FAO au Burundi

Le projet sur l’aviculture de la FAO a transformé la vie des jeunes chômeurs et des ménages vulnérables de la province Ngozi

Noviris Nsabimana, diplômé de l’enseignement secondaire technique, âgé de 25 ans et bénéficiaire du projet ASTF
28/06/2017

Ce constant global est ressorti
d’une interview avec le Représentant de la FAO, Mohamed Hama Garba(H.G), sur
les actions et les succès du projet  « Promouvoir la diversification
agricole pour réduire la pauvreté, combattre la malnutrition et renforcer les opportunités
d’emplois pour les jeunes en Afrique de l’est » (ASTF/GCP/SFE/001/MUL.
Dans cet interview compilé par la Cellule de communication de la FAO, le Représentant
de la FAO au Burundi décrit les avantages tirés de la vente et de la
consommation des œufs issus des poules offertes par la FAO dans la province de
Ngozi reconnue pour son taux de malnutrition le plus élevé du pays

 

Q. Qui sont les bénéficiaires de ce projet et quelle est sa zone d’action et sa durée de mise en œuvre :

H.G. Le projet est venu en appui à 25 jeunes chômeurs ruraux diplômés, sans emplois. Il a aussi appuyé 100 ménages vulnérables. Les deux catégories de bénéficiaires avaient été identifiées dans les communes Gashikanwa et Ngozi de la province de Ngozi. Le projet ASTF est mis en œuvre pour la période 2014 à 2017. Il couvre les Communes Gashikanwa et Ngozi de la province Ngozi. Il a été mis en œuvre dans un contexte ou la province de Ngozi de la province Ngozi habitant les bénéficiaires enregistrait un taux de 71.2 % d’enfants de moins de cinq ans souffrant de la malnutrition chronique, le taux le plus élevé dans le pays.

Q. Quelles sont les sources de financement de ce projet et à quoi vise-t-il?

H.M.  Le Projet est appuyé  par le Bureau Régional de la FAO à Addis Abeba (FAO/SFE) avec le financement du Fonds Fudiciaire de Solidarité Africaine (ASTF). Décaissé dans le cadre de la promotion de la coopération Sud-Sud, le Fonds est une initiative des Présidents Africains qui a été retenue lors du sommet de Malabo de 2012. Il est venu montrer que les africains peuvent aider d’autres africains.  Spécifiquement, le fond a pour objectif principal de renforcer la sécurité alimentaire à travers le continent en aidant les pays et leurs organisations régionales à éradiquer la faim et la malnutrition, à éliminer la pauvreté rurale et à gérer les ressources naturelles de façon durable. Le fonds a déjà alloué 34,5 millions de dollars à 15 programmes régionaux et projets nationaux en Afrique. Le montant alloué au Burundi est de 800 775 Dollars. La Guinée Equatoriale et l’Angola sont les principaux contributeurs de ce projet. Le projet couvre quatre pays d’Afrique de l’Est : le Kenya, l’Ouganda, le Burundi et le Rwanda. Le projet vise essentiellement à promouvoir l’emploi des jeunes, à améliorer le statut nutritionnel et à fournir un supplément de revenus aux ménages vulnérables à travers la production des œufs et du poisson : aliments à haute valeur nutritive par excellence. Ainsi, le projet intervient à travers l’aviculture pour le Burundi et le Rwanda. Tandis que la pisciculture a été l’option du projet pour le Kenya et l’Ouganda. ? Objectif+ domaine de chaque pays)

