CCP: BA/TF 01/7


COMITÉ DES PRODUITS

GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL SUR LA BANANE ET LES FRUITS TROPICAUX

Deuxième session

San José (Costa Rica), 4 - 8 décembre 2001

ÉVALUATION DU NOUVEAU RÉGIME (AVRIL 2001) D'IMPORTATION DE LA BANANE
DANS LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE (CE)

Table des matières



I. INTRODUCTION

1. Avec les États-Unis d'Amérique et le Japon, la Communauté européenne (CE) fait partie des trois marchés les plus importants pour la banane d'exportation, avec près de 30 pour cent des importations mondiales. Par conséquent, depuis que l'Organisation commune de marché de la banane dans l'Union européenne (CMOB) a adopté la Résolution 404/93 du Conseil de la CE en date du 13 février 1993, le groupe a suivi de près l'évolution des politiques de la Communauté européenne en vue d'évaluer les perspectives futures du marché. Afin d'aider le groupe à analyser les changements de politiques les plus récents, le présent document, qui s'appuie sur un modèle économétrique élaboré à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), a été établi dans le but de lui fournir une toile de fond analytique concernant les conséquences les plus probables de l'application du régime d'importation de la CE à partir du 1er juillet 2001. On trouvera, dans le document CCP: BA/TF 01/CRS.9 une synthèse de l'évolution des politiques d'importation de la banane de la Communauté européenne depuis 1993.

2. De nombreux autres pays importateurs maintiennent différentes formes de régime d'importation de la banane. Afin de mettre les autres régimes d'importation en perspective à l'intention du groupe, le document CCP: BA/TF 01/08 fournit une synthèse des politiques en question.

II. LE NOUVEAU RÉGIME D'IMPORTATION DE LA BANANE DANS LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE
(ACCORD D'AVRIL 2001)

3. Le nouveau régime d'importation de la banane de la Communauté européenne est un processus d'évolution en deux temps vers un régime exclusivement tarifaire qui devrait entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2006. Au cours de la période de transition allant de 2001 à 2005, les bananes seront importées dans le cadre d'un système de contingents tarifaires par le biais de licences d'importation distribuées sur la base des échanges commerciaux antérieurs. Ce système transitoire de contingents tarifaires est entré en vigueur le 1er juillet 2001; il se divise lui-même en deux phases: la phase I, qui vient à expiration le 31 décembre 2001, et la phase II. Ce document présente les résultats pour l'année 2005, à savoir la dernière année du système transitoire de contingents tarifaires et précédant l'entrée en vigueur, en 2006, du système exclusivement tarifaire. Le tableau 1 présente un aperçu du nouveau régime applicable aux échanges commerciaux.

A. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE L'ÉTAPE I

4. Au cours de l'étape I, phase I, on établit un contingent tarifaire consolidé (A), ainsi qu'un contingent tarifaire autonome (B) aux volumes respectifs de 2,2 millions de tonnes et 353 000 tonnes. Les contingents tarifaires A et B sont gérés comme un seul (contingent A/B) et ne sont pas alloués entre les fournisseurs nationaux. Le tarif appliqué aux importations de bananes dans le cadre du contingent A/B est de 75 euros par tonne, avec une préférence tarifaire de 75 euros par tonne accordée aux bananes ACP. Les licences d'importation correspondantes sont réparties entre les opérateurs traditionnels A/B (83 pour cent du contingent) et les opérateurs non traditionnels A/B (17 pour cent). Un contingent tarifaire supplémentaire de 850 000 tonnes (contingent C) a été introduit; il est accessible à tous les fournisseurs nationaux. Le tarif appliqué dans le cadre du contingent C est de 300 euros par tonne, avec une préférence tarifaire de 300 euros par tonne accordée aux bananes des pays ACP.

5. Le régime de licences d'importation est encore géré en grande partie selon le principe des références historiques. Comme nous l'indiquons plus haut, le contingent A/B est alloué à hauteur de 83 pour cent aux opérateurs traditionnels. Toutefois, la notion d'opérateurs traditionnels et d'opérateurs non traditionnels a évolué relativement au règlement antérieur1.

6. Le changement le plus marquant applicable aux importateurs traditionnels a été l'utilisation de la période 1994-1996 comme période de référence pour les importations, ainsi que l'élimination des licences de catégorie B. Pour les importateurs non traditionnels, le changement le plus significatif a été l'utilisation de la période de référence 1994-1996 ainsi que la nécessité d'avoir importé pour 1,2 million d'euros au moins au cours de ces années afin de remplir les conditions pour l'obtention de licences2.

