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Soutien à l’agrofesterie privée
et communautaire en Chine

J.L. Liu

Liu Jinlong est professeur de faculté spécialisé en foresterie communautaire au Centre de recherches sur la foresterie durable, Université chinoise de foresterie, Beijing (Chine).

En Chine, de récentes réformes ouvrent la gestion des forêts au secteur privé mais le montant élevé des redevances forestières et d’autres contraintes institutionnelles pourraient décourager les investissements privés, dans ce secteur.

Des réformes politiques et macroé-conomiques (la politique- «d’ouverture» a été lancée à la fin des années 70 alors que l’«expérience socialiste de marché» a été introduite au début des années 90) ont conduit à des changements dans le secteur forestier visant à décentraliser la gestion et l’utilisation des forêts, et à accroître la participation du public. En 1983, le «système de responsabilisation des ménages» a été étendu au secteur privé, et la gestion d’une part importante des terres forestières collectives a été confiée à des ménages individuels. En 1985, on estimait que les entités privées étaient responsables de plus de 50 pour cent de l’expansion de la superficie forestière (Li et al., 1988). Au milieu des années 80, le marché des produits forestiers a également été libéralisé. Depuis le début des années 90, le droit d’accorder et de mettre aux enchères des baux et de vendre les droits de jouissance des terres a été introduit, même pour les forêts appartenant à l’Etat.

L’ouverture de la gestion des forêts au secteur privé peut accroître la rentabilité de la foresterie, à condition que le secteur privé soit libre de gérer les forêts pour en tirer un profit (surtout dans le cas où les taxes sont très élevées). Pour que la participation privée à la foresterie procure des avantages aux populations en Chine, trois conditions fondamentales doivent être réunies: existence de canaux de participation appropriés, de mécanismes de partage des avantages rationnels et d’arrangements favorables concernant la jouissance des terres et des arbres (Liu, 1999).

Comme le montre cet article, les réformes mises en œuvre en Chine ont indéniablement stimulé la participation du public à la foresterie, mais elles pourraient être encore plus efficaces. La question des incitations, en particulier, mérite plus d’attention si l’on veut stimuler la participation du public, encourager une gestion durable des forêts, et accroître la rentabilité des activités forestières.

Les objectifs forestiers de la Chine

Bien que la Chine soit au cinquième rang mondial pour la superficie forestière, la superficie de forêt et le matériel sur pied par habitant n’y sont respectivement que de 0, 1 ha et 7 m3 (niveaux très inférieurs aux moyennes mondiales qui sont respectivement de 0,6 ha et de 7 m3), et son couvert forestier ne représente que 17,5 pour cent de son territoire (FAO, 2001). En 2001, les importations ont représenté 62 pour cent de la consommation totale de bois du pays, soit 12 pour cent de plus qu’en 2000 (Administration forestière publique, 2002). Sur le plan écologique, 38 pour cent des terres du pays (environ 367 millions d’hectares) sont touchées par l’érosion, alors que la désertification prévaut sur 27 pour cent de la superficie des terres et s’étend chaque année d’un quart de million d’hectares (Administration forestière publique, 2000). Environ un tiers des prairies sont sujettes à la dégradation. La biodiversité est également menacée avec, selon les rapports, entre 15 et 20 pour cent des espèces de faune et de flore sauvages du pays menacées d’extinction (Banque mondiale, 1994).

En réaction, le Gouvernement chinois a mis en tête des priorités le développement forestier, pour atteindre toute une série d’objectifs – renforcement de l’environnement, conservation des sols, maîtrise des inondations, lutte contre la désertification, production de bois d’œuvre et lutte contre la pauvreté. Aujourd’hui, la Chine a le plus vaste domaine de forêts plantées du monde (45 millions d’hectares); les plantations représentent 27,5 pour cent du couvert forestier total (FAO, 2001). L’ambition du gouvernement est d’accroître le couvert forestier à 20,3 pour cent, 23,4 pour cent et plus de 28 pour cent de la superficie totale des terres, d’ici 2010, 2020 et 2050 (RGFSCS, 2002).


