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1.   INTRODUCTION

1.1  GÉNÉRALITÉS

L'évaluation des risques microbiologiques (ERM) est un nouvel instrument pour évaluer la sécurité sanitaire des aliments et de l'eau. L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) jouent un rôle central dans le développement et la normalisation des ERM à l'échelle internationale, pour informer les gestionnaires des risques aux niveaux national et international. L'élaboration de directives, comme celles sur la caractérisation des dangers liés aux pathogènes présents dans les aliments et dans l'eau, est un élément important de cette tâche. Les directives s'adressent principalement à une audience multidisciplinaire intervenant directement dans la préparation et l'examen de documents portant sur l'évaluation des risques microbiologiques, à l'échelon national ou international. Elles seront également utiles aux responsables de la gestion des risques qui prennent leurs décisions sur la base des résultats des évaluations des risques, et qui doivent connaître les principes et des postulats qui les sous-tendent.

Les caractérisations des dangers liés aux pathogènes microbiologiques présents dans les aliments et dans l'eau sont étudiées ensemble dans ce document car ces deux éléments ne peuvent pas être gérés comme il convient ou compris l'un sans l'autre, malgré des différences historiques dans les approches. L'eau est à la fois un ingrédient des denrées alimentaires et un vecteur indépendant par lequel les hommes s'exposent aux dangers microbiologiques en buvant, en pratiquant des activités récréatives ou en étant en contact avec des aérosols. L'exposition humaine aux agents pathogènes peut se faire à la fois à travers les aliments et l'eau, comme cela a été démontré par les récents foyers épidémiques résultant de la réutilisation des eaux usées pour l'irrigation des fruits et des légumes. Pour réduire l'impact des pathogènes sur la santé publique, il est indispensable de comprendre le rôle joué par toutes les principales voies d'exposition. L'adoption d'une approche commune pour la caractérisation des dangers microbiologiques dans les aliments et dans l'eau favorisera cette compréhension, aidera à faire une analyse des risques efficace et renforcera la protection de la santé publique.

Les consultations mixtes FAO/OMS d'experts sur l'évaluation des risques microbiologiques (JEMRA) conduisent des évaluations des risques microbiologiques d'origine alimentaire, au niveau international. Les Comités du Codex Alimentarius sont généralement chargés de la gestion des risques concernant les aliments faisant l'objet d'un commerce international. Les JEMRA visent à fournir une base scientifique aux délibérations pertinentes sur la gestion des risques du Codex Alimentarius qui ont pour objet d'élaborer des normes, directives et textes apparentés sur les produits alimentaires pour protéger la santé des consommateurs et garantir des pratiques commerciales équitables. Les rapports sur l'évaluation des risques des JEMRA fournissent aussi des informations aux pays membres de la FAO, de l'OMS et du Codex.

L'OMS donne des orientations sur la qualité de l'eau et la santé humaine à l'échelon international, à travers une série de directives, dont les Directives de qualité pour l'eau de boisson, des directives concernant l'utilisation sans risque des eaux usées et des excréments en agriculture et en aquaculture, et des directives sur la qualité des eaux utilisées à des fins récréatives. Ces directives, fondées sur un examen critique des meilleurs preuves scientifiques disponibles et sur le consensus d'experts, ont été dérivées en intégrant des informations sur les effets adverses sur la santé avec des informations concernant l'efficacité des mesures de protection, tant dans des conditions normales que de stress. (Fewtrell et Bartram, 2001). Ces directives aboutissent à des normes de gestion de la sécurité sanitaire généralisées pouvant inclure des conseils pour les « bonnes pratiques » et pour les vérifications (tant par des méthodes analytiques que par des inspections). Elles peuvent ensuite être adaptées aux conditions sociales, économiques et environnementales locales ou nationales. Ces directives fournissent donc une base scientifique pour les activités de gestion des risques des décideurs locaux et nationaux, facilitent l'établissement de normes et sont un point de référence international pour l'évaluation de la salubrité de l'eau.

1.2  CARACTÉRISATION DES DANGERS DANS CE CONTEXTE

L'analyse des risques est un processus en trois étapes: évaluation des risques (évaluation scientifique des effets adverses connus ou potentiels sur la santé); gestion des risques (évaluation, sélection et mise en œuvre des différentes options) et communication sur les risques (échange d'informations entre toutes les parties intéressées). Quoique la séparation fonctionnelle entre ces trois étapes soit importante, la nécessité d'une interaction entre elles est de plus en plus reconnue (FAO/OMS, 2002b); OMS, 2000b).

Caractérisation des dangers liés à la présence de pathogènes dans les aliments et dans l'eau - DIRECTIVES
 

Figure 1. Les composantes d'une évaluation des risques microbiologiques

L'évaluation des risques microbiologiques dans les aliments est définie par la Commission du Codex Alimentarius (CCA) comme étant un processus à base scientifique constitué de quatre composantes (figure 1): identification des dangers; évaluation de l'exposition; caractérisation des dangers et caractérisation des risques.

