SYSTEME MONDIAL D'INFORMATION ET D'ALERTE RAPIDE SUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE DE LA FAO
PROGRAMME ALIMENTAIRE MONDIAL

RAPPORT SPÉCIAL

MISSION FAO/PAM D'ÉVALUATION DES RÉCOLTES ET DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

au Sud-Soudan

6 février 2009

Faits saillants

  • Les précipitations en général propices et les flambées de ravageurs et de maladies relativement limitées, ce à quoi il faut ajouter l'augmentation du nombre de rapatriés, ont permis d'obtenir une récolte céréalière supérieure à la moyenne soit 1,25 million de tonnes, contre 860 000 tonnes en 2007.

  • Compte tenu des projections pour 2009 qui établissent la population à 9,7 millions, le déficit céréalier global jusqu'à la prochaine récolte devrait s'élever à environ 47 000 tonnes.

  • Dans la plupart du Sud-Soudan, l'état du bétail et des parcours a été généralement satisfaisant.

  • En dépit de la bonne récolte, le très mauvais état des routes et l'insuffisance du réseau de commercialisation - associés aux déplacements de populations dus au conflit et à l’arrivée de nouveaux rapatriés - continuent d'exercer des contraintes matérielles et financières sur l'accès à la nourriture et rendent un grand nombre de personnes vulnérables tributaires de l'aide alimentaire.

  • Le mauvais état du réseau de transport est de loin l’élément le plus coûteux pour le commerce des denrées alimentaires dans le Sud-Soudan et on ne saurait trop insister sur la nécessité de déployer des efforts concertés pour remettre en état/construire des routes d'accès et de grands axes de circulation.

  • Même s'ils ont fléchi récemment, les prix des denrées alimentaires sur tous les marchés sont encore bien plus élevés qu'en 2007. Ils devraient encore diminuer au cours des prochaines semaines, à mesure de l'arrivée de la récolte de sorgho à cycle long dans les zones à proximité des principaux marchés.

  • Selon les estimations de l'évaluation annuelle des besoins et des moyens de subsistance qui vient d'être effectuée, environ 1,3 million de personnes vulnérables seront exposées à l'insécurité alimentaire en 2009 et nécessiteront approximativement 96 000 tonnes d'aide alimentaire. Ces chiffres tiennent compte des quelque 239 000 rapatriés attendus dans le Sud-Soudan en 2009.

1. VUE D'ENSEMBLE

Une Mission conjointe FAO/PAM d'évaluation des récoltes et de la sécurité alimentaire s'est rendue dans le Sud-Soudan du 2 au 26 octobre 2008 pour estimer la production céréalière et analyser la situation globale des approvisionnements vivriers. Elle était composée de représentants du Gouvernement du Sud-Soudan, du Ministère de l'agriculture et de la foresterie, de la Commission pour le secours et la reconstruction du Sud-Soudan, du Centre commun de recherche (CCR) de l'Union européenne, de FEWSNET, du PAM et de la FAO.

La Mission a tenu des consultations avec des fonctionnaires de divers organes, notamment le Ministère de l'agriculture et de la foresterie, la Commission pour le secours et la reconstruction du Sud-Soudan et le Centre de statistiques et d'évaluation du Sud-Soudan ainsi que des fonctionnaires des Nations Unies et d'autres institutions internationales, parmi lesquelles la Banque mondiale. Des renseignements

spécifiques sur le terrain et à l'échelle nationale ont été fournis par les administrations centrales et locales pertinentes et par les ONG ci-après: Norwegian People’s Aid (NPA), Danish Relief Council (DRC), Mundri Relief Development Association (MRDA), Rural Action Against Hunger (RAAH), Catholic Relief Services (CRS) et Action Africa Help (AAH).

La Mission, formée de 25 personnes réparties en 5 équipes, a pu couvrir la totalité des 10 États du Sud-Soudan. Grâce aux effets bénéfiques de l’Accord de paix global, les deux équipes chargées de couvrir les trois États de l'Equatoria oriental, central et occidental ont été pour la première fois en mesure de mener à bien leur mission par la route. Les trois autres équipes se sont acquittées de leur tâche comme d'habitude, en se rendant par avion d'une zone à l'autre1/. Sur place, elles ont utilisé les moyens de transport disponibles fournis par diverses autorités locales, des ONG et des services de location de voitures et de motos, ce qui leur a permis de couvrir une étendue beaucoup plus vaste en 2008 qu'auparavant. En tout, 38 des 79 comtés ont été visités et 155 entretiens semi-structurés ont été organisés.