PROMOUVOIR LA PARTICIPATION DES POPULATIONS AU DÉVELOPPEMENT DU SECTEUR FORESTIER

En Chine, les plans nationaux qui concernent de plus près la foresterie sont le Plan environnemental (1998) et le Plan d’action forestier pour Action 21 de la Chine (Administration forestière publique, 1995). Ces plans ont adopté le concept de la participation populaire en incluant des objectifs comme la mise en place de mécanismes de suivi participatifs pour la protection de l’environnement et le renforcement de la démocratie dans les processus de prise de décisions et de gestion liés à l’environnement. Toutefois, ces plans ne définissent pas clairement les modalités de mise en œuvre de la participation populaire.

Pour atteindre leurs objectifs, les plans soulignent la nécessité de renforcer les instruments reposant sur les mécanismes du marché (par exemple vente aux enchères) et de fournir des incitations pour encourager le secteur privé ou les agriculteurs individuels à participer à la remise en état, à la protection et à la gestion des terres dégradées. Par exemple, il est clairement établi que tout individu ou groupe privé qui boise des terres nues peut être récompensé par des droits de jouissance des terres à long terme, transmissibles par héritage. En outre, le Plan d’action forestier a proposé l’établissement d’un Fonds d’indemnisation pour les avantages écologiques en vue de subventionner la gestion des forêts à vocation environnementale. En 2001, 1 milliard de yuan (environ 120 millions de dollars EU) ont été prélevés sur les comptes financiers du Gouvernement central et alloués à ce fonds, pour accorder des subventions aux unités de gestion des forêts.

Entre 1978 et 2000, 10 programmes ont été lancés pour développer les ressources forestières de la Chine. Ces programmes visaient principalement à préserver et à maximiser les avantages environnementaux des forêts, comme la protection des bassins versants, la lutte contre l’érosion des sols et la diversité biologique. Ils ont été mis en œuvre selon l’approche descendante traditionnelle. Ces programmes comprennent le Programme de plantation de rideaux-abris dans les trois régions du nord et les programmes de conservation des eaux dans les bassins hydrographiques des principaux cours d’eau. En 1999, ces 10 programmes avaient établi au total
38, 4 millions d’hectares de plantations forestières. Après l’an 2000, ils ont été fondus en un programme unique d’établissement de forêts de protection clés.

Depuis la fin des années 90, on a noté un regain d’intérêt pour la participation communautaire. Les cinq nouveaux programmes élaborés depuis, à savoir le Programme de lutte contre la désertification dans les provinces de Beijing et de Tianjin, le Programme d’établissement de réserves de faune et de réserves naturelles, le Programme de développement de la foresterie commerciale et surtout le Programme de protection des forêts naturelles et le Programme Des céréales pour reverdir ont été essentiellement axés sur la plantation d’arbres, mais la nécessité de fournir un appui aux communautés rurales pour leur donner la possibilité de développer d’autres moyens d’existence a souvent été signalée.

Le Programme de protection des forêts naturelles indique que le gouvernement «encouragera vivement la participation privée à la protection et à la gestion des forêts et qu’il établira un nouveau modèle de mise en œuvre des programmes faisant appel aux mécanismes du marché et prévoyant la participation de multiples parties prenantes, notamment du secteur privé». (Administration forestière publique, 2000). Dans la pratique, la majorité des fonds du programme ont été acheminés vers des entreprises forestières d’Etat en difficulté financière. Cette situation a suscité un débat animé en Chine sur la manière d’associer les communautés rurales au programme, et explique en partie pourquoi l’Administration forestière publique met en avant les instruments de marché et la participation de multiples parties prenantes au programme.