7. Au cours de l'étape I, phase II, les dispositions applicables à la phase I resteront en vigueur à l'exception des modifications suivantes: en premier lieu, le contingent tarifaire autonome B sera fixé à 453 000 tonnes, soit une augmentation de 100 000 tonnes relativement à la phase I; deuxièmement, le contingent tarifaire supplémentaire sera fixé à 750 000 tonnes, soit une réduction de 100 000 tonnes relativement à la phase I, et il sera réservé aux bananes ACP.

8. La part des licences d'importation octroyée aux opérateurs traditionnels A/B continuera d'être allouée en vertu des procédures définies pour la phase I. De ce fait, les licences d'importation devront être distribuées jusqu'au 31 décembre 2003 sur la base du volume de référence de la période 1994-1996 pour chacun des opérateurs traditionnels qualifiés. Ultérieurement, la part de licences d'importation octroyée aux opérateurs traditionnels A/B sera en principe allouée sur la base exclusive de l'utilisation de licences émises depuis l'ouverture de la phase II. Cette deuxième phase devra entrer en vigueur "le plus tôt possible", sous réserve de l'approbation par le Conseil et par le Parlement européen et de l'adoption de la dérogation prévue à l'article XIII de l'accord du GATT de 1994 nécessaire pour la gestion des contingents tarifaires autonomes C.

B. LA DEUXIÈME ÉTAPE

9. Au cours de l'étape II, le système de contingents tarifaires décrit ci-dessus sera remplacé par un système exclusivement tarifaire, qui devra entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2006.

III. ÉVALUATION QUANTITATIVE DU RÉGIME TRANSITOIRE DE CONTINGENTS TARIFAIRES

10. Nous présentons, dans cette section, les résultats des simulations de mise en vigueur du régime. On trouvera, à l'Annexe II, une description sommaire du modèle.

A. APERÇU GÉNÉRAL DES RÉSULTATS

11. L'analyse effectuée à l'aide du modèle indique que le contingent A/B devra être contraignant. Elle indique également que la préférence tarifaire de 75 euros la tonne accordée aux bananes ACP dans le cadre du contingent A/B ne serait pas suffisante pour permettre aux bananes de cette origine de rivaliser avec les bananes de la zone dollar dans le cadre du contingent A/B (à supposer que celui-ci soit ouvert à tous les fournisseurs nationaux, ce qui semble être le cas pour la phase I mais non pour la phase II). Enfin, le modèle indique que le tarif du contingent C de 300 euros la tonne serait trop élevé pour permettre aux importations de bananes de la zone dollar de rentrer dans le cadre du contingent C (à supposer que le contingent C soit ouvert aux bananes de toutes origines, ce qui semble être le cas pour la phase I mais non pour la phase II, avec une préférence tarifaire de 300 euros la tonne pour les bananes ACP). Une fois le contingent A/B rempli, il serait plus rentable, pour les fournisseurs de la zone dollar, d'exporter sur les marchés du reste du monde plutôt que de subir un droit de 300 euros la tonne dans le cadre du contingent C. Les importations hors contingent seraient nulles étant donné que les tarifs hors contingent sont prohibitifs (à supposer que les tarifs hors contingent soient de 680 euros la tonne pour les pays non ACP et de 380 euros la tonne pour les pays ACP).

B. L'OFFRE SUR LE MARCHÉ DE LA CE

12. Les résultats des simulations semblent indiquer que le groupe des pays ACP ne serait pas en mesure d'utiliser entièrement un contingent C fixé à 850 000 tonnes comme dans la phase I. Toutefois, le taux d'utilisation serait de 100 pour cent pour un contingent C fixé à 750 000 tonnes comme dans la phase II (tableau 2).

