Ce document présente une revue succincte et préliminaire du statut de l’aquaculture et des pêches continentales dans le monde, basée sur les données statistiques de la FAO les plus récentes : Statistiques de l’aquaculture et des pêches continentales – FishStat Plus version 2.3 http://www.fao.org/fi/statist/FISOFT/FISHPLUS.asp; tous les deux ans par le Département des Pêches de la FAO afin que les informations les plus récentes sur la production de l’aquaculture et des pêches continentales, ainsi que sur leurs problèmes et leurs tendances, soient mises à la disposition des participants du Comité des Pêches (COFI). Des analyses plus détaillées sont faites pour les pays membres de la FAO sous la forme de publications régulières telles que la Review of the state of world aquaculture (FAO, 1997 - www.fao.org/fi/publ/circular/c886.1/c886-1.asp et L’état des ressources halieutiques mondiales: les pêches continentales (FAO, 2000d .http://www.fao.org/fi/publ/circular/ficirc.asp. La plupart des analyses de la production aquacole présentées ici sont basées sur des informations présentées à la récente conférence sur l’Aquaculture au cours du troisième millénaire, tenue à Bangkok, Thaïlande, du 20 au 25 février 2000, et en particulier dans le document intitulé " Increasing the contribution of aquaculture for food security and poverty alleviation " (Tacon, 2001). Les actes de la conférence sur l’Aquaculture au cours du troisième millénaire (Subasinghe et al., 2001) contenant une analyse et une revue détaillées de tout le secteur aquacole est en préparation pour être publiée en octobre 2001.
Production aquacole
L’aquaculture demeure le secteur de production alimentaire présentant la plus forte croissance dans le monde. Depuis 1984, son taux de croissance général a été supérieur à 11 pour cent par an, comparé à 3,1 pour cent pour la production de viande d’élevages animaux terrestres et 0,8 pour cent pour la production des pêches de capture (Figure 1). En 1998, environ 90 pour cent et 82,2 pour cent de la production aquacole mondiale ont été produits respectivement dans les pays en voie de développement (35,49 Mt) et en particulier dans les Pays à faible revenu et à déficit vivrier (PFRDV = 32,41 Mt). La contribution des pays en voie de développement à la production aquacole globale est passée de 72,6 pour cent (7,37 Mt) en 1984 à 90 pour cent (35,49 Mt) en 1998 alors que celle des pays développés a diminué de 27,4 pour cent (2,78 Mt) à 10 pour cent (3,93 Mt) au cours de la même période (Figure 2). Au cours de la période 1984-1998, la production aquacole dans les PFRDV a augmenté cinq fois plus vite (13,7 pour cent par an depuis 1984) que dans les pays développés (2,7 pour cent par an depuis 1984), le taux moyen de croissance de la production aquacole dans les pays en voie de développement étant de 12,8 pour cent par an.Disponibilité globale en produits aquatiques de consommation
En ce qui concerne la disponibilité par tête d’habitant en produits aquacoles de consommation (c’est-à-dire la production de poissons, crustacés et mollusques cultivés exprimée sur la base de leur poids vif, tout en excluant les plantes aquatiques cultivées; 30,86 Mt en 1998), elle a augmenté de 261 pour cent, passant de 1,45 kg en 1984 à 5,23 kg en 1998, avec un taux de croissance annuel moyen de 10,4 pour cent. Au contraire, la disponibilité per caput en produits de consommation des pêches de capture (62,45 Mt, excluant les produits pêchés destinés à la fabrication de farine de poisson) s’est maintenue pratiquement constante (10,88 kg en 1984 et 10,58 kg en 1998). Sur la base des données précédentes, l’aquaculture a produit en 1998 plus de 33,1 pour cent de la disponibilité