COFO-2001/2


 

COMITÉ DES FORÊTS

Point 5 de l'ordre du jour provisoire

QUINZIÈME SESSION

Rome, 12 - 16 mars 2001

INFORMATION FORESTIÈRE ET
GESTION DES CONNAISSANCES

Note du Secrétariat

INTRODUCTION

1. "La gestion des connaissances est cruciale pour faciliter la prise de décisions efficaces. Il faut à cet effet recueillir, synthétiser et partager des connaissances et des données d'expérience, et les combiner systématiquement avec des informations et des analyses statistiques précises" Cadre stratégique de la FAO: 2000-2015.

2. Le cadre stratégique de la FAO souligne toute l'importance que l'Organisation attache à la gestion des connaissances, qui est pour elle un moyen d'aider et d'appuyer les pays membres. Dans le cadre plus large de sa mission au sein de l'Organisation, le Département des forêts de la FAO facilite la collecte et la circulation des informations et des connaissances forestières en travaillant avec les pays membres et avec la société civile en général. En tant qu'organisme intergouvernemental, la FAO soutient les initiatives visant à aplanir les difficultés liées aux différences de langue, de terminologie et de culture.

Accéder aux informations et aux connaissances forestières

Pendant la dernière décennie, des milliers de publications ont traité de questions importantes ayant trait aux méthodes durables d’aménagement forestier: connaissances améliorées des principes écologiques, points de vue sur les résultats de l’aménagement forestier passé, rôle des gens et des communautés, inventaire et conservation biologiques, etc. Un réservoir, riche mais absolument énorme, d’idées, d’informations et de critiques concernant la gestion des ressources naturelles a été ainsi constitué. L’aptitude des professionnels de la foresterie à extraire des parcelles de bon sens de cette multitude de sources jouera à l'avenir un rôle déterminant dans la prise de décisions rationnelles concernant les orientations et la gestion. L’absence de codification, de structure et d’organisation risque de ralentir l’aptitude des professionnels à mieux coordonner les avantages économiques, sociaux et environnementaux de l’aménagement forestier durable.

3. L'aménagement forestier durable se prête particulièrement à l'application de la gestion des connaissances car il s'agit d'un effort de longue haleine présentant des aspects intersectoriels. Dans les rapports du Groupe intergouvernemental sur les forêts et du Forum intergouvernemental sur les forêts qui vient de s'achever, il a été demandé aux forestiers d'élaborer et de mettre en oeuvre des modalités nouvelles et efficaces de partage des informations et des connaissances forestières. La profession est appelée à mieux coordonner et partager, de manière plus systématique, les connaissances et le bon sens collectifs acquis au cours d'années de pratique et d'apprentissage. Grâce aux technologies électroniques, il nous est plus facile de mettre les informations en commun, mais la plupart d'entre nous sont en fait submergés par les données sans avoir les moyens appropriés de les filtrer pour s'assurer de leur qualité et de leur originalité. En outre, tandis que nous archivons davantage d'informations sous forme numérique, nous perdons dans le même temps le savoir tacite qui permet d'assortir cette masse d'informations et de données de concepts et d'éclaircissements et de lui donner un sens. Cette perte du savoir découle en partie du fait que toute une gamme de connaissances forestières acquises par les individus n'a pas été systématiquement enregistrée.

4. La gestion des connaissances suscite un vif intérêt en tant qu'élément fondamental de la réussite des entreprises. Le présent document analyse le bien-fondé de ce concept et les possibilités qu'il offre dans l'optique de l'aménagement durable des forêts, et précise le rôle que la FAO pourrait jouer dans le cadre de mesures de soutien. Il tente de répondre aux questions suivantes: Quels enseignements peut-on tirer de la mise en pratique de ce concept et comment les adapter, et quels éclaircissements peuvent-ils apporter aux fins du développement du secteur forestier en général et des travaux normatifs de la FAO en particulier?

