Directeur général QU Dongyu

Réunion avec les ambassadeurs de l’UE «Sécurité alimentaire, défis et perspectives à l’échelle mondiale: le rôle de la FAO et les priorités de l’UE»

de M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO

25/07/2022

Réunion avec les ambassadeurs de l’UE

«Sécurité alimentaire, défis et perspectives à l’échelle mondiale:
le rôle de la FAO et les priorités de l’UE» 

Allocution de

M. Qu Dongyu

 Texte avant allocution

Le 25 juillet 2022

 

Chers collègues,

 

1.         Selon l’édition 2021 du rapport sur L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, 828 millions de personnes ont souffert de la faim en 2021, soit 46 millions de plus qu’en 2020 et 150 millions de plus qu’en 2019, avant que ne survienne la pandémie de covid-19. 

 

2.         La pandémie a creusé les inégalités existantes et aggravé le problème de l’élimination de la faim.

 

3.         Les dernières projections indiquent que plus de 670 millions de personnes pourraient toujours souffrir de la faim en 2030, ce qui est très éloigné de l’objectif «Faim zéro»!

 

4.         L’insécurité alimentaire aiguë est appelée à s’aggraver dans 20 pays ou zones géographiques, comprenant deux secteurs régionaux désignés comme «foyers de famine».

 

5.         En agissant ensemble, nous devons empêcher que l’insécurité alimentaire aiguë ne connaisse une évolution précipitée dans les mois et les années à venir.

 

6.         Grâce à l’aide que dispense aujourd’hui l’Union européenne dans de nombreux domaines, qu’il s’agisse du Réseau mondial, du Comité international de planification pour la souveraineté alimentaire ou de l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue, nous sommes à même de mieux surveiller et anticiper les foyers de famine, et cibler nos interventions dans les délais requis.

 

7.         La guerre en Ukraine, ainsi que d’autres conflits qui touchent un certain nombre de pays dans l’ensemble du monde, à quoi s’ajoutent les effets de la crise climatique, viennent augmenter les difficultés d’une situation mondiale déjà complexe.

 

8.         Il est urgent de transformer nos systèmes agroalimentaires en vue d’accroître leur résilience, de corriger leurs vulnérabilités et d’accélérer la concrétisation des ODD.

 

9.         Pour accomplir cette transformation, nous devons nous intéresser à quatre grands domaines, qui sont aussi en rapport direct avec les priorités de l’UE:

 

10.       Premièrement, nous devons investir dans les pays qui en ont le plus besoin, à savoir ceux qui sont frappés de plein fouet par la hausse des prix des produits alimentaires et qui présentent des vulnérabilités.

 

11.       Afin d’accroître les disponibilités alimentaires, nous devons veiller davantage à la production locale d’aliments nutritifs; à l’heure actuelle, nous n’affectons à l’appui à la production agricole que 8 pour cent de l’ensemble des fonds mobilisés pour la sécurité alimentaire dans les situations d’urgence.

 

12.       Deuxièmement, nous devons mettre en place des politiques ayant pour effet d’accroître la productivité tout en préservant les ressources naturelles.

 

13.       La transformation des systèmes agroalimentaires permettant des régimes alimentaires sains et nutritifs, et produisant des résultats plus équitables, suppose des investissements financiers importants, estimés à 8 pour cent de la taille du marché agroalimentaire.

 

14.       Ces investissement doivent s’opérer dans les infrastructures physiques que sont les routes, les systèmes d’irrigation, le réseau électrique et le réseau numérique, mais ils doivent aussi concerner les infrastructures des chaînes de valeur telles que les installations de stockage et de réfrigération, ainsi que les infrastructures de banque et d’assurance.

 

15.       Vous devez investir davantage dans l’innovation et les nouvelles technologies, et dans des systèmes d’information sur le marché plus transparents.

 

16.       La transparence des marchés et la coordination sont cruciales en période d’incertitude car elles contribuent à stabiliser les marchés et les prix.

 

17.       La FAO demeure déterminée à améliorer la transparence des marchés mondiaux grâce au Système d’information sur les marchés agricoles (AMIS), qui est un outil essentiel pour renforcer la confiance à l’égard des marchés mondiaux.

 

18.       Troisièmement, nous devons faire un usage plus efficace et plus efficient des extrants et des intrants disponibles – nous devons produire plus et mieux avec moins d’intrants.

 

19.       Permettez-moi d’illustrer cela par trois exemples.

 

•          Nous devons utiliser des technologies de pointe afin, par exemple, de rendre optimale l’utilisation de l’eau en agriculture;

 

•          Nous devons réduire les pertes et le gaspillage de nourriture, dont les quantités pourraient nourrir environ 1,26 milliard de personnes chaque année et qui ont un fort impact négatif sur l’environnement;

 

•          Nous devons recourir à des moyens technologiques qui rendent l’utilisation d’engrais plus efficace.

 

20.       La science et l’innovation constituent un accélérateur commun à ces processus.

 

21.       Nous devons corréler toutes les solutions à caractère scientifique aux principaux processus multilatéraux, telle la COP27, afin d’accélérer la transformation.

 

22.       La Stratégie en matière de science et d’innovation, que la FAO a récemment adoptée, nous aidera à atteindre de nouveaux degrés de productivité, de qualité, de diversité, d’efficacité et de viabilité environnementale dans les systèmes agroalimentaires.

