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14 La diversité biologique agricole au Burkina Faso - Didier BALMA[22], Ouétian BOGNOUNOU[23], Adama OUEDRAOGO[24], Michel Jérôme TANKOANO[25], Godouma ZIGANI[26], Mathias ZIGANI[27]


I. PRESENTATION DU BURKINA FASO

1.1 Généralités

Le Burkina Faso est situé au cœur de l'Afrique de l'Ouest entre les latitudes 9°20' et 15°03' Nord et les longitudes 02°20' Est et 05°03' Ouest. D'une superficie de 274.200 km2, le pays est limité par six (6) autres Etats de l'Afrique de l'Ouest: le Niger à l'Est, le Mali au Nord et au Nord-Ouest, la Côte d'Ivoire au Sud-Ouest, le Ghana au Sud, le Togo et le Bénin au Sud-Est.

Le Burkina Faso est caractérisé par un climat tropical de type soudano-sahélien en général où alternent deux saisons: une longue saison sèche d'octobre à avril et une courte saison de pluies de mai à septembre.

Depuis les années soixante dix jusqu'à nos jours, le pays connaît des années de sécheresse, devenue presque chronique. Cependant, il convient de relever la pluviométrie exceptionnellement excédentaire enregistrée au cours de l'année 2003. La pluviométrie varie de 350 mm à l'extrême Nord à 1.100 mm à l'extrême Sud.

Du Nord au Sud du pays, la végétation est successivement marquée par des prédominances herbeuse, arbustive, arborée, boisée, de galeries forestières et de forêts claires. Le pays dispose de 66 formations naturelles classées d'une superficie totale de 2.712.747 ha.

Hormis les fleuves Mouhoun, Comoé et Pendjari, le reste des cours d'eau a un écoulement temporaire. Le pays possède quelques plans d'eau naturels, dont la Mare aux Hippopotames et la Mare de Oursi, qui ont été classées «Sites de Ramsar».

1.2 Situation socio-économique relative au secteur agropastoral

L'économie du Burkina Faso est essentiellement basée sur l'agriculture et l'élevage pratiqués par plus de 85 % de la population. Les populations de la partie sahélienne du pays (le Nord) pratiquent surtout l'élevage, tandis que celles du reste du pays sont en majorité des agriculteurs. Cependant, on assiste de plus en plus à la pratique de ces deux activités sur l'ensemble du territoire.

Les activités anthropiques destructrices des ressources naturelles, aggravées par les conditions climatiques drastiques, ont entraîné l'appauvrissement des terres agricoles et des espaces de pâturages dans les zones plus peuplées et/ou sèches, d'où la contrainte pour les agriculteurs et les éleveurs de pratiquer des migrations de terroirs vers les zones les plus favorables à leurs activités, notamment à l'Est, au Centre-Sud, au Sud et à l'Ouest. En plus de ces migrations, on assiste à l'exode rural vers les centres urbains et les pays voisins où la main d'œuvre est recherchée.

II. ETAT DES RESSOURCES BIOLOGIQUES AGRICOLES

2.1 Etat des ressources phytogénétiques

Les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture se composent de la diversité de matériel génétique contenue dans les variétés traditionnelles et les cultures modernes des agriculteurs ainsi que des parents sauvages des plantes cultivées et autres espèces de plantes sauvages qui peuvent être utilisées pour l'alimentation humaine, animale, l'obtention des fibres, de tissus, d'abris, de bois, de bois d'œuvre et d'énergie etc.

Ces ressources phytogénétiques sont le fondement de la sécurité alimentaire et du développement durable tant au niveau national que mondial. Elles sont à la base de l'évolution naturelle et dirigée des espèces végétales les plus importantes pour la survie et le bien-être de l'humanité.

2.1.1 Etat des ressources des plantes cultivées

Etat de la diversité génétique et de l'utilisation des plantes cultivées

L'ethnopluralité du Burkina Faso (une soixantaine d'ethnies) s'accompagne d'une grande diversité dans la végétation domestiquée. Ainsi, pour les plantes cultivées, la production agricole est assurée par des cultivars traditionnels issus pour la plupart de domestication sur place, à partir des formes sauvages encore présentes sur certaines aires de cultures. C'est le cas du sorgho, du mil, du riz, du fonio, de l'igname,...

Il est dénombré au Burkina Faso au moins une soixantaine de plantes cultivées, considérées comme les plus vulgarisées, parmi lesquelles on distingue:

6 espèces de céréales;

4 espèces de légumineuses;

7 espèces de tubercules/racines;

5 espèces de culture de rentes;

28 espèces de cultures maraîchères dont 6 locales et 22 introduites;

12 espèces d'arboricultures fruitières;

1 espèce d'algue (Spirulina platensis);

4 espèces de plantes fourragères.

