cours pour surveillants et contremaîtres: Après avoir passé l'examen d'ouvriers qualifiés et terminé une année d'enseignement pratique, un certain nombre d'élèves seront choisis pour suivre une série de cours supérieurs en vue d'obtenir le diplôme de contremaîtres.

c) Cours industriels et commerciaux: Ces cours sont rendus obligatoires par la législation autrichienne pour tout apprenti de l'industrie du sciage. Pendant ses trois années d'apprentissage, chaque homme devra suivre une série de cours commerciaux d'une durée de 8 semaines. Le nombre des étudiants sera d'environ 300 par an.

d) Cours de spécialisation: Enseignement supérieur destiné à faire connaître aux techniciens qualifiés les récentes expériences et les techniques modernes du sciage, et comprenant les cours suivants:

15 cours d'une semaine pour les ouvriers qualifiés du sciage.
4 cours d'une semaine pour les directeurs de scieries.
5 cours d'une semaine pour les contremaîtres et classeurs.
4 cours d'une semaine sur l'organisation e le rendement du travail.
5 cours d'une semaine sur la tenue des livres et la comptabilité.

Chaque cours sera prévu pour 25 étudiants, et d'autres cours, réunions et conférences seront organisés selon les besoins. Il y aura donc 35 cours d'enseignement pratique et de spécialisation, suivis chaque année par 800 à 900 élèves.

2. Institut expérimental des techniques du sciage

Ce sera un institut gouvernemental des techniques du sciage; il fera partie de l'école et aura à sa disposition la scierie expérimentale, l'atelier et l'accès aux cours.

3. Une scierie complète pour l'instruction et les expériences.

4. Logements pour les étudiants.

Aménagés pour 100 apprentis et dotés d'une bibliothèque technique et scientifique, et d'une salle d'étude avec radio et appareil de projection. Il y a, en outre, des chambres pour les étudiants suivant les cours de spécialisation, ainsi que pour les visiteurs.

Cette école sera d'un grand secours pour les entreprises dont l'équipement est ancien, et qui n'ont pas les fonds nécessaires pour couvrir les frais d'une remise en état, puisque, grâce aux cours de cette école, ces entreprises pourront élever leur productivité de 20 pour cent, sans nouveaux investissement de capitaux. L'école enseignera à ces entreprises à tirer parti du matériel existant (par exemple, à accélérer la vitesse d'un scie alternative). Elles pourront ainsi se mesurer avantageusement avec les scieries les plus modernes de leurs propres localités.

Ce programme de modernisation de l'industrie du sciage en Autriche n'exige pas la construction de nombreuses usines nouvelles. Il y a, naturellement, des arguments de poids en faveur d'une transformation de ce genre: prix de revient inférieurs, et production d'une qualité supérieure; possibilité d'une utilisation plus complète des déchets par les industries de la pâte et des panneaux de fibre, et diminution du temps écoulé entre l'abattage et l'arrivée des grumes à la scierie. Mais dans une industrie dont la structure est solidement établie, les innovations ne doivent être introduites que progressivement, avec le souci que les machines et les moteurs actuellement employés ne se démodent pas trop rapidement.


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