NERC/04/5


Vingt-Septième Conférence Régionale de la FAO pour le Proche-Orient

Doha, Qatar, 13 – 17 mars 2004

Sécurité Sanitaire des Aliments et Commerce International dans
la Région du Proche-Orient

Table des matières


Annexe 1. Pays de la Région du Proche-Orient Membres de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et d’Organes Internationaux d’Etablissement des Normes


I. INTRODUCTION

1. Depuis la conclusion du Cycle d’Uruguay en 1995, la sécurité sanitaire des aliments est devenue un thème important dans les débats sur le commerce international. Depuis lors, les mesures sanitaires et phytosanitaires appliquées dans les pays développés se sont faites de plus en plus détaillées et strictes et, dans certains cas, elles limitent les échanges et/ou augmentent de façon notable les coûts des exportations des produits alimentaires en provenance des pays de la région du Proche-Orient.

2. Le commerce des produits agricoles et alimentaires est essentiel pour les pays du Proche-Orient. Dans une région où les ressources naturelles, notamment l’eau, sont rares, la satisfaction des besoins alimentaires et l’assurance de la sécurité alimentaire dépendent dans une large mesure des importations d’aliments ; c’est pourquoi les systèmes visant à en contrôler la qualité et la sécurité sanitaire revêtent une importance cruciale pour la santé publique. Par ailleurs, les exportations de denrées alimentaires sont, pour les pays de la région (en particulier pour les économies des pays non-producteurs de pétrole), un moyen efficace de générer des devises. Il est donc indispensable de créer des systèmes performants de sécurité sanitaire des aliments pour maintenir et accroître les parts de marché des exportations de produits alimentaires et agricoles.

3. Bien que plusieurs pays de la région aient pris des mesures pour créer de nouveaux systèmes améliorés de sécurité sanitaire des aliments, nombre de pays doivent encore renforcer la capacité et l’efficacité de leurs systèmes, afin de contrôler la sécurité sanitaire des aliments produits localement et importés, et de garantir et de démontrer le respect des normes de sécurité sur les marchés d’exportation. Cela est d’autant plus important que les exportations de la région sont dominées par les fruits, les légumes, l’huile d’olive et le poisson, produits pour lesquels les exigences de sécurité sanitaire sont très strictes et en mutation permanente par rapport à d’autres produits, et parce que le gros de ces produits est exporté à destination de l’UE où les normes alimentaires sont plus strictes que sur d’autres marchés où se vendent des produits de la région.

4. Le présent document passe en revue les systèmes de sécurité sanitaire et le commerce des aliments au Proche-Orient, ainsi que leurs incidences réciproques, et recommande aux gouvernements et à la FAO des mesures pratiques destinées à renforcer la sécurité sanitaire des aliments dans la région et à promouvoir le commerce des produits agricoles et alimentaires.

II. SITUATION ET EFFICACITÉ DES SYSTÈMES DE SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS DANS LA RÉGION DU PROCHE-ORIENT

A. RÉALISATIONS

5. La situation et l’efficacité des systèmes de sécurité sanitaire des aliments varient considérablement dans l’ensemble du Proche-Orient. Les pays de la région sont à des stades très différents pour ce qui est de la mise au point et de l’application de tels systèmes. Ces dernières années, un nombre croissant de pays se sont attachés à mettre à jour et à renforcer leurs systèmes et infrastructures de contrôle des aliments, et à introduire l’analyse des risques dans leurs approches.

6. Dans toute la région, des efforts ont été déployés, ou sont en cours, pour réformer et améliorer les systèmes de contrôle des aliments. C’est ainsi que des activités ont été entreprises pour formuler une stratégie nationale de contrôle (Maroc, Tunisie), établir une nouvelle législation alimentaire conforme aux exigences internationales (Chypre, Égypte, Émirats arabes unis, Jordanie, Liban, Maroc, Oman, Pakistan et Soudan) et réviser et mettre à jour les normes et règlements alimentaires (République islamique d’Iran, Soudan et Syrie). La majorité des pays harmonisent leurs normes alimentaires avec le Codex, appliquent des systèmes efficaces de fabrication et d’assurance de la qualité (Tunisie) et tendent vers une approche fondée sur la gestion des risques (Égypte, Jordanie, Maroc). En 1999, les membres de l’OMS de la Méditerranée orientale ont adopté un plan d’action régional pour la sécurité sanitaire des aliments et, depuis lors, un grand nombre d’entre eux ont entrepris un examen de la situation de leur sécurité alimentaire nationale. Au cours d’activités plus récentes appuyées par la FAO, le système de contrôle des aliments du Maroc et de la Syrie s’est encore amélioré, grâce à des mesures plus strictes de contrôle de la qualité et à l’harmonisation des tâches entre les diverses institutions nationales s’occupant du contrôle des aliments. Depuis 2002, le Soudan s’efforce de réviser et mettre à jour, avec l’appui de la FAO, ses normes et règlements alimentaires et de les harmoniser avec les normes internationales.