TERMINOLOGIE ET PRINCIPES DE LA GESTION DES CONNAISSANCES

5. L'application du concept de la gestion des connaissances à la foresterie s'inspire des leçons dégagées dans les autres secteurs, en particulier le monde des affaires. Il existe une définition commune du concept: "la gestion des connaissances peut être définie comme la collecte, la synthèse et le partage systématiques des connaissances et des données d'expérience en vue de favoriser la réussite des entreprises". Il est cependant intéressant de noter que l'exploitation scientifique de ce concept a visé à procurer des avantages aux entreprises grâce à la collecte, l'organisation et le partage des connaissances au sein de chacune d'entre elles. L'application au secteur forestier en général et à la FAO en particulier repose sur la démarche opposée, à savoir que l'accent devrait être mis surtout sur le partage des connaissances entre toutes les parties prenantes, les questions de fond pouvant être analogues.

6. Il y a souvent confusion entre les termes "données", "informations" et "connaissances", et il est parfois difficile de faire la distinction. Les informations peuvent être définies comme des données organisées et formulées en vue de répondre à un besoin. Les connaissances sont définies comme étant le sens que les gens donnent aux informations et l'utilisation qu'ils en font. Elles sont considérées comme un ensemble changeant de données d'expérience, de valeurs, d'informations contextuelles et de connaissances spécialisées, qui définit un cadre permettant d'évaluer les données d'expérience et les informations et de les traduire en actions concrètes. Associées à l'expérience acquise par les hommes, les informations deviennent des connaissances, les connaissances nécessaires pour nous guider vers une meilleure compréhension des principes de l'aménagement forestier.

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7. L'application de la gestion des connaissances à la foresterie atteste l'existence d'un processus de création de connaissances et de facteurs de compréhension. Nous nous employons à repérer les connaissances importantes pour l'aménagement durable des forêts: par exemple, les prévisions concernant l'évolution des peuplements forestiers. Une fois leur utilité perçue, les connaissances doivent être recueillies, notamment grâce à des études scientifiques sur les mesures à prendre en matière de sylviculture, afin qu'elles puissent être réutilisées au lieu d'être perdues. Pour que les connaissances puissent être recyclées et diffusées, leur collecte doit être organisée et leur qualité contrôlée. Cette organisation peut être centrée sur les clients, les produits ou les processus. Les connaissances recueillies et organisées sont alors partagées de manière à être évaluées et utilisées par toutes les parties prenantes. La majeure partie des connaissances ne peut pas être utilisée telle quelle, mais doit être adaptée pour tenir compte des caractéristiques de l'utilisateur. Une fois effectuée cette adaptation, les connaissances seront utilisées, et il est probable que cette nouvelle application créera des besoins et des incitations à approfondir l'étude. Le graphique illustre le cycle des divers processus de la gestion des connaissances.

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Source: Carla O'Dell et C. Jackson Grayson, Jr., "If only we knew what we know",
The Free Press, New York, 1998, p.7

 

 

8. L'aménagement forestier suppose la gestion et la mise en commun de deux types de connaissances: des connaissances objectives fondées sur des données recueillies et analysées de manière systématique, et des connaissances ou perceptions implicites découlant de l'expérience acquise par les organisations ou par les individus et de démarches empiriques.

9. Les connaissances explicites sont stockées dans les livres, les publications, les bases de données et sur Internet, qui offre une collection de plus en plus vaste d'informations numériques. Les outils de recherche des informations et des connaissances dans ces médias s'améliorent chaque jour. Cependant, il existe un risque manifeste d'excès d'informations. L'ampleur du flux d'informations met à l'épreuve notre capacité d'évaluer leur pertinence et leur exactitude. Le contrôle de la qualité, la mise au point et la différenciation seront les principaux objectifs à atteindre à l'avenir pour accroître la valeur de l'information numérique.

10. Les connaissances implicites ou tacites sont les perceptions, les données d'expérience et les réflexions emmagasinées dans le cerveau humain. Cette forme de connaissances a toujours été le complément nécessaire des connaissances explicites. À une époque où il y a pléthore d'informations, elle pourrait prendre de l'importance. On a longtemps considéré le cerveau humain comme tout à fait apte à faire face à des situations complexes, comportant de multiples options et scénarios. Tandis que l'intelligence artificielle marque des progrès, un vaste domaine de connaissances tacites reste largement inaccessible à la plupart des utilisateurs. Le rôle de premier plan joué par ces connaissances tacites est maintenant plus largement reconnu, mais jusqu'ici, on ne s'est guère employé à les mettre en valeur ou à les partager. Une tâche importante nous attend: exploiter les technologies de l'information de manière à ce qu'elles imitent les capacités humaines d'évaluation et de tri des connaissances disponibles.

