COORDINATION INSTITUTIONNELLE ET REORGANISATION STRUCTURELLE DANS LE DOMAINE DES PECHES

TABLE DES MATIERES


FI:DP/MAG/85/014
Document de travail
Juin 1990

MADAGASCAR

Rapport préparé pour le projet
Assistance à l'Administration des pêches


par


Jean-Pierre Beurier
(Consultant)


Le présent rapport a été préparé durant l'exécution du projet identifié sur la page de titre. Les conclusions et recommandations figurant dans ce rapport sont celles qui ont été jugées appropriées lors de sa rédaction. Elles seront éventuellement modifiées à la lumière des connaissances plus approfondies acquises au cours d'étapes ultérieures du projet.

Les désignations utilisées et la présentation des données qui figurent dans le présent document n'impliquent, de la part des Nations Unies ou de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites.

ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE
Rome, 1990


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TABLE DES MATIERES

LISTE DES ABREVIATIONS

1.  INTRODUCTION

1.1  Buts de la mission et mandat
1.2  Résumé des conclusions et recommandations

1.2.1 Recensement des contraintes
1.2.2 Recommandations

2.  RAPPEL DES STRUCTURES ADMINISTRATIVES MALGACHES

2.1  Décentralisation
2.2  Administration des pêches et de l'aquaculture
2.3  Commissions interministérielles des pêches
2.4  Enseignement halieutique et océanographique
2.5  Organes de recherche
2.6  Tableaux résumés de l'enseignement et de la recherche halieutique à Madagascar

3.  ANALYSE DE LA SITUATION EN MATIERE DE COORDINATION DE LA FORMATION ET DE LA RECHERCHE HALIEUTIQUE

3.1  La formation
3.2  Recherche marine
3.3  Recherche en eaux continentales

4.  PROPOSITIONS POUR UNE COORDINATION INSTITUTIONNELLE RENFORCEE

4.1  Analyse théorique du système pêche
4.2  Création d'un Comité technique paritaire
4.3  Création d'un Comité interministériel de la mer et des eaux continentales (CIME)
4.4  Restructuration de la formation et de la recherche

4.4.1 Solution à court terme
4.4.2 Modèle à long terme pour la recherche
4.4.3 Modèle à long terme pour la formation

Annexe 1: PERSONNES RENCONTREES

LISTE DES ABREVIATIONS

BIRDBanque internationale pour la reconstruction et le développement
CIMEComité interministériel de la mer et des eaux continentales
CNROCentre national de recherche océanographique
CSRConseil suprême de la révolution
CTHConseil technique halieutique
DASEDirection de l'appui, du suivi et de l'évaluation du MRSTD
DESUPDirection de l'enseignement supérieur
DMMDirection de la marine marchande
DPADirection de la pêche et de l'aquaculture
DPCDirection de la planification et de la coordination
DRFPDirection des recherches forestières et piscicoles
EASTAEcole d'application des sciences et techniques agricoles
ENEMEcole nationale de l'enseignement maritime
FMIFonds monétaire international
IFHInstitute de formation halieutique
MINESUPMinistère de l'enseignement supérieur
MPAEFMinistère de la production animale (élevage et pêche) et des eaux et forêts
MRSTDMinistère de la recherche scientifique et technologique pour le développement
MTMTMinistère du transport, de la météorologie et du tourisme
OMNISOffice militaire national pour les industries stratégiques
ORSTOMInstitut français de recherche scientifique pour le développement en coopération
PDROPlan directeur de la recherche océanographique
SERDISociété d'études et de réalisations industrielles pour le développement
UFSHUnité de formation supérieure halieutique

1. INTRODUCTION

1.1 BUTS DE LA MISSION ET MANDAT

Dans le cadre du projet MAG/85/014 “Assistance à l'administration des pêches et de l'aquaculture”, dont l'un des objectifs consiste à préparer un plan de développement de l'ensemble du secteur halieutique couvrant la période 1991–1995, le consultant a été envoyé à Madagascar du 10 février au 1er mars 1990 avec pour mandat d'assister le Conseiller technique principal dans les activités liées au volet “Coordination des activités des institutions dans le domaine des pêches”.

Le consultant devait:

Le consultant exprime ses remerciements aux instances et personnes rencontrées au cours de la mission.

1.2 RESUME DES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

1.2.1 RECENSEMENT DES CONTRAINTES

La principale contrainte d'ordre administratif réside dans l'absence de concertation régulière interdirections ministérielles. La nécessité pour le Gouvernement de Madagascar d'instaurer des liaisons horizontales pour le secteur des pêches devient prioritaire.

Dans sa “lettre sur la politique de développement” en date du 6 juin 1988, Monsieur le Premier Ministre de la République démocratique de Madagascar a nettement mis l'accent sur la nécessité d'encourager les productions primaires, de faciliter l'accès au travail de la population et de former des cadres.

Il est certain que cette volonté clairement exprimée permet d'envisager une coopération accrue interadministrative afin de réaliser les objectifs nécessaires au développement de la pêche et du secteur marin.

La pêche et l'aquaculture apparaissent comme un bon exemple de production primaire capable de fixer des populations de façon stable et de maintenir des emplois. Une bonne concertation entre Administrations concernées prend donc ici toute son importance.

La principale contrainte d'ordre technique réside dans l'absence d'une véritable recherche halieutique appliquée et dans une certaine dilution de la formation.

Le CNRO créé en 1977 après le départ de l'ORSTOM n'a jamais été réellement activé.

Les quelques personnes qui y sont affectées ne sont ni aidées ni encadrées pour mener à bien les travaux indispensables à la DPA afin de leur fournir les connaissances d'amont nécessaires au pilotage des pêcheries et à la détermination des stratégies d'aménagement à mener.

L'absence de concertation entre l'UFSH (Toliara) et le CNRO (Nosy Be) ainsi que l'absence d'équipe structurée semblent préjudiciables à tout plan de développement des pêches et de l'aquaculture.

Il apparaît important de trouver une solution pour éliminer cette lourde contrainte et pour rationaliser la formation des différents agents économiques du secteur.

1.2.2 RECOMMANDATIONS

L'information: un flux d'information permanent doit être créé entre l'administration, la production et la recherche appliquée afin que la DPA puisse orienter celle-ci en fonction du Plan de développement des pêches. Les liaisons entre la DPA et les administrations de terrain doivent être facilitées, par exemple par l'obtention d'une fréquence radio BLU.

