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A propos de ce rapport

La situation des marchés des produits agricoles 2004 est le premier numéro d'une nouvelle publication biennale qui viendra compléter la série existante de rapports publiés par la FAO intitulée «La situation…» et. Ce rapport n'est pas de nature technique, bien que les résultats et les conclusions présentés se fondent sur une analyse technique des spécialistes du commerce et des produits de la FAO. Son but est de présenter les questions relatives aux marchés des produits de base d'une manière objective, transparente et accessible à un public plus large, comprenant les décideurs, les observateurs des marchés des produits de base et tous ceux qui s'intéressent à l'évolution de ces marchés et à leur impact sur les pays en développement.

Il vise en particulier à mieux faire comprendre l'incidence de l'évolution des marchés mondiaux des produits de base sur les moyens d'existence et la sécurité alimentaire de centaines de millions de personnes dans le monde en développement, et sur les économies des nombreux pays en développement qui tirent une part importante de leurs recettes d'exportation du commerce des produits de base.

Le présent rapport est divisé en quatre sections principales, complétées par des tableaux qui fournissent des données de base sur le contexte actuel, les tendances historiques des prix des produits de base et les termes de l'échange.

La première section, Evolutions récentes et tendances à long terme, traite des tendances et de la volatilité des prix des produits agricoles et examine le contexte actuel et les évolutions récentes à la lumière de ces données.

La deuxième section porte sur le Coût des importations de produits alimentaires. Elle examine l'évolution de la structure des importations de produits alimentaires en rappelant que les pays en développement sont passés d'exportateurs nets à importateurs nets de produits alimentaires et d'autres produits agricoles. Cette section observe également l'incidence des fluctuations des prix des produits alimentaires au plan international sur le coût des importations de produits alimentaires des pays en développement en général et des pays les moins avancés en particulier.

La troisième section, Recettes d'exportation de produits agricoles, souligne que les exportations agricoles sont toujours d'une importance capitale pour les économies de nombreux pays en développement. Cette section étudie les conséquences de la baisse des prix des produits de base et de la volatilité des prix à l'égard des pays tributaires de ces produits, et examine la manière dont les droits de douane et les subventions ont entravé la croissance des exportations agricoles des pays en développement.

La quatrième et dernière section analyse l'Evolution de la structure du commerce agricole, en portant une attention particulière à ses conséquences sur les exploitants et les pays du monde en développement qui sont tributaires du commerce des produits de base. Les questions traitées dans cette section incluent le passage du commerce des produits agricoles primaires à celui des produits agricoles transformés, l'importance croissante des accords commerciaux régionaux et des accords commerciaux qui régissent le commerce des produits de base et les possibilités qu'ils offrent aux pays en développement, et l'incidence de la concentration croissante du marché due à la domination écrasante exercée par quelques sociétés transnationales de distribution, de transformation et de commercialisation sur les chaînes de produits agricoles de base.

Remerciements

La situation des marchés des produits agricoles 2004 a été préparée par une équipe de la Division des produits et du commerce international conduite par Alexander Sarris et David Hallam, sous l'autorité générale de Hartwig de Haen,
Sous-Directeur général, Département économique et social de la FAO.

Les données de la Section 1 sur les Evolutions récentes et les tendances à long terme ont été fournies par les spécialistes de la Division des produits et du commerce international: Abdolreza Abbassian, Pedro Arias, Boubaker BenBelhassen, Concha Calpe, Kaison Chang, Merritt Cluff, Michael Griffin, Ali Gurkan, David Hallam, Pascal Liu, Shakib Mbabaali, Brian Moir, Nancy Morgan, Paul Pilkauskas, Adam Prakash, George Rapsomanikis, Shangnan Shui et Peter Thoenes. Les données statistiques utilisées dans les analyses et la plupart des graphiques ont été compilées par les commis à la statistique de la division: Gianni Borgianelli, Laura Cattaneo, Claudio Cerqui­glini, Daniela Citti, Julie Claro, Dino Forzinet­ti, John Heine, Massimo Iafrate, Daniela Margheriti, Patrizia Masciana, Vincenzo Mazzucca, Marco Milo, Mauro Pace et Bar­bara Senfter.