LA GESTION DES CONNAISSANCES AU SERVICE DE LA FORESTERIE

Collecte et enrichissement des données

11. L'application des connaissances doit reposer sur des données fiables. Les connaissances sont mises à profit de la manière la plus constructive lorsqu'elles reposent sur une description précise de la situation. La collecte de données précises sur la situation et l'état des forêts présente de grandes difficultés du fait de leur dispersion sur le plan géographique et de leur isolement. À ces difficultés s'ajoutent les besoins d'information sur d'autres variables influant sur les fonctions économiques, sociales et environnementales des forêts. Assembler et analyser les données permet de leur ajouter davantage de valeur lorsqu'elles sont actuelles et fiables. Des dispositifs institutionnels appropriés et la nécessité avérée de disposer de ces données pour appliquer les connaissances sont des conditions préalables à la collecte de données de qualité supérieure. Les points 8 b) et 8 d) de l'ordre du jour du Comité des forêts, qui décrivent les résultats de l'évaluation actuelle des ressources forestières en 2000 et les futurs besoins d'évaluation des ressources, sont un bon exemple du rôle crucial joué par les données de qualité et de la nécessité de poursuivre systématiquement un processus ininterrompu de collecte des données et de partage des informations.

12. Le partage des données et des informations est largement facilité par l'adoption d'une série commune de définitions et d'un schéma de codification commune, ce qui permet le stockage et l'extraction de l'information dans toute une gamme de domaines techniques et géographiques, ainsi que son utilisation dans différentes langues et par différentes parties prenantes.

13. L'apport des correspondants nationaux au niveau des pays est essentiel pour le succès de ce système d'information en pleine expansion. Sans cela, le principe de "la valeur et la richesse croissantes" acquises en passant des données aux informations ne s'applique pas. La meilleure façon de conserver et mettre à jour les données est de s'appuyer sur des partenariats avec des institutions forestières fortes et compétentes dans chaque pays membre. Cette approche de réseau permet de partager l'appropriation, la responsabilité et le contrôle de l'information forestière à un niveau plus proche des forêts. En élargissant l'éventail de ceux qui s'investissent dans la gestion et le partage des connaissances, la FAO transforme son système d'information, qui n'est plus fondé uniquement sur un petit groupe de fonctionnaires de la FAO mais sur une base beaucoup plus large, formée par une "communauté de spécialistes" dirigée par des institutions nationales.

14. Dans le secteur forestier, l'information devient connaissance lorsqu'elle est intégrée à une expérience pratique fondée sur les traditions et/ou sur des initiatives expérimentales délibérées. Cette source de connaissances prédomine dans de nombreuses régions en raison de l'adaptation de longue date à la situation locale mais également à cause des carences des anciennes méthodes de transformation des connaissances.

15. Les résultats de la recherche constituent une base importante de connaissances. Cependant, il arrive souvent que le courant d'échange entre la recherche et l'application pratique fonctionne mal, ce qui revient à dire que les chercheurs risquent de ne pas développer les connaissances requises et que l'accès aux résultats de la recherche est limité. En d'autres termes, la chaîne des connaissances est brisée. Les technologies modernes de l'information offrent des possibilités d'accéder aux résultats de la recherche stockés dans les centres de recherche, qui étaient difficilement accessibles.

Partager les informations et les connaissances

16. Repérer les parties prenantes. La fourniture d'informations est un élément important de l'aménagement forestier. C'est une entreprise ardue que de partager efficacement les informations entre les nombreuses parties prenantes associées à l'utilisation souvent conflictuelle des forêts: propriétaires, habitants des forêts, travailleurs, entreprises commerciales menant des activités forestières, représentants du secteur public et société civile en général. Chacun peut agir à titre individuel, mais également en tant que membre d'un certain secteur de la société. Il faut préciser les différents besoins et les formes d'accès aux connaissances dans le cadre d'un processus itératif de gestion des connaissances.