On signalera pour mémoire que les différents fruitiers de même que de nombreuses espèces maraîchères ont été introduits durant la période coloniale à partir de jardins d'essais, jardins botaniques dont les plus remarquables sont ceux de:

Kita, Kati, Koulikoro (Mali)

Bingerville, Dabou (Côte d'Ivoire)

Camayenne (Guinée Conakry)

Richard Toll, Hann (Sénégal)

Bobo Dioulasso (Burkina)

A la différence de la plupart de ces plantes qui sont cultivées en milieu rural, les espèces maraîchères sont très développées autour des agglomérations et autour de nombreuses retenues d'eau naturelles ou artificielles. Elles sont le fait de paysans citadins qui s'y adonnent en saison froide (novembre à mars), voire en saison de pluies.

Ces plantes cultivées sont utilisées essentiellement pour couvrir les besoins alimentaires des populations; certaines alimentent le commerce régional ou international (cultures de rente) et sont à la base des industries agro-alimentaires. En outre, les résidus de récolte générés par certaines espèces notamment céréalières et légumineuses (fanes d'arachide, de niébé, paille de riz, tourteaux de coton, tiges de sorgho et de mil) sont exploités pour l'alimentation animale.

La culture du coton, de l'arachide, du sésame et du soja s'est toujours placée dans le cadre économique pour le Burkina Faso. Toutefois, il faut noter les récentes tournures qui se manifestent en faveur de l'expérimentation des cotons Bacillus thuringiensis (BT), bio et VIP.

Depuis la campagne agricole 2002 / 2003, le Burkina Faso a déjà commencé, sous l'impulsion de la firme Monsanto, l'expérimentation en champ de coton BT. La campagne agricole 2003/2004 verra le début de l'expérimentation du coton bio, introduit par la firme suisse Helvetas.

Si le souci de mettre à la disposition des producteurs, des formes de cultivars économiquement rentables anime les autorités du Burkina Faso, il faut cependant noter que le gouvernement burkinabé a associé tous les acteurs, directement ou indirectement impliqués, à une réflexion d'ensemble.

A cet effet, la société civile organisée autour de «Social Alerte», avec la Ligue des Consommateurs du Burkina et de nombreux mouvements écologistes, au nom du principe de précaution quant aux risques sur la santé, l'alimentation et l'environnement, reste vigilante:

Une coalition de veille écologique face aux organismes génétiquement modifiés (OGM), après le lancement d'une campagne de sensibilisation/ information est en voie de création.

L'État burkinabé a créé un comité interministériel chargé d'étudier les problèmes que pose le coton transgénique.

C'est dire que les autorités burkinabé ne perdent pas de vue l'importance du maintien de la diversité biologique agricole.

Conservation des ressources génétiques des plantes cultivées

Entre 1960 et 1986, une série de missions de prospection et de collecte de plusieurs espèces cultivées et sauvages a été entreprise à travers tout le Burkina avec l'appui de l'IPGRI, en collaboration avec les institutions nationales telles que l'Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA), la Direction des Services Agricoles (DSA), l'Institut du Développement Rural (IDR) de l'Université Polytechnique de Bobo-Dioulasso et l'Unité de Formation et de Recherche en Science de la Vie et de la Terre (UFR/SVT) de l'Université de Ouagadougou (UO) et d'autres institutions internationales telles que l'IRAT, l'IITA/SAFGRAD, IRD (ex ORSTOM) et l'ICRISAT. Plus de 2.800 accessions de matériel génétique ont pu être collectées et les doubles des échantillons sont conservés dans le pays à la disposition des chercheurs nationaux (voir tableau ci-dessous).

Année

Institutions associées

Espèces cultivées

1960

IRAT

Sorgho, Mil

1967

IRAT

Maïs, Riz

1975

IBPGR/ ORSTOM/ ICRISAT

Mil

1976

IRAT/ ORSTOM

Riz

1977

IITA

Niébé

1978

IITA - SAFGRAD/ IITA

Maïs, Riz

1980

ICRISAT

Sorgho, Mil

1981

IBPGR/ INERA/ UO/ DSA/ ORSTOM

Sorgho, Mil, Gombo, Fonio, Arachide, Maïs

1982

IBPGR/ U.Birming/ INERA/ DSA/ UO

Gombo, Voandzou, Niébé, Maïs, Sorgho, Mil, espèces fourragères

1984-86

IBPGR/ UO/ INERA/ ORSTOM

Sorgho, Riz, Mil

Les tubercules (igname, patate douce, manioc, taro, macabo et souchet) ont été collectés en 1982

La plupart de ces collections ont connu des problèmes de conservation et sont hors d'usage à l'heure actuelle.