La Mission s'est rendue dans les endroits suivants:

Bahr el Ghazal Nord: Aweil central, Aweil oriental, Aweil occidental, Gogrial occidental; Bahr el Ghaza Ouest: Raja; Unité: Bentiu, Rubkona, Leer, Koch, Guit, Mayom, Pariang; Equatoria central: Juba, Yei, Lainya, Morobo, Kejo Keji, Terekeka; Equatoria oriental: Torit, Kapoeta, Ikotos, Magwi; Haut Nil: Renk, Malakal, Panyikang; Jonglei: Bor, Pibor, Pochalla; Warrap: Gogrial; Lacs: Rumbek oriental, Rumbek central; Equatoria occidental: Yambio, Nzara, Ibba, Maridi, Mvolo, Mundri occidental, Mundri oriental.

Les renseignements fournis par les services centraux du Ministère de l'agriculture, les responsables des comtés/inspecteurs, les agriculteurs, les négociants, le personnel des ONG et les organismes internationaux ont été recoupés avec les résultats des coupes-échantillons effectuées dans les zones agricoles, les observations faites sur le terrain par la plupart des équipes à l'aide de l'outil d'évaluation graphique, les mesures ponctuelles des rendements ainsi que des données secondaires (rapports de la FAO, du PAM et des ONG, notamment). La Mission a aussi effectué des enquêtes aléatoires sur les marchés et, là où la récolte était terminée, elle a estimé les quantités de céréales entreposées dans les silos sur les exploitations. Des responsables basés à Nimule et Kaya (à la frontière avec l'Ouganda) et à Bazi (à la frontière avec la République démocratique du Congo) ont aussi fourni quelques renseignements sur les échanges transfrontaliers. La Mission a bénéficié d'un appui (tant technique que logistique) des plus précieux de la part de l'Unité des opérations d'urgence de la FAO à Juba, de Food Security Information for Action (SIFSIA) – Juba et Karthoum – et de l'Unité d'analyse et de cartograghie de la vulnérabilité du PAM. Les estimations concernant la pluviosité, provenant du Centre commun de recherche (CCR) de l'UE pour 2008, ont été rapprochées des données pluviométriques locales et des descriptions du régime traditionnel des précipitations faites par les personnes interrogées. Ces renseignements ont été actualisés à l'aide des données sur la pluviométrie fournies par SIFSIA-Khartoum, aux fins d'inclusion dans le présent document.

Conformément à la pratique des années antérieures, la Mission a estimé la production céréalière sur la base des superficies ventilées par comté, à l'aide d'un modèle qui intègre les dernières estimations concernant la population sédentaire (mission d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires de 2007), plus les statistiques rassemblées par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) relatives aux retours tant spontanés qu'organisés de PDI et de réfugiés entre février 2007 et août 2008. Les estimations concernant la superficie détenue par un ménage moyen dans chaque comté, ajustées en fonction des observations de la Mission lors des visites sur le terrain sont multipliées par les rendements par unité de surface utilisés lors des missions précédentes, là encore majorés avec prudence en fonction des constatations de la mission de 2008, dont la couverture a été plus importante et plus détaillée, selon lesquelles les rendements de sorgho et de maïs ont été bien supérieurs à ceux enregistrés précédemment2/.

Outre la récolte actuelle, les estimations portant sur toutes les céréales comprennent celles qui seront récoltées dans les 2 ou 3 prochains mois, à savoir essentiellement le sorgho à cycle long mis en terre en juin dans le Haut-Nil et dans les Lacs ainsi qu'en certains endroits de l'Equatoria oriental, à récolter en janvier 2009. Ces champs sont encore vulnérables a) si les précipitations cessent prématurément et b) s'ils sont attaqués par les oiseaux migrateurs Quelea quelea. L'estimation comprend aussi le maïs et le sorgho à cycle court déjà récoltés, qui sont consommés avant de parvenir à pleine maturité. L'inclusion de ces dernières cultures dans le bilan céréalier qui permet de déterminer si une zone est excédentaire ou déficitaire part du principe que les résultats des récoltes et les disponibilités seront les mêmes l'année prochaine, hypothèse qui ne se vérifie pas toujours. Les pratiques agricoles demeurent telles que décrites par les missions précédentes. Alors que les disponibilités de semences étaient adéquates parmi les agriculteurs installés, les PDI et les rapatriés ainsi que les familles vulnérables dans les zones d'accueil ont bénéficié de distributions de semences appuyées par la FAO.