globale en produits aquacoles de consommation. Au niveau mondial, la consommation per caput de produits animaux aquatiques est plus élevée que tout autre type de viande ou protéine animale (FAOSTAT, 2000)(http://apps.fao.org/page/collections?subset=agriculture). Bien qu’en 1998 les pays en voie de développement aient produit plus des deux tiers de la disponibilité totale en produits aquatiques de consommation, la disponibilité per caput a été la plus grande dans les pays développés (23,2 kg en 1998 pour 25,6 kg en 1984), suivie des pays en voie de développement (14 kg pour 8 kg en 1984) et des PFRDV (13,6 kg pour 6,9 kg en 1984). Par continent, la disponibilité per caput a été la plus élevée en Océanie (20,2 kg en 1998 contre 21,3 kg en 1984), suivie de l’Europe (19,7 kg contre 17,8 kg), de l’Asie (17,6 kg contre 10,5 kg), des Amérique du Nord et Centrale (16,8 kg contre 16,6 kg), de l’Amérique du Sud ( 9,8 kg contre 7,9 kg) et de l’Afrique (7 kg contre 8,1 kg) (FAOSTAT, 2000).La plus grande partie de la production aquacole étant d’origine rurale et de subsistance, l’aquaculture a un impact majeur par la provision directe et indirecte d’emplois en milieu rural pauvre, contribuant ainsi à l’allégement de la pauvreté. Dans beaucoup de pays en voie de développement, l’aquaculture crée des perspectives pour la diversification des systèmes culturaux, la réduction des risques et l’intégration à l’agriculture. En termes de production, toutes les régions, excepté l’Afrique, ont enregistré une augmentation importante de la production moyenne per caput entre 1984 et 1998. Bien que l’Asie continue à dominer l’aquaculture mondiale aussi bien en poids total de production que pour chacune des principales commodités, l’Amérique latine a enregistré une très haute croissance annuelle moyenne entre 1984 et 1998. Au cours des prochaines années, l’aquaculture continuera à être un important producteur d’aliments aquatiques. L’objectif principal d’augmenter la production aquacole devrait s’orienter vers l’allégement de la pauvreté et la contribution à la sécurité alimentaire des masses. Ceci ne pourra être réalisé qu’en s’assurant que tout développement aquacole futur sera durable du point de vue de l’environnement, économiquement viable et socialement acceptable.
Menaces futures
Les effets sur l’environnement provoqués par d’autres activités constituent la contrainte principale pour la durabilité ou l’augmentation de la production. Parallèlement à une démographie croissante, le développement économique rapide au niveau mondial et en particulier dans plusieurs pays asiatiques aura plus que probablement un impact sur les écosystèmes aquatiques continentaux, principalement par le déversement d’effluents industriels dans les cours d’eau ainsi que par la perte et la dégradation de certains types d’habitats caractéristiques des zones humides. Les besoins en eau douce sont en augmentation et continueront à s’accroître (Figure 6), ce qui aura vraisemblablement un impact négatif sur les pêches, les pêcheurs n’ayant généralement que peu d’influence sur les prises de décision dans de nombreux pays. En présence d’une population accrue, utilisant plus de poisson et plus d’eau douce, la pression croissante sur les pêches continentales pourrait résulter en surexploitation, perte de biodiversité et impossibilité de satisfaire les besoins en produits de la pêche continentale. L’introduction d’espèces exotiques a permis d’améliorer la production des pêches continentales mais elle a aussi eu des impacts négatifs sur l’environnement et sur les aspects économiques (voir section suivante).Vers l’avenir