En 1984, l'IPGRI a fourni du matériel de conservation à la station de Farakô-Ba pour la conservation des semences orthodoxes, puis du matériel pour l'empaquetage et le stockage des semences. Un certain nombre de collections a bénéficié de l'appui de l'IPGRI pour leur évaluation. Il s'agit entre autres du mil par l'IDR/UO; des espèces fourragères par l'Institut de Recherches en Biologie et Ecologie Tropicale; du riz, des tubercules et de l'oignon par l'INERA. L'IPGRI a également financé la régénération des collections d'aubergine locale à la station de recherches de Kamboinsé.

2.1.2 Etat des ressources des plantes forestières et agroforestières

Etat de la diversité génétique et de l'utilisation des plantes forestières et agroforestières

Au nombre des ressources forestières, nous considérons dans la présente communication les fruitiers sauvages, les espèces de plantations forestières, les plantes fourragères sauvages.

a) Fruitiers sauvages

Préservés en brousse, beaucoup sont des espèces agro-forestières omniprésentes dans les champs et jachères. On en compte au moins une cinquantaine. Leur nature est variée selon qu'on est au sud, au centre ou au nord, en rapport avec la composition floristique variable selon un gradient nord-sud.

A noter que les fruitiers sauvages sont l'objet d'une étude pluridisciplinaire CNRST/ CRDI Canada autour du thème «Valorisation des fruitiers sauvages pour la sécurité alimentaire et la conservation de la diversité biologique».

b) Plantations forestières/ sylviculture

La sylviculture des essences locales a été longtemps négligée par manque de connaissances sur leurs biologie, écologie et techniques sylvicoles. Jusqu'à une date récente, la sylviculture et les plantations forestières reposaient essentiellement sur les espèces introduites à l'initiative, pour le volet recherche, du CIRAD-Forêt (ex Centre Technique Forêt Tropicale) et de l'INERA.

La sylviculture des essences locales a connu son essor au Burkina Faso avec la création du Centre National des Semences Forestières (CNSF), un des premiers centres en Afrique de l'Ouest, spécialisé en matière de semences d'espèces forestières ligneuses des zones sahelo-soudaniennes. Le catalogue 2001 - 2003 des espèces forestières dont la sylviculture est maîtrisée par le CNSF, compte plus de 150 espèces.

c) Plantes fourragères

Si les pâturages les plus intéressants (quantitativement et qualitativement) sont essentiellement herbacés annuels (rarement pérennes), il convient de prendre en considération l'apport non négligeable des ligneux fourragers avec comme familles botaniques remarquables les Capparaceae, les Fabaceae (Pterocarpus spp), surtout en saison sèche, lorsque l'herbe fait défaut en raison de la faible productivité des pâturages herbacés. Les formations mixtes forestières et graminéennes (forêts claires, savanes arbustives, arborées, boisées et steppes) de la zone soudano-sahelienne constituent des pâturages relativement bons, ce qui, lié à une meilleure salubrité (absence de diptères responsables de la trypanosomose animale) fait de cette zone, une zone de prédilection de l'élevage domestique. Elles constituent également des habitats naturels pour une faune sauvage abondante (plus de 35 espèces que compte la faune du Burkina).

Quelques données sur la valeur fourragère des pâturages du Burkina Faso:

Si certains milieux, vallée/plaine du Sourou, avec comme espèces remarquables Echinochloa spp et diverses espèces aquatiques, constituent d'excellents pâturages (malheureusement convoités par la riziculture ou autres spéculations agricoles), les pâturages naturels sont de faible productivité.

Les inventaires taxonomiques réalisés sur les plantes herbacées terrestres ont permis de recenser 87 familles, 333 genres et 627 espèces (Monographie Nationale sur la Diversité Biologique du Burkina Faso, 1999).

Selon les études agrostologiques de l'IEMVT/CIRAD (des cartes sur les potentialités pastorales ont été établies pour une grande partie du Burkina), la zone sahélienne du Burkina, comporte quatre types de pâturages qui ont une capacité de charge variable en fonction de plusieurs critères: couverture herbeuse, utilisation pastorale, etc.

Steppes arbustives des dunes fixes et ensablement 2,5 à 7 ha/UBT.

Forêts et prairies des zones basses aux zones de collines et reliefs 3 à 7 ha/UBT.

Broussailles et forêts associées à la latérite et aux gravillons 2,5 à 7 ha/UBT.

Steppes épineuses des étendues non gravillonnaire à faible relief 3 à 7 ha/UBT.