La concertation: la création d'un Comitétechnique halieutique (CTH) réunissant les Directions de la Marine marchande, de la Pêche et de l'Aquaculture, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, est nécessaire au développement de la pêche et de l'aquaculture. La création d'un Comité interministériel de la mer et des eaux continentales (CIME) est la cléde voûte de la réforme administrative permettant une prise en commun de décisions propres au secteur des pêches.

L'enseignement: le programme de la formation doit se concentrer à l'avenir sur la formation des cadres techniques supérieurs, l'organigramme de l'Unité de formation supérieure halieutique (UFSH) doit être modifié afin que les liaisons entre la formation et la Direction de la pêche et de l'aquaculture (DPA) soient effectives et traduisent des rapports administratifs précis juridiquement constatés. L'UFSH devrait avoir un statut juridique sous forme d'institut universitaire. Un organigramme général des formations dans les domaines halieutique et maritime doit faire apparaître une réelle complémentarité sans chevauchements.

La recherche: actuellement la recherche halieutique n'est pas structurellement reconnue et effective. Il convient par conséquent d'éviter une programmation uniquement issue de l'Administration de la recherche mais au contraire de proposer une programmation qui proviendrait essentiellement de la DPA et à la fois de toutes les administrations intéressées, par le biais du Comité interministériel de la mer et des eaux continentales qui répercuterait sur les centres de recherche ses propositions comme celles de la profession.

La gestion des navires de recherche n'est pas efficace: seule une gestion nationale paraît satisfaisante, sans parler du fait que le recours à l'affrètement temporaire est la seule solution financièrement satisfaisante et techniquement fiable pour le pays.

La restructuration administrative: quatre ministères compétents pour la jeunesse, l'éducation, la recherche, épuisent les moyens financiers de l'Etat et multiplient les points de blocage. Il conviendrait de rassembler dans un Ministère d'Etat à l'Education et à la Recherche cet ensemble administratif.

2. RAPPEL DES STRUCTURES ADMINISTRATIVES MALGACHES

Sans revenir sur l'analyse complète des structures administratives malgaches contenue dans divers rapports 1, on peut résumer ainsi le système de la deuxième république.

2.1 DECENTRALISATION

Le Président de la République, Chef de l'Etat, détient le pouvoir réglementaire, commande les forces armées, nomme aux emplois civils et militaires. Le Conseil suprême de la révolution (CSR) lui donne son avis pour toute décision importante mais ne participe plus au gouvernement de façon institutionnelle.

Le Premier Ministre dirige le gouvernement et est responsable de l'Administration. Le gouvernement exécute la politique générale.

L'Assemblée nationale élue au suffrage universel direct est dotée du pouvoir législatif. Elle vote les textes législatifs dans les matiéres qui ne sont pas du domaine du réglement. L'Etat malgache est caractérisé par une organisation administrative décentralisée.

1 En particulier: J.P. Beurier, FAO/GCP/RAS/087/NOR - FL/IOR/82/6, 1982; E. Woitellier, FAO/TCP/MAG/4403; A. Bonzon, FAO/TCP/MAG/4405 - FL/IOR/86/18, 1986

Cette décentralisation a été très poussée puisque le Faritany (Région) devait exercer sur son ressort l'ensemble des prérogatives de l'Etat. Dans la pratique, cette structure a évolué pour conjurer le risque de double blocage de la société: vers le haut où la structure pourrait se heurter à l'autorité ministérielle, vers le bas où elle pourrait rentrer en conflit avec le système structurel traditionnel et très indépendant. L'évolution récente a ainsi montré un certain rééquilibre du fait que l'impact effectif de cette décentralisation poussée a été très relativisée.

2.2 ADMINISTRATION DES PECHES ET DE L'AQUACULTURE

La création du Ministère de la production animale (élevage et pêche) et des eaux et forêts (MPAEF) a considérablement modifié l'ancienne structure du Ministère du développement rural et de la réforme agraire dans lequel la pêche était sous-représentée et artificiellement divisée.

Le nouveau ministère comporte une direction administrative (Etudes-Programmation-Financement) et trois directions techniques (Eaux et Forêts, Elevage, Pêche et Aquaculture).

Les pêches (maritime et continentale) sont élevées au rang d'une direction ministérielle (Décret 85–127 du 3 mai 1985-JORDM 1986 18 mai p. 962) ce qui renforce considérablement les compétences du Directeur lui permettant de négocier au niveau des directions des autres ministères et de structurer un ensemble thématique: les pêches et l'aquaculture.

La DPA comprend trois grands services au niveau central:

et une administration de terrain décentralisée comprenant:

La création du MPAEF et de la DPA apparaît comme très positive. En effet la restructuration du ministère chargé de la production animale par transformation de la Division des pêches maritimes en Direction de la pêche et de l'aquaculture (DPA) a aidé à la création d'un véritable “pilotage” des pêches malgaches. La nouvelle structure de la DPA est mieux adaptée aux besoins du secteur. Elle devra encore être étoffée dans les limites de l'enveloppe budgétaire disponible. Bien que l'ensemble soit viable dès à présent, il serait souhaitable d'améliorer la structure des services décentralisés en remplaçant la structure piramidale (verticale) actuelle par une structure horizontale plus simple permettant d'accélérer les flux d'information et de décision administratives.

La nouvelle formation d'halieutes à Toliara (UFSH) apparaît comme une bonne source de recrutement pour renforcer la DPA.

2.3 COMMISSIONS INTERMINISTERIELLES DES PECHES

En 1966 fut créée une Commission interministérielle des pêches maritimes (regroupant des représentants des services de la pêche; de la Marine marchande, du Plan, de l'Industrie, des Affaires étrangères, de l'Information, du Centre national de recherche océanographique (CNRO) et de la Défense; les deux dernières institutions n'ayant que voix consultative) au sein d'un Comité d'exploitation de la mer (qui n'aura jamais de vie effective). La Commission ne prendra forme que par le Décret no 71–238 du 18 mai 1971 créant une sous-commission de chalutage en son sein et lui accordant essentiellement les attributions suivantes:

En pratique la sous-commission de chalutage tend à se substituer à la Commission interministérielle. Cette solution embryonnaire de concertation est naturellement insuffisante.

On peut noter également que le Décret no 62–321 du 3 juillet 1962 porte création d'un Conseil Supérieur de la protection de la nature composé de représentants de divers ministères, dont ceux chargés des pêches. Le Conseil est obligatoirement consulté sur tous les projets concernant la réglementation des pêches intérieures; il peut en outre créer une commission spécifique pour ce sous-secteur. Il semble toutefois que le Conseil ne soit plus actif depuis de nombreuses années, en ce qui concerne la pêche continentale.