Le Programme de protection des forêts naturelles a, dans une certaine mesure, réussi à encourager la participation du secteur privé. Par exemple, dans la province de Heilongjiang, le système de responsabilisation des ménages a été promu et développé; les agriculteurs peuvent à présent se faire assigner par contrat une pièce de forêts déterminée pour la gérer conformément aux critères de gestion établis par les autorités forestières, en échange d’une indemnisation du Programme de protection des forêts naturelles. Dans la Province de Shaanxi, la gestion des forêts d’Etat a été cédée aux communautés rurales ou au secteur privé et ces agriculteurs sont indemnisés par le Programme. Dans le sud-ouest de la Chine, le Gouvernement a encouragé la sous-traitance de certains achats et services comme la production de jeunes plants, la plantation d’arbres et la surveillance des forêts, au secteur privé et à des agriculteurs individuels. Le Gouvernement a aussi commencé à expérimenter un système d’indemnisation pour les forêts privées qui resteront des forêts de protection destinées à fournir des services environnementaux, après l’achèvement du programme.

Le Programme Des céréales pour reverdir (nom in extenso Programme de conversion des terres agricoles en forêts ou en prairies), introduit en Chine occidentale en 2000, vise à enrayer la dégradation et l’érosion des sols grâce à la conversion en forêts ou en pâturages de près de 1 500 ha de terres pentues actuellement cultivées ou en friche, d’ici 2010. A cette fin, il distribuera une combinaison de subventions en aliments et en espèces pendant les huit premières années (2 250 kg de céréales en Chine méridionale et 1 500 kg de céréales en Chine septentrionale, et 300 yuan [36 $EU] par an, pour la gestion), plus 750 yuan par hectare pour couvrir les coûts des jeunes plants pendant la première année. Les concepts fondamentaux de ce programme sont «la participation volontaire des agriculteurs» et «le recours aux services de particuliers», mais la manière dont ces principes seront mis en application n’est pas encore spécifiée.

Avant 2000, les programmes visant en premier lieu la récupération de l’environnement, comme le Programme des rideaux-abris des trois Nord, avait établi des millions d’hectares de plantations, mais elles ont été mises en œuvre suivant la méthode traditionnelle du sommet à la base

J. CARLE


Les programmes de plantation d’arbres plus récents montrent une tendance à une plus grande participation rurale et à la fourniture de plus d’avantages aux communautés – cet agriculteur a récolté les tiges de son maïs planté en intercalaire entre les arbres pour en tirer du combustible et du fourrage

Source: Liu et al., 2002.


CONTRAINTES ENTRAVANT LA MISE EN ŒUVRE DE LA FORESTERIE PRIVÉE ET COMMUNAUTAIRE


Arrangements institutionnels

Le Gouvernement chinois a une hiérarchie complexe d’institutions administratives. Il existe cinq niveaux verticaux d’administration forestière, comprenant l’Administration forestière publique, les départements forestiers des provinces et des préfectures ou des municipalités, les bureaux forestiers des comtés et les stations forestières des cantons. Ce système d’administration hiérarchisé encourage une approche descendante (du sommet vers la base) du développement forestier, pour la planification, la formulation et la mise en œuvre des projets, qui se prête mal à la participation du public. Elle incite également implicitement le personnel forestier opérant à chaque échelon à chercher à plaire aux niveaux supérieurs de l’administration plutôt qu’à être à l’écoute des autres parties prenantes. Les projets forestiers entrepris selon cette approche descendante ont été caractérisés par un manque de coordination entre les institutions gouvernementales, une faible efficience, des «trous noirs» financiers, une utilisation inappropriée des ressources naturelles, et une faible participation (Liu, Ye et Zheng, 2000).

En 20, ans les réformes des politiques «d’ouverture» ont peu à peu créé un petit espace pour la participation des individus et des communautés. Surtout, alors que la propriété des terres forestières reste aux mains du secteur public (fermes forestières d’Etat ou sociétés de gestion collective), l’utilisation et la gestion des forêts sont de plus en plus transférées aux ménages, aux communautés et aux entreprises privées. En outre, au sein du secteur public, les responsabilités sont progressivement transférées du gouvernement central aux autorités locales. Toutefois, depuis 1987, le Gouvernement a introduit un système limitant les possibilités de coupe annuelle, déterminé au niveau central, qui impose de demander un contingent de récolte aux autorités forestières avant de pouvoir exploiter commercialement une forêt.