13. Dans le scénario S-II qui correspond à l'application de la phase II à partir de janvier 2002, les exportations des pays ACP vers la Communauté européenne se monteraient à 760 523 tonnes en 2005, soit 8,4 pour cent de plus que la période de référence 1996-19983. La production interne de la Communauté européenne augmenterait de 6,2 pour cent, passant de 750 671 tonnes en 1996-1998 à 797 090 tonnes en 2005. Les exportations des fournisseurs de la zone dollar vers la Communauté européenne seraient équivalentes au niveau contraignant du contingent A/B, soit 2 653 000 000 de tonnes. Ce volume représente une augmentation de 239 400 tonnes, soit 9,9 pour cent, relativement à la période de référence 1996-1998, à savoir de 2 414 000 000 de tonnes, mais une augmentation de 140 000 tonnes seulement (5,6 pour cent) relativement au niveau de 1999, qui était de 2 513 000 000 de tonnes. Le total des exportations des pays ACP vers la Communauté européenne représenterait, pour 2005, 18,1 pour cent de la consommation de la Communauté européenne, à savoir la même part que pour la période 1996-1998. La production interne de la Communauté européenne et des pays de la zone dollar représenterait 18,9 pour cent et 63 pour cent respectivement du marché de la Communauté européenne. Si le contingent A/B était maintenu à 2 553 000 000 de tonnes au cours de l'ensemble de la période allant de 2001 à 2005 (scénario S-I), le total des exportations des pays ACP vers la CE serait plus élevé (787 212 tonnes en 2005). Dans cette hypothèse, la part des pays de la zone dollar serait inférieure (61,7 pour cent), et la part des pays ACP et celle de la production interne de la Communauté européenne seraient plus élevées, soit 19 pour cent et 19,3 pour cent, respectivement.

14. Les colonnes 4 et 5 du tableau 2 illustrent la sensibilité des résultats de la simulation au volume du contingent tarifaire A/B. En effet, une augmentation du contingent A/B qui le ferait passer de 2 553 000 000 de tonnes à 2 653 000 000 de tonnes, entraîne une réduction des importations de la Communauté européenne en provenance des pays ACP. Le déclin des exportations des pays ACP vers la CE est inférieur à l'augmentation liée au contingent A/B, si bien que la consommation totale de la Communauté européenne augmente et que les prix moyens c.a.f. reculent dans la Communauté européenne. Lorsque le volume du contingent A/B varie, la production interne de la Communauté européenne ne change pas, en raison des programmes de soutien des revenus. Depuis la première Organisation commune de marché, en 1993, les producteurs de la Communauté européenne se voient garantir un revenu minimum par le biais d'un paiement compensatoire applicable à un volume plafond de 854 000 tonnes. Nous partons de l'hypothèse, dans ce document, que la somme des prix f.o.b. et de l'aide directe est constante, si bien que le prix "effectif" pris en compte par les producteurs de la Communauté européenne dans le cadre de leurs programmes d'optimisation du profit ne change pas lorsque varie le niveau du contingent A/B.

C. LES EXPORTATIONS DES PAYS ACP ET DES PAYS DE LA ZONE DOLLAR

15. La répartition de la fluctuation des volumes d'exportation varie de façon marquée entre les pays ACP (tableau 2). Dans le scénario S-II, les exportations en provenance de la Côte d'Ivoire et du Cameroun vers la CE augmenteraient respectivement de 22 pour cent (de 168 410 tonnes en 1996-98 à 205 466 tonnes en 2005) et de 17 pour cent (de 146 490 tonnes en 1996-98 à 171 374 tonnes en 2005). Les importations de la CE en provenance des Îles-Sous-le-Vent et de la Jamaïque diminuerait de 5,7 pour cent, passant de 230 953 tonnes à 217 802 tonnes. Le tableau 3 indique, de la même façon, la distribution de l'évolution de l'ensemble des exportations entre les fournisseurs de la zone dollar. Dans le scénario S-II, l'Équateur exporterait 4 841 000 000 de tonnes en 2005, soit environ 793 000 tonnes ou 19,6 pour cent de plus que durant la période de référence. Le principal exportateur mondial bénéficierait d'un accès accru au marché de la CE grâce à un contingent A/B établi à 2 653 000 000 de tonnes, et d'un accroissement de la demande dans le reste du monde, en particulier aux États-Unis. Les exportations des deux autres pays d'Amérique centrale augmenteraient d'environ 7,6 pour cent pour le Costa Rica et le Guatemala, et d'environ 12 pour cent pour le Panama et le Honduras.

D. LA RENTE DU CONTINGENT A/B ET L'ÉQUIVALENT TARIFAIRE

16. L'application du scénario S-II entraînerait un déclin du prix moyen c.a.f. dans la CE d'environ 30 euros la tonne, soit de 593 euros en 1996-98 à 560 euros en 2005. Le prix moyen f.o.b. des pays de la zone dollar s'en trouverait diminué d'environ 20 dollars É.-U. la tonne, reculant de 292 dollars É.-U. en 1996-98 à 272 dollars É.-U. en 2005. Ainsi, la rente de contingent, à savoir la différence entre le prix mondial et le prix plus élevé pour la CE découlant de la restriction commerciale sur les bananes de la zone dollar importées dans la CE diminuerait, passant de 239 euros la tonne en 1996-98 à 182 euros la tonne en 20054.