Les tableaux de données en annexe ont été préparés par Pedro Arias et Julie Claro.

Le contenu de la Section 2 sur le Coût des importations de produits alimentaires a été rédigé par Ali Gurkan, Merritt Cluff, Adam Prakash et Piero Conforti.

La Section 3 sur les Recettes d'exportation des produits agricoles a été préparée par Pedro Arias, Shakib Mbabaali, George Rapsomanikis et David Hallam.

Les données de la Section 4 sur l'Evolution de la structure du commerce agricole ont été fournies par Nasredin Elamin, Hansdeep Khaira et Harmon Thomas.

Les versions provisoires de chacune des sections précédemment citées ont été révisées et commentées. D'autres commentaires utiles sur les versions provisoires précédentes ont été apportés par un certain nombre de spécialistes du Département économique et social de la FAO, notamment: Jelle Bruinsma, Deep Ford, Ted Gillin, Haluk Kasnakoglu, Panos Konandreas, Ramesh Sharma, Prakash Shetty, Josef Schmidhuber, Jacob Skoet et Randy Stringer.

Ce rapport a été édité par David Hallam avec l'aide de Pedro Arias et d'Andrew Marx.

Avant-propos

Les tendances à long terme et les chocs à court terme que subissent les marchés des produits agricoles de base nous concernent tous. Ils ont une incidence directe sur le prix des aliments que nous consommons et les vêtements que nous portons mais aussi sur la santé économique des ménages, des communautés et de pays entiers qui sont tributaires de leurs exportations de produits de base. Moins directement, mais tout aussi inexorablement, ils ont des répercussions sur la viabilité des communautés rurales et des modes de vie, l'importance des flux migratoires vers les zones urbaines et les perspectives de développement durable.

Leur impact est le plus marqué sur des centaines de millions de personnes et sur un grand nombre de pays parmi les plus pauvres du monde en développement. Selon les estimations, 2,5 milliards d'habitants du monde en développement tirent leurs moyens d'existence de l'agriculture. Pour nombre d'entre eux, la vente de produits agricoles de base ou l'exercice d'une activité rémunérée dans la production et la transformation de ces produits pour l'exportation représentent les seules sources de revenus en espèces. Plus de 50 pays en développement, dont une majorité de pays les moins avancés (PMA), sont tributaires des exportations de trois produits agricoles de base, parfois moins. En général, il s'agit de produits tropicaux qui représentent de 20 à 90 pour cent de leurs recettes en devises. Toutefois, beaucoup de PMA sont également des importateurs nets de produits alimentaires et consacrent plus de la moitié de leurs recettes d'exportation de produits de base à l'importation de produits alimentaires, afin de compenser les insuffisances de la production intérieure. Pour ces personnes et ces pays, les évolutions des marchés internationaux des produits de base peuvent aussi bien signifier l'abondance que la famine.

Baisse des prix, déséquilibre des marchés

Si la tendance à long terme des prix réels des produits agricoles de base est orientée à la baisse, les prix présentent également une variabilité importante en marge de cette tendance. Dans la seconde moitié des années 90, les cours d'un certain nombre de produits de base exportés par les pays en développement ont atteint leurs plus bas niveaux depuis la grande dépression des années 30. Le cours du café a chuté de 70 pour cent entre 1997 et 2001, menaçant les moyens d'existence de près de 25 millions de personnes qui dépendent de ce produit et déclenchant des mesures de secours alimentaire d'urgence dans plusieurs pays d'Afrique et d'Amérique centrale. En revanche, les prix moins élevés des aliments de base ont permis à de nombreux consommateurs démunis, surtout dans les zones urbaines, de s'acheter des produits alimentaires à moindre coût et d'accéder à une nourriture plus nutritive.