Au Yatenga des études de l'INERA et du CIRAD sur le potentiel additif ligneux et herbacé des unités sylvo-pastorales et agropastorales montrent que:

les pâturages de forêts tigrées et savanes arbustives et de brousses tigrées ont un potentiel de 1,6 à 2,8 TMS/ha;

les savanes boisées et les forêts sèches ont une biomasse nette plus élevée (6 à 7 TMS/ha.).

Conservation et utilisation des ressources génétiques agroforestières/ forestières

L'objectif de la recherche en matière de conservation des ressources forestières vise:

la préservation des plants en pépinière;

l'amélioration des méthodes de conservation des graines forestières;

l'amélioration des techniques de gestion des peuplements;

une meilleure connaissance de la biodiversité et des mécanismes de sa perpétuation.

On peut noter comme acquis:

l'étude des problèmes phytosanitaires dans les pépinières;

l'inventaire des termites et de leur contrôle;

l'existence du parc botanique du CNRST et l'herbier national;

l'existence de nombreuses zones de protection que sont les forêts classées (2.712.747 ha), les réserves de faune (2.545.500 ha) et les parcs nationaux (390.500 ha);

la création d'un Centre National des Semences Forestières (CNSF).

Depuis 1993, l'IPGRI a développé un partenariat nouveau et fructueux avec le Ministère chargé de l'Environnement, en particulier avec le CNSF, à travers les activités de recherche suivantes:

Participation du Burkina Faso au réseau International de Recherche sur les Semences. La composante burkinabè vise à développer des méthodes améliorées de manipulation et de stockage de semences forestières récalcitrantes, telles que Butyrospermum paradoxum (karité), Sclerocarya birrea (prunier), Lannea microcarpa (raisinier), Dalbergia melanoxylon, Pterocarpus erinaceus et Anogeissus leiocarpus qui ont été retenues.

Etude de la diversité génétique et stratégies de conservation et d'utilisation de Parkia biglobosa (néré) en Afrique de l'Ouest et Centrale.

Les usages faits à partir des éléments constitutifs ou des produits des plantes forestières par les populations sont nombreux, mais les principaux sont: alimentation humaine, énergie, santé, artisanat, alimentation animale, culture, ornement, récréation...

2.1.3 Contraintes liées à l'exploitation des ressources phytogénétiques

«Le plus grand défi du millénaire naissant sera sans doute lié à l'accès aux ressources naturelles. La terre fera l'objet de conflits et de tensions jamais connus auparavant. Les faits le confirment: l'augmentation de la population, l'appauvrissement des sols et l'apparition de nouveaux acteurs soucieux de faire fructifier leurs capitaux dans l'agriculture accroissent les risques de conflits fonciers». (Hubert OUEDRAOGO, Enseignant de Droit à l'Université de Ouagadougou, principal animateur du Groupement de Recherche et d'Action sur le Foncier: GRAF, cf. doc. Programme Sahel Burkinabé/ GTZ sur Kishi Beiga 1999.)

Qu'ils soient paysans ou éleveurs, l'accès à la terre préoccupe tous les producteurs. Si les conflits fonciers entre agriculteurs autochtones et éleveurs allochtones migrants sont les plus fréquents (notamment à l'Ouest et au Sud-Ouest du Burkina), l'accès aux ressources en eau (surtout dans les zones pastorales et axes de transhumance) est également source de conflits et de tension, d'autant plus que l'eau risque de devenir de plus en plus rare et convoitée.

On notera l'existence d'un certain conflit de nature discrète, mais réelle, entre riverains, éleveurs transhumants et l'Etat pour ce qui concerne l'accès aux ressources des parcs et réserves diverses:

Cas du Parc National de Pô où la Fondation des Amis de la Nature (NATURAMA) qui a obtenu un agrément en qualité de concessionnaire, mène des actions en rapport avec la population riveraine. A cet effet, un livret guide de découverte du parc a été produit.

Il convient de relever la non-intégration du volet ressources phytogénétiques dans les projets de recherche-action.

2.2 Etat des ressources génétiques animales

2.2.1 Etat de la diversité génétique des animaux domestiqués

a) Inventaire non exhaustif des races

Espèces

Sous-groupes

Races (nombre)

Locales

Exotiques

Total

Bovine

Taurins

01

07

08

Zébus

05

01

06

Ovine

Moutons



06

Caprine

Chèvres



05

Porcine

Porc



05

Equine

Cheval

01

01

02

Asine

Ane

01


01

Volaille

(Poule, pintade, dindon, canard, pigeon)



14

Cunicole

Lapin



02

b) Stratégies et structures impliquées dans la sélection et l'amélioration des races

Les éleveurs ont un savoir traditionnel sur lequel ils se basent pour le choix de leurs animaux. Leurs objectifs ou priorités de sélection portent sur la rusticité et par conséquent l'adaptation de l'animal au mode élevage extensif. Ce processus qui est le plus répandu n'est pas formalisé.