2.4 ENSEIGNEMENT HALIEUTIQUE ET OCEANOGRAPHIQUE

L'université malgache est décentralisée et les universités de Faritany sont dirigées par un recteur. Il existe deux diplômes d'études approfondies traitant des problèmes de ressources vivantes dépendant du Ministère de l'enseignement supérieur:

Aucun enseignement spécifique ne traite de limnologie.

Il existe également à Toliara au sein de l'Université une Unité de formation supérieure halieutique (UFSH) mise en place en 1987 et soutenue par un projet PNUD/FAO (MAG/84/002) de formation des cadres supérieurs de la pêche à Madagascar qui avait été proposé dans un rapport FAO sur la formation halieutique 1. Cette formation logée dans les locaux inutilisés de la Station marine de Toliara n'a pas de statut juridique précis. Toutefois, l'UFSH devra prendre en considération la capacité limitée d'absorption pour le secteur d'ingénieurs halieutes. Des propositions pour se doter d'un statut sont à l'étude actuellement au sein du Conseil d'orientation de l'UFSH.

Il existe à Mahajanga une école de navigants du Ministère du transport, de la météorologie et du tourisme (MTMT): l'Ecole nationale de l'enseignement maritime (ENEM) dont le but est de former des navigants (capitaines, lieutenants et matelots) et notamment des patrons pêcheurs, ainsi que des marins mécaniciens et des techniciens radio. C'est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle de la Direction de la marine marchande (DMM). Le MPAEF sur proposition de la DPA a créé en octobre 1986 une Ecole d'application des sciences et techniques agricoles (EASTA) dont le but est de former des agents techniques. Cette école ne semble pas disposer des moyens financiers nécessaires à son fonctionnement.

Enfin, un projet financé par la GTZ est établi auprès de la circonscription des pêches et de l'aquaculture de Nosy Be. Ce projet assure, entre autres, une formation de base aux jeunes pêcheurs moyennant des stages de six semaines. Cette formation de qualité, liée au projet, est donc temporaire et très limitée géographiquement.

On constate dans l'ensemble une grande disparité dans les niveaux de formation et un éclatement territorial qui ne serait bénéfique que si toutes les formations réalisaient leurs objectifs. Il faudrait établir de manière précise les fonctions de chaque formation pour assurer une bonne complémentarité de l'ensemble.

1 Fontenelle (G) et Ralison (A): Rapport sur la définition de la structure de la nouvelle unité de formation supérieure halieutique à Madagascar FI:DP/MAG/002-FAO-Rome 1985 (5 p.)

2.5 ORGANES DE RECHERCHE

Sur le juridique, il existe deux centres de recherches maritimes compétents en matière océanographique ainsi qu'un centre hydrobiologique.

La Station marine de Toliara existe depuis fort longtemps et dépend de l'Université de Toliara. Cette station n'est pas active car elle est dépourvue de ressources humaines, techniques et financières. Ses locaux sont utilisés par l'UFSH.

Le Centre national de la recherche océanographique situé à Nosy Be, est rattaché au Ministère de la recherche scientifique et technologique pour le développement (MRSTD). Ce centre créé par le décret 77–081 du 4 avril 1977 (JO du 6 août 1977 p. 2066) modifié, se présente sous la forme d'un établissement public à caractère industriel et commercial doté d'une personnalité civile et d'une autonomie financière. Il participe à l'élaboration de la politique nationale en matière de recherche et assure l'exercice des recherches concernant les ressources non stratégiques de la mer.

Le CNRO comprend quatre départements:

Ce centre dispose d'une bibliothèque (à jour jusqu'en 1974), de quelques chercheurs et d'un important personnel d'exécution. On remarquera à son propos un problème de hiérarchie de textes juridiques: le décret le créant lui confie la coordination de la recherche océanographique, alors que la loi créant la DPA confie à celle-ci l'ensemble de l'halieutique y compris la recherche d'informations scientifiques: la loi est supérieure au décret.

La Direction des recherches forestières et piscicoles (DRFP) est l'un des centres nationaux de recherche du Centre national de recherche pour le développement rural (Faibe Fikarohana Momba ny Fampandrosoara ny Ambanivolitra: FOFIFA) qui a pour vocation d'assurer la recherche agricole, forestière et piscicole (eaux continentales). La DRFP a pour tâche d'exécuter les recherches en matière de pêche fluviale et d'élevage en eau douce. Pour le moment elle ne semble pas active.

Il existe enfin un Office militaire national pour les industries stratégiques (OMNIS) dont la direction est assurée par des militaires. Cet office est placé directement sous la responsabilité du Président de la République. L'OMNIS a le monopole de la recherche pétrolière et minérale en mer à Madagascar.

D'emblée, il apparaît ici une contradiction entre l'OMNIS qui a le monopole de la recherche minérale et le CNRO qui a également un programme analoque de recherche dans son “département” de géologie.

2.6 TABLEAUX RESUMES DE L'ENSEIGNEMENT ET DE LA RECHERCHE HALIEUTIQUE A MADAGASCAR

ENSEIGNEMENT

RECHERCHE

3. ANALYSE DE LA SITUATION EN MATIERE DE COORDINATION DE LA FORMATION ET DE LA RECHERCHE HALIEUTIQUES

Avant de formuler des propositions, il convient de montrer que la concertation s'inscrit bien dans les prises de positions des diverses institutions concernées.

3.1 LA FORMATION

Le conseil d'orientation a préparé en 1988 un organigramme sur les fonctions possibles de l'UFSH en plus de son rôle de formation. Ce projet est reproduit ci-après.

Le conseil d'orientation de l'UFSH a eu l'occasion de rendre des rapports sur la mise en place de l'unité de formation notamment en octobre 1989 avec un document intitulé “Situation et problèmes actuels” qui constate:

Le document précise également qu'il serait souhaitable de concrétiser la collaboration entre les deux ministères par une participation active et constructive des représentants du MPAEF. Une concertation permanente devrait assurer une meilleure coordination dans la réalisation conjointe des objectifs”.

Enfin le Conseil d'orientation dans son compte rendu du 17 février 1989 précisait que “suivant le conseil du Secrétaire général du MRSTD une concertation active devait être engagée entre l'UFSH et le CNRO… pour une meilleure coordination des activités” et que cela devrait être concrétisé par le biais d'une convention.

Dans le cas de la promotion d'une telle collaboration, il est essentiel de prendre en compte également l'ENEM qui forme les gens de mer et collabore avec la DPA.

3.2 RECHERCHE MARINE

On a eu l'occasion d'analyser la structure de la recherche océanographique à Madagascar dans le rapport de J.P. Beurier, “Les zones sous juridiction, la législation des pêcheries et l'organisation structurelle du secteur des pêches à Madagascar. Projet FAO/GCP/RAS/087/NOR, FAO Rome, 1982 (p. 15–16).