Certes, les marchés des produits de base se sont redressés au cours des derniers mois, et de manière spectaculaire dans le cas des céréales, mais tendanciellement, les prix réels sont en général orientés à la baisse. De nombreux exploitants et pays exportateurs se retrouvent encore piégés par leur dépendance. Ils produisent et exportent plus tout en gagnant moins que par le passé. Parallèlement, si les pays importateurs de produits alimentaires ont bénéficié de cette baisse tendancielle, ils n'en sont pas moins préoccupés par la variabilité et les hausses à court terme des prix internationaux des produits alimentaires.

De nombreuses raisons peuvent expliquer le déclin à long terme et la volatilité à court terme des prix réels des produits de base. Pour une grande part, l'orientation persistante à la baisse semble être de nature structurelle, exprimant les lois de l'offre et de la demande qui régissent le marché. En clair, l'offre mondiale a augmenté plus rapidement que la demande, poussée par une productivité accrue et l'entrée sur le marché de nouveaux producteurs importants.

L'accroissement de la productivité agricole due au progrès technologique a bénéficié à la fois aux producteurs et aux consommateurs. Les premiers obtiennent des coûts inférieurs et une compétitivité accrue, les seconds bénéficient de prix plus bas. Mais ce sont principalement les producteurs des régions les mieux équipées et les plus développées qui ont été en mesure d'exploiter les gains de productivité pour renforcer leur position sur les marchés mondiaux. Les PMA ont vu leur part du commerce agricole mondial se réduire alors que leur dépendance à son égard est restée beaucoup plus élevée que celle des autres pays en développement.

Les principaux bénéficiaires de la baisse des prix des produits alimentaires ont été les consommateurs des pays développés et des zones urbaines des pays en développement. Toutefois, pour l'immense majorité des personnes pauvres et souffrant de la faim qui vivent dans les zones rurales des pays en développement et sont tributaires de l'agriculture, les pertes de revenus et d'emploi dues à la baisse des cours des produits qu'ils commercialisent ne sont pas compensées en général par les avantages que procure la diminution des prix des produits alimentaires résultant d'une baisse des produits de base.

Le problème de l'offre excédentaire a été aggravé par les politiques gouvernementales, conduites dans les pays développés et les pays en développement, qui ont sérieusement déséquilibré les marchés agricoles.

Les droits de douane sur les importations agricoles des pays développés et des pays en développement ont freiné la croissance des exportations agricoles provenant des pays en développement. La progressivité des droits de douane, qui se traduit par l'application de droits plus élevés sur les produits exportés à des stades de transformation plus avancés, a réduit la capacité des pays en développement à exporter des produits transformés à plus forte valeur ajoutée, dont les prix ont été considérablement plus stables que ceux des produits de base.

Outre les droits de douane, les exploitants des pays en développement doivent affronter la concurrence des producteurs fortement mécanisés et subventionnés des pays industrialisés. Le soutien à la production des exploitants des pays développés s'élève à plus de 230 milliards de dollars EU par an, soit près de 30 fois le montant de l'aide au développement agricole accordée aux pays en développement.

Les droits de douane et les autres obstacles tarifaires ont également ralenti la croissance du commerce entre les pays en développement. En effet, le commerce
Sud-Sud pourrait se développer rapidement, notamment entre des pays enregistrant une forte hausse des revenus et des niveaux de consommation faibles, s'il n'était freiné par des obstacles tarifaires qui peuvent être supérieurs à ceux appliqués aux importations par les pays développés.

Une autre évolution des marchés des produits agricoles de base tient à la concentration des forces du marché dans les mains de quelques entreprises transnationales. A elles seules, trois compagnies contrôlent désormais près de la moitié de la torréfaction mondiale du café, et les 30 plus grandes chaînes de supermarchés assurent près d'un tiers des ventes au détail de produits alimentaires dans le monde.

De telles entreprises transnationales ont aidé certains petits exploitants à s'intégrer dans le marché mondial et contribué au transfert de la production moderne et de la technologie de distribution. Il est néanmoins préoccupant de constater que la concentration du marché prive les autres acteurs d'une large part du pouvoir économique. Il y a quatre ans, le Groupe d'experts éminents en matière d'éthique alimentaire et agricole, créé par la FAO, avait noté que «la concentration du pouvoir économique aux mains d'un petit nombre instaure de profonds déséquilibres de pouvoir».