Potentiellement, les captures pourraient être considérablement augmentées par la réhabilitation d’habitats d’eau douce et de leurs pêcheries. Ceci a déjà permis d’améliorer les pêches dans de nombreux pays, tout en étant considéré comme une possibilité dans beaucoup d’autres. Une autre méthode permettant d’augmenter les captures dans les eaux continentales consiste dans l’application et/ou l’amélioration de techniques d’aménagement telles que :Un débat actuel : la gestion des introductions d’espèces
Les espèces aquatiques introduites ont contribué à l’amélioration de la vie journalière dans de nombreuses régions à travers le monde. En Asie, la production aquacole des tilapias africains atteint actuellement plus de 700 000 tonnes. Au Chili, une industrie florissante est basée sur la production de salmonidés introduits qui contribuent actuellement près de 20 pour cent des saumons cultivés dans le monde. Globalement, la contribution des espèces introduites à la production totale varie de 10 pour cent à environ 17 pour cent, selon le groupe taxonomique auquel elles appartiennent. Mais, les espèces introduites sont aussi considérées comme une menace pour les espèces indigènes (Tableau 2). La réintroduction de l’Ouest américain en Europe occidentale d’huîtres plates européennes est responsable de l’infection des huîtres indigènes par le parasite protozoaire Bonamia, ce qui a résulté en la décimation des populations d’huîtres plates européennes. Le déplacement généralisé à travers l’Afrique des tilapias cultivés a favorisé l’hybridation avec les espèces sauvages locales à tel point qu’il est devenu extrêmement difficile, si non impossible, d’encore trouver des populations naturelles. L’introduction au Bangladesh de carpes indiennes a conduit à ce que les pêcheurs ruraux se voient limiter l’accès à certaines zones de pêche. Des espèces ont été déplacées à travers le monde pour diverses raisons, la motivation principale étant le développement de l’aquaculture (Figure 7). De nombreux impacts de l’introduction d’espèces exotiques étant encore inconnus, la FAO a établi la Base de données sur les introductions d’espèces aquatiques (DIAS - http://www.fao.org/fi/statist/fisoft/dias/index.htm afin de répertorier les introductions à l’échelle mondiale.Il faut s’attendre à ce que les introductions et les transferts d’organismes aquatiques continueront, causés principalement par le développement de l’aquaculture, des pêches fondées sur l’élevage, et de la réhabilitation d’environnements divers et de pêcheries, ainsi que l’apparition de nouvelles technologies facilitant le déplacement d’organismes vivants ou de leur matériel génétique.
La domestication d’espèces indigènes est actuellement envisagée et encouragée dans beaucoup de régions afin de prévenir les impacts négatifs possible de l’introduction d’espèces étrangères. Une telle approche présente plusieurs avantages, notamment de moins perturber l’environnement et de réduire le risque d’introduction d’agents pathogènes. Bien souvent, les marchés existent déjà et les consommateurs sont habitués aux espèces locales. Mais les espèces domestiquées peuvent aussi présenter des risques (par ex. érosion génétique des stocks locaux) et ne pas remplir les conditions requises. Dans ce cas, l’introduction d’une espèce étrangère peut être envisagée, ainsi que discuté dans le Code de conduite pour une pêche responsable (Figure 8). FAO demande aux gouvernements, aux organisations non gouvernementales et, en général, à toutes les personnes intéressées de signaler les introductions à la FAO afin de pouvoir l’inclure dans sa Base de données sur l’introduction d’espèces aquatiques. Pour encourager l’utilisation responsable d’espèces introduites, l’amélioration de l’information existante est indispensable.
