FAO au Burundi

La CEEAC se mobilise pour promouvoir des systèmes alimentaires plus résilients dans les Etats membres face aux chocs et catastrophes

Partage d’expériences par M. PISSANG TCHANGAÏ Dadémanao, Représentant de la FAO au Burundi
29/09/2023

Avec la facilitation du Mécanisme africain d’évaluation des pairs (MAEP) et la Commission de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC), la FAO en collaboration avec d’autres acteurs de la résilience des systèmes alimentaires a partagé, dans un atelier régional de deux jours - du 26 au 27 septembres 2023 à Bujumbura -   leurs expériences sur la résilience des systèmes alimentaires des Etats. Le but ultime était de mobiliser et renforcer l’engagement politiques des acteurs étatiques et non étatiques en matière de la résilience urbaine et la résilience des systèmes alimentaires des Etats dans un contexte de changement climatique.

« Nous sommes dans une région   en tête, en termes de pourcentage de la population touchée par la faim (soit 42%) », a tenu de rappeler M. PISSANG TCHANGAÏ Dadémanao, Représentant de la FAO au Burundi.  En 2022, on estime que la faim a touché environ 735 millions de personnes dans le monde, soit 122 millions d’augmentation comparé à 2019, avant la pandémie. De ces 735 millions, 282 millions sont en Afrique avec 7,5 millions en Afrique australe ; 19,5 millions en Afrique du Nord ; 57 millions en Afrique centrale ; 62,8 millions en Afrique de l’Ouest et 134,6 millions en Afrique de l’Est.

M. PISSANG TCHANGAÏ, souligne que les principaux moteurs qui sapent la résilience des pays et leur capacité à répondre aux chocs alimentaires sont bien connus. Il cite notamment les chocs économiques qui ont dépassé les conflits en tant que principal facteur d'insécurité alimentaire aiguë et de malnutrition dans les crises alimentaires majeures, les conflits et l’insécurité à la lumière de ceux en République démocratique du Congo et la République centrafricaine, les évènements climatiques extrêmes en l’occurrence la sécheresse, les chocs hydriques, les inondations et éboulements, le criquet pèlerin, et les épidémies/épizooties, etc.

En effet, une série de chocs et de défis causés par des conflits, la variabilité du climat, les maladies, catastrophes naturelles, …, ayant une incidence directe sur les systèmes alimentaires des pays mettent en exergue la vulnérabilité des Etats et leur faiblesse à faire face à ces aléas. « Les catastrophes ont un impact direct sur les systèmes alimentaires et sur toute la chaine de production », souligne SGHAIR M’Bareck SAID, Haut Représentant de l’UA pour les Grands Lacs.

Evoquant le rapport mondial sur les crises alimentaires (GRFC) 2023, M. Ferdinand Bashikako, Secrétaire permanent au Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération au Développement a souligné, à l’ouverture des activités dudit atelier, que les effets combinés de la pandémie de COVID-19, des conflits et l’impact de changements climatique ont plongé de nombreux pays et régions du continent africain dans une crise alimentaire sans nom.

« Un système alimentaire résilient est capable de résister aux perturbations et de s’en remettre de manière à garantir un approvisionnement suffisant en nourriture acceptable et accessible pour tous », estime l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA).

La résilience étant à la fois le processus et le résultat ou l’évolution de l’expérience et des circonstances, Mlle Catherine KAMAU technicienne à l’AGRA indique que le développement des capacités pour construire des systèmes alimentaires résilients doit être guidé par 7 principes fondamentaux : « Appropriation et leadership du pays, alignement sur les priorités et les besoins nationaux, utilisation des systèmes et expertises nationaux, approche localisée qui n'est pas une approche universelle, approche multi-niveaux, responsabilité mutuelle et  harmonisation de l'action et des partenariats ».

Au niveau national, quelques approches sont actuellement utilisées: « la résilience du système semencier qui implique la réforme politique pour la libéralisation du marché des semences conduisant à améliorer la recherche, la production et la disponibilité sur le marché des semences à haut rendement ; le système de marché intégré pour la résilience ; une agriculture durable pour la résilience (soutenir l’engagement des agriculteurs et des communautés dans des pratiques agricoles régénératrices) ; la capacité politique et étatique en matière de résilience (soutien aux réformes politiques) et la science et données pour la résilience (utilisation de la recherche à partir de données locales/nationalisées pour en assurer l'exactitude et la pertinence)».

Ces expériences ont été partagées avec les points focaux nationaux en charge de la réduction des risques de catastrophes des 11 Etats membres de la CEEAC, les membres du groupe de travail technique sur la résilience des Etats face aux chocs et catastrophes et le Département de l’environnement durable et de l’économie bleue de l’Union Africaine ont pris part aux travaux de l’atelier.  