La situation n'a pas évolué de façon sensible. La station marine de Toliara n'est pas active et n'est utilisée que par l'équipe de l'UFSH.

Le CNRO de Nosy Be en dix ans, a édité lui-même une dizaine de publications.

Mais les différentes tentatives de collaboration n'ont pu aboutir:

De plus, il n'existe pas de collaboration avec les pêcheries de Nosy Be qui ont pourtant des demandes précises à formuler (évaluation des stocks - socio-économie, etc.). Il n'a pas existé de collaboration effective avec le chercheur de l'association thonière du fait de l'absence d'embarquement possible.

Enfin et surtout, la DPA n'a pas de résponse concrète quant aux études qu'elle souhaiterait voir mener.

Il n'y a donc pas à l'heure actuelle de recherche halieutique structurellement reconnue et effective.

Une mission de la Banque mondiale (BIRD) a travaillé sur la recherche océanographique en septembre et octobre 1988 et a étudié le document de base du Plan directeur de la recherche océanographique (PDRO - septembre 1988) élaboré par le Ministère de la recherche scientifique et technologique pour le développement (MRSTD).

Il ressort du plan directeur la sélection de six programmes:

L'ensemble de ces programmes concerne la recherche appliquée dans le domaine des ressources vivantes.

Ces sous-programmes attestent, au demeurant, que cette recherche appliquée est entièrement tournée vers la science halieutique (sous-programmes: pêche lagunaire, pêche maritime, évaluation des stocks, rejets du chalutage, qualité des denrées alimentaires, technologie halieutique, programme “thon”, etc.).

Il s'agit bien là de l'amont du travail de la DPA. Le CNRO se propose donc d'informer le “pilote des pêches” c'est-à-dire la DPA. Il est en conséquence fondamental que le flux d'information passe bien entre les deux organismes et que la DPA puisse en fonction du Plan de développement des pêches orienter les recherches du CNRO. Du reste dans sa lettre au MRSTD du 18 octobre 1988, le chargé des projets agricoles de la Banque mondiale concluait à propos du PDRO, que la stragégie à mettre en place concernait “le développement de la conservation des ressources océaniques et notamment des ressources halieutiques”. La BIRD insiste même sur les programmes prioritaires: élevage de crevettes, utilisation des poissons rejetés, études des stocks, et conclue qu'elle pouvait envisager de financer ces projets s'il s'agit bien de recherche appliquée. La Banque mondiale est beaucoup plus réservée quant aux autres projets. En outre, le rapport de la Société d'études et de réalisations industrielles pour le développement (SERDI) de juin 1989 (Diagnostiquant le CNRO) émet également quelques réserves1.

Le CNRO va du reste lui-même dans le même sens: dans son document de projet “Recherches - Développement en océanographie” en date du 9 décembre 1988, on trouve dans tous les programmes des références aux finalités économiques de la recherche (par. III programme langouste, par. III programme captures secondaires) et à la concertation avec les partenaires économiques et techniques (par. III programme langouste, par. III programme récif corallien, par. IV programme crabe des mangroves, par. III programme élevage de crevettes).

On constate une bonne unité de vue entre la Banque mondiale et le CNRO lui-même sur la nécessité de coordination. Malgré tout on ne peut que noter l'absence de traduction dans les faits de cette volonté commune. La participation du Directeur de la DPA au Conseil d'administration du CNRO est certes utile mais ne concerne que la gestion de l'organisme et pas son orientation.

1 Etudes et analyses diagnostiques des possibilités et contraintes du CNRO - No 205 - MRSTD/SG/DARSE 3 - octobre 1989

3.3 RECHERCHE EN EAUX CONTINENTALES

Le Centre national de recherche pour le développement rural (FOFIFA) dépendant du MRSTD, a été créé pour diriger la recherche appliquée en matière agricole, forestière et piscicole. La Direction des recherches forestières et piscicoles lance des centres nationaux de recherche sous sa tutelle.

Sa participation à une action de coordination administrative est utile pour conseiller la DPA dans le domaine de sa compétence.

4. PROPOSITIONS POUR UNE COORDINATION INSTITUTIONNELLE RENFORCEE

4.1 ANALYSE THEORIQUE DU SYSTEME PECHE

On rappellera brièvement l'analyse du système pêche qui a fait l'objet de développement dans le rapport de J.P. Beurier, “Les zones sous juridiction, la législation des pêcheries et l'organisation structurelle du secteur des pêches à Madagascar. Projet FAO/GCP/RAS/087/NOR, FAO Rome, 1982 (p. 20 et suivantes):

La pêche repose sur des rapports triangulaires entre:

Entre ces trois pôles l'information doit circuler dans les deux sens et la concertation doit être constante. La convergence des flux d'information a lieu au niveau national, elle se fait vers le décideur administratif qui doit être le “pilote” du système pêche.

Le “pilote” doit faire réagir l'ensemble du système pour une meilleure utilisation de la ressource, il doit éviter la surpêche comme la sous-exploitation mais aussi la surproduction par rapport au marché.

Son rôle économique est donc aussi important que son rôle halieutique.

Pour un bon “pilotage” de l'ensemble, il convient alors de respecter le schéma des flux d'information et des flux de décision qui commandent la marche du système.

Le réseau de statistiques est bien sûr la condition sine qua non de la réussite du pilotage.

Dès lors le pilote peut “accélérer” ou “freiner” le système selon les besoins. L'ensemble est très souple et adaptable à toute situation particulière (un stock, une zone, une communauté de pêcheurs, etc.).

Pour la bonne application de ce schéma les liaisons avec le terrain sont fondamentales, or elles demeurent encore à Madagascar un facteur limitant. Le consultant recommande l'affectation à la DPA d'une longueur d'onde radio afin que les vacations quotidiennes puissent être établies sur ondes moyennes avec les principaux services décentralisés 1.

Cela permettrait un bon passage des informations et assurerait en même temps un meilleur contrôle du travail de terrain effectivement réalisé.

1 L'existence sur le marché de matériel radio simplifié permet d'équiper les administrations d'appareils relativement peu coûteux et maniables par des non-spécialistes (BLU). Du reste ce système existe déjà pour le coton (HASYMA) et pour les travaux publics

4.2 CREATION D'UN COMITE TECHNIQUE PARITAIRE

Afin de remédier à l'absence de circulation d'information, et de concertation en amont, et l'absence de décisions collectives en aval, il conviendrait de créer une structure de rencontre, point de passage obligé de l'information avant la prise de toute décision concernant le secteur des ressources vivantes des espaces marins sous juridiction malgache et des eaux continentales.