17. Bien que la rente de contingent A/B varie avec le taux de change euro/dollar É.-U., elle est également sensible à l'évolution des politiques et aux variables exogènes. Ainsi, une augmentation de la demande dans la CE devrait augmentait l'effet de rente, de la même façon que des augmentations de l'offre dans la zone dollar. Dans le même ordre d'idées, l'adoption d'un contingent A/B inférieur aurait pour effet d'augmenter les rentes A/B (voir le tableau 4 à propos des effets des leviers de déplacement d'offre et de demande).

18. Selon le tableau 4, un équivalent tarifaire d'environ 182 euros la tonne en 2006 avec une préférence tarifaire de montant égal accordée aux bananes ACP serait "équivalent" au système transitoire de contingents tarifaires de la phase II (scénario S-II). Un équivalent tarifaire de cet ordre de grandeur maintiendrait le prix moyen c.a.f. dans la CE à son niveau de 2005, soit environ 560 euros la tonne. Dans ce cas de figure, les exportations de la zone dollar vers la CE et celles en provenance des pays producteurs et des pays ACP n'en seraient guère affectées en 2006, relativement aux résultats du scénario S-II.

19. Il va de soi que ce résultat est fonction du choix de paramètres ainsi que des hypothèses de politiques contenues dans l'analyse. Il semble, en particulier, qu'un tarif de cet ordre de grandeur serait sous-estimé, c'est-à-dire en deçà d'"équivalent", en cas d'affaiblissement de l'euro vis-à-vis du dollar É.-U. relativement à une parité de 1 en 2005 comme dans les scénarios S-I et S-II. En outre, cette "équivalence" s'applique strictement et exclusivement à l'année 2006. Étant donné que les augmentations de productivité et de volume de production seront probablement plus élevées dans la zone dollar que dans les pays ACP, si les décideurs de la CE choisissent d'éviter d'autres variations des positions concurrentielles de l'offre, basées sur des changements de productivité, l'équivalent tarifaire devrait être augmenté, selon le modèle, de manière à permettre aux pays ACP de maintenir une part de marché à long terme comparable à celle de 2005.

20. À l'évidence, l'analyse incorpore certaines hypothèses simplificatrices, si bien que les résultats empiriques sont sujets à plusieurs réserves. En particulier, une analyse pertinente et complète de la répartition de la rente de contingent A/B nécessite une modélisation très attentive de tous les opérateurs impliqués dans le secteur de la banane et de tous les aspects de la structure de marché, y compris les stratégies et les attentes des opérateurs5. Malheureusement, on ne dispose d'aucune donnée pour effectuer un tel exercice de modélisation, étant donné que seules les données par pays sont disponibles. Il s'agit là d'un point important, car le nouveau régime d'importation à base de licences est essentiellement axé sur les contingents accordés aux sociétés.

IV. CONCLUSIONS GÉNÉRALES

21. Du point de vue des pays, le régime transitoire d'importation de la CE peut très largement être considéré comme le prolongement d'un marché géré, avec deux contingents tarifaires et un régime de licences d'importation basé sur les échanges commerciaux antérieurs. Le choix de la période de référence 1994-1996 ne prend pas nécessairement en compte les évolutions dynamiques et les investissements qui sont intervenus depuis, chez un grand nombre d'opérateurs. Il ressort clairement du tableau 5, malgré de nombreuses incertitudes concernant les données, que la part du marché de la CE et du marché mondial détenue par une compagnie multinationale (Chiquita Brand) a décru de façon substantielle depuis 1992, tandis que la part de ces marchés détenue par une autre compagnie multinationale (Dole Food Company) a sensiblement augmenté. Il est certes difficile d'apprécier l'évolution des parts de marché, évolution qui non seulement reflète des variations au niveau des investissements, mais qui est également attribuable à d'autres causes, telles que l'apparition de maladies de la banane, les intempéries, les grèves et les perturbations concernant les expéditions et le fonctionnement des entreprises. En outre, l'adoption de 1992 comme référence risque d'induire en erreur, dans la mesure où les exportateurs de bananes de la zone dollar ont commencé à augmenter leurs expéditions vers la CE au cours des années qui précédaient immédiatement l'Organisation commune de marché de 1993, dans l'attente du nouveau régime commercial.

22. Tant les États-Unis que la CE, en se félicitant de l'accord conclu en avril 2001, ont reconnu avoir des objectifs communs, à savoir "parvenir à un accord sur un système conforme aux normes de l'OMC, garantir un accès équitable et satisfaisant au marché européen pour les bananes de toutes origines et pour tous les opérateurs, et protéger les producteurs ACP en raison de leur vulnérabilité". D'après les résultats de la simulation, il est essentiel que ces pays améliorent leur compétitivité au cours de la période transitoire d'application de contingents tarifaires, dans la perspective de l'application d'un régime exclusivement tarifaire.