7. Des systèmes modernes de gestion des risques permettent de surveiller et contrôler la sécurité sanitaire des aliments produits localement ou importés. Aux Émirats arabes unis, par exemple, dans les systèmes d’inspection des aliments produits localement et importés, on utilise des logiciels créés expressément qui couvrent toute la filière, améliorent l’accès à l’information, attirent l’attention sur les aliments à risque élevé, accélèrent les démarches de dédouanement des aliments importés, augmentent les incitations à améliorer la performance et renforcent la sécurité sanitaire des aliments. Certains autres pays, comme la Jordanie, ont révisé leur législation alimentaire en 2001, harmonisé leurs normes de sécurité sanitaire des aliments en fonction du Codex et adopté un système de sécurité sanitaire fondé sur la gestion des risques, qui a réduit de moitié les coûts de l’analyse des essais et diminué la durée du dédouanement par un dispositif semi-automatisé d’archivage pour la localisation et l’établissement des rapports.

8. Un certain nombre de pays ont institué des comités nationaux pour coordonner les travaux des différentes administrations s’occupant de la sécurité sanitaire des aliments. C’est ainsi que, dans les pays du Conseil de coopération du golfe Persique (CCG), des comités ont été établis pour fournir une instance à tous les ministères et les organismes intéressés et leur permettre de collaborer au contrôle et à la législation alimentaires. L’Égypte, la République islamique d’Iran, l’Iraq, le Maroc, le Soudan et la Syrie ont des comités alimentaires nationaux dont la fonction est de surveiller l’application des lois et règlements et de renforcer la coordination. Dans certains pays, ces comités s’occupent également de l’établissement des normes. D’autres pays ont institué des comités nationaux du Codex. Un comité national du Codex a été créé, par exemple, en Tunisie en 2000 avec l’appui de la FAO pour aider le pays à renforcer les systèmes de contrôle de la sécurité et de la qualité des aliments et pour répondre aux changements survenant dans l’environnement commercial mondial. En outre, en 2003, la Jordanie et l’Arabie saoudite ont établi des administrations indépendantes pour le contrôle des aliments et des médicaments.

9. L’acceptation et l’utilisation croissantes des bonnes pratiques de fabrication, des bonnes pratiques agricoles et de l’analyse des risques aux points critiques sont observables dans toute la région. Dans de nombreux pays, un grand nombre d’industries appliquent l’analyse des risques aux points critiques à titre volontaire, afin d’améliorer à l’échelon national la sécurité sanitaire des aliments et d’accroître leur part des marchés d’exportation. Les Émirats arabes unis, Oman, la Tunisie et le Yémen appliquent des règlements de gestion de la qualité fondés sur l’analyse des risques aux points critiques pour le poisson et les produits de la pêche, afin de regagner leur accès aux marchés d’importation (le marché de l’UE, par exemple). En outre, la Tunisie a imposé ce type d’analyse à l’industrie halieutique dans sa législation sur la sécurité sanitaire des aliments. Certains pays comme les Émirats arabes unis, le Liban, le Maroc et Oman ont mis au point - ou s’apprêtent à le faire - une législation et des directives sur les bonnes pratiques de fabrication et l’analyse des risques aux points critiques. La République islamique d’Iran a promulgué une législation qui exige la certification par ce type d’analyse des exportations de produits alimentaires, et a renforcé, avec l’aide de la FAO, sa capacité nationale de surveillance et de contrôle des résidus (pesticides, médicaments pour animaux et résidus chimiques) dans les aliments.

10. D’autres pays ont pris des mesures pour assurer l’application des bonnes pratiques de production (bonnes pratiques agricoles, bonnes pratiques de fabrication et analyse des risques aux points critiques) aux principaux produits alimentaires d’exportation, souvent en consultation avec les pays importateurs ou avec leur appui. En Égypte, par exemple, des règlements qui exigent l’indication des lieux de production et d’autres aspects connexes sont imposés pour la pomme de terre et l’arachide, et sont en préparation pour les légumes et les fruits, afin de satisfaire aux normes de l’Union européenne.

