Dans cet article, les auteurs utilisent les idées conceptuelles de la théorie de l'acteur-réseau (ANT) pour explorer le rôle des systèmes d'innovation agroécologique (AeIS) dans la reconfiguration des pratiques agricoles vers la durabilité. Les AeIS sont des réseaux d'acteurs impliquant une diversité d'individus (par exemple, des agriculteurs, des commerçants, des experts) et d'organisations (par exemple, des coopératives, des agences de développement rural, des institutions d'enseignement et de recherche) qui intègrent les principes et les pratiques de l'agroécologie pour améliorer la résilience des agroécosystèmes. Leur composition et leur structure influent sur la manière dont les différents agents du changement interagissent, ainsi que sur la façon dont ils accèdent, échangent et utilisent les connaissances, tout en favorisant l'adoption de technologies spécifiques. L'étude documente sept AeIS qui ont été actives entre 2005 et 2020 dans les hautes terres du nord du Laos. Dans le cadre de ces initiatives, une recherche-action a été menée pour comprendre les processus qui sous-tendent diverses innovations techniques, organisationnelles et institutionnelles visant à favoriser une transition agroécologique. En s'appuyant sur une analyse comparative des AeIS, l'analyse considère comment l'agence a été distribuée entre les collectifs au fur et à mesure de leur réorganisation dans le temps. La discussion souligne l'importance de configurer, d'élargir et d'entretenir des espaces dans lesquels les acteurs sont habilités à s'ajuster et à s'adapter, ainsi qu'à penser et à agir collectivement dans la complexité. Enfin, ce qui compte dans l'innovation, c'est le processus de mise en réseau sous-jacent lui-même, c'est-à-dire le processus par lequel tous les acteurs de l'AeIS interagissent et échangent. Les changements dans les processus de mise en réseau s'accompagnent d'une évolution de la conception de la connaissance. En passant de la connaissance au savoir (c'est-à-dire au savoir en devenir), les AeIS ne promeuvent plus seulement des produits ou des technologies, mais aussi l'intelligence collective fondée sur une éthique du soin.