23. Depuis l'Organisation commune de marché de 1993, les régions productrices de la CE ont bénéficié d'un soutien des revenus sous forme d'aides directes. Les scénarios présentés dans la section III partent de l'hypothèse que le prix effectif - à savoir le prix f.o.b. à la tonne plus le montant d'aides directes à la tonne - envisagé par les producteurs de la CE est demeuré inchangé par rapport à son niveau de 1996-1998. Dans le scénario S-II, les territoires de la CE fourniraient environ 797 000 tonnes, soit un supplément de 46 419 tonnes par rapport à 1996-98, à un prix inférieur de 30 euros au prix moyen de 1996-1998, ce qui implique une compensation additionnelle d'environ 24 millions d'euros relativement à 1996-1998. On obtient ainsi une compensation supplémentaire d'environ 30 euros par tonne de bananes6. S'agissant de la période 1996-1998, les producteurs de la CE pâtiraient également de la suppression de la catégorie B d'opérateurs. Le taux de croissance de l'offre en provenance des territoires de la CE est positif pour les huit années de la période 1993-2000 (voir l'annexe I)7. Il est probable que cette tendance favorable résulte du programme de soutien du revenu. L'absence de données fiables empêche de déterminer dans quelle mesure les régions productrices de la CE ont utilisé ce programme de soutien du revenu afin de réduire le coût de production unitaire et d'améliorer leur compétitivité.

24. Examiné sous l'angle du fournisseur, le modèle économétrique suppose que le régime intérimaire de la CE ne réussira probablement pas à protéger complètement les parts de marché des fournisseurs des Caraïbes, étant donné que l'on prévoit une réduction de leur part d'au moins 5 000 à 15 000 tonnes entre 2001 et 2005 (tableau 2). On peut s'attendre à ce que les pays producteurs de l'Afrique occidentale enregistrent des progrès par rapport à la période de référence. Cependant, le niveau du contingent C aurait pour effet de limiter la croissance pour l'Afrique de l'Ouest. De plus, étant donné que les échanges historiques de ces pays sont réduits, il leur faudrait acheter des licences pour faire admettre un volume additionnel de bananes.

25. Il n'existe pas de certitude que la phase II entrera en vigueur au 1er janvier 2002, ni que le régime exclusivement tarifaire sera mis en application au 1er janvier 2006. Il est probable que la fixation d'un tarif approprié fera l'objet d'un débat considérable jusqu'à cette date. Compte tenu de l'importance de ce niveau tarifaire pour le commerce mondial de la banane, le Sous-Groupe souhaitera peut-être que le secrétariat entreprenne une analyse de modélisation plus approfondie de ce concept.

Tableau 1 - Le nouveau régime du commerce de la banane dans la Communauté européenne (accord conclu en avril 2001)

Étapes et phases Principales caractéristiques
Étape I, phase I (1er juillet 2001) Système de contingents tarifaires (TRQ) avec:
- un contingent tarifaire consolidé A de 2 200 000 tonnes
- un contingent tarifaire B de 353 000 tonnes
- un contingent tarifaire additionnel C de 850 000 tonnes

Les contingents tarifaires sont (théoriquement) accessibles à tous les fournisseurs

Tarifs:
- Contingent A/B:75 euros par tonne pour les pays non ACP et néant pour les pays ACP
- Contingent C: 300 euros par tonne pour les pays non ACP et néant pour les pays ACP
- Hors contingent: 680 euros par tonne pour les pays non ACP et 380 euros pour les pays ACP (?)

Gestion des contingents tarifaires:
- gestion unifiée des contingents tarifaires A et B
- références historiques (1994-1996)
- opérateurs traditionnels (83 pour cent des licences) et opérateurs non traditionnels (17 pour cent)

Étape I, phase II (dès que possible) Système de contingents tarifaires (TRQ) avec
- un contingent tarifaire A consolidé de 2 200 000 tonnes
- un contingent tarifaire autonome B de 453 000 tonnes
- un contingent tarifaire additionnel C de 750 000 tonnes

Les contingents tarifaires A et B sont réservés aux pays non ACP et le contingent tarifaire C est réservé aux pays ACP

Tarifs:
- Contingent A/B: 75 euros par tonne pour les pays non ACP et néant pour les pays ACP
- Contingent C: 300 euros par tonne pour les pays non ACP et néant pour les pays ACP
- Hors contingent: 680 euros par tonne pour les pays non ACP et 380 euros pour les pays ACP (?)

