Directeur général QU Dongyu

Trente-troisième session de la Conférence régionale de la FAO pour l’Europe Allocution d’ouverture de M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO

de M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO

10/05/2022

Trente-troisième session de la Conférence régionale de la FAO pour l’Europe

Allocution d’ouverture

de

M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO

Texte avant allocution

10 mai 2022

 

Monsieur le Ministre de l’agriculture et du développement rural de la Pologne, Président de la Conférence régionale,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs,

 

1. Je voudrais remercier le Gouvernement et le peuple de Pologne d’accueillir cette session de la Conférence régionale.

 

2. Nous nous trouvons à un tournant, et la région Europe et Asie centrale est confrontée aux défis redoutables de la sécurité alimentaire et nutritionnelle.

 

3. Les pays de la région ont joué un rôle décisif s’agissant d’aider à maîtriser la pandémie de covid-19 et de limiter ses effets dommageables sur l’économie et l’agriculture.

 

4. Votre réussite dépasse les frontières de la région, et vous devez poursuivre cet effort.

 

5. Vos modalités de développement et de gestion de l’agriculture, des forêts, de la pêche et de l’élevage ont des incidences sur le climat mondial ainsi que sur les écosystèmes et la biodiversité de chacun des pays de la région, et au-delà.

 

6. Nous voici réunis à l’occasion de cette session de la Conférence régionale à l’heure où les effets de la pandémie de covid-19, l’impact de la guerre en Ukraine et d’autres situations d’urgence humanitaire qui se déclarent aux quatre coins du monde, ont des effets dommageables sur notre vie, notre santé et notre économie.

 

7. Le moment est décisif pour réfléchir à des réponses adaptées et partager des solutions éprouvées devant aider les décideurs politiques de toute la région à relever ces défis.

 

8. Les coûts des produits alimentaires, des combustibles, des engrais et des transports sont plus élevés que jamais, et les prix du blé et des huiles végétales ont connu une envolée.

 

9. Le fardeau économique supplémentaire que représente la hausse des prix nous est imposé au moment où l’accroissement des dépenses publiques dans les services de santé et les aides économiques a déjà mis à mal les budgets nationaux.

 

10. Cette accumulation des fardeaux n’a fait qu’aggraver la situation des plus vulnérables.

 

11. Les perturbations des approvisionnements en provenance de la Fédération de Russie et de l’Ukraine font ressentir leurs effets sur les systèmes agroalimentaires mondiaux.

 

12. L’actuelle hausse des prix des intrants agricoles et des coûts de production se traduira probablement par une perte de productivité du secteur alimentaire au cours de la prochaine campagne agricole, voire au-delà, ce qui entraînera une nouvelle augmentation des prix des produits alimentaires.

 

13. La paix est capitale pour préserver les populations de la faim.

 

14. Lors de la session extraordinaire du Conseil de la FAO, tenue en avril de cette année, la FAO a réaffirmé sa détermination à suivre de près les répercussions de la guerre en Ukraine sur la sécurité alimentaire et l’agriculture à l’échelle mondiale.

 

15. Elle s’est aussi engagée à élaborer des plans à court, moyen et long termes qui doivent permettre de faire face aux conséquences de la crise.

 

16. La FAO fournit régulièrement aux Membres des analyses de données exhaustives concernant les effets du conflit sur les systèmes agroalimentaires, et continuera de le faire.

 

17. L’Organisation facilite et conduit également les interventions d’urgence, l’aide au redressement et le renforcement de la résilience dans l’ensemble des systèmes agroalimentaires, en vertu de son mandat et selon ses capacités.

 

18. Qui sera le plus touché par la crise en cours?

 

19. Premièrement, l’Ukraine, du fait des destructions que subit le pays, lesquelles causent de grandes souffrances à la population et réduisent à néant les chaînes de valeur et les filières d’approvisionnement.

 

20. Deuxièmement, les pays fortement tributaires de l’offre de produits alimentaires (notamment de matières premières destinées à l’alimentation animale), de combustibles et d’engrais en provenance de la Fédération de Russie et de l’Ukraine, et parmi eux, de nombreux pays à faible revenu, importateurs de produits alimentaires.

 

21. Troisièmement, tous les consommateurs de la région et du monde entier, car la hausse des prix des denrées alimentaires, de l’énergie et des engrais abaisse le pouvoir d’achat et compromet les récoltes suivantes.

 

22. La présente session de la Conférence régionale est l’occasion d’examiner ces questions, les perspectives et les moyens d’éviter une crise encore plus grave.

 

23. Elle offre aussi la possibilité de définir des mesures multilatérales essentielles, propres à atténuer l’impact de la crise.

 

24. La FAO souligne la nécessité de mener une action conjointe et coordonnée et d’apporter des solutions stratégiques.

 

25. L’Organisation appelle tous les pays à:

 

• maintenir un commerce des produits alimentaires et des engrais ouvert, ce qui doit permettre à la Fédération de Russie et à l’Ukraine de répondre aux besoins nationaux, tout en satisfaisant la demande mondiale;

• trouver des fournisseurs de denrées alimentaires nouveaux et plus diversifiés;

• apporter une aide aux catégories de population vulnérables, notamment les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, les réfugiés et les personnes directement touchées par la guerre;

• éviter les réactions ponctuelles en matière d’action publique;

• renforcer la transparence des marchés mondiaux et faciliter le dialogue et la coordination entre les Membres;

• endiguer la propagation de la peste porcine africaine.

 

Chers collègues,

 

26. La FAO reste en Ukraine et se consacre à l’accomplissement de sa mission. Nous avons renforcé notre équipe sur le terrain et pris toutes les mesures pour assurer sa sécurité.

 

27. L’Organisation a réalisé des évaluations des besoins nationaux en Ukraine, en axant celles-ci sur les administrations locales et les exploitations agricoles commerciales, et a effectué des enquêtes auprès des ménages dans les zones recevant un afflux important de personnes déplacées à l’intérieur du pays.

 

28. Les résultats montrent que la sécurité alimentaire se dégrade, un ménage sur cinq ne disposant pas des ressources nécessaires pour satisfaire ses besoins alimentaires de base.

 

29. En ce qui concerne la production agricole, les données font état d’une disponibilité limitée d’intrants agricoles essentiels.

 

30. En outre, près d’un tiers des agriculteurs ont signalé un dysfonctionnement des chaînes d’approvisionnement et des réseaux de fourniture d’intrants.

 

31. Les petits producteurs et les exploitant qui pratiquent l’agriculture de subsistance sont ceux qui en pâtissent le plus.

 

32. Le plan d’intervention rapide de la FAO en Ukraine pour la période de mars à décembre 2022 prévoit 115 millions d’USD pour venir en aide à près d’un million de personnes (soit 370 000 ménages environ), mais une grande partie des fonds requis n’a pas encore été reçue.

 

Chers collègues,

 

33. Nous sommes réunis aujourd’hui autour d’une vision précise: transformer nos systèmes agroalimentaires pour les rendre plus efficaces, plus inclusifs, plus résilients et plus durables.

 

34. Cette vision est également celle qui sous-tend le Cadre stratégique 2022-2031 de la FAO, lequel s’articule autour des quatre améliorations (production, nutrition, environnement et conditions de vie), qu’il convient d’apporter en ne laissant personne de côté.

 

35. Les quatre améliorations occupent une place centrale dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, et le Cadre stratégique vise à aider les Membres à atteindre les objectifs de développement durable (ODD).

 

36. Afin de pouvoir produire des effets concrets qui s’inscrivent dans la durée, le Cadre stratégique et les quatre améliorations doivent être ancrés dans les réalités de votre région, et leur mise en œuvre repose sur une prise en main par les pays.

 

37. Par une amélioration de la production, la région peut asseoir son rôle de chef de file en matière de pratiques agricoles novatrices, durables et fondées sur des éléments scientifiques, ainsi que dans le domaine de l’agriculture numérique.

 

38. Il existe des solutions prometteuses et transposables dans l’ensemble de la région Europe et Asie centrale qui peuvent contribuer à une efficacité et une durabilité renforcées de la production et de la consommation.

 

39. L’amélioration de la nutrition permettra de contrer les effets dommageables de la pandémie sur la sécurité alimentaire et la nutrition, et nous aidera à combattre la faim et à apporter des solutions au problème de la malnutrition, ce qui est d’une importance capitale pour cette région.

 

40. Les initiatives prises en ce sens dans les domaines de la législation et de la sensibilisation peuvent contribuer à améliorer la nutrition en encourageant à privilégier des aliments sains et produits localement, au lieu d’aliments hautement transformés.

 

41. Cette région étant très diverse sur les plans du développement, des ressources naturelles et des caractéristiques structurelles, les pays qui la composent ne sont pas tous confrontés aux mêmes problèmes en ce qui concerne la malnutrition.

 

42. L’amélioration de l’environnement constitue un préalable indispensable à la durabilité des systèmes agroalimentaires, et constitue une obligation morale envers les générations actuelles et futures.

 

43. La FAO aide les pays de la région à opérer leur transition vers des systèmes agroalimentaires plus résilients face au climat et plus durables, tout en protégeant la biodiversité.

 

44. La fréquence des phénomènes climatiques extrêmes et les catastrophes naturelles ne fait qu’augmenter dans la région, et le développement durable est capital pour accroître la résilience face aux chocs futurs et réduire les émissions de gaz à effet de serre.

 

45. L’amélioration des conditions de vie de tous passe par la protection et la préservation des moyens de subsistance des personnes les plus durement touchées par la pandémie, la guerre actuelle et les autres crises.

 

46. Elle nous impose de conjuguer nos efforts visant à réduire tous les types d’inégalités: entre les villes et les zones rurales, entre les femmes et les hommes, entre les riches et les pauvres, y compris la fracture numérique et le fossé générationnel.

 

47. Nous devons ouvrir des perspectives économiques élargies dans les zones rurales, en comptant sur une diversification des sources de revenu, grâce au tourisme rural notamment, et à d’autres activités non agricoles.

 

Chers collègues,

 

48. Les pays de cette région sont en bonne voie, grâce aux mesures qu’ils ont déjà prises dans le sens des quatre améliorations.

 

49. La FAO est déterminée à continuer d’œuvrer avec vous de manière efficiente, efficace et cohérente pour faire face aux conséquences de la guerre et aux répercussions de la pandémie sur le long terme.

 

50. En tant qu’organisation hôte du Pôle de coordination des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, et au nom du système des Nations Unies, nous nous engageons à soutenir les Membres dans la mise en œuvre de leurs voies d’action nationales, en mettant à leur disposition notre expertise technique et en mobilisant des ressources au service des trois priorités régionales que vous avez définies:

 

• Un: autonomiser les petits agriculteurs, les exploitations familiales et les jeunes;

• Deux: transformer les systèmes agroalimentaires;

• Trois: gérer les ressources naturelles de manière durable et protéger la biodiversité.

 

51. Trois pays de la région se sont déjà ralliés à l’initiative de la FAO intitulée Un pays – Un produit prioritaire, ce qui les rapproche de l’instauration de systèmes agroalimentaires durables et des cibles des ODD.

 

52. Cette région se prête idéalement à la mise en œuvre de l’Initiative 1000 villages numériques, dont la FAO est à l’origine et qui vise à faire des villages du monde entier des pôles numériques.

 

53. En étroite collaboration avec l’Union européenne, la FAO s’emploie à tirer parti de la riche expérience que possède cette dernière en ce qui concerne le développement de villages intelligents, dans le but de permettre la transformation numérique d’autres villages de la région.

 

54. Cette semaine, nous lancerons également la Plateforme technique régionale consacrée à l’agriculture verte, qui constitue un portail numérique, convivial et ouvert pour le partage d’informations.

 

55. L’agriculture verte joue un rôle capital dans la transformation des systèmes agroalimentaires locaux, car elle peut contribuer à alléger le fardeau qui pèse sur les ressources naturelles, tout en réduisant la pauvreté, la faim et la malnutrition.

 

Chers collègues,

 

56. La Conférence régionale est votre conférence.

 

57. La transformation des systèmes agroalimentaires peut se concrétiser si vous la prenez en main et en faites l’objet de votre engagement politique et de vos plans d’action.

 

58. En tant que ministres de l’agriculture, vous devez jouer un rôle de premier plan dans cette transformation.

 

59. Je vous remercie pour votre appui, et celui que vous apportez aux agriculteurs d’Europe et d’Asie centrale!