En 1994, la province de Hainan a institué une prohibition d’exploiter les forêts naturelles, et dès le lancement du Programme de protection des forêts naturelles en 1998, les provinces du cours supérieur du Yangtze et des cours supérieur et intermédiaire du fleuve Jaune ont cessé toute exploitation commerciale. Les agriculteurs et les communautés rurales ont perdu les revenus des forêts touchées par la prohibition, sans recevoir aucune indemnisation du projet. Si elles veulent renforcer la gestion durable des forêts, les autorités chinoises doivent reconsidérer leur politique de prohibition à l’exploitation, au lieu de s’accrocher à une politique excluant toute intervention.

Alors que les autorités locales reçoivent de l’Administration forestière publique des fonds pour financer les projets, elles doivent compter sur les Trésors locaux et sur leurs propres recettes pour couvrir les dépenses ordinaires, comme les salaires du personnel. La surdotation en personnel qui caractérise la plupart des institutions forestières publiques a grevé les ressources financières et inévitablement conduit à un relèvement des taxes et des prix des produits forestiers. Elle a aussi contribué à une forte bureaucratisation de la gestion des forêts, qui laisse peu de place à la participation des communautés.


Réglementations forestières

D’une manière générale, le droit des forêts de la République populaire de Chine n’a pas créé d’environnement propice à la promotion de la participation communautaire. Dans aucune législation sur la gestion des forêts, il n’existe de clause se référant à la participation communautaire à la planification de la gestion forestière, à la conception des projets, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation.

La loi est en outre suffisamment floue pour être interprétée de diverses manières. En théorie, cette flexibilité pourrait être utilisée à l’avantage des populations locales mais, dans la pratique, les autorités locales tendent à en profiter pour raffermir leur contrôle sur les ressources forestières dans leur propre intérêt ou dans celui des institutions (même si cela est contraire à l’esprit de la réforme gouvernementale).


Jouissance des terres et des arbres

L’instabilité des régimes de jouissance des terres est l’un des principaux facteurs qui entrave la participation communautaire à la gestion des forêts (Liu, Ye et Zheng, 2000). En Chine, les forêts appartiennent soit à l’Etat (41,2 pour cent), soit à des sociétés de gestion collective (58,8 pour cent). Depuis le milieu des années 80, la loi autorise à assigner à des particuliers et à des groupes privés les droits de jouissance afférents à des terres forestières de propriété collective, et cette faculté a été étendue aux terres appartenant à l’Etat dans les années 90, en vue d’encourager la foresterie communautaire. Toutefois, la propriété des arbres et des forêts est souvent morcelée et mal définie. (Bien que la définition scientifique des forêts inclue la terre, le droit des forêts chinois stipule que les individus et le secteur privé peuvent posséder des arbres et des forêts, mais pas les terres qui sont dessous, celles-ci appartenant à l’Etat ou à des collectivités). A cet égard, de nouveaux efforts sont nécessaires pour mieux définir les modes de jouissance des terres et des arbres et mettre en œuvre une législation pour les entériner.

En moins de 55 ans, cinq réformes majeures sur les droits de jouissance des terres forestières ont vu le jour. Il est évident que les changement fréquents dans les droits d’utilisation des terres forestières _ plus rapides que le cycle de croissance naturelle des essences forestières – ont une incidence négative sur l’attitude des agriculteurs, qui perdent confiance dans leur droit de propriété et se désintéressent de la gestion des forêts, ce qui entraîne leur destruction (Liu, Ye et Zheng, 2000; Ye, Liu et Lin, 2002). Par exemple, la mise en œuvre au milieu des années 80 d’une politique consistant à accorder des baux à court terme à des individus pour gérer des forêts de propriété collective s’est traduite par la destruction de vastes étendues de forêts dans ces zones.