Gestion des contingents tarifaires:
- gestion unifiée des contingents tarifaires
- références historiques (1994-96 jusqu'au 31 décembre 2003)
- opérateurs traditionnels (83 pour cent des licences) et opérateurs non traditionnels (17 pour cent)

Étape II (au plus tard le 1er janvier 2006) Système exclusivement tarifaire

Barèmes tarifaires non définis

Source: Commission européenne, Règlement (CE) 896/2001 du 8 mai 2001; FruiTrop, N° 79, Avril 2001, page 6; OMC, 2001, WT/DS 27/58, 2 juillet 2001.

 

Tableau 2 - Importations de bananes dans la Communauté européenne (tonnes)

  Base 1996-98 1999 1 2005
      S-II
(contingent A/B: 2,653)
S-I
(contingent A/B: 2,553)
Territoires CE 750 671 [19,4] 730 000 [18,6] 797 090 [18,9] 797 090 [19,3]
         
Pays ACP 701 471 [18,1] 678 000 [17,3] 760 523 [18,1] 2 787 212 [19,0]
- Côte d'Ivoire 168 410 192 200 205 466 212 482
- Cameroun 146 490 161 400 171 374 177 224
- Îles-Sous-le-Vent et Jamaïque 230 953 ... 217 802 225 838
- Autres pays ACP "traditionnels" 96 956 ... 100 717 104 157
- Pays ACP "non traditionnels" 58 662 ... 65 165 67 512
         
Autres pays 2 413 603 [62,4] 2 513 000 [64,1] 2 653 000 [63,0] 2 553 000 [61,7]
         
Total 3 865 745 [100] 3 921 000 [100] 4 210 613 [100] 4 137 302 [100]

1Source:  ODEADOM (Office de développement de l'économie agricole des départements d'outre-mer (2001) et FAO (2001)
2 Dans le scénario S-II, les exportations des pays ACP vers la CE sont légèrement supérieures au niveau de contingents C de 750 000 tonnes (plus 10 500 tonnes). Les résultats ne changent pas de façon marquée lorsque les exportations des pays ACP sont strictement limitées au niveau du contingent C.

 

Tableau 3 - Total des exportations de bananes par pays de la zone dollar, Amérique centrale et Amérique du Sud (tonnes)

  Base 1996-98 1999 1 2005
      S-II
(contingent A/B: 2,653)
S-I
(contingent A/B: 2,553)
Équateur 4 048 000 3 865 000 4 840 573 4 800 378
Costa Rica 1 956 000 2 113 000 2 104 571 2 087 096
Colombie 1 451 000 1 650 000 1 623 884 1 613 088
Panama 566 000 593 000 633 438 629 227
Guatemala 688 000 680 000 740 258 734 111
Honduras 545 000 109 000 609 936 605 881
Total 10 081 782 ... 11 566 320 11 476 700

1 Source: FAO (2001)

 

Tableau 4 - Sensibilité de la rente de contingent A/B aux paramètres de politique et/ou aux variables exogènes

  Rente de contingent A/B en 2005 (euros par tonne)
  Scénario S-II
(contingent A/B: 2,653)
Scénario S-I
(contingent A/B: 2,553)
Expériences de référence 182,1 198,2
Expériences de sensibilité    
Taux de change euro/dollar É.-U.:1 227,4 243,4
1 + augmentation CE autonome
leviers de déplacement de la demande:2
258,3 274,8
2 + augmentation en zone dollar exogène
leviers de déplacement de l'offre:3
270,0 286,4

1 suppose que le taux de change euro/dollar É.-U. reste à 0,85 (0,85 euro = 1 dollar É.-U.) plutôt que la parité 1
2 suppose, en plus de 1, que les leviers de déplacement de la demande dans la CE soient multipliés par 2
3 suppose en plus de 2, que les leviers de déplacement de l'offre de la zone dollar augmentent de 2 pour cent par an

 

Tableau 5 - Parts du marché mondial et du marché de la CE détenues par des compagnies bananières

  Parts du marché (en pourcentage)
  Monde Communauté européenne
  1992 1 1992 2 1998 1 1997 2 1992 1 1992 2 1998 1 1997 2
Chiquita 34 34 26 24-25 > 30 > 30 < 20 15-16
Dole 20 20 25 25-26 12 12 16 18-19
Del Monte 3 15 8 16 5 7-8 16 10-11
Fyffes ... 2-3 8 6-7 - 4-5 18 16-17
Noboa 7-8 ... 7-8 13 7-8 ... 7-8 ...