11. Avec l’aide de la FAO, le Liban s’efforce d’améliorer l’efficacité et la capacité du système de contrôle alimentaire par un examen approfondi, et a établi un groupe de base de formateurs en matière d’analyse des risques aux points critiques. Grâce à ces initiatives, les normes alimentaires ont été révisées et mises à jour et le système d’assurance de la qualité s’est amélioré. Un nouveau projet de loi relatif aux aliments sera soumis au gouvernement, pour examen. Des activités ont été entreprises en Syrie, avec l’aide de la FAO, pour améliorer les capacités analytiques des laboratoires nationaux de contrôle des aliments et les porter jusqu’au niveau exigé par les organismes d’accréditation internationaux, et pour établir un comité national du Codex qui soit performant. Plusieurs autres pays de la région s’efforcent d’améliorer l’efficacité de leur structure de contrôle des aliments par l’institution d’organismes intégrés de sécurité sanitaire des aliments.

12. L’harmonisation des politiques, règlements et normes alimentaires au niveau régional a également suscité l’attention de nombreux pays de la région. Les membres des pays du CCG, par exemple, ont mis au point une procédure commune d’exportation des aliments qui prévoit une politique et des normes d’inspection partagées. Les aliments produits ou importés par les pays membres peuvent circuler librement dans tous les pays du CCG.

B. DÉFIS

13. Malgré ces bons résultats et les efforts de création de capacités déployés par de nombreux pays de la région, les systèmes de contrôle des aliments sont encore excessivement fragmentés, peu développés et périmés dans la plupart d’entre eux. Au niveau national, la responsabilité de la sécurité alimentaire est complexe et normalement partagée entre différents ministères et départements, et un manque de clarté sur les rôles et une mauvaise coordination règnent entre les institutions intéressées. En outre, de nombreux pays de la région continuent à séparer le contrôle des aliments produits localement de celui des produits importés.

14. Dans quelques pays, il n’existe pas de lois séparées pour les aliments. La législation alimentaire est incorporée dans la législation plus générale relative à la santé publique et à la répression des fraudes. Dans d’autres, elle demeure désuète et ne reflète pas les changements et les nouvelles exigences apparues depuis sa formulation il y a plusieurs décennies. Certains pays ont promulgué diverses lois liées à l’alimentation mais, dans la plupart des cas, elles ne couvrent pas entièrement le thème de la sécurité sanitaire des aliments. Bahreïn et Oman ont une législation alimentaire très détaillée concernant strictement les produits alimentaires importés ou exportés mais elle s’applique mal aux aliments produits et consommés localement.

15. Bien que les bonnes pratiques de fabrication et les systèmes d’assurance de la qualité comme l’analyse des risques aux points critiques aient été introduits dans toute la région, les systèmes d’inspection nationaux ne les ont pas pleinement incorporées et continuent à viser en premier lieu le contrôle du produit final. Les laboratoires ont des compétences scientifiques et techniques limitées, peu de ressources financières et d’équipement et ne sont pas accrédités au plan international.

16. Les activités d’inspection des aliments varient largement dans toute la région. Rares sont les pays (Émirats arabes unis, Jordanie) qui aient mis en oeuvre avec succès l’approche fondée sur l’analyse des risques, alors que dans de nombreux autres, les services d’inspection et les laboratoires n’ont, dans la plupart des cas, guère d’expérience en la matière et leur capacité ne va pas au-delà de l’analyse de routine. C’est ainsi que de nombreux pays appliquent des normes de datation sans fondement scientifique.

17. S’il est vrai que certains pays (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Jordanie, Koweït et Oman) utilisent des mécanismes performants de notification des maladies d’origine alimentaire, dans la plupart des autres ces mécanismes de surveillance laissent à désirer. En outre, l’apparition de ces maladies est considérée comme un fait normal de la vie quotidienne et elle n’est souvent pas signalée. De ce fait, l’incidence des maladies d’origine alimentaire n’est pas toujours prise en compte dans la formulation des stratégies nationales de sécurité sanitaire des aliments. Les mesures de sécurité concernant les contaminants et agents pathogènes d’origine microbienne ne jouissent pas de la priorité qu’elles méritent.

18. Bien que les aliments vendus sur la voie publique jouent un rôle important dans la nutrition d’une part importante de la population de différents pays de la région, on ne dispense guère d’enseignements sur les pratiques de manipulation des aliments et rares sont les activités de sensibilisation du public à cet égard.

19. De nombreux pays s’efforcent de stimuler la prise de conscience des consommateurs et des préposés à la manutention des aliments vis-à-vis de leur sécurité sanitaire, mais l’impact de ces efforts n’a pas encore été évalué.

20. De nombreux pays de la région ont adhéré à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et à des organismes d’établissement de normes comme le Codex Alimentarius. Sur les 32 pays de la région, 16 sont des membres de l’OMC, 9 négocient à l’heure actuelle leur adhésion et trois l’ont demandée (voir l’annexe 1). Vingt-deux pays sont membres du Codex et certains (comme l’Égypte, la Jordanie, le Maroc, le Soudan, la Syrie et la Tunisie) ont créé des comités nationaux du Codex. Bien qu’un nombre croissant de pays soient représentés aux réunions, la limitation des ressources scientifiques, techniques et financières continue d’entraver leur capacité de participer activement au Codex et aux comités techniques de l’OMC. Dans plusieurs pays, les normes et règlements ne sont pas entièrement conformes aux accords du Codex et de l’OMC.