Rendre les marchés des produits de base accessibles à tous

Si les cours des produits agricoles de base ont montré des signes de reprise au cours des derniers mois, ce redressement ne semble pas durable et les perspectives à long terme offertes aux exploitants et aux pays du monde en développement qui dépendent de ces produits ne sont pas brillantes. En revanche, d'autres hausses à court terme des prix des produits alimentaires de base sont probables, menaçant les moyens d'existence des habitants des pays à faible revenu et à déficit vivrier.

Les cours des produits agricoles de base demeurent extrêmement fluctuants et, à prix donnés, l'offre de produits agricoles de base continue d'être tendanciellement supérieure à la demande. Les droits de douane élevés et les subventions internes aux pays développés restreignent l'accès au marché et pèsent sur les prix. Bien que les échanges entre les pays en développement croissent plus vite que les échanges entre pays en développement et pays développés, les possibilités d'augmenter les courants d'échanges entre les pays en développement sont encore entravées par les obstacles tarifaires. Pour certains produits, le commerce, la transformation et la distribution sont désormais dominés par une poignée de sociétés transnationales, et le pouvoir économique des exploitants et des pays exportateurs est devenu relativement limité. Des voix se sont déclarées préoccupées par le fait que les producteurs des pays en développement ne reçoivent apparemment qu'une faible part de la valeur finale de leur production.

La crise du marché des produits de base des années 90 a attiré l'attention sur l'ensemble de ces problèmes et mis en lumière le besoin de nouvelles approches pour en résoudre la plus grande partie.

Prenons l'exemple de la volatilité des prix. Dans le passé, on traitait ce problème en mettant l'accent sur des mesures visant à stabiliser directement les prix ou les recettes, en gérant des stocks tampons ou en accordant des compensations aux pays qui subissaient des baisses imprévues de leurs recettes d'exportation. Dans une large mesure, et pour diverses raisons, ces mesures ont échoué. Les nouvelles approches cherchent moins à empêcher les brusques variations des prix qu'à aider les exploitants et les consommateurs à se protéger contre leurs conséquences, par le biais de mécanismes comme le système des prix garantis et l'établissement de prix prévisionnels.

Les efforts entrepris pour traiter le problème récurrent de la production excédentaire de cultures d'exportation traditionnelles doivent consister principalement à augmenter la demande, contrôler l'offre de certains produits de base et réduire la vulnérabilité des exploitants et des pays qui en dépendent. Les stratégies de diversification permettant aux exploitants de s'orienter vers des cultures mieux valorisées ou de produire et commercialiser des produits transformés à valeur ajoutée peuvent contribuer à réduire à la fois l'offre et la dépendance.

Il faut également s'efforcer de mieux comprendre les conséquences de la concentration croissante des chaînes de produits de base sur la concurrence, les prix et la part de la valeur finale du produit vendu qui revient aux exploitants et aux exportateurs de produits agricoles. Pour cela, il est urgent de continuer à suivre de près ces phénomènes et de les analyser de manière approfondie, tout en appuyant les efforts des exportateurs pour augmenter leur pouvoir économique collectif. L'analyse doit aussi permettre de comprendre l'incidence de la baisse des prix mondiaux des produits alimentaires de base et de l'évolution de la structure du marché sur la sécurité alimentaire des personnes démunies dans les zones rurales et urbaines.

En lançant La situation des marchés des produits agricoles, la FAO espère apporter une contribution éclairée au débat ainsi qu'une participation déterminante à la résolution des problèmes qui touchent ces domaines. Le présent rapport passe en revue les principales évolutions des marchés des produits de base qui ont eu lieu pendant l'exercice biennal et met en lumière les questions essentielles qui se posent en termes de politiques et les différentes possibilités d'action.

Compte tenu du rôle majeur que les produits agricoles de base jouent dans notre existence et de leur importance vitale pour les millions de personnes les plus laborieuses et les plus vulnérables du monde, il est grand temps d'y apporter une attention accrue et d'entreprendre une action concertée.

Jacques Diouf
Directeur général de la FAO

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