La solution pourrait être la création d'un comité technique paritaire appelé “Comité technique halieutique” (CTH). Son rôle consisterait à souder la coopération entre les Directions compétentes des quatre ministères concernés par ce problème.

L'organigramme pouvait être le suivant1:

1MPAEF:Ministère de la production animale et de eaux et forêts
DPA:Direction de la pêche et de l'aquaculture
DRFP:Direction des recherches forestières et piscicoles
MINESUP:Ministère de l'enseignement supérieur
DESUP:Direction de l'enseignement supérieur
MRSTD:Ministère de la recherche scientifique et technoloique pour le développement
DPC:Direction de la planification et de la commercialisation
MTMT:Ministère des transports, de la météorologie et du tourisme
DMM:Direction de la marine marchande

Le CTH serait coordonné par un secrétaire provenant de la DPA dont le rôle serait de faire circuler l'information entre DPA - UFSH - CNRO - ENEM - DRFP; d'organiser une réunion par semestre des directeurs des quatre services ministériels.

L'ordre du jour de ces réunions semestrielles devrait prendre en compte:

Le CTH ne saurait être un simple organe de conseil pour les ministres responsables; il conviendrait en effet qu'il soit créé par convention interministérielle qui préciserait les limites de ses compétences, et qui, dans le strict cadre de celles-ci, accorderait au CTH une compétence délibérative.

Ainsi les décisions prises selon l'ordre du jour des réunions semestrielles seraient applicables dès signature d'un document de séance par les quatre directeurs concernés.

Les compétences seraient bien sûr exercées dans le cadre de l'application du Plan de développement des pêches, du Plan directeur de la recherche océanographique et du Plan de formation des cadres halieutiques.

Le secrétaire du CTH assurerait l'exécution des décisions, et la circulation de l'information.

Ne feraient l'objet d'application immédiate que les décisions reprises au document de séance (procès verbal) ayant fait l'unanimité des quatre parties.

En cas de désaccord, la question en litige ferait obligatoirement l'objet d'une nouvelle inscription à l'ordre du jour de la séance suivante.

Tous les ans, un compte rendu serait fait par le secrétaire du CTH cosigné par les quatre directeurs et transmis aux ministres de tutelle. Ce compte rendu décrirait en termes non scientifiques l'avancement des efforts de coopération et mettrait l'accent sur les éventuelles questions litigieuses afin qu'elles trouvent une solution en réunion interministérielle ad hoc.

La bonne marche de ce comité technique serait un facteur favorable à une meilleure connaissance du milieu marin et des ressources humaines, permettant ainsi un meilleur “pilotage” de la pêche dont la DPA a la charge.

Compte tenu des aspects techniques particuliers propres d'une part au milieu marin, d'autre part au milieu continental, il conviendrait de distinguer deux sous-comités:

Les questions générales seraient débattues en séance plénière du CTH.

4.3 CREATION D'UN COMITE INTERMINISTERIEL DE LA MER ET DES EAUX CONTINENTALES (CIME)

La création d'une DPA et d'une UFSH, la relance de la recherche au CNRO venant s'ajouter à l'ordonnance 85–013 du 16 septembre 1985 fixant les limites des zones maritimes de la République démocratique de Madagascar (JO du 21 septembre, p. 1917), prouvent la volonté du Gouvernement malgache d'appliquer une réelle politique de la mer.

Dans ces conditions, compte tenu des intérêts parfois divergents des divers utilisateurs des eaux côtières, et vu l'ampleur des projets communs en cours, il semble opportun de créer un système de coordination des actions de l'Etat en mer.

On a signalé dans le rapport de J.P. Beurier, “Les zones sous juridiction, la législation des pêcheries et l'organisation structurelle du secteur des pêches à Madagascar. Projet FAO/GCP/RAS/087/NOR, FAO Rome, 1982 (p. 14 et 24) l'existence d'une commission des pêches maritimes (Décret 71–238 - JO du 5 juin 1976, p. 1180) et d'une sous-commission du chalutage dont le rôle est de traiter les problèmes liés à la pêche industrielle; ces commissions réunissent les représentants de six ministères et forment la commission interministérielle des pêches maritimes. Toutefois son champ d'application est devenu beaucoup trop restreint par rapport à l'ampleur de la tâche.

Il conviendrait de la supprimer pour la remplacer par un organe plus vaste aux compétences plus étendues: le comité interministériel de la mer et des eaux continentales (CIME).

Tous les ministères compétents y seraient représentés:

Défense - Finances - Affaires étrangères - Elevage/Eaux et Forêts - Recherche - Transport - Industrie - Plan - Justice - Commerce.

Chaque ministère serait représenté par un Directeur ministériel en session ordinaire et par le ministre en session extraordinaire.

Les sessions ordinaires: une session par semestre pour assurer la coordination, la concertation et l'information sur tous les problèmes administratifs liés à la mer.

Serait de sa compétence la prise de décision sur dossier pour:

Sur les thèmes concernant:

Les décisions du CIME consignées dans le procès verbal de session et prises à la majorité simple sont entérinées par les ministres de tutelle et ont valeur de décisions interministérielles.

Les sessions extraordinaires réuniraient en cas de besoin le CIME composé des ministres de tutelle qui prendraient les décisions d'urgence qui s'imposent (résoudre le problème de la pollution de la mer, intervenir en mer en cas de menace de pollution, prendre les mesures qui s'imposent en cas de typhon, etc.).

Les décisions consigées au procès-verbal seraient exécutoires immédiatement.

Les sessions ordinaires seraient présidées par le représentant du Ministère de la défense et les sessions extraordinaires par le Premier Ministre.

Autant que de besoin, lors des sessions ordinaires, il pourrait être décidé de réunir dans les intersessions les représentants de quelques ministères intéressés par une question particulière (licences de chalutage par exemple) à la demande de l'administration la plus intéressée.

1 Un premier exemple nécessitant une coordination rapide des actions administratives, est la construction portuaire lancée par le Ministère chargé des transports qui désire connaître les besoins de la DPA en matière de ports, jetées ou cales de pêche

4.4 RESTRUCTURATION DE LA FORMATION ET DE LA RECHERCHE

La structure de la formaton halieutique reste complexe et disparate même si de sensibles progrès ont été constatés. Il sera nécessaire de formuler des propositions de simplification de l'ensemble et notamment de l'UFSH afin que ce volet fondamental de la pêche forme un tout homogène et complémentaire.