III. LE COMMERCE DES PRODUITS ALIMENTAIRES ET AGRICOLES DANS LA RÉGION DU PROCHE-ORIENT

21. S’il est vrai que les pays de la région du Proche-Orient représentent moins de 4 pour cent du commerce agricole mondial, il n’en demeure pas moins que l’agriculture absorbe encore un pourcentage élevé du PIB dans nombre d’entre eux. Les échanges alimentaires jouent un rôle essentiel en garantissant la sécurité alimentaire et/ou en générant des recettes en devises dans de nombreux pays.

22. Étant donné la limitation des ressources agricoles naturelles, notamment l’eau, et l’expansion accélérée de la population dans la région, les pays dépendent de manière croissante des importations pour satisfaire leurs besoins nutritionnels et soutenir la sécurité alimentaire. Ces 25 dernières années, les importations de denrées alimentaires ont augmenté de 7 pour cent annuellement, et ont dépassé la valeur des exportations agricoles. La plupart des pays sont des importateurs nets de produits alimentaires et leur production alimentaire sont fortement déficitaire, notamment en ce qui concerne les céréales et les huiles végétales. Environ 30 pour cent des céréales consommées dans la région sont importés. Entre 1997 et 1999, l’Algérie, l’Égypte, le Yémen et les États du golfe Persique ont importé plus de 50 pour cent du blé et de la farine de blé consommés, qui sont les aliments de base de ces pays. Dans d’autres, 30 pour cent du lait et des produits laitiers et 20 pour cent de la viande consommée viennent des importations. Environ 30 pour cent des produits agricoles et vivriers importés (notamment la viande, les produits laitiers, les céréales, le sucre, les matières grasses et les huiles) proviennent de l’Union européenne. La plupart des pays, notamment les pays non-producteurs de pétrole, ont du mal à générer suffisamment de recettes en devises pour financer leurs importations alimentaires.

23. Les fruits, les légumes et le poisson sont les principaux produits alimentaires d’exportation de la région. En 1997-2002, les exportations de fruits et légumes primaires ont représenté à eux seuls plus de 14 pour cent de la valeur totale des exportations agricoles de la région. Près de 70 pour cent des exportations agricoles des pays du bassin méditerranéen vont à l’heure actuelle à l’Union européenne. Environ 85 pour cent de ces exportations sont des fruits et légumes frais et transformés, de l’huile d’olive et du poisson.

24. Le poisson représente un produit alimentaire d’exportation de valeur élevée qui acquiert une importance croissante dans plusieurs pays de la région. Le Maroc est le principal exportateur de poisson des pays arabes et africains. Ses principaux clients sont l’Union européenne et le Japon. L’exportation de chaque kilogramme de produits halieutiques équivaut en valeur à l’importation d’environ quatre kilogrammes d’autres denrées alimentaires. En Mauritanie, les exportations de poisson se concentrent dans une large mesure sur une seule espèce – le poulpe commun. Les exportations sont destinées au Japon (40 pour cent) et à l’Union européenne (60 pour cent). Pour quelques États du golfe Persique, comme Oman, le poisson est la deuxième source la plus importante de recettes en devises après le pétrole.

A. COMMERCE INTRARÉGIONAL

25. Les pays ont ratifié un grand nombre d’accords commerciaux régionaux. Les plus importants sont les suivants: la Zone de libre-échange arabe (1996), l’Union du Maghreb arabe (1989) et le Conseil de coopération du golfe Persique (1981). En pratique, ces accords ne sont pas pleinement mis en oeuvre. C’est ainsi que, au titre des accords sur les échanges et le commerce de transit entre les pays arabes, la plupart des produits agricoles primaires sont admis en franchise, et les taux tarifaires sont sujets à une réduction de 50 pour cent pour les produits agricoles transformés comme le beurre, le fromage, le sucre, le sirop d’abricot, les oignons secs et l’ail. Toutefois, d’une manière générale, des taux tarifaires pleins sont appliqués et des démarches administratives complexes continuent à être nécessaires dans la plupart des pays.

26. Le commerce intrarégional des produits alimentaires et agricoles a une envergure limitée et porte pour l’essentiel sur deux ou trois pays et quelques produits. À l’exception d’Oman, la valeur des importations en provenance de l’intérieur de la région est inférieure à 10 pour cent dans la plupart des pays. Parmi les principaux obstacles et défis qui limitent les échanges intrarégionaux figurent le manque de diversité des produits agricoles, les obstacles non tarifaires, l’absence de services de soutien et la divergence des intérêts politiques et économiques.