Q. Quelles ont été les mécanismes adoptés pour permettre un bon entretien des poulaillers offerts aux bénéficiaires ?

H.G. Les jeunes chômeurs ont reçu un kit d’élevage avicole constitué principalement d’un lot de 330 poules pondeuses par individu. Les ménages vulnérables ont, quant eux, ont bénéficié de l’installation de petites fermettes avicoles et ont reçu 33 poules pondeuses chacun. Pour bien réussir, les bénéficiaires impliquent les membres de leurs familles dans la gestion de leurs poulaillers. A part la construction des poulaillers et la distribution des poules aux bénéficiaires, le projet ASTF a apporté un appui en aliments en équipement pour quatre mois pour les préparer à, eux-mêmes, prendre en charge leurs poulaillers. Les poulaillers sont bien clôturés pour notamment éviter les regards des passants et des vols éventuels. Le bénéficiaire et sa famille veillent à ce que l’eau et les aliments ne manquent pas. Afin de bien valoriser ces investissements et les rendre plus professionnels, la FAO a organisé des séances de formation en technique d’élevage des poules pondeuses. A cet effet, notre organisation  a dû recourir aux prestataires de services pour assurer la formation, l’encadrement et un suivi de proximité. Pour les unités commerciales de jeunes bénéficiaires, chaque poulailler est doté d’un magasin pour le stockage des aliments et de l’équipement de travail, notamment de collecte et de conservation des œufs.

Q : Peux-t-on affirmer que le projet ASTF a été un véritable succès ?

H.G. Oui, en effet, le projet est sans nul doute un réel succès. Cela est d’ailleurs témoigné par les jeunes bénéficiaires. Le projet a significativement transformé leur vie dans la mesure où il a contribué à améliorer à réduire leur pauvreté. Les jeunes bénéficiaires vont avoir de l’emploi à plein temps. Ils rapportent qu’ils donnent eux même de l’emploi aux autres jeunes. Ils ont maintenant un tel pouvoir d’achat qu’ils peuvent accomplir des activités nécessitant de grands coûts. En effet, ils se sont achetés des terrains agricoles qu’ils exploitent grâce aux revenus issus de la vente des œufs et au fumier obtenu de leur élevage. Certains s’achètent des parcelles sur lesquelles ils érigent des maisons en matériaux durables. Il y en a qui parviennent à organiser leurs mariages grâce à ces revenus. D’autres se raccordent au réseau d’eau de la REGIDESO. Ils installent des panneaux solaires pour éclairer les poulaillers et leurs habitations et pour charger des téléphones y compris ceux de leurs voisins. Ils supportent avec succès les frais de scolarité de leurs frères et sœurs. Ceux qui veulent commencer ou continuer les études universitaires  se payent eux-mêmes le minerval. Les bénéficiaires donnent des œufs aux malades et aux autres personnes vulnérables de leurs localités. Ils adoptent notamment la polyculture sur leur exploitation en initiant  un élevage bovin à proximité de leurs poulaillers. Ils installèrent des cultures fourragères et des pâturages naturels. Les bénéficiaires plus zélés font eux-mêmes de l’affouragement en complément au reste de l’alimentation de leurs volailles.

Initialement vulnérables, les ménages, surtout les femmes chefs de famille, déclarent qu’ils  ont maintenant une occupation. Leur production d’œufs leur permet d’avoir un revenu complémentaire et d’améliorer leur ration alimentaire par la consommation des œufs. La fiente de  poules, qu’ils jugent de loin plus performante que les autres sortes de fumier, leur permet de fertiliser leurs champs et surtout installer de très prospères champs, des potagers pour produire des légumes et des fruits pour la consommation et la vente. Pour cette Saison B, les jeunes bénéficiaires rapportent avoir obtenu d’importantes quantités de récoltes notamment de haricots, d’arachide et de pomme de terre.  Ils font même l’extension des champs existants, notamment les bananerais. Ils investissent leurs dividendes aussi dans le reboisement des terres familiales.

