Alors que l'agroécologie devient une réalité concrète pour un nombre croissant de producteurs et de communautés à travers le monde, elle suscite également des discussions significatives sur le besoin urgent de transformation durable des systèmes alimentaires dans les débats internationaux. Les origines de l'agroécologie peuvent varier en fonction de ses différentes dimensions, en tant que science, mouvement social et pratique. Cependant, au cours des dernières années, ces trois dimensions n'ont cessé de gagner en importance, atteignant un point culminant en 2021.

Exactement sept ans après que la FAO ait organisé le Premier symposium international sur l'agroécologie - ouvrant un espace neutre pour discuter du potentiel de l'agroécologie à atteindre de multiples objectifs de développement durable (ODD), le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui s'est tenu en septembre 2021, a mis en évidence l'agroécologie comme une voie importante pour stimuler les solutions basées sur la nature pour une agriculture et une production alimentaire durables. 

Des engagements collectifs ont permis de placer l'agroécologie en bonne place dans les discussions formelles et les décisions prises par le Sommet. Tout a commencé lorsque le sommet a lancé un appel aux parties prenantes pour qu'elles soumettent ce qui serait appelé des "solutions qui changent la donne" pour la transformation des systèmes alimentaires. Entre décembre 2020 et mai 2021, un certain nombre de forums publics, de consultations en ligne et d'appels à soumissions ont été organisés par les cinq filières d'action du Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires, ce qui a donné lieu à plus de 2 200 idées et soumissions. Parmi celles-ci, plus de 80 soumissions faisaient référence à l'agroécologie et à l'agriculture régénérative comme solution prometteuse. Ces idées ont été évaluées et consolidées en un nombre plus restreint de groupes de solutions.

Ce processus a abouti à la création du groupe de solutions " Transformation par l'agroécologie et l'agriculture régénérative ", codirigé par Emile Frison (IPES-Food), Esther Penunia (Asian Farmer Association for Sustainable Rural Development) et Fergus Sinclair (CIFOR-ICRAF et Plateforme de partenariat pour la transformation agroécologique). Le groupe a proposé l'agroécologie et l'agriculture régénérative comme la voie la plus appropriée pour réaliser une transformation ambitieuse des systèmes alimentaires, grâce à une large inclusion et collaboration des différentes parties prenantes. Passant des idées à l'action, le groupe a lancé une promesse de créer une coalition de volontaires pour la Transformation des systèmes alimentaires par l'agroécologie ( la Coalition). Parallèlement, plus de 1 200 signataires (dont des pays, des organisations, des ONG, des groupes d'agriculteurs et des experts) se sont engagés à proposer un cadre unificateur pour la transformation des systèmes alimentaires basé sur les 13 principes de l'agroécologie énoncés dans le rapport du Groupe d'experts de haut niveau (HLPE 2019), qui reprennent les 10 éléments de l'agroécologie adoptés par la FAO.

La Coalition émergente a contribué à donner le ton des discussions qui ont précédé le Sommet. En fait, le Pré-sommet qui s'est tenu à Rome en juillet 2021 a mis en avant la coalition sur l'agroécologie parmi les sept coalitions exceptionnelles qui joueraient un rôle de premier plan dans les discussions et les décisions du sommet. Avant le Sommet, les dirigeants de la Coalition ont participé à un certain nombre de discussions, d'événements et de dialogues multipartites au cours desquels différents acteurs du monde entier ont exprimé leur soutien, leur intérêt et leur engagement à l'égard de la portée de la Coalition et de son rôle important dans la mise en œuvre de la transformation tant attendue du système alimentaire.

Le jeudi 23 septembre 2021, la société civile, les agriculteurs, les jeunes, les peuples autochtones, les États membres de la FAO et d'innombrables acteurs ont rejoint le Sommet. Plus de 51 000 personnes, originaires de 193 pays, ont assisté au sommet, toutes prêtes à s'attaquer à la faim dans le monde, au changement climatique et à la perte de biodiversité pour une véritable transformation des systèmes alimentaires. La Coalition pour l'agroécologie a été mise en avant par le Sommet comme une approche importante pour la mise en œuvre du deuxième domaine d'action "Favoriser les solutions de production fondées sur la nature" afin de rendre les systèmes alimentaires plus durables et de profiter simultanément aux populations, à la planète et à notre prospérité commune.

La Coalition vise à catalyser une action collaborative autour des cadres et instruments existants importants pour développer l'agroécologie sur le terrain. En termes de politiques, la mise en œuvre des Recommandations politiques du CSA récemment approuvées sur les approches agroécologiques et autres approches novatrices pour une agriculture et des systèmes alimentaires durables qui renforcent la sécurité alimentaire et la nutrition, est l'une des actions prioritaires, ainsi que la garantie de la cohérence des politiques dans les différents secteurs. Un autre domaine prioritaire qui reflète l'un des éléments distinctifs de l'agroécologie concerne la co-création de connaissances et la recherche participative. Il s'agit de "promouvoir l'innovation locale, par une approche transdisciplinaire et participative entre les scientifiques, les agriculteurs, les populations autochtones et les autres parties prenantes des systèmes alimentaires". À cet égard, l'année 2021 a également vu la mise en œuvre à grande échelle de l'Outil d'évaluation des performances de l'agroécologie (TAPE) et la création de la Plateforme de partenariat pour la transformation agroécologique, qui vise à combler les principales lacunes en matière de connaissances et de mise en œuvre afin de soutenir largement les transitions agroécologiques.

À l'heure actuelle, vingt-six pays ont officiellement rejoint la Coalition (onze d'Afrique, six d'Europe, quatre d'Asie, trois d'Amérique latine et des Caraïbes et deux du Proche-Orient) ainsi que l'Union africaine et trente-cinq organisations - dont la FAO, le FIDA, le PAM, le PNUE, le PNUD ainsi que des organisations d'agriculteurs, de la société civile, philanthropiques, de recherche et de peuples autochtones, exprimant ainsi un haut niveau d'engagement et d'intérêt pour le renforcement de la collaboration en vue d'accélérer les transformations du système alimentaire par l'agroécologie.

La Coalition pour la transformation des systèmes alimentaires par l'agroécologie est en train de définir son modus operandi et fonctionnera en relation avec le Comité pour la sécurité alimentaire mondiale (CSA) et son Groupe d'experts de haut niveau (HLPE).

À l'avenir, d'importantes synergies peuvent être créées entre la Coalition pour l'agroécologie et l’Initiative de passage à l’échelle supérieure de l’agroécologie, rassemblant une communauté croissante de partenaires et de parties prenantes qui ont des rôles essentiels à jouer pour accélérer la réalisation de l'Agenda 2030 et construire des systèmes alimentaires durables pour tous.