Au niveau gouvernemental, de nombreux projets d'élevage se sont intéressés à l'amélioration des productivités animales à travers l'amélioration des conditions du milieu (santé, alimentation) et accessoirement aux circuits de commercialisation.

La définition et la mise en œuvre de stratégies et plans d'action d'amélioration des races est encore naissante. La mise en place d'associations d'éleveurs de race est débutante. C'est le cas de la race Azawak à travers un projet national bénéficiant de l'appui de la coopération belge.

La politique nationale d'amélioration des races devra mettre l'accent sur la promotion des associations d'éleveurs de race et la mise en place de mesures incitatives comme c'est le cas du zébu Azawak. Un cadre institutionnel national impliquant tous les acteurs devra être mis en place.

2.2.2 Etat de l'utilisation des RGA

a) Importance

Le secteur de l'élevage contribue à la sécurité alimentaire. Il participe pour près de 12 % du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2000, compte non tenu de sa contribution dans la traction animale, au transport et à la fumure organique des terres de culture. En 1997, 7% de la population totale, soit environ 700.000 habitants, étaient des éleveurs.

Malgré son second rang en valeur des exportations totales du pays après le coton, les investissements dans le secteur restent encore modestes et ne représentent que 1,5 % de l'ensemble des ressources publiques consacrées au développement.

Il manque les données actualisées sur les différentes catégories de terres et leurs tendances. On note une tendance à l'augmentation des terres cultivées au détriment de celles réservées au pâturage; ce qui met le plus souvent les éleveurs dans une situation d'insécurité foncière. Cette situation engendre des conflits sanglants et quelquefois meurtriers.

b) Systèmes de production

L'importance de l'élevage varie d'une région du pays à l'autre en fonction de la diversité des conditions agro-écologiques et socio-économiques.

Deux grands types de systèmes de production coexistent au Burkina Faso: (i) les systèmes traditionnels ou extensifs ou à faible niveau d'intrants qui sont les modes les plus fréquemment pratiqués et (ii) les systèmes améliorés. Ces systèmes à faible niveau d'intrants concernent surtout les espèces bovines, ovines et caprines dont 85 à 95% des exploitations sont de type traditionnel. Il s'agit des élevages privés et ceux regroupés dans les zones pastorales. On dénombre au Burkina une cinquantaine de zones pastorales dont dix sont actives (c'est-à-dire dotées d'une minimum d'infrastructures).

c) Les principaux produits

Il s'agit:

de la viande produite principalement par les bovins, puis la volaille, puis les petits ruminants et enfin les autres espèces. Le commerce de ce produit se fait surtout à travers l'exportation d'animaux sur pied;

des cuirs et des peaux qui font également l'objet d'exportation;

du travail et de la fumure organique;

du lait: le pays est déficitaire et a recours régulièrement à des importations.

d) Les principales contraintes

Elles sont d'ordre:

sociologique avec principalement: l'insécurité foncière (difficulté d'application de la Réorganisation Agraire Foncière);

technique avec principalement la faible productivité des races locales;

économique avec principalement les difficultés d'accès au financement.

2.2.3 Etat de la conservation des ressources génétiques animales

En matière de conservation in-situ, il n'y a pas de programme spécifique pour les races animales exploitées au Burkina Faso. Par contre, pour la conservation ex-situ nous notons les actions suivantes:

existence d'une banque de semences bovines (N'Dama, Baoulé, Azawak, Goudali, Somba et Zébu Peul) constituée avec la collaboration du Centre International de Recherche Développement sur l'Elevage en Zone Sub-humide (CIRDES);

existence du Laboratoire National d'Insémination Artificielle et de Biotechnologie (LNIA) chargé de la production et de la conservation de semences et d'embryons bovins.

III. ETAT DES CAPACITES EN MATIERE DE GESTION DE LA BIODIVERSITE AGRICOLE

3.1 Politiques et stratégies

Un des plus grands défis auquel le Burkina Faso reste confronté, c'est de réduire la pauvreté par l'augmentation de la production afin d'améliorer la sécurité alimentaire et les revenus des populations, tout en préservant les ressources naturelles. La solution à ces défis repose sur le Secteur Agriculture/ GRN (agriculture, élevage, hydraulique, forêts, faune, ressources halieutiques...) qui constitue la principale activité des populations et la base du développement socio-économique du pays. Au regard de ce défi de développement, le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures pour l'ensemble des secteurs concernés par la biodiversité:

l'adoption en 1994 du Plan d'Action National pour l'Environnement (PANE) ou agenda 21 national;

l'adoption en 1995 de la politique forestière Nationale;

l'adoption en novembre 1997 de la Note d'Orientation du Plan d'Actions de la Politique de Développement de l'Elevage;