En ce qui concerne la recherche, la situation actuelle n'est pas satisfaisante et amène à la conclusion que la recherche halieutique à Madagascar est insuffisante. Ce fait est préjudiciable à l'ensemble du système-pêche.

Il convient de permettre à la DPA d'obtenir le flux d'informations scientifiques nécessaire à la prise de décisions dans le pilotage des pêcheries malgaches. C'est pourquoi devant l'urgence du problème, il sera proposé une solution à court terme permettant de relancer la recherche aussi vite que possible, puis une solution à long terme permettant une réelle restructuration de la recherche halieutique malgache.

4.4.1 Solution à court terme

4.4.1.1 Formation

La direction des enseignements supérieurs du Ministère de l'enseignement supérieur, fait un effort important en matière de formations liées directement à la profession.

Ainsi, l'UFSH est la concrétisation de cet effort dans un domaine très professionnalisé. Même si les négociations ne sont pas encore terminées, il semble évident que maintenant le contenu de la formation supérieure ne variera plus de façon sensible.

Cependant, il apparaît nécessaire de modifier l'organigramme figurant dans le présent rapport à propos de la création de l'UFSH: les flèches de liaisons entre la formation et l'administration ne traduisent pas de rapports administratifs précis et encore moins juridiques entre les partenaires.

Les prochaines réunions de négociations vont fixer le statut de l'UFSH. Il semble qu'on se dirige vers un Institut de formation halieutique (IFH)1 qui aurait une certaine autonomie administrative et financière. Cette solution apparaît comme la plus satisfaisante car il n'est pas souhaitable que l'UFSH se cantonne dans la formation trop pointue d'ingénieurs mais qu'elle assure également celle de techniciens supérieurs des pêches, qui pourraient progressivement constituer l'assise territoriale de la DPA. Enfin, l'UFSH pourrait également organiser des cycles de formation permanente afin de recycler périodiquement le personnel de la DPA aussi bien du siège que des services provinciaux, des circonscriptions, des sections et des brigades. Il convient de ne pas faire double emploi avec l'Ecole d'application des sciences techniques agricoles (EASTA) de Mahajanga créée par le MPAEF en octobre 1986. Cette école pourrait se tourner utilement vers la formation des pêcheurs en plus de l'actuelle formation de techniciens de base

1 Il existe déjà ce type d'institut à Madagascar comme l'Institut de comptabilité (INSCAE) créé en 1986 (décret 86–209 du ll juillet). Le Recteur de Toliara semble préférer - à raison - cette solution donnant de la souplesse à l'organe

Le système proposé permettrait une concertation permanente entre les responsables de la formation, de l'information et de la décision en matière halieutique. On notera que ces différentes formation seront également utiles pour le personnel des entreprises privées.

Pour les promotions d'ingénieurs halieutes la concertation fonctionne bien entre la DPA et l'UFSH puisque plusieurs sujets de mémoires ont été donnés aux étudiants sur proposition de la DPA. On pourrait imaginer également que la DPA décide d'un certain nombre de lieux de stages en raison des informations qu'elle désire obtenir. Ceci renforcerait encore la montée du flux d'information vers le décideur du système pêche.

Les mémoires des étudiants sont d'un bon niveau, les thèmes montrent qu'il s'agit de recherche appliquée, combien utile pour la DPA.

C'est pourquoi, le consultant propose que la DPA instaure un prix de mémoire par an: le meilleur se verrait remettre un certificat de prix par le Directeur de la pêche et de l'aquaculture.

En valorisant la recherche appliquée la DPA aiderait la créativité intellectuelle malgache, motiverait les étudiants et montrerait les liens étroits entre l'Administration des pêches et la formation halieutique. Dans le même sens, il est proposé que la DPA aide le Recteur de l'Université de Toliara pour l'obtention de bourses de 3e cycle universitaire pour les étudiants dont les thèmes d'études intéressent la pêche.

En conséquence, on propose une modification des organigrammes des projets UFSH d'octobre 1989.

L'institut à créer pourrait s'articuler comme suit:

L'organigramme de la collaboration avec les adminsitrations pourrait se lire comme suit:

On peut noter enfin, au niveau doctorat que les chercheurs du CNRO qui ne sont pas docteurs sont inscrits en thèse à l'Université de Toliara où ils sont suivis en collaboration avec les Universités d'Aix-Marseille ou Rennes.

Il n'existe pas de formation spécifique en droit ou en économie des pêches à Madagascar. Il est recommandé que la DPA dispose d'un ou deux économistes des pêches. On ne saurait envisager une formation spécifique, mais il conviendrait que quelques jeunes maîtres en économie puissent recevoir une formation de 3e cycle à l'étranger pour permettre à la DPA de choisir un diplômé capable de poursuivre l'important travail fait actuellement dans le cadre du projet FAO/MAG/85/014. Le suivi du programme statistique, par exemple, apparaît fondamental pour les opérations de “pilotage” de la DPA.

En droit, il n'existe pas non plus d'enseignement spécialisé en droit de la mer et en droit maritime à Madagascar, mais la Direction de l'enseignement supérieur (DESUP) va créer un important centre d'enseignement du droit à Fianarantsoa. Il semble donc intéressant que, dans le cadre du développement des activités maritimes à Madagascar (notamment depuis l'existence d'une zone économique exclusive, et du fait de l'existence de la Société malgache des transports maritimes) quelques jeunes maîtres en droit soient formés en 3e cycle à l'étranger dans les matières maritimes (Droit de la mer - Droit des pêches - Droit maritime) afin de conseiller, si besoin est, les administrations chargées des problèmes maritimes et tout spécialement la DPA.

4.4.1.2 Restructuration provisoire de la recherche halieutique

Il est très important de restructurer la recherche en fonction de l'ensemble du potentiel national disponible (humain et matériel). Il faut tout d'abord opérer une distinction entre la recherche océanographique générale et la recherche halieutique.

a) Recherche océanographique générale

Cette recherche resterait structurée dans le cadre actuel:

  1. Direction-programmation = DPC1 du MRSTD
  2. Réalisation = CNRO
  3. Suivi-contrôle = DASE2 du MRSTD

1 Direction de la planification et de la programmation du Ministère de la recherche dont dépend directement le CNRO

2 Direction de l'appui, du suivi et de l'évaluation du MRSTD qui assure le contrôle des actions menées

Il s'agit ici de recherches plus fondamentales concernant directement le MRSTD. Ceci n'empêcherait pas la DPA de proposer éventuellement à celui-ci des thémes de recherche qui lui sembleraient utiles. Ces travaux pourraient être exécutés sur ordre du MRSTD par le CNRO ou par d'autres organismes nationaux que le Ministére pourrait utiliser en finançant les études sur le Fonds d'appui de la recherche.