Il y en a qui se sont achetés des motos  pour assurer du transport rémunéré et pouvoir de se déplacer eux-mêmes notamment du lieu de travail à leurs exploitation. En cas de chute du taux de ponte, les bénéficiaires ne  se précipitent pas à liquider leurs poules mais fidélisent plutôt leurs clients et réinjectent leurs bénéfices dans l’aviculture. Les bénéficiaires ont maintenant la capacité de satisfaire aux besoins essentiels tels que l’habillement, le matériel et les frais de  scolarité de leurs enfants, l’assurance d’une hygiène décente, et j’en passe. Les poulaillers offerts par la FAO constituent, au juste, une sorte d’ascenseur social et un regain de dignité dans leur communauté grâce à un accès au capital due à l’enthousiasme du projet et à la gestion rationnelle d’élevage.

Q. Auriez-vous des chiffres illustratifs de ces succès ?

H.G. En guise d’exemple, pour le groupe de jeunes bénéficiaires, la production cumulée des œufs est estimé à plus de 1 million cinq cent œufs correspondant générant un revenu brut de plus de 212 000 dollars. Cette production a généré un bénéfice net de  près de 72 000 dollars, le bénéfice de chacun revenant à autour de 239 dollars par mois. En pleine production, environ 30,000 œufs par semaine étaient vendus aux marchés de Bujumbura, pendant que la province de Ngozi et ses environs achetaient autour de 10 000 œufs.  Les jeunes aviculteurs ont tous utilisé la fiente de poules, esquivant l’engrais chimique dont le coût est de près d’un dollar par kilo. Dans les 10 derniers mois, environs 400 tonnes de fumier de poulailler engrais ont été produits par ces jeunes bénéficiaires.

 Pour le groupe des ménages vulnérables représentés essentiellement par les femmes, le revenu issu de la vente des œufs est estimé à 30 dollars par mois. Environs 60 œufs sont consommés par chaque ménage  par mois.

 Q : Quels sont les défis et les perspectives pour les bénéficiaires ?

 H.G. Pour la plupart des bénéficiaires, les perspectives sont orientés vers l’engouement de poursuive l’élevage avicole.  Ils projettent repeupler leurs poulaillers, s’il arrive que ces poules pondeuses perdent leurs performances. Certains projettent doubler les effectifs de leurs volailles à travers l’installation d’un deuxième poulailler. Les femmes bénéficiaires du projet envisagent de se procurer des abreuvoirs et des mangeoires additionnels pour faire l’extension de leurs poulaillers. Elles projettent même acheter des bovins, car remarquant que leurs poulaillers deviennent de plus en plus rentables. Les bénéficiaires  envisagent de fabriquer, eux-mêmes les aliments pour leurs volailles afin de les utiliser pour leur élevage et aussi les vendre aux autres éleveurs pour gagner plus d’argent à côté de celui tiré des œufs. Leurs poulaillers redonnent espoir non seulement aux bénéficiaires directs mais aussi à l’administration communale.

 Les défis sont principalement liés à la chute de la production qui peut être causée par l’âge des poules d’une part ou à d’éventuelles erreurs d’alimentation suite aux retards dans l’approvisionnement en aliments de qualité d’autre part. D’autres défis sont en rapport avec la chute du coût d’un œuf consécutive aux fluctuations monétaires et surtout au faible pouvoir du consommateur. Les organisations d’aviculteurs ont besoin de plus de cohésion. La préparation pour un nouveau  cycle de production est un autre défis car pouvant requérir des moyens inexistants pour certains. Il y a aussi des cas de jalousie par des non bénéficiaires qui s’adonnent à voler ou empoisonner les poules des bénéficiaires.  

 Q. Quelles sont les stratégies adoptées pour la pérennisation du projet ?

 H.G. Les bénéficiaires démontrent leur capacité de gérer leurs poulaillers d’une façon autonome. L’apprentissage des techniques simples de production locale des aliments des poules, la sensibilisation sur  la santé et l’hygiène des poules  et la consommation des œufs constituent, par exemple, une des garanties de pérennisation des poulaillers reçus. En outre, les bénéficiaires sont organisés en associations et en coopératives de production avicole et sont déjà en contacts avec des organisations  professionnelles, notamment les producteurs d’intrants,  et avec les caisses d’épargne et de crédit ainsi qu’aux consommateurs.