B. COMMERCE AVEC LES PAYS DÉVELOPPÉS

27. La plupart des pays de la région, notamment ceux du bassin méditerranéen, ont noué des liens économiques solides avec les pays développés, en particulier l’Union européenne. L’importance relative du marché de l’UE pour les pays du bassin méditerranéen varie énormément d’un pays à l’autre. Plus de 50 pour cent des exportations du Proche-Orient à destination de l’UE viennent d’Égypte, du Maroc, de Syrie et de Tunisie. La composition des exportations agricoles vers l’UE diffère aussi largement. Les fruits et légumes, par exemple, prédominent dans les exportations à destination de l’UE de tous les pays du bassin méditerranéen à l’exception du Liban et de la Syrie. Le poisson est un produit important pour l’Algérie, les Émirats arabes unis, le Maroc, Oman, la Tunisie et le Yémen. La pomme de terre est un produit d’exportation majeur pour l’Égypte alors que l’huile d’olive n’est important que pour la Tunisie où elle représente plus de 55 pour cent des exportations agricoles vers l’UE.

28. Plusieurs pays de la région appartiennent au Partenariat euro-méditerranéen qui vise à créer une zone de libre-échange entre l’UE et les pays du bassin méditerranéen d’ici 2010. À ce jour, l’Algérie, l’Autorité palestinienne, Chypre, l’Égypte, la Jordanie, le Liban, Malte, le Maroc, la Tunisie et la Turquie ont signé des accords de partenariat. Les produits agricoles ne font pas partie des accords de libre-échange mais sont sujets à des normes commerciales préférentielles.

C. DÉFIS ET CONTRAINTES QUI LIMITENT LE COMMERCE DES PRODUITS ALIMENTAIRES ET AGRICOLES

29. Les coûts élevés qu’entraîne l’observation des normes établies par les accords SPS et OTC de l’OMC continuent à entraver l’expansion du marché. Cet obstacle est particulièrement grave pour les petites économies de la région. Pour exercer et défendre leurs droits, et remplir leurs obligations au titre de l’OMC, les pays doivent être en mesure de participer de manière plus efficace au système de l’OMC.

30. Les obstacles aux marchés des fruits et légumes de l’UE et d’ailleurs entravent les exportations en provenance de la région. Le Cycle d’Uruguay n’a pas apporté d’améliorations sensibles à l’accès au marché des fruits et légumes exportés par la région. La plupart des exportations de fruits et de légumes vers l’UE sont sujettes à des tarifs qui varient suivant le produit, la saison et le pays d’origine. Pendant les périodes où les importations concurrencent la production intérieure de l’UE, des tarifs plus élevés sont appliqués. La hausse de tarifs représente aussi un obstacle aux exportations de produits transformés venant de la région. Bien que des pays comme Chypre, l’Égypte, le Liban, la Turquie, les pays du Maghreb et d’autres aient un potentiel intéressant d’exportation de produits alimentaires transformés, ils se heurtent aux importants obstacles commerciaux de nombreux pays développés.

IV. IMPACT DES NORMES DE SÉCURITÉ SANITAIRE SUR LE COMMERCE DES PRODUITS ALIMENTAIRES ET AGRICOLES AU PROCHE-ORIENT

31. De nombreux pays de la région sont tenus, d’une part, de répondre de façon appropriée aux demandes d’aliments salubres et sains émanant de leurs ressortissants et doivent, d’autre part, se conformer aux conditions fixées par l’OMC pour l’élimination des obstacles techniques au commerce. D’une manière générale, la plupart des pays de la région ont du mal à planifier et mettre en oeuvre des politiques touchant la sécurité sanitaire des aliments et le commerce, à appliquer des accords internationaux pertinents, et à exploiter les possibilités d’échanges. Plusieurs pays éprouvent des difficultés à respecter les normes internationales de sécurité et de qualité en raison de leurs faibles capacités en matière de recherche scientifique, d’essais, de conformité et d’équivalence. De ce fait, un important défi que devront relever les pays de la région consiste dans le relèvement des normes SPS et OTC d’exportation pour les amener à des niveaux reconnus au plan international, et pour appliquer les normes souvent plus strictes établies par les pays développés.