Figure 8. Le processus de prise de décision lorsque
Encadré 1. La contribution des ressources des pêches continentales à la sécurité alimentaire est certainement largement sous-estimée. Ceci est principalement dû à la nature informelle et dispersée de beaucoup de pêcheries (FAO, 2000d). Par exemple: |
Pour 1991, le Brésil a déclaré que les pêches continentales ont totalisé 190 000 t alors qu'une estimation indépendante basée sur la démographie et les taux de consommation de poisson suggère une production d'environ 319 000 t rien que pour la partie brésilienne du Bassin de l'Amazone (Bayley, 1998). |
Les eaux continentales du Ghana sont dominées par le Lac Volta (8 000 km2). Pour ces dernières années, le Ghana a déclaré un total de captures pour ses eaux continentales situé entre 55 000 et 74 000 t. Cependant, sur la base d'une enquête statistique partielle, rien que la production totale du Lac Volta devrait se situer entre 150 000 et 200 000 t par an (de Graaf and Ofori-Danson, 1997. |
Pour la période 1984-1997, le Cambodge a déclaré des captures continentales annuelles variant de 50 000 à 75 000 t. Cependant, une estimation des captures réelles au cours de la période 1994-1997 mentionnent de 290 000 à 430 000 t par an (van Zalinghe et al., 1998). |
Pour la période 1984-1997, les plus importantes captures annuelles signalées par la Thaïlande et par le Viet Nam ont respectivement atteint 229 000 t et 136 000 t alors que des estimations faites par MRC (1992) et Jensen (1996) mentionnent des captures de 303 000 t et 190 000 t respectivement. |
Encadré 2. Menaces pour les pêches continentales |
Surexploitation |
Compétition pour l'eau par d'autres secteurs (agriculture, industries, etc) |
Dégradation de l'environnement et pertes d'habitats aquatiques |
Pollution |
Réduction de l'aire de pêche ou de l'accès |
Perte de biodiversité |
Introduction d'espèces |
Gestion des pêches inadéquate |
Tableau 1. Principaux producteurs en 1998: production aquacole totale (FAO FishStat Plus 2000)
Pays |
Production1 tonnes |
Production2 % total mondial |
TCA3 84-98, %.yr-1 |
Changt4 97-98, % |
Valeur totale US$’000 |
Valeur unitaire US$/kg |
||
Chine |
27 071 942 |
68.6 |
+ |
16.2 |
+ |
12.7 |
25 499 016 |
0.94 |
Inde |
2 029 619 |
73.8 |
+ |
11.2 |
+ |
9.0 |
2 222 789 |
1.09 |
Japon |
1 290 486 |
77.1 |
+ |
0.5 |
- |
3.7 |
4 126 039 |
3.20 |
Philippines |
954 512 |
79.5 |
+ |
5.5 |
- |
0.3 |
639 080 |
0.67 |
Indonésie |
814 090 |
81.6 |
+ |
7.2 |
+ |
4.7 |
2 149 508 |
2.64 |
Corée, Rép. |
796 632 |
83.6 |
+ |
1.2 |
- |
23.4 |
766 268 |
0.96 |
Bangladesh |
583 877 |
85.1 |
+ |
12.7 |
+ |
13.9 |
1 493 670 |
2.56 |
Thaïlande |
569 577 |
86.5 |
+ |
13.0 |
+ |
3.1 |
1 806 795 |
3.17 |
Viet Nam |
537 870 |
87.9 |
+ |
12.3 |
+ |
5.7 |
1 356 724 |
2.52 |
Corée, RDP |
481 500 |
89.1 |
- |
2.9 |
- |
1.6 |
302 950 |
0.63 |
Total mondial |
39 430 834 |
100.0 |
+ |
11.0 |
+ |
9.4 |
52 458 185 |
1.33 |
Tableau 2. Impacts principaux des espèces introduites
Bénéfices | Problèmes |
Production de revenus | Réduction ou élimination des espèces indigènes |
Augmentation de la production | Altération de l’habitat |
Contrôle biologique | Importation d’agents pathogènes (maladies) |
|
Changement dans l’accès à la terre et aux ressources |
Tableau 3. Espèces le plus fréquemment introduites (source: DIAS)
Poisson | Crustacé | Mollusque |
Carpe commune | Crevette géante tigrée | Huître creuse du Pacifique |
Truite arc-en-ciel | Ecrevisse rouge de marais | Troque du Nil |
Tilapia du Mozambique | Bouquet géant | Crépidule des moules |
Carpe herbivore | Crevette Kuruma | Golden apple snail |
Tilapia du Nil | Crevette à pattes blanches | Grande tridacne brillante |
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