Sources: 1 Ledemé F. cité dans FruiTrop, N° 62, Octobre 1999

                2 Van de Kasteele A., Février 1998, sources diverses

 

ANNEXE I - OFFRE DE BANANES DANS LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE (milliers de tonnes) 1

 

  1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000
Pays ACP 596 680 748 727 764 796 693 615 677 754
Traditionnels 585 641 684 640 687 734 640 554 632 694
Non traditionnels 12 39 65 87 77 62 53 61 45 60
Territoires CE 699 778 644 585 658 685 811 786 787 ...
Autres pays 2 286 2 367 2 219 2 102 2 405 2 397 2 462 2 393 2 520 2 530
Total partiel 3 581 3 825 3 611 3 414 3 827 3 878 3 966 3 794 3 983  
Réexportations 53 13 36 58 44 31 17 26 27 34
Total général 3 528 3 812 3 575 3 356 3 783 3 847 3 949 3 768 3 956  

Source: Commission européenne - 2000 CD Eurostat 5-2001

1 De 1991 à 1994 - 12 CE; à partir de 1995 - 15 CE

 

 

ANNEXE II

Les simulations présentées dans ce document sont effectuées au moyen d'une version actualisée d'un modèle d'équilibre partiel basé sur une seule denrée et sur plusieurs pays du marché mondial de la banane. Le modèle est décrit en détail dans Guyomard et divers collaborateurs (1997,1999a, 1999b). Il consiste, de façon synthétique, en équations de demande (importations) et d'offre (exportations) rédigées sous forme de fonction d'élasticité constante. Les prix d'importations c.a.f. des zones importatrices et les prix d'exportations f.o.b. des zones exportatrices sont corrélés par des coûts de transport et par des équations à marge constante. Les équations de compensation des marchés garantissent l'équilibre offre-demande sur les marchés "pertinents". Il est intéressant de noter, à ce stade, que le nombre d'équations de compensation des marchés dépend étroitement de la politique d'importation de la CE: à titre d'exemple, dans le cas de l'Organisation commune de marché de 1994 avec un contingent consolidé NPF, il a fallu élaborer deux équations de compensation du marché, une pour le marché CE afin de déterminer les prix c.a.f. dans la CE ainsi que les prix f.o.b. dans les territoires CE et les pays ACP, et une autre pour le reste du monde afin de déterminer les prix c.a.f. et f.o.b. sur les marchés d'import-export du reste du monde. La valeur et le volume des flux commerciaux bilatéraux - à savoir les exportations du fournisseur j vers l'importateur i, et les importations de l'acquéreur i à partir de l'exportateur j -, sont basés sur les données EUROSOSTAT (COMEXT) et FAO (FAOSTAT). Les valeurs unitaires f.o.b. et c.a.f. proviennent de ces données en ce qui concerne le volume et la valeur. Les données de référence utilisées pour l'initialisation et le calibrage du modèle correspondent à la moyenne 1996-1998.

Les fonctions d'offre (exportations) et de demande (importations) comprennent des facteurs de déplacement chronologique. Les tendances de croissance de l'offre et de la demande ont été estimées à partir de données portant sur les quinze dernières années. Ces tendances de croissance ont ensuite été expurgées de l'incidence des tendances de prix en posant l'indépendance entre les effets de prix et les effets chronologiques. Cette hypothèse implique que les modifications de politiques n'ont pas d'incidence sur l'ampleur des déplacements d'offre et de demande.

Références concernant le modèle

Guyomard H., Mahé L.-P., Tavéra C., Trochet T., 1991, Technical change and EC-US agricultural trade liberalisation. Journal of Agricultural Economics, 42(2), 119-137.

Guyomard H., Herrard N., Laroche C., Le Mouël C, 1997, Analyse théorique et empirique du fonctionnement de l'Organisation commune de marché de la banane dans l'Union européenne. INRA-ESR, Rennes, Rapport pour la Commission européenne, Direction générale VI, Bruxelles.

Guyomard H., Laroche C., Le Mouël C., 1999a, An economic assessment of the Common Market Organization for bananas in the European Union. Agricultural Economics, 20, 105-120.

Guyomard H., Laroche C., Le Mouël C., 1999b, Impacts of the Common Market Organization for bananas on European Union markets, international trade and welfare. Journal of Policy Modeling, 21(5), 619-631.