l'adoption en janvier 1998 du Document d'Orientations Stratégiques (DOS) des Secteurs de l'Agriculture et de l'Elevage à l'horizon 2010;

l'adoption en 1999 de la stratégie nationale et du Plan d'Actions sur la conservation de la Biodiversité;

l'adoption du Plan Stratégique Opérationnel (PSO) en octobre 1999;

l'adoption du Cadre Stratégique de Lutte Contre la Pauvreté (CSLP) en 2000;

l'adoption en octobre 2000 du Plan d'Actions et Programme d'Investissements du Secteur de l'Elevage (PAPISE) au Burkina Faso;

l'adoption en 2000 du Programme d'Action national de lutte contre la désertification;

l'adoption en décembre 2001 de la stratégie Nationale de mise en œuvre de la Convention sur les Changements Climatiques.

Tous ces actes de l'Etat burkinabé traduisent la priorité accordée au secteur rural et plus particulièrement au développement du secteur Agriculture/GRN qui figure en droite ligne dans le document du Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP), qui a été relu en 2003. Pour assurer plus d'efficacité aux interventions pour la promotion du monde rural en cohérence avec le processus de décentralisation en cours, le Gouvernement a adopté en 2002 une Lettre de Politique de Développement Rural Décentralisé (LPDRD).

Pour la diversité biologique de manière spécifique, le Burkina Faso est Partie contractante de la Convention sur la Diversité Biologique, suite à sa ratification par le pays le 2 septembre 1993. Aussi, en application de la disposition de l'article 6 de la convention, le Burkina Faso s'est progressivement doté à partir de l'année 2000 de:

une monographie nationale en matière de diversité biologique;

une stratégie nationale et d'un plan d'action en matière de diversité biologique;

un rapport sur l'état des ressources phytogénétiques;

un rapport sur l'état des ressources animales.

L'élaboration de ces différents outils de planification de la diversité biologique a toujours utilisé une approche méthodologique concertée, qui a permis d'impliquer les différentes parties prenantes dans la préservation de la diversité biologique (notamment les services étatiques, les Associations et ONG, les producteurs privés, les Chefs coutumiers, les Chefs de terre).

D'autres outils de planification non moins importants et ayant une influence directe sur la conservation de la diversité biologique, ont été également élaborés. Il s'agit notamment:

du Programme d'Action National de lutte contre la désertification, adopté en juin 2000 en application de la Convention des Nations Unies sur la Lutte contre la Désertification;

de la Stratégie Nationale de mise en œuvre de la Convention Cadre sur les Changements Climatiques;

de la Stratégie de mise en œuvre Concertée des trois Conventions de Rio, élaborée pour susciter la synergie de leur mise en œuvre.

3.2 Législations et réglementation

La constitution du Burkina Faso prévoit une disposition garantissant «l'appartenance des ressources naturelles au peuple et la possibilité de les utiliser pour améliorer leurs conditions de vie (article 14)» et une autre reconnaissant «le droit à un environnement sain et le devoir pour tous de protéger, défendre et promouvoir l'environnement (article 29)».

Les principales législations environnementales (ou ayant un impact sur la diversité biologique agricole) actuellement adoptées sont:

la loi n° 014/96/ADP du 24/06/1996 portant sur Réorganisation Agraire et Foncière;

la loi n°005/97/ADP du 31/01/1997 portant Code de l'Environnement;

la loi n°006/97/ADP du 31/01/97 portant Code Forestier;

la loi d'orientation n° 002/01/ADP du 03/04/2001 relative à la gestion de l'eau;

les textes d'orientation de la décentralisation en 1998;

la loi d'orientation relative au pastoralisme au Burkina Faso, adoptée en novembre 2002.

L'application de beaucoup de ces lois reste encore difficile sur le terrain compte-tenu de l'insuffisance des textes d'application, de leur inadéquation et des pesanteurs socio-économiques persistantes. En outre, la mise en œuvre du processus de décentralisation, en cours dans le pays, va nécessiter la relecture de la plupart de ces lois en vue de mieux définir le rôle des collectivités locales et des populations ainsi que le cadre de leur organisation.