Les effets bénéfiques des précipitations de 2008, qui ont en général commencé en temps voulu sans interruption significative et sans provoquer d'inondations généralisées, se sont traduits par une augmentation de la production dans la plupart des régions, du fait de l'expansion des superficies cultivées et de l'amélioration des rendements.

Le résultat net laisse penser que la superficie récoltée en 2008 est bien plus importante qu'en 2007 et s'élève à 1 million d'hectares, chiffre qui comprend les activités agricoles des rapatriés répertoriés par l'OIM (août 2008). Pour 2008, les estimations établissent la production brute du secteur traditionnel à 1,25 million de tonnes, soit environ 1 million de tonnes de céréales disponibles pour la consommation. D'après les constatations de la Mission, les seuls stocks sur l'exploitation reportés des années précédentes sont ceux détenus par des agriculteurs de l'Equatoria occidental. Ces stocks s'accumulent d'une année sur l'autre et ne sont pas inclus dans le calcul des excédents ou déficits éventuels (qui partent du principe d'une évolution neutre). Ils comprennent aussi bien des céréales, des graines oléagineuses que des légumineuses, en particulier les cultures les moins périssables telles que l'éleusine et le sorgho. Le maïs, les haricots et les arachides sont moins susceptibles d'être stockés sur l'exploitation à moins qu'ils ne soient destinés à être vendus par le biais des associations d'agriculteurs, dont les activités sont encore mises en échec par les routes impraticables, les débouchés limités et les importantes pertes en entrepôt. Ces éléments expliquent pourquoi le chiffre concernant la consommation par habitant et par an utilisé dans le bilan est plus élevé, même dans les zones où le manioc est la denrée de base de prédilection, comme c'est le cas dans certains comtés du sud de l'Equatoria central et les comtés situés à l'ouest de Equatoria oriental.3/

Les estimations concernant la récolte indiquées ci-dessus devraient en théorie donner un excédent céréalier d'environ 47 000 tonnes pour au total 9,7 millions d'habitants à la mi-2009, selon les projections de la mission4/. Toutefois, dans la réalité, l'excédent est virtuel, car l'état actuel de l'infrastructure routière et du réseau de commercialisation empêche tout mouvement significatif des céréales de la multitude de petites exploitations familiales qui pratiquent une agriculture non mécanisée au sud vers la plupart des zones déficitaires, situées principalement au nord.

La production céréalière issue du secteur mécanisé, qui provient d'exploitations étendues largement ouvertes sur les marchés et facilement accessibles par la route, semble proche de celle des années précédentes, soit 142 560 tonnes de sorgho et de mil pour une superficie de 165 000 hectares. Jusqu'à présent, les invasions de ravageurs dans le secteur mécanisé, implanté principalement à Renk, ont été soit minimes soit contrées par l'unité de protection phytosanitaire du Ministère basée à Renk. Toutefois, les oiseaux migrateurs Quelea quelea demeurent une menace pour les cultures mises en terre

dernièrement, et ce jusqu'à ce qu'elles soient récoltées en janvier. À cet égard, la Mission attire l'attention sur les colonies de Quelea quelea repérées par une de ses équipes dans les papyrus au sud de Terekeba et se demande s'il s'agit là d'une nouvelle habitude de nidification qui doit être portée à l'attention des spécialistes de la protection phytosanitaire. La production céréalière issue du secteur mécanisé, à Renk en particulier, est essentiellement commercialisée dans le nord du Sud-Soudan, en raison du meilleur état des routes et du moindre coût du transport, et seules de petites quantités sont acheminées vers le sud à destination de Malakal, ce qui ne risque de ne pas avoir d'effet notable sur le déficit. Par conséquent, il n'est pas tenu compte de la production issue du secteur mécanisé dans le calcul des excédents/déficits céréaliers au Sud-Soudan.

Dans la plupart du Sud-Soudan, l'état du bétail est globalement bon, ce qui se traduit par des prix élevés et stables. Les termes de l'échange se détériorent toutefois depuis plusieurs mois du fait de la hausse exorbitante des prix des produits alimentaires.