32. Compte tenu de la forte dépendance de la région vis-à-vis des importations de produits alimentaires, la garantie de la sécurité sanitaire et de la qualité des aliments importés est une source de préoccupation. À cet égard, de nombreux pays s’inquiètent du dumping sur leurs marchés d’aliments de faible qualité, frelatés ou proches de la fin de la durée de conservation. C’est ainsi que près de 7 pour cent des expéditions à destination des Émirats arabes unis ont été refusés en 2001-2003 pour cause de non-conformité avec les normes locales de sécurité sanitaire des aliments. Au Bahreïn, en 2003, 379 tonnes de denrées alimentaires importées impropres à la consommation humaine (contamination par le plomb, le mercure et le cadmium ou des micro-organismes pathogènes) ont été séquestrées pour une période de six mois. Les importations d’aliments impropres à la consommation revêtent une plus grande importance depuis les problèmes de sécurité sanitaire apparus récemment en Europe et ailleurs (comme l’ESB et la présence de dioxine dans la viande et la volaille), de nombreux pays admettant leur capacité limitée de prendre des mesures appropriées pour protéger leurs consommateurs à cet égard.

33. Dans certains cas, des pays de la région ont imposé sur les produits importés des restrictions qui ont été contestées par d’autres en raison de leur manque de justification scientifique. Parmi ces restrictions commerciales figurent la nécessité d’une teneur maximale en eau de 5 pour cent pour la volaille congelée (considérée trop faible par quelques membres de l’OMC), l’interdiction d’importer du bœuf dont la teneur en matière grasse est supérieure à 7 pour cent, la date d’expiration pour certains produits, etc. Parfois les pays de la région ont appliqué un degré de tolérance zéro pour quelques aliments importés, disposition qui doit maintenant être remplacée par des mesures sanitaires fondées sur l’évaluation des risques. En outre, les informations sur les mesures sanitaires et phytosanitaires sont normalement insuffisantes et souvent indisponibles.

34. En ce qui concerne les exportations en provenance de la région, la plupart des pays manquent d’accès aux marchés qui les intéressent le plus. Les normes sanitaires et phytosanitaires appliquées par les pays développés ont représenté certains des obstacles les plus insurmontables aux exportations de produits alimentaires et agricoles. C’est ainsi que de janvier en juin 2001, 27 pour cent des exportations de produits alimentaires d’Égypte, de Jordanie, du Liban et de Syrie à destination des États-Unis ont été refusés par la Food and Drug Administration, en raison de leur non-conformité avec les mesures de sécurité du pays (malpropreté, contamination microbiologique, niveaux de résidus de pesticides ou d’additifs alimentaires supérieurs aux normes établies), et 58 pour cent pour des questions d’étiquetage.

35. Les interdictions frappant les produits ont déterminé d’importantes pertes économiques pour les pays exportateurs de la région. En septembre 1997, l’Union européenne a interdit l’accès aux pistaches iraniennes (la troisième source de recettes en devises, après le pétrole et les tapis), du fait de leur contenu élevé en aflatoxines. Le Japon a imposé une interdiction similaire sur les pistaches iraniennes en octobre 1998. À cause de ces restrictions, l’Iran a perdu sa part du marché japonais des pistaches (80 pour cent).

36. Les interdictions frappant les exportations de produits alimentaires de la région ont provoqué des difficultés considérables aux pays qui cherchaient à rentrer sur le marché et à regagner leurs parts de marché, jadis importantes, dans les pays développés. En septembre 1998, par exemple, à cause de leur contamination par le flétrissement bactérien, les exportations de pommes de terre égyptiennes vers l’Union européenne ont été stoppées à la suite d’une décision de cette dernière exigeant que les importations proviennent de zones exemptes de maladies certifiées. Suite à cette décision, l’UE a considéré comme contaminées toutes les importations venant de zones non déclarées exemptes de maladie. L’Égypte a donc été obligée de soumettre des dossiers prouvant que ses zones de production de pomme de terre étaient saines. Cependant, les autorités de la CE n’ont reconnu que 23 des 133 dossiers soumis par l’Égypte sous prétexte que la documentation était insuffisante (cartes illisibles et traduction insuffisante de l’Arabe) et seules cinq zones ont obtenu le statut de zone exempte de parasites.

37. Même si certains pays ont pu se conformer parfois aux mesures SPS, les ressources techniques et financières dont ils disposaient étaient souvent insuffisantes et les démarches nécessaires pour accéder à la conformité se sont avérées complexes et longues. C’est ainsi qu’en 1998, l’UE a interdit les importations de poisson et produits de la pêche des États du golfe Persique car ils ne respectaient pas les normes environnementales et sanitaires fondées sur l’analyse des risques aux points critiques. Les exportateurs ont soudain perdu leur part du marché, et les secteurs public et privé ont dû supporter des coûts élevés pour se conformer aux normes. L’adoption de règlements de gestion de la qualité basées sur l’analyse des risques aux points critiques et la démonstration de leur mise en application (y compris les modifications et la reconstruction nécessaires pour répondre aux exigences sanitaires, les nouveaux laboratoires d’essai, la formation du personnel, les honoraires des consultants, la documentation sur l’analyse des risques aux points critiques, etc.) sont souvent coûteuses et pourraient exiger l’appui des gouvernements. L’UE a levé l’interdiction frappant Oman en 1999, le Yémen en 2002 et les Émirats arabes unis en 2003, une fois que la sécurité sanitaire du poisson exporté a été pleinement certifiée.