Pour que les dispositions concourent effectivement à la gestion durable de la diversité biologique agricole, des mesures correctives suivantes doivent être adoptées par les structures compétentes:

réaménager la loi sur la Réorganisation Agraire et Foncière de manière à inciter les producteurs à faire des investissements (sur le long terme);

adopter des textes juridiques qui responsabilisent effectivement les organisations jusqu'au niveau villageois;

élaborer, en tenant compte des cultures, des textes propres au Burkina Faso pour la mise en œuvre de la législation environnementale et veiller à leur large diffusion et à leur application;

élaborer et appliquer les textes indispensables au partage juste et équitable des avantages découlant de l'exploitation des ressources biologiques, surtout génétiques;

prévoir des instruments juridiques pour protéger les connaissances des tradipraticiens;

protéger le patrimoine génétique national par l'adoption de textes juridiques y afférents et le renforcement du muséum d'histoire naturelle du CNRST;

élaborer et appliquer une législation et réglementation sur la biosécurité (directives sur les organismes génétiquement modifiés) pour prévenir les risques biotechnologiques;

accélérer le processus de ratification du Traité International sur les Ressources Phytogénétiques pour l'Alimentation et l'Agriculture;

adopter les textes organiques relatifs à la création du Comité National des Ressources Phytogénétiques.

3.3 Institutions et organisations de gestion

Au Burkina Faso, les activités de gestion de la diversité biologique agricole sont menées par plusieurs catégories d'acteurs, à savoir:

les structures gouvernementales et leurs démembrements (Ministères chargés des ressources forestières, hydrauliques, animales, minières, agricoles, des enseignements de bases, secondaire, supérieur et de la recherche scientifique, ......);

les structures non gouvernementales (associations, ONG, les producteurs privés, les Chefs coutumiers, les Chefs de terre);

les collectivités rurales et urbaines.

Mais la planification politique et stratégique en matière de diversité biologique relève des structures gouvernementales.

3.4 Principales contraintes de gestion de la biodiversité agricole

Selon le document de stratégie nationale et plan d'action en matière de diversité biologique, l'état actuel de la diversité biologique au Burkina Faso connaît un problème majeur, à savoir son appauvrissement, du fait des effets conjugués de la détérioration des conditions climatiques, de la dégradation des écosystèmes et des habitats et de la surexploitation des ressources naturelles.

Les problèmes spécifiques enregistrés au niveau du pays sont notamment:

la sécheresse;

l'érosion éolienne et hydrique;

la non application de certaines mesures législatives et réglementaires par manque de volonté politique affichée;

les mauvaises pratiques anthropiques (l'agriculture extensive, les feux de brousse, le surpâturage, la coupe abusive du bois, la surexploitation de la faune terrestre et aquatique, la surexploitation des plantes médicinales, etc.);

l'insuffisance de schémas d'aménagement;

l'ignorance des enjeux de la conservation des ressources génétiques par les populations;

l'insuffisance de la recherche sur les ressources génétiques en raison du manque de moyens financiers;

l'érosion des savoirs et du savoir-faire traditionnels;

la faible valorisation des ressources biologiques;

l'analphabétisme;

l'insécurité foncière;

les conflits agriculteurs / éleveurs;

les difficultés d'accès aux crédits agricoles;

le faible niveau du partage des bénéfices découlant de l'exploitation des ressources biologiques, surtout génétiques.

IV. PRIORITES NATIONALES POUR LA CONSERVATION ET L'UTILISATION DE LA DIVERSITE BIOLOGIQUE AGRICOLE

4.1 Conservation de la diversité biologique agricole.

Les composantes ci-après de la diversité biologique à conserver en priorité ont été identifiées.

a) Les écosystèmes et les habitats

Il est nécessaire de conserver les écosystèmes terrestres et aquatiques, en raison de leur vocation d'abris privilégiés des éléments constitutifs de la diversité biologique et génétique.

i) Les formations végétales: l'accent doit être mis sur la conservation des aires classées et des formations fragiles ainsi que sur la multiplication des mises en défens abritant des espèces à valeur fourragère ou économique. En outre, on veillera à une exploitation plus rationnelle des aires protégées.

ii) Les plans d'eau naturels ou artificiels et les zones humides en général: on veillera à leur meilleure exploitation par l'Agriculture, la Pêche, l'Elevage et par toutes autres activités.

b) Les espèces

Les espèces à conserver en priorité devront être celles qui sont endémiques, menacées, vulnérables et d'intérêt économique prononcé. A ce titre, l'accent devra être mis sur celles qui sont répertoriées dans la Monographie Nationale sur la Diversité Biologique du Burkina Faso.

c) Les ressources génétiques

Les ressources génétiques à conserver en priorité devront être celles d'espèces animales et végétales menacées, et celles dont on peut tirer des produits de forte valeur connue sur les plans économique, socio-économique, socio-culturel et scientifique.

4.2 Utilisation durable des éléments constitutifs de la diversité biologique agricole

Vu la dégradation actuelle des ressources naturelles, les composantes de la diversité biologique agricole ci-après décrites peuvent être retenues pour entreprendre des actions allant dans le sens de leur utilisation durable.

