Directeur général QU Dongyu

Forum international pour une action en faveur de l’apiculture et de la pollinisation durables organisé en Slovénie – Allocution de bienvenue et d’inauguration de ruchers

de M. Qu Dongyu, Directeur général de la FAO

21/05/2024

Mesdames et Messieurs,

Chers amis, 

C’est pour moi un grand honneur de revenir dans ce beau pays verdoyant. On y devine la présence d’abeilles en grand nombre et celle d’autres pollinisateurs dans les herbes de ces montagnes, qui butinent dans l’environnement de qualité qu’elles leur offrent.

Au cours des 100 derniers jours, dans aucun pays, y compris la Chine, je n’ai été traité aussi chaleureusement qu’ici. Si je reviens aujourd’hui, c’est en raison de votre dévouement, de votre engagement, de vos efforts, auxquels se joignent ceux de tous les collègues de Slovénie, de la FAO et du monde entier.

Je me réjouis aussi de voir le Président d’Apimondia présent parmi nous. Avec l’appui de tous, nous entamons un forum qui fera date.

Nos forums sont nombreux, de grande taille ou de taille modeste, mais celui-ci revêt une importance particulière. Non seulement pour l’Europe, pour la Slovénie, pays qui, dans son nom en anglais, contient le mot «love», et qui est cher à mon cœur.

J’ai rencontré l’ancien Ministre de l’agriculture, M. Dejan Zidan, il y a une dizaine d’années. Il m’a alors demandé d’appuyer et de lancer la Journée mondiale des abeilles.

Cela m’a touché car lorsque j’étais vice-président de l’Académie chinoise des sciences agronomiques, il y a 22 ans, nous avions un institut national pour les abeilles et la pollinisation, chose connue d’un grand nombre de personnes, mais sans que soient nombreux les hommes et les femmes politiques qui se tiennent au fait de ce type de recherche.

C’est cependant en Slovénie que se trouve le foyer de la recherche moderne sur les abeilles et la pollinisation. Le fait que vous ayez été les pionniers des technologies et de la recherche en apiculture n’est pas très connu en dehors de la Slovénie. Faites le test: demandez donc à vos collègues, pour vous faire une idée du nombre de gens qui savent que l’un des scientifiques modernes de la recherche sur les abeilles est slovène. Voilà un fait qui me rapproche particulièrement de votre pays.

Les abeilles ne servent pas seulement à produire du miel. Les abeilles servent à tout. Sans les abeilles, le monde aurait été rendu au silence. Sans les abeilles, pas de fleurs. Sans les abeilles, le monde serait privé de moissons. Les abeilles ne sont pas seulement des insectes au vol sonore, elles piquent aussi, parfois. Mais si les enfants ont peur des abeilles, celles-ci sont des amies de la planète et de l’humanité. Voilà ce qui fait la valeur véritable des abeilles et de la famille des pollinisateurs.

Quand j’étais phytogénéticien, j’ai pris la mesure de l’intérêt qu’offre tout le travail de pollinisation qu’assurent les abeilles et les autres pollinisateurs.

Les abeilles améliorent les rendements de production et la qualité des légumes et des fruits, et celles d’autres cultures, et de même pour toutes les plantes herbacées des zones arides et semi-arides.

Seules les abeilles travaillent pour nous jour et nuit, sans interruption, individuellement et collectivement. Si nous demandons à nos ouvriers de faire des heures supplémentaires, ils demandent à être payés plus, tandis que les abeilles, elles, ne se plaignent jamais. Elles travaillent jour et nuit sans se plaindre, et sans salaire. Voilà la créature véritablement généreuse et la plus intelligente de cette planète.

Nous avons une particularité qui nous différencie des animaux et qu’il nous faut apprendre à apprécier et à cultiver: la gratitude envers les plantes, les animaux, les petites abeilles. Voici une épinglette ornée d’un abeille dorée, présent du Premier Ministre, qui nous rappelle que nous devons être reconnaissants envers les petites abeilles.

Ensuite, rappelons-nous ce en quoi consiste le mandat de la FAO, établi en 1943 durant la seconde Guerre mondiale. À cette époque, 90 pour cent de la population ne mangeaient pas à sa faim. À présent, il nous reste encore beaucoup à faire ensemble, pour les 10 pour cent de l’humanité concernés. Le chemin parcouru est considérable, mais dans une civilisation moderne, nous devons garantir l’alimentation. Non seulement l’alimentation de base, mais aussi une alimentation saine.