La DPA pourrait également proposer des sujets de mémoires pour les étudiants de 3e cycle en écologie et gestion de l'environnement de la Faculté des sciences d'Antananarivo.

b) Recherche halieutique appliquée

En ce qui concerne l'halieutique, le problème de la recherche est très différent dans la mesure où celle-ci est inconcevable sans résultats pratiques sur la profession (cf. l'IFREMER en France ou la NOAA aux Etats-Unis). Dans ces conditions la programmation ne peut se faire sans l'accord des partenaires professionnels puisque ce sont eux qui sont les premiers confrontés aux problèmes à résoudre.

Dans ces conditions une programmation uniquement issue de l'Administration de la recherche, ou bien qui n'est prise en compte que si elle est acceptée par cette même Administration n'apparaît pas une solution souhaitable.

C'est au contraire à la recherche appliquée de servir d'information d'amont aux partenaires de la profession. Les thèmes de recherche pour servir la profession sont limités par les priorités nationales concernant l'enveloppe budgétaire nationale et les moyens techniques disponibles.

Pour atteindre cet objectif, on pourrait restructurer le CNRO comme suit:

La répartition du travail entre les trois organismes serait faite sur une base logique en fonction:

Ainsi le CNRO pourrait se voir confier plus particulièrement les études sur la crevette, les études statistiques et de terrain concernant le nord de l'île et les expériences localisées dans le nord.

L'UFSH mènerait plus particulièrement les études sur la langouste, les études statistiques et de terrain concernant le sud de l'île et les expériences qui y seraient localisées1, ainsi que la microbiologie.

Enfin, la DRFP serait responsable de l'ensemble des programmes continentaux.

Ceci permettrait d'éviter des études faisant double emploi telle que celle programmée par le CNRO sur la langouste au sud de Madagascar, alors même que l'actuelle UFSH va rendre son rapport sur le même sujet à la fin de 1990.

Ceci permettrait également d'éviter la dispersion géographique coûteuse des chercheurs (projet d'installation d'un chercheur et de deux techniciens du CNRO à Taolagnaro) alors même que les équipes sont déjà insuffisantes.

Enfin, ceci permettrait d'éviter un surcoût inutile de la recherche alors que l'enveloppe budgétaire de la recherche marine est limitée. Afin d'éviter la complexité administrative actuelle2, on peut souhaiter voir rassembler l'ensemble des ministères chargés de l'enseignement et de la recherche en un seul Ministère d'Etat à l'enseignement et à la recherche. La coordination serait améliorée à moindre coût.

1 Exemple: en ce qui concerne les radeaux de dispositifs de concentration de poisson (DCP) de l'Association thonière, on peut fort bien imaginer une expérimentation menée au nord par le CNRO et une au sud menée par l'UFSH avec confrontation des résultats par l'association

2 Actuellement il existe, outre un Ministère chargé de la jeunesse, un Ministère pour l'enseignement de base, un Ministère pour l'enseignement supérieur et un Ministère pour la recherche. Le coût de cette répartition administrative est élevé et l'efficacité diluée

c) Les navires affectés à la recherche1

En ce qui concerne les navires de pêche affectés à la recherche, la situation n'est pas satisfaisante.

Une telle situation est préjudiciable à la recherche, la gestion des navires ne peut être réalisée à Madagascar qu'au niveau national et suppose done que tous les ministères intéréssés gérent en commun le ou les navires opérationnels. En conséquence, la programmation de leurs jours en mer pourrait être assurée lors des sessions ordinaires du Comité interministériel de la mer, et la gestion par un groupement d'intérêt économique des 3 ministéres les plus directement intéréssés (MPAEF - MINESUP - MRSTD). On peut rappeller ici que la FAO propose une liste de navires de recherche océanographique disponibles à l'affrètement.

4.4.1.3 Coopération avec la Défense nationale

Il paraît indispensable qu'une collaboration puisse s'instaurer entre la DPA et l'OMNIS. Au cas où des zones intéressant la pêche feraient l'objet de campagnes de recherche par l'OMNIS, il serait souhaitable qu'une coordination des actions de recherche soit effectuée pour permettre des travaux pluridisciplinaires.

4.4.2 Modèle à long terme pour la recherche

Pour la premiére fois le secteur des pêches de Madagascar bénéficie du support d'un projet spécifique dont les travaux devront être pris en compte par le plan économique national qui couvrira les années 1991–1995. Dans ce contexte, il convient de proposer une restructuration de l'ensemble de la recherche en mer et en eau douce comme suit:

1 Le consultant recommande que le navire école de l'ENEM puisse en dehors de la formation être utilisé pour des campagnes en mer programmées par la DPA

4.4.2.1 Au sommet de la pyramide administrative

Une concentration ministérielle s'impose, ce qui du reste a été demandé par le Fonds monétaire international (FMI). Il conviendrait de rassembler dans un Ministère d'Etat l'enseignement et la recherche car la coordination des actions dans ces domaines est nécessaire. On obtiendrait alors:

Ces deux directions dont les actions seraient coordonnées par le Ministère d'Etat de l'enseignement et de la recherche pourraient directement collaborer avec la DPA et la DMM au sein du Comité technique halieutique pour les actions proprement halieutiques.

4.4.2.2 Au niveau des Directions ministérielles

Pour les actions nationales,la coordination serait assurée au sein du CIME qui serait chargé de vérifier la complémentarité des niveaux des enseignements maritime et halieutique et de programmer les thèmes de la recherche océanographique et limnologique malgache, tout en laissant le soin des sujets et des moyens de cette recherche aux organismes spécialisés.

En ce qui concerne les centres de recherche, dans un pays jeune, il n'est pas possible de disperser les moyens humains, financiers ou matériels. En conséquence l'ossature de la recherche serait la suivante:

La coordination de la recherche et la répartition des tâches précises entre les organismes de recherche seraient faites sous la responsabilité de la DPC à laquelle tous les organismes intéressés devraient rendre compte des résultats des travaux effectués sur crédits alloués par le CIME.

4.4.2.3 Au niveau des centres de recherche

Les Etablissements publics administratifs ou industriels et commerciaux seraient libres, en dehors des actions thématiques programmées par le CIME ou le CTH, de réaliser sur crédits propres, d'autres recherches programmées par eux-mêmes dans le cadre général d'un plan national. Ainsi ces centres seraient libres dans leurs recherches fondamentales.

Les Universités décentralisées peuvent naturellement créer des centres de recherche; ainsi l'Université de Toliara peut, dans le cadre de cette réforme, réactiver la station marine si la programmation est imposée comme indiquée ci-dessus.