 

23.       Et la Stratégie relative au changement climatique donnera son orientation à l’appui renforcé que dispense la FAO aux Membres ayant l’ambition de relever les défis climatiques dans les systèmes agroalimentaires et de mettre en œuvre l’Accord de Paris.

 

24.       Nous devons mettre en œuvre ces deux stratégies thématiques en synergie, et nous devons intensifier nos efforts de mobilisation des connaissances, nouer des partenariats et obtenir les financements nécessaires à leur mise en œuvre fructueuse.

 

25.       La science et l’innovation sont des atouts décisifs dans l’obtention de solutions aux problèmes climatiques auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui.

 

Chers collègues,

 

26.       À la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU en mai dernier, j’ai insisté sur le fait que l’agriculture était l’une des clés d’une stabilité et d’une sécurité durables.

 

27.       Les dirigeants des organisations de l’ONU ayant leur siège à Rome, réunis pour présenter un exposé au Conseil de sécurité sur les conflits et la sécurité alimentaire, ont réaffirmé d’une seule voix le rôle crucial de ces organisations dans les efforts déployés pour inverser la hausse d’incidence de la faim extrême.

 

28.       La FAO a adressé au Groupe international d’intervention en cas de crise huit propositions de mesures à prendre pour faire face à la situation que connaît la sécurité alimentaire dans le monde et aux risques induits par les conflits actuels.

 

29.       La guerre en Ukraine a réduit les disponibilités de denrées alimentaires exportables, d’aliments pour animaux, d’engrais et de carburant, ce qui a entraîné une nouvelle hausse des prix des produits alimentaires et menace la récolte de 2023.

 

30.       L’Accord sur les exportations de céréales via la mer Noire, signé vendredi dernier, facilitera l’accès mondial aux denrées alimentaires et aux engrais de Russie, et représente un pas en avant important dans la recherche de solutions à la crise alimentaire mondiale.

 

31.       Afin d’aider les pays les plus touchés à faire face à la hausse des coûts des importations, la FAO a proposé la création d’un mécanisme de financement des importations alimentaires ayant pour vocation d’aider au financement des achats alimentaires.

 

32.       Avec votre appui, ce dispositif pourrait être mis en place par les grands organismes de financement dans le cadre de leur mécanisme financier appliqué aux balances des paiements.

 

33.       La FAO reste pleinement engagée auprès du Réseau mondial contre les crises alimentaires pour définir, avec ses alliés, des solutions dans le nexus action humanitaire-développement-paix.

 

34.       Le Réseau mondial constitue une plateforme importante permettant à la communauté internationale de coordonner des actions collectives et cohérentes conçues pour prévenir les crises alimentaires, atténuer leurs impacts et contribuer à la transformation des systèmes agroalimentaires.

 

35.       La transformation des systèmes agroalimentaires ne peut se concrétiser qu’en étant inclusive.

 

36.       Le Vice-Président Timmermans a récemment souligné l’importance de faire du Pacte vert pour l’Europe un accord juste à dimension sociale.

 

37.       Nous ne pouvons avancer qu’en conviant toutes les parties prenantes à la table où se prennent les décisions.

 

38.       Les données recueillies sur tous les continents montrent que les femmes sont davantage que les hommes exposées à l’insécurité alimentaire, et cette situation a connu une aggravation du fait de la pandémie.

 

39.       Nous devons faire en sorte que les femmes, les petits producteurs de denrées alimentaires, les jeunes et les agriculteurs ruraux soient inclus dans la transformation.

 

40.       Nous devons poursuivre le travail en collaboration, car ce n’est qu’en travaillant en étroite collaboration que nous pouvons atteindre des objectifs importants, et nos réalisations collectives sont riches d’exemples à cet égard.

 

41.       Nous avons réussi à maîtriser la recrudescence du criquet pèlerin, protégeant ainsi les moyens de subsistance dans la Corne de l’Afrique, au Yémen et au-delà.

 

42.       Et nous avons renforcé la lutte mondiale contre la chenille légionnaire d’automne grâce à une réponse forte et coordonnée.

 

43.       Grâce à l’approche «Une seule santé», et à la nouvelle collaboration quadripartite qui lui donne corps, nous renforçons encore la coopération au service de la santé des humains, des animaux, des végétaux et de l’environnement.

 

44.       Le Pôle de coordination sur les systèmes alimentaires qui a été mis en place est désormais opérationnel. Il s’appuie sur les capacités plus larges du système des Nations Unies pour épauler les Membres dans la mise en œuvre de leurs itinéraires nationaux dans ce domaine.

 

45.       La FAO est résolue de concourir ensemble à ce processus par l’intermédiaire de l’Alliance mondiale pour la sécurité alimentaire, afin de surveiller les facteurs responsables de la hausse des prix et les répercussions de celle-ci, et de faire en sorte que les investissements, les financements, les données et la connaissance des pratiques optimales soient mis à la disposition des pays qui en ont besoin.

 

Chers amis,

 

46.       La collaboration est essentielle pour relever les défis considérables qui nous attendent.

 

47.       Je me réjouis à la perspective de poursuivre cette collaboration avec l’Union européenne dans le cadre de notre partenariat solide, efficace, efficient et cohérent pour transformer nos systèmes agroalimentaires.

 

48.       Je vous remercie.