Le but d'une évaluation des risques peut être de fournir une estimation du taux d'atteinte résultant de la présence d'un pathogène dans une population donnée, mais il peut aussi être limité à l'évaluation d'une ou plusieurs étapes, dans un système de production ou de transformation alimentaire. Le gestionnaire des risques qui demande une évaluation des risques devrait spécifier le problème qu'il doit traiter, les questions auxquelles doit répondre l'évaluation, et les mesures qu'il envisage ou dont il dispose pour réduire l'incidence de la maladie.

1.3 OBJET DES DIRECTIVES

Le présent document a pour objet de fournir un cadre pratique et une approche structurée pour la caractérisation des dangers microbiologiques, qu'elle soit menée dans le contexte d'une évaluation des risques microbiologiques complète ou de façon autonome. Il se propose d'aider les scientifiques du secteur public et les chercheurs à identifier les points à traiter, la méthodologie à adopter pour incorporer les données provenant de différentes sources et la méthodologie de modélisation dose-réponse.

Ces directives ne sont pas une source d'information exhaustive pour la caractérisation des dangers. Cette opération exige des compétences couvrant plusieurs disciplines scientifiques et le recours à une équipe interdisciplinaire. Les questions en jeu sont complexes, notamment la méthodologie de modélisation dose-réponse. Au lieu de donner des précisions détaillées sur des techniques qui évoluent rapidement, des références à des sources d'informations additionnelles appropriées sont indiquées, le cas échéant. Les décisions de modélisation peuvent nécessiter des consultations avec des statisticiens, des mathématiciens ou des experts d'autres disciplines scientifiques qualifiés.

Ces directives ne prétendent pas avoir une valeur normative, de même qu'elles n'identifient pas d'options incontournables, déterminées à l'avance. Pour certaines questions, une approche est préconisée, sur la base de l'opinion générale des experts (par exemple, la théorie du choc unique, une approche de modélisation objective – voir section 6.3.1) pour donner des orientations d'actualité sur la science de la caractérisation des dangers. Pour d'autres questions, les options disponibles sont comparées et l'analyste décidera de l'approche à adopter compte tenu de la situation. Dans ces deux cas, l'approche et sa justification doivent être documentées dans la caractérisation des dangers, pour des raisons de transparence.

Pour les caractérisations des dangers conduites dans le cadre d'évaluations complètes des risques liés à la présence de pathogènes dans la chaîne alimentaire, les documents du Codex Alimentarius sur l'ERM fournissent le contexte requis. Les présentes directives sont censées compléter les documents du Codex, qui fournissent des orientations plus générales sur les ERM (par exemple: CAC, 1999).

Pour les caractérisations des dangers conduites dans le cadre d'évaluations complètes des risques liés à la présence de pathogènes dans l'eau potable, les directives sur la qualité de l'eau de boisson et les documents d'information y relatifs serviront de cadre. En outre, elles fournissent des informations sur le rôle de la caractérisation des dangers dans la détermination par dérivation des objectifs sanitaires concernant la qualité de l'eau potable.

1.4 PORTÉE

Ces directives portent uniquement sur la caractérisation des dangers, en tant que processus indépendant ou composante d'une ERM. Elles traitent principalement des effets de l'exposition aux pathogènes microbiens sur des hôtes individuels. L'accumulation des risques individuels sur une population et les risques de transmission secondaire ou ses aspects dynamiques ne sont pas pris en considération ici, car ils relèvent du processus de caractérisation des risques.

Ces directives sont limitées à une étude de la science de la caractérisation des dangers. Elles ne tentent jamais d'aborder les questions de la gestion des risques ou de la communication sur les risques, sauf pour décrire les interactions nécessaires pour maximiser l'utilité de la caractérisation des dangers (collecte des données, questions à résoudre, présentation des résultats de la caractérisation des dangers). Les questions ayant trait à l'établissement d'un niveau de protection approprié sont considérées comme relevant de la gestion des risques, et ne sont pas traitées dans cet ouvrage.

Ces directives concernent l'application de la caractérisation des dangers liés à la présence de pathogènes dans les aliments et dans l'eau. Jusqu'ici, la plupart des travaux ont été axés sur les bactéries et les virus pathogènes, ainsi que sur quelques protozoaires parasitiques. Les principes ébauchés ici, et en particulier les méthodes descriptives, peuvent aussi s'appliquer à d'autres effets d'expositions uniques à des micro-organismes ou à leurs toxines, y compris à des séquelles ou à des infections chroniques, notamment par Helicobacter pylori. Les effets de l'exposition chronique (notamment aux mycotoxines ou aux toxines d'algues), peuvent nécessiter une autre approche, d'avantage en rapport avec la caractérisation des dangers liés aux produits chimiques toxiques.

Ces directives sont centrées sur l'effet adverse d'un danger résultant de l'ingestion d'eau et d'aliments contaminés. Les effets adverses sur la santé pouvant résulter de l'exposition par d'autres voies (par exemple, par inhalation) ne sont pas expressément visés dans ce document, mais les principes de base qui y sont décrits peuvent aussi convenir pour caractériser d'autres voies d'exposition.


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