La DPC peut conserver au CNRO son statut juridique d'Etablissement public industriel et commercial qui lui assure la personnalité juridique, l'autonomie financière et une grande souplesse de fonctionnement, mais doit assurer un contrôle effectif sur le rendu des travaux et devra commenter les résultats de la recherche devant le CIME qui, ayant financé les actions thématiques programmées, sera en fin de compte l'usager principal de cet ensemble complémentaire de recherche.

La tutelle de l'administration de la pêche, voire de l'ensemble des administrations chargées de la mer et des eaux sur les organismes chargés de la recherche appliquée est la pierre angulaire de cette réforme.

De nombreux pays ont, du reste, choisi une telle solution (Tanzanie, Maroc, Mali, Mauritanie). Jusqu'à présent Madagascar se présente sur ce point comme un cas particulier. C'est pourquoi une tutelle de la programmation au niveau interministériel semble être une solution sage. Il convient de désenclaver rapidement Madagascar en ce qui concerne les sciences océanographiques et limnologiques.

Dans les pays de tradition maritime, la collaboration entre les organes de recherche appliquée, l'Administration compétente et la profession, est permanente (Etats-Unis - France - Japon, par exemple). Ce type de solution permet d'éviter les chevauchements.

4.4.2.4 Au niveau des moyens à la mer

Comme susmentionné, la gestion de ceux-ci ne peut être que nationale, comme cela se fait à l'étranger; chaque organisme ne peut disposer utilement de moyens propres coûteux et délicats à entretenir comme à gérer.

Encore faut-il préciser qu'en halieutique, le moyen le moins coûteux et le plus fiable d'assurer des jours en mer effectifs est d'avoir recours à l'affrètement à la journée de navires de pêche tels que les crevettiers en période de fermeture de cette pêche ou des navires artisanaux. Cette solution efficace a fait ses preuves dans de nombreux pays.

4.4.2.5 Une telle réforme devrait s'accompagner d'une coopération en matière de recherche halieutique avec des centres étrangers.

En tout état de cause, la recherche halieutique tropicale ayant fait l'objet de très nombreuses études à l'étranger, il serait souhaitable que des organismes spécialisés dans ce type de travail aident Madagascar.

Il pourrait être utile pour les pêches maritimes et continentales de Madagascar, qu'une convention de coopération soit signée par le Gouvernement de la République démocratique de Madagascar avec l'un des grands organismes spécialisés tels que:

Ces centres pourraient, en affectant des chercheurs spécialisés en halieutique tropicale et en hydrobiologie, encadrer les recherches appliquées précises et bien ciblées répondant aux demandes des partenaires malgaches. Ils pourraient également contribuer à la formation professionnelle des chercheurs nationaux. Ils pourraient enfin aider à la détermination des moyens appropriés pour répondre à la demande du CIME.

4.4.3 Modèle à long terme pour la formation

La solution paraît ici moins complexe que pour la recherche dans la mesure où il existe déjà des organismes fonctionnant de façon satisfaisante.

Il convient ici plutôt d'assurer la complémentarité de l'ensemble des formations que de les réformer.

Ces formations doivent rester souples, à savoir s'adapter aux besoins qualitatifs et quantitatifs de la mer et des eaux douces à Madagascar.

En conséquence, les enseignants doivent être adaptables, selon les besoins, à plusieurs niveaux de formation.

C'est ici le CTH qui serait le coordonnateur des besoins en ce qui concerne:

-les navigants-officiers(pont et machine)
- marins
-les ingénieurs halieutes
-les techniciens supérieurs
-les techniciens
-les animateurs socio-professionnels
-la plongée scientifique

On peut à long terme conserver la structure administrative actuelle, compte tenu de la spécificité “mer” de ces formations, et garder le schéma suivant si une bonne complémentarité est assurée:

DMM →ENEM=navigants
DESUP →UFSH=ingénieurs (en cas de besoin); techniciens supérieurs; plongeurs scientifiques
 Université=hydrobiologistes
DPA →EASTA=techniciens et animateurs

Mais il convient de pouvoir facilement organiser dans les divers centres des séminaires de formation permanente et de recyclage en fonction des besoins du CTH.

Egalement il faut pouvoir stopper une formation devenue sans objet et la remplacer par une autre adaptée aux besoins urgents.

De plus il est nécessaire que le CTH, assurant la coordination de cet ensemble de formation, puisse proposer des déplacements momentanés d'enseignants nécessaires à la consolidation d'une formation particulière. Un “vivier” d'enseignants serait ainsi disponible pour renforcer l'un des centres.

Par exemple l'UFSH pourrait assurer l'encadrement de certains cycles de formation de l'EASTA qui n'est pas activée faute d'encadrement.

La mobilité assurerait une utilisation optimale du potentiel humain malgache, permettant de n'appeler des enseignants étrangers qu'au cas où la demande ne pourrait être couverte par des nationaux.

Annexe 1

PERSONNES RENCONTREES

M. Victor JeannodaDirecteur de l'Appui du suivi et de l'évaluation du MRSTD
M. Silver RakotofiringaDirecteur de la Planification et Programmation MRSTD
M. Joseph SydsonDirecteur de l'enseignement supérieur
Mme RayaonsonDirectrice de la Marine marchande
M. Charles AndrianaivojaonaDirecteur des Pêches et de l'Aquaculture
M. Christophe VelosontsirafyDirecteur adjoint des Pêches et de l'Aquaculture
M. Honoré RazafimbeloChef du Service provincial DPA Antsirane
M. François GilbertChef du Service provincial DPA Toliara
M. Désiré RabenomananaChef du Service de la pêche industrielle
M. George RafomananaFonctionnaire DPA
M. Benjamin RazafimahaleoDépartement de la pêche continentale et de la pisciculture
M. BikiniCirconscription des pêches de Nosy Be
M. Christian RalijaonaDirecteur de la formation supérieure halieutique de Toliara
M. Man-Waï RabenevananaCoordinateur national, projet PNUD/FAO/MAG/84/002 “Formation des cadres supérieurs de la pêche”, Toliara
Mme Eulalie RanaivosonCoordinateur scientifique Toliara
Melle Hajanirina RazafindrainibeChercheur au CNRO
Mme RabarisonDocumentaliste bibliothécaire CNRO
M. BoswellPêcheries de Nosy Be
M. Olivier AvalleConseiller technique principal, Projet PNUD/FAO/MAG/88/006 “Ferme pilote de l'aquaculture des crevettes”, Nosy Be
M. Jacques MouillardAssociation thonière Nosy Be
M. Olivier LangrandConseiller Fonds mondial pour la nature


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