 

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1 Les opérateurs traditionnels sont "des agents économiques (...) établis dans la Communauté pendant la période qui détermine leurs quantités de référence et qui, pour leur propre compte, ont réalisé l'achat d'une quantité minimale de bananes originaires de producteurs de pays tiers ou, le cas échéant, la production, le suivi de leur expédition et de leur vente dans la Communauté." Les opérations définies ci-dessus sont appelées importations primaires. "On entend par opérateurs traditionnels A/B les opérateurs traditionnels qui ont réalisé la quantité minimale d'importations primaires de bananes de pays tiers et/ou de bananes non traditionnelles ACP, selon les définitions données par l'article 16 du Règlement (CE) 404/93, dans la version modifiée par le Règlement 1637/98. On entend par opérateurs traditionnels C les opérateurs traditionnels qui ont réalisé la quantité minimale d'importations primaires de bananes traditionnelles ACP selon les définitions données par l'article 16 précité, dans la version modifiée par le Règlement 1637/98 (CE)."

2 "La quantité de référence de chaque opérateur traditionnel A/B sera établie [...] sur la base de la moyenne des importations primaires de bananes de pays tiers et/ou de bananes non traditionnelles ACP au cours des années 1994, 1995 et 1996, prises en compte au titre de l'année 1998 pour la gestion du contingent tarifaire pour les importations de bananes originaires de pays tiers et de bananes non traditionnelles ACP (...). La quantité de référence de chaque importateur traditionnel C (...) sera établie sur la base de la moyenne des importations primaires de bananes traditionnelles ACP au cours des années 1994, 1995 et 1996, au titre de l'année 1998 (...)." "On entend par opérateurs non traditionnels "les agents économiques établis dans la Communauté au moment de leur enregistrement qui, (a) ont exercé une activité commerciale d'importation de bananes fraîches dans la Communauté, pour leur propre compte et à titre autonome (...) pendant l'une des deux années précédant immédiatement l'année au titre de laquelle l'enregistrement est demandé, (b) en vertu de cette activité, ont réalisé des importations d'une valeur déclarée en douane égale ou supérieure à 1 200 000 euros pendant la période déterminée au point (a); et (c) n'ont pas de quantité de référence en tant qu'opérateurs traditionnels dans le cadre du contingent tarifaire au titre duquel ils demandent leur enregistrement (...)."

3 Selon le scénario S-II, les exportations des pays ACP vers la Communauté européenne sont légèrement plus élevées que le contingent C de 750 000 tonnes (plus 10 500 tonnes). Les résultats ne diffèrent pas sensiblement lorsque que les exportations des pays ACP sont maintenues à un niveau strictement égal au niveau du contingent C.

4 La rente de contingent sur les importations de bananes de la zone dollar dans la CE se calcule comme suit: prix moyen c.a.f. dans la C.E - coûts de transport entre le marché d'importation de la CE et la zone d'exportation dollar - marges commerciales moyennes "normales" - prix moyen f.o.b. dans la zone dollar. Il convient de garder à l'esprit que le marché d'importation de la CE effectue les compensations en euros, tandis que le marché du reste du monde compense, dans une grande mesure, en dollars É.-U.

5 Trois sociétés multinationales représentent environ 70 pour cent du marché mondial de l'import-export de la banane, et la plupart des marchés nationaux de la CE sont dominés par un petit nombre d'opérateurs, y compris les trois sociétés multinationales précitées. Cela laisse supposer que l'hypothèse de concurrence parfaite est sujette à caution, sans pour autant impliquer nécessairement que le marché mondial de l'import-export de la banane n'est pas parfaitement concurrentiel. À titre d'exemple, des études ont montré que le marché allemand de la banane ne saurait être décrit comme assujetti à domination, et cela en dépit du faible nombre de sociétés qui rivalisent sur ce marché - le coefficient de concentration entre quatre sociétés dépasserait 80 pour cent du marché allemand.

6 En 1996-98, l'aide directe à l'unité accordée aux producteurs de la CE était d'environ 260 euros la tonne - moyenne pondérée triennale. Cette aide a augmenté de façon substantielle en 1999 ( 297 euros la tonne) et en 2000 (383 euros la tonne). Ce phénomène est en partie dû à l'augmentation des gains de référence historiques utilisés pour le calcul de la compensation, lesquels sont passés de 592,9 euros la tonne pour les années 1993 à 1997, à 622,5 euros la tonne en 1998 et à 640,3 euros la tonne en 1999 et en 2000.

7 Il convient toutefois d'observer que les quantités fournies en 1991-1992 (environ 703 000 tonnes) ont été nettement supérieures aux volumes commercialisés durant les quatre premières années de l'Organisation commune de marché, soit de 1993 à 1996.