Que signifie une alimentation saine? Des aliments de base obtenus du riz, du blé, du maïs ou de l’orge, des graines alimentaires. Mais aussi des légumes, des fruits et toutes les protéines animales issues de l’aquaculture, des volailles et de l’élevage.

Nous devons aussi préserver l’environnement et la biodiversité. De la biodiversité à la diversité alimentaire: augmenter le nombre des produits obtenus d’animaux différents, des abeilles et, à nouveau des pollinisateurs. La diversité alimentaire repose sur la biodiversité, mais les abeilles sont des animaux clés pour nous aider à cet égard.

En ce qui concerne la FAO, nous nous devons d’épauler les pays en développement, mais nous devons aussi venir en aide aux pays à revenu intermédiaire, et à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, y compris même en Europe et parmi les pays membres de l’OCDE, pour relever ensemble les défis mondiaux: perte de biodiversité, dégradation de l’environnement, et d’autres.

Tout cela fait partie du mandat de la FAO défini en 1943. Nous n’avons pas encore accompli cette mission. Nous devons travailler ensemble.

Non point seulement dans les zones sensibles. À Gaza, au Soudan, au Soudan du Sud, au Yémen, en Somalie, à Haïti, en Afghanistan, en Syrie, et ailleurs, mais aussi à présent en Europe, dans les pays de l’OCDE, où 10 pour cent au moins des personnes ne peuvent pas se permettre une alimentation saine.

La sécurité alimentaire réunit trois composantes: la disponibilité alimentaire, l’accessibilité alimentaire et l’abordabilité des aliments. La Slovénie est un pays à revenu élevé, et n’a aucun problème de disponibilité ni d’accessibilité alimentaire. Mais je crois pouvoir dire que, dans une petite proportion, le pays a encore un problème d’abordabilité.

Tels sont les faits, même pour un pays comme la Slovénie, et à fortiori pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral, les petits États insulaires en développement, soit 90 pays au total.

C’est la vision commune de la FAO, reposant sur ses textes de base et son mandat. Il nous faut travailler ensemble avec tous les membres, les 194 membres. Que leur territoire soit grand ou petit, riche ou pauvre.

Par chance, la Slovénie n’est pas vaste. Les pays qui ont un vaste territoire connaissent un grand nombre de difficultés, et votre pays n’est pas non plus petit ni pauvre. Vous avez de la chance.

Vous êtes un pays de taille respectable, avec une société bien organisée, de bons services d’assistance sociale et des codes de savoir-vivre. Bien sûr, vous avez vos propres problèmes, grands et petits. Certaines inondations qui touchent votre territoire peuvent être de grande ampleur pour vous, mais elles ne le sont pas pour moi. Chez moi, tous les ans, nous faisons face à des inondations de vaste ampleur. Pour nous, elles ne sont pas vastes.

Chaque pays a ses difficultés, grandes ou petites, mais vous devez travailler ensemble avec de nouvelles technologies, des investissements nouveaux qui répondent aux besoins, et des politiques publiques porteuses. La FAO est votre organisation. Nous entendons œuvrer avec vous à travers ces trois aspects. C’est la raison pour laquelle nous avons créé le Forum mondial de l’alimentation.

L’un des piliers en est l’autonomisation des jeunes et des femmes, y compris les peuples autochtones.

Le second est la science et l’innovation.

Le troisième est l’investissement.

Nous vous offrons une plateforme d’échange qui doit vous permettre de trouver des partenaires potentiels. Je me réjouis donc d’être présent au Forum international sur l’apiculture durable et au-delà, et je salue vos efforts.

On peut dire que vous avez su vous servir des abeilles comme outil diplomatique d’aide aux populations, aux membres et aux plus nécessiteux, et cela m’ôte toute excuse pour ne pas revenir dans les 100 prochains jours vous offrir mon soutien et travailler ensemble.

Dans cette perspective, je vous souhaite bonne chance et des travaux fructueux pour demain.

Il est passionnant d’assister à la réussite de ce premier forum international. Dès la première édition, vous entrez dans l’histoire. Peu importe qu’il soit important par la taille ou par ses répercussions, quand les historiens se pencheront sur le sujet – je suis de Chine, pays qui a 5 000 ans d’histoire –, ils diront peut-être dans 500 ans que le premier forum intelligent sur l’apiculture a débuté en Slovénie. Il s’agit d’une contribution historique. Une contribution petite comme l’est l’abeille, mais à l’impact grandiose.

C’est parti!

Je vous remercie de votre attention.