(i) Les écosystèmes terrestres et aquatiques: Ce sont les plans d'eau naturels et artificiels et les zones humides en général, les sols et les formations naturelles classées et protégées riveraines et/ou proches des agglomérations urbaines, qui subissent les pressions liées à l'activité de l'homme.

(ii) Les espèces: Les espèces (végétales agricoles et animales) qui devront faire l'objet d'utilisation durable sont, en priorité, celles qui sont les plus exploitées par les hommes et les animaux, celles en voie de disparition, celles qui sont menacées ou endémiques.

(iii) Les ressources génétiques: L'érosion génétique qui se manifeste actuellement est un préjudice pour le développement économique. Une meilleure connaissance sur les potentialités génétiques des espèces animales et végétales s'avère nécessaire pour leur valorisation et leur utilisation durable dans le cadre ex situ et in situ.

4.3 Partage des bénéfices

Au Burkina Faso, la notion de partage des bénéfices peut s'appliquer à l'ensemble des richesses du pays en diversité biologique. On retiendra en particulier parmi ces richesses les produits de la flore, de la faune et des écosystèmes naturels. Les bénéfices à partager peuvent être monétaires et non monétaires, tels que les biens de services (par exemple la technologie, le matériel technique, l'information), et le partenariat.

V. AXES POUR UNE VISION COMMUNE NATIONALE EN MATIERE DE BIODIVERSITE AGRICOLE

5.1 Au niveau institutionnel

L'élargissement du Comité Technique de mise en œuvre de la Convention sur la Diversité Biologique en y intégrant les représentants des autres acteurs concernés;

La création d'un cadre sous-régional d'échanges sur les sujets relatifs à la diversité biologique;

La mise en place au niveau national et sous-régional de réseaux thématiques sur les catégories de ressources biologiques (phytogénétiques, zoogénétiques);

L'harmonisation des instruments législatifs et réglementaires en matière de diversité biologique.

5.2 Au niveau technique

Le renforcement des capacités nationales sur la gestion de la diversité biologique à travers la formation/information des acteurs; la formulation de programmes nationaux et sous-régionaux; et la création ou la consolidation des infrastructures appropriées.

L'approfondissement des connaissances y compris le savoir-faire local sur la diversité biologique.

5.3 Au niveau de la coopération bilatérale et internationale

La recherche de financement pour des actions de conservation et l'utilisation durable de la biodiversité.

Le transfert de technologies.

Résultats des discussions:

Les succès et contraintes spécifiques au Burkina Faso analysés par les participants pendant l'atelier ont été les suivants:

SUCCES

  • Le cadre politique et institutionnel

    - Existence d'efforts de conservation;

- Existence de plusieurs documents de politiques ex: de stratégies;

- Existence de textes législatifs en matière de convention de la biodiversité agricole;

- Existence d'un cadre juridique;

- Existence d'orientation politique;

- Existence de textes législatifs;

- Bon dispositif institutionnel et juridique;

- Existence de comité de mise en oeuvre de convention biodiversité;

  • La gestion de l'agro-biodiversité

- Agro-biodiversité réelle au Burkina Faso;

- Bonne coordination au niveau national des activités de ressources génétiques;

- Expérience de la réserve du parc de Pô à multiplier;

- Expérience du CNSF à capitaliser au niveau régional.

CONTRAINTES

  • Problèmes du cadre politique et institutionnel

- Insuffisance de textes d'application sur la CDB;

- Comment impliquer la société civile dans la revue et le développement des outils législatifs pour renforcer les droits des agriculteurs;

- Insécurité foncière pour l'agriculture et l'élevage;

- Avez-vous réussi à harmoniser les textes législatifs au niveau national?

- Harmonisation des législations indispensable pour une meilleure gestion des ressources génétiques.

  • Problèmes de gestion de l'agro-biodiversité

- Absence de programme d'amélioration génétique animale;

- Faible capacité de gestion des ressources génétiques (banques de gènes etc.);

- Aspects agricoles insuffisamment abordés;

- Quelle est l'importance du droit coutumier dans la gestion des ressources génétiques?

- Absence de cadre de référence scientifique sur l'appauvrissement de la CDBA.

- Insuffisance de la stratégie d'amélioration de RGA;

- Non application des textes législatifs;

- Faible évaluation de l'impact des systèmes de gestion traditionnelle des ressources génétiques sur la diversité.


[22] Coordonnateur National des Ressources Phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture
[23] Ethnobotaniste, membre de l'ONG NATURAMA
[24] Docteur Vétérinaire en service au CNEAG/Point Focal RGA
[25] Coordonnateur National du PSB en service à la DCLD/Point Focal UNCCD
[26] Ingénieur des Eaux et Forêts en service à la DCIE/ Point focal CDB
[27] Agro-économiste en service à la DGPV

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