38. La plupart des pays de la région n’ont pas encore harmonisé leurs normes nationales de sécurité sanitaire des aliments avec les normes internationales et la tâche s’avère complexe. C’est pourquoi ils sont obligés de démontrer l’équivalence de leurs mesures SPS avec celles des pays développés, ce qui entrave leur accès aux marchés des pays développés et accroît les coûts pour les exportateurs. La teneur et le niveau des normes internationales sont souvent inadaptés et/ou inapplicables pour les pays de la région car les procédures actuelles d’établissement des normes internationales ne tiennent pas suffisamment compte des besoins et de la situation particulière des pays en développement.

39. Les pays de la région devront se préparer à relever les nouveaux défis que présenteront les contrôles et la certification des importations et exportations de produits alimentaires, y compris les aliments irradiés, ceux provenant d’organismes génétiquement modifiés, la traçabilité, les aliments biologiques et les dispositions de l’évaluation scientifique des risques en cas de déviation par rapport aux normes internationales.

V. PROPOSITION DE PLAN D’ACTION VISANT À PROMOUVOIR LA SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS ET LE COMMERCE DES PRODUITS ALIMENTAIRES AU PROCHE-ORIENT

A. RECOMMANDATIONS AUX GOUVERNEMENTS

40. En fonction de ce qui précède, il est suggéré d’inviter les États membres de la région à:

    1. Sensibiliser les décideurs et les responsables des politiques à l’importance de la sécurité sanitaire et de la qualité des aliments pour la protection des consommateurs, les échanges de produits alimentaires et le développement économique. Il faudrait pour ce faire organiser des séminaires, des ateliers et des campagnes de communication à l’intention des hauts fonctionnaires, de l’industrie alimentaire, des médias et des associations de consommateurs;
    2. Examiner et améliorer le cadre institutionnel relatif à la sécurité sanitaire des aliments au niveau national, afin d’améliorer l’efficacité, minimiser les doubles emplois et clarifier les rôles et responsabilités des institutions pertinentes:
    3. Créer un solide cadre juridique et réglementaire favorisant la qualité et la sécurité sanitaire des aliments:
    4. Formuler une stratégie nationale de sécurité sanitaire des aliments sur une base holistique qui va « de l’étable à la table » et implique toutes les parties prenantes intéressées (fonctionnaires publics, industrie alimentaire, médias et associations de consommateurs);
    5. Moderniser, renforcer et maintenir la capacité des services d’inspection des aliments, afin de:
    6. Renforcer la capacité des laboratoires de contrôle des aliments d’appuyer les activités de suivi, de respect et de mise en application des normes entreprises par les services de contrôle des aliments par les mesures suivantes:
    7. Mettre en oeuvre des systèmes d’assurance de la qualité dans la filière de production et de la transformation alimentaires par les mesures suivantes:
    8. Renforcer les compétences scientifiques et techniques nationales:
    9. Améliorer la participation aux travaux de la Commission du Codex Alimentarius:
    10. Permettre aux producteurs et à l’industrie alimentaires de tirer parti des débouchés internationaux et régionaux:
    11. Utiliser les groupements régionaux et sous-régionaux existants pour parvenir à un consensus sur les questions relatives au commerce des produits agricoles et alimentaires, en vue d’accroître l’attention portée aux questions commerciales régionales liées à la sécurité sanitaire des aliments, d’appuyer les efforts visant la poursuite de cas d’injustice devant le Comité SPS de l’OMC et de renforcer le pouvoir de négociation lors des négociations commerciales mondiales.
    12. Renforcer les capacités de surveillance nationale des maladies d’origine alimentaire et créer un système et un mécanisme d’alerte rapide pour communiquer avec les autorités chargées du contrôle des aliments et pour appliquer les mesures correctives nécessaires.
    13. Au niveau régional:

B. MESURES RECOMMANDÉES À LA FAO

41. Dans les limites des ressources financières et humaines disponibles, la FAO, en collaboration avec l’OMS, est invitée à renforcer la capacité des pays de gérer la sécurité sanitaire des aliments par la fourniture d’une assistance technique appropriée, selon les besoins, aux niveaux régional et sous-régional, et à contribuer à la mise en oeuvre du plan d’action décrit plus haut.