COMMUNAUTÉ DE SPÉCIALISTES: personnes mettant en commun des informations fondées sur des compétences partagées ou sur une passion commune, par exemple la foresterie tropicale. Cette démarche est fructueuse car les membres d’une même communauté partagent librement leurs données d’expérience et leurs connaissances d’une manière créative favorisant de nouvelles approches des problèmes. Ces réseaux sont analogues aux associations professionnelles (médicales par exemple) qui fonctionnent en autodiscipline; il ne faut pas les confondre avec les groupes de travail/équipes spéciales créés par des organes de direction en vue d’une tâche ou d’un résultat spécifique. Dans les organisations structurées et hiérarchiques, les communautés de spécialistes facilitent le décloisonnement des structures verticales en favorisant le partage horizontal des connaissances.

17. Connaissances et transparence. Il peut être essentiel de mettre à disposition des informations transparentes sur l'état des forêts et sur les transactions commerciales concernant leur aménagement afin de sensibiliser le public et de susciter une volonté politique en faveur de l'aménagement durable des forêts. Lorsque ces informations sont crédibles et bien présentées, elles peuvent appuyer efficacement les réformes politiques et institutionnelles entreprises dans le secteur forestier.

18. Travail en réseau. Les réseaux ruraux traditionnels servent de point de départ pour transmettre de précieuses connaissances sur les sources et les utilisations des plantes médicinales, du gibier, des fruits comestibles, des matériaux de tissage et d'une série d'autres produits forestiers. Aujourd'hui, le travail en réseau prend plusieurs formes. Les réseaux électroniques servent à mettre les données en commun. Il peut s'agir également de groupements d'intérêts qui ont une passion commune, par exemple la foresterie tropicale. Ces "communautés de spécialistes" jouent un rôle de plus en plus important dans les échanges de connaissances et de données d'expérience.

19. Présenter les connaissances. En raison de leur surabondance, il devient de plus en plus important de présenter les informations et les connaissances sous une forme intéressante, facilement accessible et digeste. Les leçons dégagées dans d'autres secteurs pourraient fournir des indications utiles.

20. Partager les connaissances disponibles. Des organisations comme la FAO sont confrontées à une nouvelle série de possibilités et de responsabilités en matière de diffusion des connaissances grâce à des réseaux. La demande concernant l'aménagement forestier durable est vaste et une approche neuve de la planification et de l'aménagement forestiers est indispensable pour s'assurer les partenariats nécessaires parmi toutes les parties prenantes. L'ensemble des connaissances et des données d'expérience provenant de tous les intervenants doit être mis à profit, ce qui nécessite un dispositif de diffusion et de mise en commun des connaissances forestières.

21. Pour aider les réseaux, la FAO pourrait jouer un rôle en évolution ou inscrit dans la durée, fondé sur le principe de la mobilisation de la "communauté des spécialistes", afin de mettre à profit les données d'expérience et les connaissances tacites parallèlement aux connaissances explicites disponibles. Puisqu'elle concourt à alimenter le fonds croissant de connaissances forestières, la FAO s'adapte et doit continuer à évoluer. On relie actuellement le site Internet du Département des forêts à un certain nombre de sites d'autres organisations. Par ailleurs, plusieurs partenariats ont été établis avec d'autres importants fournisseurs d'informations forestières comme l'Union internationale des instituts de recherches forestières (IUFRO), afin de faire progresser le Service mondial d'information forestière (SMIF) et le Centre mondial de surveillance de la conservation (PNUE - WCMC).

Connaissances explicites - Gestion des informations numériques

22. Des bibliothèques aux sites Web. L'énorme quantité de données, d'informations et de connaissances relatives à la foresterie était il y a peu de temps encore disponible uniquement sous forme de livres, de périodiques et de tableaux statistiques, et était communiquée directement aux utilisateurs par les fournisseurs d'informations. Avec le développement des technologies modernes de l'information, cette situation a radicalement changé. Une collection de nouveaux outils est disponible pour le stockage systématique des informations et la vitesse de communication a augmenté de manière spectaculaire. WAICENT, système d'information de la FAO, est une source globale d'information dans le domaine de la gestion des ressources naturelles, qu'il s'agisse de statistiques ou de documents écrits. Avec ces outils modernes, l'information peut être recherchée et restituée avec de plus en plus de souplesse.