Les efforts de la FAO en matière de sécurité alimentaire en Afrique

Le Cadre stratégique de la FAO 2022-2031 guide ses interventions, dans le monde autant qu’en Afrique, pour assurer un avenir meilleur pour tous.

Cette stratégie fonde sur l’émergence d’une nouvelle vision de l’agriculture. Le Cadre stratégique est axé sur la transition vers des systèmes agroalimentaires plus efficaces, plus inclusifs, plus résilients et plus durables qui permettent d’apporter des améliorations en matière de production, de nutrition, d’environnement et de conditions de vie en ne laissant personne de côté.

Chacun des objectifs du cadre sont soutenus par des Programmes prioritaires autour desquels s’alignent les Cadres de Programmation Pays (CPP), eux-mêmes dérivés du Cadre de Coopération pour le Développement durable du Système des Nations Unies (UNSDCF).

La FAO dispose d’une division en charge des urgences dont le centre des opérations qui est basée au siège, mais aussi des équipes décentralisées aux niveaux régional, sous régional et de certains pays. Ce département se distingue par une forte capacité de plaidoyer, de mobilisation des ressources et des interventions humanitaires et rapides lors des crises et chocs : sécheresse, invasion acridienne et autres.

Les apports de la FAO dans la construction des systèmes alimentaires résilients aux chocs intègrent aussi des renforcements de capacités et la promotion des approches : Système d’alerte précoce, l’approche « Une Seule Santé », la production des données (Rapports IPC et Cartographies), etc.

Des initiatives innovatrices sont initiées par la FAO pour renforcer la sécurité alimentaire des Etats.

L’Initiative « Main dans la main » lancée en 2019, qui constitue l’un des principaux domaines de programme prioritaires de l’Organisation et qui appuie la mise en œuvre de programmes ambitieux menés à l’échelle nationale aux fins d’accélérer la transformation des systèmes agroalimentaires.

L’initiative « Un pays, Un Produit (OCOP : One country, One Product). OCOP s'attaquera à cinq grands défis mondiaux, notamment : Accroître la productivité et assurer une alimentation saine, réduire les pertes et le gaspillage alimentaires et protéger la biodiversité, économiser l'eau et optimiser l'utilisation des terres, minimiser les intrants chimiques agricoles et Atténuer les changements climatiques et s'y adapter. Un des objectifs majeurs de l’OCOP est de faciliter le développement de chaînes de valeur durables et inclusives pour l'agriculture familiale et les petits exploitants en plaçant le modèle de production familiale au centre des interventions.

L’Initiative « Villes Vertes » :  En septembre 2020, la FAO a lancé son Initiative des villes vertes visant à améliorer les moyens de subsistance et le bien-être des populations urbaines et périurbaines dans au moins 100 villes du monde au cours des trois prochaines années, l'objectif étant que 1000 villes y adhèrent d'ici 2030.  Cette initiative vise, entre autres, assurer l’accès à un environnement sain et à une alimentation saine provenant de systèmes agroalimentaires durables, en augmentant la disponibilité d’espaces verts grâce à la foresterie urbaine et périurbaine.

Des perspectives d’action

Dans la bataille d’assurer la sécurité alimentaire des Etats, bien d’axes se dégagent auxquels il faut orienter les actions. M. PISSANG TCHANGAÏ Dadémanao, Représentant de la FAO au Burundi évoque entre autres l’importance de l’approche « Une seule santé » pour faire face à l’émergence de nouveaux réservoirs d’agents zoonotiques, tout comme il est crucial de renforcer l’accès à l’assurance et au financement agricoles ; la mise en place des mesures de protection sociale bien ciblées pour aider les plus vulnérables notamment des programmes de transferts monétaires et de vivres-contre-travail ; La constitution de stocks alimentaires stratégiques; la promotion des investissements offrant les meilleurs retours et veiller à limiter les arbitrages ; la facilitation de l’accès des petits exploitants vivant dans les pays les moins avancés à la technologie, aux marchés, à la diversification des cultures, aux financements, ainsi qu’à des infrastructures résilientes ; investissement dans les énergies renouvelables et le numérique et la lutter contre les disparités entre les hommes et les femmes.

En conclusion, M. PISSANG TCHANGAÏ s’est appuyé sur la déclaration de l’Économiste en chef de la FAO, qui estime que dans le domaine de la sécurité alimentaire, un nouveau contrat social est nécessaire pour guider notre vie commune sur la planète. Ce contrat social a un prérequis : « Nous devons travailler ensemble pour renforcer la résilience afin d’assurer le respect du droit universel à l’alimentation pour tous et nous donner les moyens d’y arriver ».