Le droit limité dont disposent les communautés pour déterminer la manière dont les terres forestières sont utilisées demeure un problème. Souvent, dans les efforts qu’elles font pour améliorer la gestion des forêts, les autorités locales interfèrent dans les décisions des agriculteurs concernant les espèces à planter, le moment où cela doit être fait et les méthodes qui seront adoptées. De hauts fonctionnaires des provinces de Hunan et de la Mongolie-Intérieure ont expliqué qu’une stratégie de boisement et de gestion unifiée était considérée comme la clé de la réussite de la gestion des plantations et des forêts. (Ye, Liu et Lin, 2002). Le conflit entre la nécessité de planifier et de contrôler les activités de boisement et le souhait des agriculteurs de décider du moment et des espèces qu’ils devraient planter n’a pas encore été résolu.

Dans de nombreux endroits, les autorités locales ont promulgué une politique qui stipule que les droits d’utiliser les terres forestières seront révoqués si les terres montagneuses en friche ne sont pas plantées dans les trois ans, sans pour autant aplanir les contraintes auxquelles sont confrontés les agriculteurs ou les aider à les surmonter. Certaines zones, en particulier les montagnes en friche ou les autres terres incultes sont utilisées par les communautés locales comme pâturages, comme lieux de détente, ou pour récolter du bois et des produits forestiers non ligneux, et leur boisement par d’autres peut compromettre le droit d’accès des populations locales.

Les politiques d’utilisation des terres peuvent être interprétées par les fonctionnaires locaux, dont les points de vue ne coïncident pas toujours avec ceux des populations locales, ce qui pose un autre problème. Les droits de gérer les forêts devraient comprendre le droit de décider de ce qui est planté et du moment où cela sera fait mais, dans bien des zones rurales, les réglementations forestières sont restrictives et les agriculteurs sont contraints de planter des espèces déterminées. Le degré de contrôle dont disposent actuellement les autorités locales freine souvent l’enthousiasme des agriculteurs qui souhaiteraient participer aux projets de foresterie.


Incitations

Bien qu’elle reconnaisse l’importance de la promotion de la participation communautaire, la Chine tient à examiner les incitations prévues par les politiques forestières actuelles, pour voir dans quelle mesure elles peuvent améliorer l’efficience des investissements du gouvernement et accroître la part du secteur privé et des communautés dans les investissements forestiers.

Le budget de développement forestier du gouvernement central a augmenté de façon spectaculaire après 1998. Par exemple, en 2001, les investissements annuels totaux du secteur se montaient à environ 3,1 milliards de dollars EU, dont 2,1 milliards de dollars financés par le gouvernement central. Ces chiffres sont respectivement à peu près 7 et 17,5 fois plus élevés qu’en 1997. A l’inverse, les investissements de développement forestier financés par les communautés sont tombés à moins de 15 pour cent du total en 2001, ce qui laisse penser que le Gouvernement n’a pas réussi à encourager d’autres investisseurs à participer à cet effort.

La majorité des systèmes d’incitation actuels financés sur le budget du gouvernement central donnent la priorité aux boisements – par exemple pour prévenir les inondations en aval des fleuves – qui profitent essentiellement aux régions riches et urbaines. La plupart des programmes de développement forestier n’ont pas pour objectif de fournir des avantages aux communautés rurales et aux populations vivant dans des régions de colline ou de montagne.

Le Programme de développement de la foresterie commerciale mis en œuvre récememnt fait exception à la règle; en effet, il a proposé une série d’instruments reposant sur les mécanismes du marché pour promouvoir la participation du secteur privé et des communautés, et s’adresse aux entreprises communautaires orientées vers le marché. Ces instruments comprennent une subvention du gouvernement pour les boisements (10 pour cent de l’investissement total de boisement) et les entreprises forestières n’appartenant pas à l’Etat (plus 5 pour cent du coût des boisements, pour une superficie minimale), ainsi que des prêts subventionnés pour les activités de boisement.


Taxation et imputation des coûts

En 1994, le Gouvernement central a réformé le système fiscal centralisé de manière à répartir les pouvoirs entre le Gouvernement central et les administrations locales. Cette réforme fiscale a eu quelques effets positifs sur la gestion des forêts, mais ils ont probablement été moins importants que les effets négatifs. Par exemple, étant donné que la majorité des recettes provenant des taxes ou des redevances forestières sont versées au trésor des administrations locales, ces administrations tentent ordinairement de recouvrer le plus d’argent possible avec les taxes forestières. Ce problème est exacerbé par le fait que les forêts sont souvent situées dans des régions pauvres où les administrations locales ont des revenus insuffisants, et considèrent les forêts comme une source de revenus vitale.