23. Contraintes. Mais ces technologies comportent également des pièges. Comment peut-on assurer et évaluer la qualité et l'actualité de l'information? De quels moyens dispose-t-on pour vérifier des informations souvent contradictoires? Comment peut-on garantir que l'information disponible parviendra aux utilisateurs concernés?

24. Les progrès accomplis dans les technologies de l'information ne peuvent résoudre qu'une partie des problèmes. De nombreuses questions importantes concernant les méthodes de stockage, de traitement et de consultation des informations sont traitées de manière efficace, en particulier dans le cadre du système d'information forestière de la FAO. Il est possible grâce aux technologies disponibles de relier différentes sources de données, et les puissants outils informatiques nous permettent de rechercher non seulement les titres et les mots clés des publications mais également leur contenu. Mais, au bout du compte, les machines ne peuvent pas entièrement remplacer l'expérience et le raisonnement humains. Tant que nous ne disposerons pas d'un système plus approprié pour saisir, obtenir, contrôler et partager les connaissances tacites, les technologies de l'information ne seront pas utilisées au maximum de leur potentiel. De toute évidence, la prise de décisions au niveau politique ne peut pas être fondée uniquement sur des informations explicites. L'apport tacite des parties prenantes est un ingrédient fondamental de la démocratie.

25. La fracture "numérique". Le fait que les nouvelles technologies de l'information ne soient pas à la portée de tous les intervenants dans le domaine de la foresterie pose un autre problème quant à leur utilisation. L'accès à l'information proposée sur la Toile s'en trouve limité, mais cette fracture "numérique" a également une incidence sur la manière de boucler la chaîne des connaissances afin de s'assurer que ceux qui les élaborent sont conscients des besoins et que la mise à disposition des connaissances ne s'arrête pas à l'extrémité de la ligne téléphonique.

Connaissances tacites/implicites - Tirer parti du savoir-faire des hommes

26. Échanges de données d'expérience. Avant l'apparition des technologies actuelles de l'information, les compétences, les connaissances et les données d'expérience des spécialistes reconnus à l'échelon local constituaient la principale source de connaissances. Elles étaient transmises à la génération suivante grâce à l'éducation et à la formation mais également par le biais des corporations, des associations professionnelles et des traditions familiales. Avec les technologies actuelles de l'information, ce transfert des connaissances et des techniques, systématique ou non, risque d'être sous-exploité.

27. Mise en valeur délibérée des ressources humaines. Alors que la génération actuelle de forestiers partage activement les connaissances tacites dans le cadre de séminaires et de réunions professionnelles, on ne voit pas bien la stratégie appliquée pour enregistrer, codifier et mettre en commun ces échanges afin de compléter nos investissements dans les sites Web et les bases de données relationnelles.

28. L'enregistrement plus systématique des compétences et des données d'expérience de ceux qui possèdent vraisemblablement des connaissances tacites d'usage commun ou spécifique est une condition préalable importante pour améliorer la transmission de ce type de connaissances. Il faut pour ce faire disposer d'un système de tabulation des données d'expérience sociales, techniques, géographiques et institutionnelles, dans une base de données facilement accessible. Cette méthode peut être appliquée au niveau des réseaux locaux à des bases de données non structurées. Mais si l'on veut que cette meilleure compréhension des données d'expérience locales soit plus largement accessible, le système de partage doit être plus sophistiqué.

L’argument suivant a été utilisé pour convaincre les cadres supérieurs de la Banque mondiale des avantages de la gestion des connaissances.