 

Annexe 1

Pays de la Région du Proche-Orient membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et d’Organes Internationaux d’Etablissement des Normes

 

Organisation mondiale du commerce (OMC)

Codex Alimentarius

Office international des épizooties
(OIE)

Convention internationale pour la protection des végétaux
(CIPV)

Afghanistan

-

-

X

-

Algérie

Admission demandée1

X

X

X

Arabie saoudite

Admission demandée1

X

X

X

Azerbaïdjan

Admission demandée1

-

X

X

Bahreïn

X

X

X

X

Chypre

X

X

X

X

Djibouti

X

-

X

-

Égypte

X

X

X

X

Émirats arabes unis

X

X

X

X

Iran

Demande présentée2

X

X

X

Iraq

-

X

X

X

Jamahiriya arabe libyenne

Demande présentée2

X

X

X

Jordanie

X

X

X

X

Kazakhstan

Admission demandée1

X

X

-

Kirghizistan

X

Koweït

X

X

X

-

Liban

Admission demandée1

X

X

X

Malte

X

X

X

X

Maroc

X

X

X

X

Mauritanie

X

X

X

X

Oman

X

X

X

X

Ouzbékistan

Admission demandée1

-

-

-

Pakistan

X

X

X

X

Qatar

X

X

X

-

République arabe syrienne

Demande présentée2

X

X

-

Somalie

-

-

X

-

Soudan

Admission demandée1

X

X

X

Tadjikistan

Admission demandée1

-

X

-

Tunisie

X

X

X

X

Turkménistan

-

-

X

-

Turquie

X

X

X

X

Yémen

Admission demandée1

X

X

X

Total des membres

16

22

28

20

 

1 Demande d’admission à l’OMC en cours de négociation.

2 La demande d’admission a été présentée, mais les groupes de travail sur les demandes n’ont pas encore été établis.

Source: OMC 24 mars 2003. Membership in WTO and International Standard-Setting Bodies. Committee on Sanitary and PhytoSanitary Measures. G/SPS/GEN/49/Rev.5 http://www.wto.org/indexfr.htm

 

Références

Al-Mashjary, M. 2003. Presentation to METAP High Level Meeting on Economic Tools for Environmental Sustainability (Yémen, 27 juin 2003)
http://lnweb18.worldbank.org/mna/mena.nsf/Attachments/Hi+Level+Mashjary+27+June/$File/27+June-f-Mohammed+Al-Mashjary-Fish+PPT.pdf

Bahrain Economic Development Board. 2003. Contaminated Food Items Seized. Communiqué de presse, 21 septembre 2003.
http://biz.bahrainedb.com/NewsIn.asp?Article=57714&Sn=9

Hassib, M., Ragab, H. et Hachem, F. 2003. Trade, Market Access and Food Safety in the Near East Region. Document présenté à l’atelier technique FAO-IsDB sur les programmes régionaux pour la sécurité alimentaire : vers la sécurité alimentaire durable et la réduction de la pauvreté (Djeddah, Arabie saoudite, 8-9 octobre 2003)

FAO. 2003. Trade Liberalization Policies, Intra-Regional Trade and Opportunities for Sustainable Agricultural Development. Document présenté à la 26e Conférence régionale pour le Proche-Orient (Téhéran, République islamique d’Iran, 9-13 mars 2002)

FAO. 2003. Food Control Systems: Modern Approaches in the Near East Region. Rapport d’un atelier FAO/OMS (Le Caire, Égypte, 19 janvier 2003)

FAO. 2003. WTO Agreement on Agriculture: The Implementation Experience. Case Study on Egypt http://www.fao.org/DOCREP/005/Y4632E/y4632e0c.htm#bm12

FAO/WHO. 2001. Rapport d’un atelier régional FAO/OMS/ILSI sur l’analyse des risques: évaluation de l’exposition (Le Caire, Égypte, 27-28 janvier 2001)

Gelders, S. Microbiological Contamination of Foods – Current Status and Need for Action. Presentation to the AFC/WHO/FAO Inter-country Workshop on Emerging Food safety Issues and Consumer Protection (Amman, Jordanie, 28-30 octobre 2001)

INFOSAMAK/FAO. 2003. Rapport sur les présentations et les sessions de débats à la Consultation d’experts sur le commerce international du poisson et la sécurité alimentaire (Casablanca, Maroc, 27-30 janvier 2003) http://www.tradefoodfish.org/articles.php?pageid=art&article=article03

OMS. 1999. Rapport technique sur la sécurité sanitaire des aliments présenté au Comité régional pour la Méditerranée orientale (juillet 1999)
http://www.emro.who.int/nfs/FoodSafety-TechnicalPaper.pdf