La figure montre le poids total des taxes et autres redevances forestières dans plusieurs zones (Liu et al., 2002). Elle montre que ces charges cumulées peuvent atteindre plus de 50 pour cent de la valeur des ventes de bois. Les taxes du gouvernement représentent environ 40 pour cent du montant total des charges, alors que les autres charges légales sont de l’ordre de 55 pour cent. Des charges aussi élevées dissuadent les ménages et les communautés d’investir dans la gestion des forêts et d’y participer.

Le Gouvernement central et les administrations locales ont reconnu que le montant élevé des charges forestières pouvait freiner le développement de la participation des communautés à la gestion des forêts. En 2000, le Gouvernement central a mis en place quelques projets pilotes pour une réforme de la fiscalité rurale dans la province d’Anhui et dans quelques comtés d’autres provinces. En 2003, ces réformes ont été étendues à toute la Chine rurale.

En outre, l’une des principales taxes forestières – la taxe spéciale sur les produits agricoles – est à présent collectée une seule fois, soit auprès des producteurs soit auprès des acheteurs de produits forestiers, alors qu’auparavant les deux parties y étaient assujetties. Le Gouvernement central a récemment commencé à mettre en œuvre une politique visant à élimiter complètement cette taxe.

Un certain nombre d’autorités provinciales, principalement en Chine du Sud-Est, ont commencé à réduire les taxes forestières officielles et déployé de gros efforts pour éradiquer la pratique consistant à collecter des taxes officieuses, afin de promouvoir la participation des communautés à la gestion des forêts. Il est clair que les organismes qui comptent sur les taxes forestières pour alimenter une part importante de leurs budgets hésitent à les réduire de peur que ces compressions n’entraînent des coupes dans leurs opérations et l’appui global du personnel. Ainsi, la réforme des administrations forestières locales et la réduction des effectifs peuvent être considérées comme partie intégrante de toute réforme des politiques fiscales.

Taxes et charges forestières dans cinq zones – en pourcentage de la valeur du bois

Source: Liu et al., 2002.


CONCLUSIONS

La Chine a récemment pris des mesures importantes pour donner aux communautés et au secteur privé une plus grande liberté de gérer les forêts pour en tirer un profit. Elle a incorporé la participation du public dans des projets de boisement de grande envergure, coordonnés au niveau central, comme le Projet de protection des forêts naturelles et le Programme Des céréales pour reverdir. Toutefois, certains aspects de la législation, des politiques et de l’administration actuelles, qui font partie intégrante de l’histoire de la Chine en tant qu’économie à planification centralisée, continuent à limiter la participation du public dans le secteur forestier.

En Chine, les montants des taxes pouvant être recouvrées dans le secteur forestier sont élevés, mais ils ne sont pas utilisés de manière efficace ou en proportion suffisante dans l’intérêt du secteur forestier. La flexibilité de la législation (qui laisse une large place à l’interprétation) et la surdotation en personnel permet aux administrations forestières de tirer beaucoup d’argent du secteur, au détriment des objectifs plus généraux de la politique forestière pratiquée dans le pays.

De nouvelles réformes sont actuellement mises en œuvre dans les domaines de la jouissance des terres et des arbres, des incitations, du recouvrement des taxes forestières et de l’administration forestière. Ces réformes tournent autour des axes suivants: renoncement au contrôle direct du gouvernement sur la gestion des forêts, décentralisation des pouvoirs des administrations forestières à des niveaux inférieurs et promotion de la participation des communautés à la gestion des forêts. L’accent, actuellement mis sur la bonne gouvernance et le renforcement des capacités des autorités locales, devrait contribuer à renforcer l’efficacité de ces réformes.

Le Programme de développement forestier commercial mis en œuvre récemment s’adresse aux entreprises communautaires orientées vers le marché

E. DELAETHAUWER

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