À la fin des années 90, le réseau routier pakistanais, qui n’était pas entretenu convenablement, était en état de délabrement. Le ministre des travaux publics a pris contact avec la Banque en disant qu’il avait entendu parler d’une technique d’entretien à faible coût et qu’il souhaitait obtenir une aide pour l’appliquer maintenant au Pakistan. Lorsque le représentant de la Banque lui a proposé d’engager un consultant qui viendrait faire une proposition, le ministre a insisté en disant qu’il voulait une réponse dans une semaine et pas dans un an. Le fonctionnaire de la Banque a envoyé un message urgent au siège et aux autres bureaux de la Banque dans le monde entier pour solliciter leur aide. Dans la semaine, un collègue du bureau de Jordanie a répondu qu’il avait travaillé sur un projet analogue dont il a donné la référence, un autre collègue d’Argentine a envoyé un article qu’il avait écrit, et les chefs des administrations des Ponts et Chaussées d’Afrique du Sud et de Nouvelle-Zélande ont dit qu’ils avaient appliqué cette technique dans leur service. Finalement, le ministre pakistanais a envoyé un de ses ingénieurs en Afrique du Sud et a commencé à appliquer la nouvelle technique d’entretien peu après. Les dirigeants de la Banque en ont tiré plusieurs leçons:

  • ils ont été les premiers surpris de découvrir que quelqu’un de chez eux connaissait cette question.
  • ils ont été tout aussi surpris de découvrir que, pour échanger les "enseignements tirés de l’expérience", des spécialistes des transports avaient créé une "communauté de spécialistes" non structurée, qui comprenait également les administrations des Ponts et Chaussées de pays clients et des collègues d’autres organismes donateurs.
  • la solution n’est pas venue d’un consultant du nord, mais de l’Afrique du Sud.

29. L'élaboration et la conservation délibérées des connaissances institutionnelles sont une forme de gestion des connaissances souvent négligée, qui est importante pour tous les types d'institutions du secteur forestier. À cet effet, il faut prendre un certain nombre de mesures de mise en valeur des ressources humaines, dont les suivantes: réunions d'information en début et fin de mission, cours d'initiation, formation en cours d'emploi et recours à des personnels sous contrat et à des consultants engagés pour une brève durée qui apporteront des technologies ultramodernes et de pointe. Il faudrait cependant prévoir également des réunions des personnels permanents, des voyages d'étude et des journées de réflexion pour les cadres. Il est reconnu que les contacts informels (associations professionnelles, conversations pendant la pause café et vie sociale après les heures de bureau) sont probablement des moyens beaucoup plus efficaces de transmission des connaissances tacites.

LA GESTION DES CONNAISSANCES FORESTIÈRES : UNE TÂCHE À L'ÉCHELLE MONDIALE

Mise en application internationale

30. Au cours des dix dernières années, les débats animés entre professionnels à propos de l'aménagement forestier durable ont débouché sur un dialogue intergouvernemental très utile, qui a permis d'inscrire la foresterie parmi les préoccupations politiques. Pour passer du débat à l'action, il faut combiner les informations sur les forêts et leur utilisation avec les connaissances concernant les possibilités d'utilisation rationnelle et de gestion durable.

Exemples concrets de problèmes de gestion des connaissances forestières

Comment pouvons-nous saisir et conserver le nombre impressionnant de bonnes idées ou de suggestions qui se sont dégagées des milliers de projets d’aide technique forestière de ces 20 dernières années, et mettre en commun les meilleures d’entre elles?

Dans le cadre du processus IPF/IFF, un consensus international a été obtenu sur plus de 250 propositions de mesures – cependant, très peu de personnes travaillant dans la foresterie ou dans des domaines connexes savent ce que sont ces propositions, qui les a formulées et pourquoi, ou bien ont réfléchi à la manière de les mettre en œuvre… comment combler cette lacune?

Environ 100 pays ont préparé des programmes forestiers nationaux de tel ou tel type – à coup sûr, les connaissances acquises en un lieu sont utiles ailleurs. Comment cernons-nous les connaissances qui valent la peine d’être partagées, et comment les partageons-nous?

31. Il faut s'employer systématiquement à faciliter les échanges de connaissances et de données d'expérience, ce qui nécessitera probablement de prendre en compte au moins les éléments fondamentaux suivants:

DE LA CONCEPTION À L'ACTION - QUESTIONS À EXAMINER

32. Les membres du Comité des forêts sont invités à formuler des observations sur les mesures suivantes, proposées par la FAO et par le secteur forestier en général: