Directeur général QU Dongyu

Forum pour une révolution verte en Afrique (AGRF)

de M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO

09/09/2020

Allocution liminaire prononcée en séance plénière

M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO

Forum pour une révolution verte en Afrique (AGRF), mercredi 9 septembre 2020

Texte avant allocution

 

 

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Chers participants,

Chers collègues,

Mesdames et Messieurs,

1. Je suis très heureux de vous voir tous en bonne santé à l’occasion de cette importante conférence en ligne.

2. L’urgence et une collaboration hors du commun doivent caractériser tous nos débats sur la question de la nutrition et des systèmes agroalimentaires en Afrique, si nous entendons relever les immenses défis qui se présentent dans la région pour ce qui est de garantir l’accès de tous à des aliments sans danger, nutritifs et en quantité suffisante, tout au long de l’année, et d’éliminer la malnutrition sous toutes ses formes. Plus de faim ni de laissés-pour-compte!

3. Permettez-moi de vous faire part de quelques-unes des principales informations contenues dans l’édition 2020 du rapport sur L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, que la FAO a élaboré avec le FIDA, l’OMS, le PAM et l’UNICEF.

4. Ce rapport brosse un tableau inquiétant de la situation de l’Afrique en matière de sécurité alimentaire.

5. En effet, la région n’est pas en bonne voie, loin s’en faut, pour atteindre les objectifs de développement durable, en particulier celui qui consiste à éliminer la faim d’ici à 2030.

6. En Afrique subsaharienne, 235 millions de personnes souffraient déjà de la faim en 2019, avant même l’apparition de la COVID-19.

7. En outre, plus de 600 millions de personnes se trouvaient dans une situation d’insécurité alimentaire modérée à aiguë sévère, ce qui signifie qu’elles n’avaient pas accès régulièrement à des aliments nutritifs en quantité suffisante.

8. L’Afrique est la région où la prévalence de la sous-alimentation est la plus forte – plus du double de la moyenne mondiale – et la deuxième quant au nombre de personnes sous-alimentées.

9. C’est également celle où le nombre de personnes souffrant de la faim augmente le plus rapidement.

10. La covid-19 et les autres facteurs qui exercent des pressions sur les filières alimentaires, comme la légionnaire d’automne et le criquet pèlerin, constituent une menace sans précédent pour la sécurité alimentaire, la nutrition et les perspectives économiques en Afrique.

11. Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires pour protéger et renforcer la résilience des populations les plus vulnérables, le risque est grand que la crise sanitaire actuelle se mue en une crise alimentaire, ce qui ne ferait qu’accroître le nombre de personnes souffrant de la faim aiguë.

12. Le rapport 2020 sur L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde fournit une analyse détaillée des principaux facteurs responsables de la progression de la faim, qui ont trait au fait que de nombreux Africains n’ont pas un pouvoir d’achat suffisant pour se procurer des aliments sains et nutritifs.

13. En Afrique subsaharienne, quelque 829 millions de personnes n’ont pas les moyens de s’alimenter sainement.

14. Dans certains pays de la région, le coût d’un régime alimentaire sain est de quatre à sept fois supérieur aux dépenses alimentaires moyennes.

15. Nous nous attendons à ce que les retombées économiques de la pandémie de covid-19 fassent augmenter ces chiffres et aggravent la situation.

16. Selon les estimations préliminaires de la FAO concernant les effets de la pandémie sur la sécurité alimentaire et la nutrition, 83 à 132 millions de personnes supplémentaires dans le monde risquent d’être sous-alimentées cette année.

Mesdames et Messieurs,

17. Pour relever ces immenses défis, nous devons travailler ensemble selon de nouvelles modalités.

18. Alors que les aliments produits suffiraient à nourrir l’ensemble de la population mondiale, près d’un milliard de personnes en Afrique n’ont pas les moyens de se procurer des aliments sains, même les moins onéreux. Cela est inacceptable!

19. Il faut transformer les systèmes alimentaires afin de pouvoir non seulement nourrir une population croissante mais aussi mettre des aliments sains et abordables à la disposition de tous, d’une manière qui soit rentable au niveau économique et durable sur le plan environnemental.

20. Ce processus de transformation doit permettre d’accroître la productivité, grâce au recours aux nouvelles technologies et à la mise en œuvre de politiques destinées à rendre les aliments nutritifs abordables.

21. Nous devons nous attaquer aux facteurs qui font augmenter le prix des aliments tout au long de la filière alimentaire, au sein de l’environnement alimentaire et dans le cadre des politiques qui orientent l’innovation, le commerce, les dépenses publiques et les investissements.

22. Il n’existe pas de solution universelle. Néanmoins, les pays doivent réaliser des investissements et prendre des mesures qui tiennent davantage compte de la nutrition tout au long de la filière alimentaire, afin d’abaisser le coût des aliments nutritifs et de réduire les pertes de nourriture.

23. Les mécanismes destinés à améliorer les débouchés rémunérateurs et à créer des emplois décents, ainsi que les programmes de protection sociale tenant compte de la nutrition, seront cruciaux pour rendre les aliments sains plus abordables et plus accessibles aux populations vulnérables, y compris les ruraux pauvres. 

24. Les politiques qui encouragent les comportements alimentaires sains, aux niveaux des individus et de la société, sont également fondamentales.

25. Par ailleurs, nous devons recentrer la recherche et le développement sur les fruits et légumes en vue d’améliorer la productivité, d’accroître l’accessibilité économique, de développer les canaux de commercialisation reposant sur la chaîne du froid et de réduire les pertes et le gaspillage de nourriture, ce qui permettrait de ramener les prix à un niveau raisonnable.

26. Plus particulièrement, nous devons exploiter le potentiel des légumes-feuilles verts d’Afrique, qui sont prometteurs du fait de leur teneur en micronutriments mais font l’objet de peu de recherches.

27. Le rapport sur L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde indique que des investissements publics dans les réseaux routiers en Afrique pourraient contribuer à rendre plus abordables les aliments contenant les nutriments essentiels car ils réduiraient le coût de l’irrigation et du transport.

28. Le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires qui se tiendra l’an prochain sera l’occasion de redoubler d’efforts pour faire en sorte que les régimes alimentaires sains soient inclusifs et abordables.

29. Comme nous le constatons chaque jour, la pandémie de covid-19 nous oblige tous à vivre et à travailler selon de nouvelles normes.

30. La FAO s’appuie sur son nouveau programme d’intervention et de redressement dans le contexte de la covid-19 pour aider les pays à empêcher le déclenchement d’une catastrophe alimentaire mondiale pendant et après la pandémie, tout en œuvrant en faveur du développement à long terme pour améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition.

31. Face à la crise, nous devons «reconstruire en mieux» grâce à une productivité accrue, à une plus grande diversification et à une résilience renforcée. Pour ce faire, il convient de réaliser des interventions tenant compte de la nutrition et de prêter un appui à un secteur privé dynamique, y compris aux petites et moyennes entreprises, afin de créer des emplois de qualité.

32. En résumé, reconstruire en mieux nécessite d’adopter une approche fondée sur les systèmes alimentaires qui permette d’améliorer la production, la nutrition, l’environnement et les conditions de vie au profit de tous.

33. La transformation des systèmes agroalimentaires ne pourra s’opérer sans l’innovation, qui passe par le recours accru aux technologies et le développement du numérique dans le secteur agricole, et les défis s’en trouveront modifiés.

34. Cette transformation doit également s’appuyer sur des partenariats plus ambitieux, plus profonds et plus vastes que jamais.

35. Par l’intermédiaire de l’initiative Main dans la main de la FAO, qui est prise en charge et dirigée par les Membres, nous collaborons avec ceux-ci afin de les mettre en relation avec des partenaires qui produisent des mégadonnées et des donateurs.

36. En accélérant la transformation agricole et le développement rural durable, l’initiative contribue à éliminer la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition.

37. La FAO attend avec intérêt de collaborer avec vous, afin de mettre des aliments sains à la portée de tous les habitants de l’Afrique.

38. Œuvrons ensemble à la réalisation des cibles du Programme 2030 qui concernent la sécurité alimentaire (pour un monde libéré de la faim) et la nutrition, et au-delà de cet objectif, à la concrétisation de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  

Merci de votre attention.