Bien que le bien-être des ménages s'améliore au Sud-Soudan, de nombreux obstacles doivent être surmontés pour assurer la croissance et le développement économiques nécessaires à une amélioration durable de la santé, de la nutrition et de la sécurité alimentaire. Un obstacle majeur à tout progrès, mentionné à de multiples reprises à la mission par toutes les parties concernées, est l'état de l'infrastructure de transport. Il s'agit là d'un problème de taille pour le déplacement des personnes et des marchandises dans tout le sud, en particulier pendant la saison des pluies. Cela dissuade aussi les agriculteurs de produire des excédents, car il est onéreux et très difficile de les acheminer sur les marchés. Ainsi, les agriculteurs des zones fertiles ne produisent pas à pleine capacité, même si les États voisins connaissent des pénuries alimentaires. La remise en état des infrastructures existantes et la construction de nouvelles, en particulier des routes de desserte, non seulement ouvriraient des marchés (d'où une amélioration des moyens d'existence et de la sécurité alimentaire) mais aussi améliorerait l'accès aux soins de santé, ce qui contribuerait de manière significative à réduire les taux de mortalité et de malnutrition. Un autre phénomène constaté par la mission est la tendance croissante des jeunes à quitter leur village pour s'installer en ville, laissant les anciens s'occuper des activités agricoles et créant ainsi des pénuries de main-d'oeuvre à des périodes cruciales.

Selon l'évaluation annuelle des besoins et des moyens de subsistance, environ 1,3 million de personnes vulnérables (soit 1,06 million de résidents et de PDI ayant besoin d'une aide alimentaire et 239 000 rapatriés prévus en 2009) auront besoin d'une aide alimentaire s'élevant à environ 96 000 tonnes (73 500 tonnes et 22 500 tonnes respectivement) en 2009.

La mission a pris note du fait que des volumes importants de céréales (sorgho et maïs principalement) avaient été mis en place par le gouvernement à divers endroits stratégiques du Sud-Soudan, éventuellement en vue de ventes subventionnées ou de distributions. En dépit de tous ses efforts, la mission n'a pas été en mesure d'obtenir de données sur le volume total de céréales en question, ni sur le nombre de personnes visées. Il est donc difficile d'analyser l'impact éventuel de ce plan sur l'évolution des prix alimentaires ou la sécurité alimentaire des populations vulnérables. Il convient d'examiner plus avant la question, en particulier si des interventions humanitaires sont envisagées.

Le présent rapport a été préparé par by William Ian Robinson, Shukri Ahmed, Elijah Mukhala et Charisse Tillman sous la responsabilité des secrétariats de la FAO et du PAM à partir d'informations provenant de sources officielles et officieuses. La situation pouvant évoluer rapidement, prière de s'adresser aux soussignés pour un complément d'information le cas échéant.

Henri Josserand
Chef, SMIAR, FAO
Télécopie: 0039-06-5705-4495
Courriel: [email protected]

Kenro Oshidari
Représentant, PAM Soudan
Télécopie: 00249-83-248003
Courriel: [email protected]

Veuillez noter qu’il est possible d’obtenir le présent Rapport spécial sur le site Internet de la FAO (www.fao.org) à l'adresse suivante: http://www.fao.org/giews//

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1. Il n'a pas été possible d'effectuer des vols à basse altitude pour procéder à l'observation aérienne des cultures en 2008, car seuls des vols réguliers étaient prévus.

2. À l'aide de l'outil d'évaluation graphique pour le Sud-Soudan, les évaluateurs ont pu collaborer avec les agriculteurs pour déterminer les niveaux de production à partir de photos de leurs cultures, plutôt que d'établir des estimations chiffrées très contestables par sacs ou feddan, dans la mesure où ces agriculteurs ne raisonnent pas en ces termes.

3. La place du manioc est extrêmement importante dans le Bahr el Ghazal Ouest et les Lacs et gagne du terrain à Warrap. D'après les échantillons prélevés et comme cela s'est vérifié dans toute la ceinture verte jusqu'à Wau et Raja, les rendements varient de 15 tonnes de matière fraîche par hectare (manioc de deux ans) à 30 tonnes voire plus de matière fraiche par hectare (manioc de trois ans).

4. Le recensement de la population et des logements, qui vient d’être effectué et dont les résultats ne sont pas encore publiés, devrait fournir une estimation plus précise de la population. De ce fait, les estimations actuelles pourraient changer dans un sens ou dans l'autre, ce que rendrait nécessaire de refaire les calculs pour chaque comté et chaque État au cas où les données non regroupées feraient apparaître des disparités. Entre-temps, la mission part du principe que l’augmentation de 2,85 pour cent à la mi-2009 comprend les rapatriés.